Laid, injouable, pas ergonomique, prise de tête, et bugé diront certains. Petit bijoux répondront les autres. Hearts of Iron sera sans aucun doutes le premier jeu pour wargamers psychotiques de l'année 2003, et ils vont se régaler avec ce titre de Paradox, auteur d'Europa Universalis.
Alors je vais commencer par la version « joueur lambda ». En effet, si vous êtes un joueur qui s'adonne au wargame en amateur, fuyez, car Hearts of Iron est bien l'un des titres les plus repoussants de ces derniers mois. Moche, il l'est. Pas clair, il l'est aussi. Difficile à prendre en main, oh oui il l'est. Plein de bugs, aussi. Lent, ben oui ça aussi. Pourtant, si vous appartenez à la catégorie des puristes, de ceux qui ont passé des centaines d'heures sur Europa Universalis, vous serez probablement comblé. Reprenant le même principe du jeu de plateau, Hearts of Iron vous propose de prendre la tête d'une nation (avec un très large choix, des USA à l'Australie en passant par la Norvège) pour une durée de 5 ans, au beau milieu de la Seconde Guerre Mondiale. Sous vos yeux s'affiche une carte du monde remplie de provinces diverses et d'unités ennemies ou alliées, les autres et les vôtres que vous devrez placer judicieusement. Ou même remplie de rien d'ailleurs et que vous pourrez alors combler d'usines, de fortifications s'il s'agit de zones frontalières, de DCA, de chantiers ou que sais-je encore.
L'un des éléments centraux dans Hearts of Iron, c'est le temps. Pour chacune de vos entreprises, vous devrez prendre en compte le délai de préparation (construction, offensive, mouvements de troupes, productions etc.) et veiller à l'écoulement du temps tout court. Soyez donc attentifs lorsque vous lancerez une production, ou que vous déplacer une unité, assurez-vous que les choses seront terminées en temps et en heure et placez-vous intelligemment pour contrer l'ennemi. Mais cela va plus loin. On pourra en effet se livrer à de véritables tactiques basées sur le temps. En envoyant des troupes avec un léger différé par exemple, commencez par des raid aériens, suivez avec des blindés et enfin, quand la voie est plus ou moins libre, finissez avec l'infanterie. Le tout en temps réel, et non pas avec un système de tour peu réaliste. L'autre raison qui rend ce facteur si important, c'est que du temps, il en faut beaucoup pour jouer, car on ne peut nier que les choses avancent lentement.
Pour plus de richesse, les attaques sont non seulement coordonnables dans la durée, mais aussi configurables. Une attaque aérienne pourra aussi bien être un bombardement tactique qu'un vol de reconnaissance ou une attaque pure et simple. La seule chose que l'on pourra reprocher aux phases de combat, c'est qu'on ne voit rien se produire, l'unité bouge quand l'heure est arrivée et une simple fenêtre vous signale victoires et défaites. Bien sûr, il n'y a pas que l'aspect militaire dans un conflit d'envergure mondial, la diplomatie et l'économie ne seront donc pas ignorées avec des possibilités là aussi assez vastes et qui se trouveront influencées par vos conquêtes mais aussi l'une par l'autre. Acquérir des ressources pour l'industrie se fera aussi bien par la conquête d'une province en possédant que par le partage lié à une alliance.
Peut-être certains se demandent-ils pourquoi ce jeu est réservé à une minorité de joueurs adeptes du coup de boule dans le mur en guise de hobbies (n'y voyez pas d'offense, c'est juste pour dire que vous aimez vous prendre la tête ? Et bien d'abord parce que l'on est vite inondé par une grande masse d'information, et que le simple fait de savoir trier le crucial du secondaire peut être délicat. Mais aussi parce qu'on fait difficilement plus austère en matière d'interface. Jetez un oeil sur les screenshots pour vous en convaincre. De fait, la prise en main est longue et laborieuse. Et à moins d'être féru du genre, on est vite dégoutté.
Le gameplay est exigeant et rebutant, mais la réalisation est elle carrément rédhibitoire. Alors oui, la beauté c'est très accessoire, surtout dans ce genre mais faut pas abuser. Paradox nous livre un titre qui ressemble furieusement à son dernier hit, ressemblant lui-même au précédent. Techniquement, on prend un coup de vieux depuis le premier Europa Universalis. L'interface est, vous devez le savoir maintenant, horriblement complexe et tout sauf conviviale ou intuitive. Marque de fabrique des jeux de la firme, les innombrables pop ups sont fidèles au rendez-vous. Pensez à les paramétrer ou vous aurez vite un écran remplis d'une trentaine, voire une cinquantaine de fenêtres contenant des informations parfois très futiles. Mais il faut savoir que rien que ce réglage peut prendre un bon quart d'heure. Ceci m'amène à vous parler de ce que je reproche le plus à Hearts of Iron, son manque de finition. Soyez près à de multiples plantages (l'invasion de pop ups pouvant en être la cause d'ailleurs). Le jeu est malheureusement bien bugé et quelques bon patchs seront nécessaires pour éviter les retours au bureau intempestifs. Et voilà, un jeu plein de défauts, mais surtout pourvu d'un gameplay qui, bien qu'austère, se montre diaboliquement riche. Mais seule une petite frange de joueurs coriaces et rodés à un genre bien particulier saura apprécier ce nouveau soft. Vous voilà prevénus.
- Graphismes6/20
Le fait que le wargame ne demande pas une esthétique très poussée n'est pas une raison pour conserver ces graphismes antiques. Mais c'est surtout le manque de clarté à l'écran qui pose problème. S'adresser à un public d'acharné n'est pas une raison pour s'abstenir d'effort à ce niveau-là non plus.
- Jouabilité14/20
Encore une fois, l'interface est loin d'être intuitive et agréable, elle serait même plutôt rebutante, mais la richesse des possibilités de jeu vient contre-balancer ce problème. On cible un public bien particulier qui saura apprécier le gameplay austère de Hearts of Iron. N'empêche, c'est pas très bien fichu...
- Durée de vie17/20
Remplir les 3 scénarios avec chaque pays devrait déjà prendre pas mal de temps. A cela s'ajoute un éditeur et surtout le jeu online qui compensera les lacunes de l'IA.
- Bande son11/20
Les musiques sont d'assez bonne qualité mais elles sont peu nombreuses (La Chevauchée des Valkyries revenant souvent). Quand aux effets, ils sont quasiment inexistants.
- Scénario/
On aurait apprécié une évolution technique histoire de rendre le jeu un peu plus plaisant à l'oeil mais on s'en passera. Hearts of Iron comblera les puristes du genre qui parviendront à se dépêtrer d'un titre d'une complexité et d'une austérité rares. Tout sauf convivial, c'est un wargame pur, à l'ancienne. Mais il faudrait que Paradox mette un coup de collier sur l'aspect technique.