Pour ceux, et ils doivent être nombreux, qui ne connaissent pas Zathura, une petite explication s'impose. Troisième roman de Chris Van Allsburg a être adapté au cinéma après Jumanji et le Pôle Express, Zathura nous raconte l'histoire de deux enfants limite hyperactifs pris au piège de leur propre curiosité. En effet, Danny, petit frère de Walter, découvre dans sa cave un ancien jeu de société, sorte de jeu de l'oie kitsch et poussiéreux. Tentant d'y intéresser son aîné, il déclenche une catastrophe défiant les limites de l'imagination. Coincés dans le jeu, ils devront subir la loi de ce dernier et le terminer pour espérer en sortir vivants. Après cette présentation digne d'une madame cinéma de Télématin, plongeons allégrement dans le jeu adapté de cette oeuvre.
Zathura, avant tout, c'est une jaquette. Un visuel clairement daté, à la composition rappelant la belle époque des années 80, sorte de mélange entre les affiches de Star Wars et de Retour Vers Le Futur. Serait-ce un clin d'oeil, un hommage, un parallèle habile avec le contexte temporel de l'histoire ou encore un second degré latent ? Une question passionnante qui aboutit simplement au fait que le seul aspect extérieur peut parfois donner de fausses impressions sur un produit final. La preuve, Zathura, malgré sa promesse plastique de nous plonger dans l'ambiance "parodico-flashy" des années phares de la science-fiction se contente d'exposer un univers sans grande particularité graphique, ni réel caractère. Mais ce n'est pas pour autant qu'une déception se suit immédiatement d'un contenu malheureux. Restons donc positifs et relançons le dé. Celui-ci tombe sur le chiffre un, laissant dubitatif quant à la vitesse de progression. Et effectivement, vous vous rendrez vite compte que votre élan premier de découverte se transforme petit à petit en doutes sérieux. Doté d'une réalisation relativement indigne d'une PS2, le titre d'High Voltage Software tranche nettement avec les récentes productions de la machine tentant de tirer le meilleur de ses entrailles. Terne, peu détaillé et surtout constellé de bugs, Zathura peine à développer l'univers fantaisiste qui lui a donné naissance, ne réussissant pas même à convaincre au niveau de l'animation. Les personnages demeurent particulièrement raides tout en étant assez cubiques, ne conférant aucun sentiment de vie à leurs attitudes, loin de là. Un écueil qui ne peut que nuire à un produit destiné en priorité à un public jeune, cherchant de la chaleur et du mouvement à travers leurs héros et l'univers auquel ils font face. Tant de froideur synthétique non désirée et les innombrables lacunes techniques ne peuvent qu'éloigner le titre de son public.
Propices également à créer une distance, les passages à vide du gameplay semblent ici sublimer les ombres de la réalisation. Non que le jeu soit injouable, mais il subit à outrance de nombreuses attaques insidieuses, l'empêchant de s'exprimer totalement. Tenant le haut du pavé, la gestion des sauts est d'une cruelle imprécision, vous plaçant sans cesse dans une sorte d'inconnu, d'une quatrième dimension dans laquelle il serait impossible de savoir où son prochain pas va s'exécuter. De fait, une réelle hésitation se fait sentir lors d'un bond, d'autant que le temps de latence entre la pression sur la touche et le déclenchement du mouvement voulu reste bien trop long. Surtout dans l'optique de coller aux attentes des joueurs plus ou moins jeunes qui regretteront sans doute le manque de dynamisme du gameplay. Dans la même veine, et malgré un système de lock classique mais efficace, les affrontements s'avèrent dans l'ensemble peu lisibles, soumis aux délires d'une caméra visiblement éméchée, se plaçant n'importe où dès que vous vous heurtez à un obstacle un tant soit peu élevé. Certes, il est possible de la recadrer immédiatement, mais encore faut-il qu'elle comprenne ce que signifie ce terme. Décidée à vous énerver, cette dernière vous obligera donc à un replacement manuel parfois laborieux. Et comme le spectacle n'est pas fini, Zathura vous donne aussi accès à l'un des passages les plus insupportables de l'année, cherchant à faire de la plate-forme 2D avec une gestion de la profondeur. Un concept qui a déjà fait ses (mauvaises) preuves, aboutissant le plus souvent à une sorte de calvaire pour le joueur perdu, se demandant s'il est au fond ou au bord de sa corniche.
