Le Beat'em all renaît de ses cendres depuis quelques temps. Après les incursions d'Electronic Arts dans le genre, c'est au tour d'Activision de sortir l'artillerie lourde, au sens propre comme au sens figuré, et de lancer dans l'aréne un certain Gungrave. La question étant, en sortira-t-il vainqueur ?
Alors que la neige s'étale doucement sur les immeubles d'une cité endormie, une petite fille marche péniblement vers son destin, traînant derrière elle un mystérieux cercueil. La volubilité de ce prologue et la beauté macabre qui s'en dégage, se transformeront par la suite en un véritable carnage. Les flocons se changeront en douilles fumantes et la torpeur de la nuit cédera sa place à la violence d'une véritable vendetta. Un suaire va s'abattre dès lors sur les membres de la mafia qui dirige, d'une main de fer, la ville toute entière. Gungrave, rien que le nom est porteur de mort. Il s'agit en fait du nom du personnage central, qui se nomme très exactement Death : Beyond the grave, rebaptisé Grave (ouf on y arrive !) qui, réveillé par la petite fille mentionnée plus avant, va se lancer dans une véritable guerre contre les pontes de la Mafia. Ancien exécuteur de ce sombre organisme, aujourd'hui repenti, Grave n'aura de cesse de faire pleuvoir les balles, qu'au moment où il se retrouvera en face de Harry, grand chef du cartel mafieux. Pourquoi tant de hargne et de détermination de la part de notre héros ? Cela mes amis, vous le découvrirez bien assez tôt.
Si cette ébauche de scénario vous a donné envie d'en savoir plus, sachez qu'il va falloir jouer de la sulfateuse pour passer les niveaux et ainsi découvrir la vérité sur Grave. « Explose tout...mais avec style ». Le leitmotiv du soft est on ne peut plus vrai. Au travers de vastes stages, vous allez pouvoir tout détruire ou presque. A l'aide de vos deux pistolets, joliment appelés les Cerberos, et de votre cercueil qui fait office de lance-missiles, vous allez partir en croisade contre le crime qui ronge votre cité, en tirant sur les hommes de mains qui se jetteront devant vous. Les voitures, le vitrines de magasins, les panneaux, tout y passera et c'est dans un déluge de flammes que vous allez pouvoir tout réduire en poussière. La destruction de tout ce qui vous entoure remplira une jauge, qui une fois pleine, rajoutera un Tir Demolition à votre compteur. Vous pouvez accumuler jusqu'à 9 de ces tirs et les utiliser à tout moment. Ce tir, qui fait office de technique spéciale (le jeu en comporte 4 types + une cinquième option qui remontera l'indicateur de vie), est en fait une arme que Grave cache dans son cercueil. Et croyez-moi, une fois sortie, ces techniques s'avèrent particulièrement destructrices.
La jouabilité est toute dévouée au plaisir de jeu. Grave peut tirer tout en sautant devant lui, en arrière ou sur les côtés. Dès lors on assiste à de véritables ballets mortels, qui renvoient dans la forme aux gunfights homériques des plus grands John Woo comme « A toute épreuve » ou « Le syndicat du crime ». Lors des passages plus difficiles, notre héros pourra se servir du cercueil qu'il porte en bandoulière et qui cache en son sein une énorme puissance de feu, libérable sous la forme de roquettes ou de tirs de mitraillettes. Il s'agit en fait du fameux Tir Demolition, dont je parlais plus avant. Pour en revenir à la maniabilité, on notera tout de même quelques problèmes de caméra qui tardent à se remettre en place après les sauts du personnage. Enfin la relative lenteur du héros est pénible à certains moments, surtout contre les boss.
L'aspect graphique dénote d'une profonde dichotomie. En effet, d'un côté, on s'émerveille devant la beauté des cinématiques, toutes plus belles les unes que les autres, et de l'autre, on ne peut s'empêcher d'être déçu en parcourant les environnements du jeu. La diversité des décors est bien là puisque, entre des empoignades dans les égouts, une usine désaffectée, un métro ou dans un dojo situé sur le toit d'un immeuble, vous allez être servis. Malheureusement le tout est peu original et désespérément vide. Le design de Grave est l'oeuvre de Yasuhiro Nightow, le papa de « Trigun » et pour peu que vous aimiez cette série, vous retrouverez le style débonnaire si caractéristique du héros de cet animé. Le Mecha-Design, lui, est assuré par Kosuke « Oh my Goddess » Fujshima , excusez du peu. Du très beau monde, et il est d'autant plus dommage que les décors ne suivent pas vraiment.
La bande-son possède le même problème que les graphismes. Les bruitages sont quelconques mais le tout est supporté par de superbes musiques tantôt mystérieuses, tantôt mystiques, tantôt jazzy. Les thèmes sont bien dans la veine des compositions de Yoko Kanno pour « Cowboy Bebop ». Ceci est particulièrement flagrant dans une scène du jeu, où Grave affronte un de ses anciens amis dans une église. Il est clair que ladite scène est directement inspirée du magnifique affrontement opposant Spike et Vicious dans le dernier épisode de la série. Au final Gungrave est donc assez décevant. Le jeu se pare d'un design somptueux, d'une bande-son magnifique (cela dénote, je l'avoue, d'une profonde subjectivité de ma part) et d'un gameplay privilégiant la simplicité, pour faire en sorte que le joueur puisse jouir en toute impunité du soft. Quid de cette déception, me demanderez-vous dès lors ? C'est simple. Le jeu est décevant d'un point de vue graphique (tout admirable qu'est le design, je le précise une fois de plus), et le titre se boucle très rapidement (comptez moins de 2 heures pour finir le soft en mode Pro), dommage, véritablement dommage.
- Graphismes13/20
Le travail de Yasuhiro Nightow est superbe. Grave semble tout droit sorti d'un western urbain et sa démarche nonchalante tranche radicalement avec celle du héros type, bien manichéen comme il se doit. Les cinématiques sont divines. Seulement voilà, l'aspect graphique du titre est bien en deçà de ce que l'on est en droit d'attendre d'un jeu PS2, même si l'emploi du cell shading apporte une unité à l'ensemble.
- Jouabilité13/20
Hormis quelques problèmes de caméra et la lenteur du personnage principal, la jouabilité est tout au service de ce beat'em all.
- Durée de vie8/20
Il est navrant de constater la présence de « continues » infinis. Moins de deux heures pour terminer le soft en mode « Pro ». Privilégiez le mode « Tueur » dès le départ. Les bonus sympathiques qui sont à débloquer (vidéos, personnages du jeu sous blister à l'image de petits jouets que vous pourrez admirer sous les angles, etc.), vous inciteront peut-être à recommencer le jeu.
- Bande son14/20
Des bruitages qu'on oubliera très vite, mais quelle bande-son ! Certains morceaux renvoient aux créations de Yoko Kanno et les autres thèmes de Gungrave brillent par leur originalité et leur qualité.
- Scénario11/20
Le titre a au moins le mérite d'en proposer un. Le scénario avance au fil des cinématiques et vous pourrez parler aux personnages centraux, entre chaque niveau, pour en connaître davantage sur vous-même.
6 niveaux qui se terminent à la vitesse de l'éclair. C'est peu, trop peu. Il aurait suffit de décors plus détaillés et plus nombreux pour que Gungrave accède au panthéon des meilleurs beat'em all. A la place de cela, le jeu d'Activision se contentera de n'être qu'un bon petit jeu, qu'on oubliera assez vite et ce malgré la collaboration de designers japonais réputés et du studio d'animation Mad House, bien connu des fans de Yoshiaki Kawajiri.