Les jeux d'enquête se font de plus en fréquents sur DS, et c'est avec une curiosité non dissimulée que certains d'entre nous attendaient de pouvoir examiner de plus près l'insolite Touch Detective. Mais si, dans la forme, le titre ne manque pas d'originalité, il suffit de creuser un peu pour déchanter rapidement.
Reflétant sans complexe le génie créatif de certains développeurs japonais, Touch Detective interloque déjà par son style graphique improbable et par son character design sorti de nulle part. Incarner une petite fille aux yeux ronds qui se prend pour Sherlock Holmes, avouez que ça a tout de même quelque chose d'assez attirant, surtout lorsqu'on imagine à quel point l'atmosphère du titre doit être déjantée. Les toutes premières minutes de jeu nous aiguillent d'ailleurs dans ce sens-là en laissant entrevoir une aventure promettant monts et merveilles en matière d'histoire burlesque et invraisemblable, composée de personnages aux airs de zombies et d'enquêtes désespérément idiotes. Malheureusement, vous allez voir que le soft comporte de gros points noirs qui sabotent complètement son intérêt en matière d'investigations.
Il est déjà tard lorsque la jeune Mackenzie émerge difficilement des bras de Morphée et laisse à son majordome le soin de lui préparer une tisane matinale avant d'attaquer une journée qui s'annonce terriblement longue. Les heures qui suivront ne dissiperont pas le regard de somnambule qui caractérise son visage, l'apprentie détective errant constamment dans la brume de l'étonnement, comme si elle évoluait dans une réalité qui dépasse son entendement. Ceci dit, on la comprend lorsqu'on constate à quel point l'univers de Touch Detective est dépourvu de toute logique, avec ses personnages aux traits tirés semblables à des zombies décharnés, et ses mystères à deux francs six sous. Dans cette jungle du non-sens absolu, Mackenzie semble être la seule personne douée de raison, et c'est avec intérêt et amusement qu'on découvre les réflexions qui traversent son esprit tandis qu'elle écoute d'un air distrait les requêtes qu'on lui confie. Très franchement, l'humour de Touch Detective se révèle parfois très pertinent, et il est regrettable que les développeurs n'aient pas davantage mis l'accent là-dessus en proposant beaucoup plus de dialogues composés d'absurdités et de divagations. Au lieu de ça, le scénario ne se risque que rarement au-delà de la simple naïveté, et si on ne peut s'empêcher de sourire au début, l'humour finit généralement par tomber à plat.
Touch Detective est donc un jeu d'aventure textuel, jouable entièrement au stylet, qui emprunte beaucoup d'idées à des titres tels que Hotel Dusk, Another Code ou même Phoenix Wright pour ce qui est de l'enchaînement des enquêtes et du déroulement des dialogues. Les investigations que vous allez mener par le biais du personnage de Mackenzie fonctionnent aussi beaucoup sur l'observation, puisque votre nature de détective doit vous conduire à localiser et à récupérer un maximum d'indices autour de vous. Un système de jeu extrêmement classique qui ne prend donc aucun risque, malgré le confort apporté par le stylet, et qui aurait gagné à proposer des interactions plus complexes, par exemple en nous permettant de faire tourner les objets récupérés lorsqu'on les examine. Mais en matière d'énigmes, c'est surtout l'absence totale de casse-tête à résoudre qui nuit à l'intérêt du titre, limitant les investigations à de simples va-et-vient ennuyeux et surtout dénués de logique. Ainsi, à maintes reprises, le déroulement de l'enquête vous demandera d'aller voir telle personne à tel moment du jeu, sans que vous n'ayez aucun moyen de savoir pourquoi. En d'autres termes, la progression se résume à parler x fois à tout le monde et à essayer les objets au hasard pour débloquer une situation, ce qui rend l'aventure passablement fastidieuse.
Heureusement pour nous, et au détriment de la durée de vie, le soft ne comporte en tout et pour tout que six lieux à visiter, aucun n'étant constitué de plus de deux ou trois écrans. Et encore, vous n'aurez accès à l'ensemble de ces environnements que lors de la toute dernière enquête. Les NPC n'étant ni très nombreux, ni très bavards, l'histoire défile à pas de géant en dépit des nombreuses fois où l'on reste bloqué à cause du manque total de logique dans la progression. Les pièces à conviction et autres objets récoltés en cours de route ne brillent pas non plus par leur nombre, ce qui ne pourra que vous faciliter la tâche. Quoi qu'il en soit, quelques petites heures suffisent largement à boucler les quatre enquêtes du jeu, et pour vous donner un ordre d'idées, dites-vous qu'une seule affaire de Phoenix Wright est presque plus longue que la totalité des enquêtes de Touch Detective. On ne peut pas dire non plus que les quêtes accessibles après avoir terminé le jeu soient incontournables, mais elles pourront toujours inciter les plus motivés à compléter le journal et la liste "Touch" dans leur intégralité. Cette dernière récapitule d'ailleurs l'ensemble des objets qui présentent une texture spéciale et que vous avez pensé à toucher à l'aide du stylet au cours de l'aventure. Une autre idée amusante qui n'a pas été suffisamment exploitée pour nous surprendre efficacement. Au bout du compte, si les premières minutes laissent beaucoup d'espoir quant à l'intérêt et l'originalité de ce titre, la déception n'en est que plus cruelle quand on réalise que le plaisir de jeu est inexistant, suite à la frustration engendrée par le déroulement aléatoire et laborieux des enquêtes. Espérons que le second opus, d'ores et déjà annoncé, ne commette pas l'erreur de reprendre la formule telle quelle, mais qu'il prenne la peine de corriger d'abord les défauts qui ternissent ce premier volet.
- Graphismes14/20
Touch Detective ne peut vraiment compter que sur son style visuel si particulier pour ne pas passer complètement inaperçu. Dommage que les graphistes n'aient pas pensé à jouer davantage sur les expressions faciales des personnages qui restent trop souvent figées.
- Jouabilité12/20
Même si la jouabilité intégrale au stylet apporte un vrai confort de jeu, le gameplay manque cruellement d'originalité. On ne peut quasiment pas interagir avec les objets et on ne trouve aucune énigme de type puzzle à résoudre. Mais c'est surtout le côté illogique de la progression qui oblige à avancer à tâtons et qui finit par gaver le joueur.
- Durée de vie8/20
Le soft ne comporte que quatre enquêtes extrêmement courtes mais durant lesquelles on est constamment bloqué par un déroulement de l'histoire complètement tiré par les cheveux. Une affaire bonus est proposée à la fin pour vous permettre de remplir diverses quêtes et de compléter la liste Touch.
- Bande son13/20
Les musiques font plus preuve d'originalité que le reste, mais là aussi les concepteurs auraient pu chercher à aller encore plus loin pour assumer le côté absurde de leur titre.
- Scénario12/20
Au début, l'atmosphère évoque toutes sortes de références assez sympathiques (Sherlock Holmes, Batman, The Big O), et puis on se rend compte que l'atmosphère de Touch Detective n'est finalement pas si amusante que ça. Les touches d'humour dépassent rarement le stade de la simple naïveté.
En dépit d'un style visuel alléchant et d'une atmosphère qui s'annonce déconcertante, l'expérience que procure Touch Detective est finalement loin de tenir ses promesses. Le déroulement du jeu est laborieux parce que trop illogique et aléatoire pour nous permettre d'avancer seulement à force de réflexion, l'humour est peu convaincant et la durée de vie fait vraiment pitié. Cruelle déception.