Un dilemme cornélien, notamment lorsque l'on cherche à sauter sur un élément mouvant dont on ne peut pas franchement situer la disposition dans l'espace. Un espace d'ailleurs où personne ne vous entendra crier de dépit face à ce qu'aurait pu être le jeu, sachant que son destin est maintenant scellé. En effet doté d'une ambiance prenante rappelant les films d'aventure oniriques et délicieusement jaunis à la Goonies mâtiné de Jumanji (justement), le titre de 2K Games possédait tous les éléments pour poser une atmosphère laissant libre court aux aspirations les plus riches. On ressent évidemment cette volonté, mais trop faiblement pour totalement convaincre. Par ailleurs, et même si le soft est loin de se montrer agréable, il n'en reste pas moins qu'il propose un level design assez varié et quelques idées de gameplay sympathique, comme l'utilité précise des diverses armes à votre disposition. Malgré tout, vide, sans imagination et ne fournissant aucun plaisir de jeu, Zathura ne peut que se perdre dans l'espace intersidéral. Espérons qu'il croise le chemin d'un Chewbacca en vadrouille.
- Graphismes7/20
Décevante sur de nombreux points, la réalisation graphique de Zathura ne tient pas plus la route que des pneus lisses sur une flaque de gazole. Proposant des personnages raides, sans vie et des décors peu détaillés, rongés par un aspect terne, le titre ne parvient pas à se sortir de cette carapace poussiéreuse et visiblement gênante. Dommage, car l'ambiance spatiale un peu rétro accroche rapidement.
- Jouabilité6/20
Clairement lacunaire sur ce point précis, Zathura vous transporte dans un monde où le moindre saut de plate-forme en plate-forme devient synonyme de sueurs froides et d'incertitudes. En effet vous aurez bien du mal à gérer la distance de vos bonds, tout autant que le moment où vous allez déclencher votre action. De plus, le gameplay se révèle plat et poussif, réduisant à néant tout plaisir de jeu. Restent les affrontements, difficilement lisibles mais assez sympathiques à jouer. Il permettent au moins de changer.
- Durée de vie9/20
Se terminant visiblement assez rapidement, tout du moins dans les habitudes des jeux de ce type, Zathura ne propose rien de plus une fois l'aventure terminée, ne vous poussant pas à rentrer une nouvelle fois dans ce monde onirique. De plus, ce n'est pas non plus le plaisir de jeu qui vous prendra à la gorge pour vous conduire encore et encore dans la quête de Walter et Danny, pourtant sympathiques au demeurant.
- Bande son12/20
Les compositions se révèlent dans l'ensemble de bonne qualité, même si a plupart restent des morceaux d'ambiance assez communs. Néanmoins, vous pourrez dénicher des envolées orchestrales, sûrement tirées du film, qui tranchent agréablement avec le fond du jeu. Le doublage est quant à lui convaincant, offrant une vraie personnalité aux deux enfants.
- Scénario11/20
Les phases scénaristiques s'enchaînent bien, reprenant visiblement la progression du long métrage, mais souffrent d'ellipses assez étranges ainsi que d'une absence de réactions troublante des deux héros. Se retrouver d'un coup dans l'espace, poursuivi par un robot tueur sans montrer le moindre signe de panique est assez peu commun pour en parler.
Se retrouvant dans le vaste monde des adaptations vidéoludiques de films ratées, Zathura se laisse emporter par d'innombrables soucis de gameplay et d'ordre graphique. Vide, poussif et surtout cruellement froid, le titre de High Voltage Software souffre également d'une difficulté imposante, liée à ses problèmes de jouabilité profonds. Un point de trop pour les jeunes joueurs qui ne trouveront rien susceptible de les garder attentifs. Ainsi parlait Zathura...