Initialement sorti en 1998, StarCraft s’offre presque 20 ans plus tard une édition remasterisée par Blizzard en personne. L’occasion de se replonger à corps perdu dans ce RTS mythique, à qui il ne manquait qu’un dépoussiérage dans les règles pour redevenir instantanément indispensable.
Live Action trailer de StarCraft : Remastered
En 1998, Starcraft déboulait sur les PC des amateurs de RTS, la même année que des titres comme Dominion : Storm Over Gift 3, Dune 2000 ou encore The Settlers III. Un peu de name dropping pour indiquer qu’à l’époque, la concurrence était rude, mais Starcraft avait su se faire une place de choix avec son univers de science-fiction très fouillé, son scénario particulièrement riche et ses trois factions jouables – Terran, Zerg et Protos - disposant de mécaniques qui leur sont propres. Le succès avait été au rendez-vous et six mois plus tard sortait Brood War, unique extension du titre ajoutant 26 missions supplémentaires et deux nouvelles unités par faction.
En marge de son scénario complexe, Starcraft a également perduré pendant des années grâce à son mode multijoueur. Blizzard en écoule 1,5 million d’exemplaires durant sa première année de commercialisation mais le jeu bénéficiant d’une communauté importante, l’éditeur et développeur en vend 10 millions durant les 10 années suivantes. Starcraft est clairement une référence du genre et on peut se dire que le titre qui l’a surpassé n’est autre que sa suite Starcraft II dont le premier volet est sorti en 2010.
Et maintenant que Blizzard en a terminé avec Starcraft II – Legacy of the Void qui est sorti en novembre 2015, il n’est pas vraiment étonnant que le studio mise sur un revival de l’un de ses jeux les plus populaires. On imagine que les objectifs de Blizzard sont multiples : faire vibrer la corde de la nostalgie auprès des joueurs, surfer sur la mode des remasters qui a tendance à avoir du succès, mais également raviver la flamme des adeptes du multijoueur. Et Starcraft Remastered impose rapidement ses arguments.
Le même, mais en plus beau
Rappelez-vous : en avril dernier, Blizzard proposait à tous de télécharger gratuitement la version originelle de Starcraft, dans toute sa splendeur pixelisée. Cette version, vous allez devoir la télécharger si vous faites l’acquisition de Starcraft Remastered : c’est dans les options qu’il faut activer les graphismes en HD qui dépoussièrent le jeu en l’espace d’une seconde. On se retrouve, à la volée, avec des graphismes HD – voire Ultra HD si votre écran est doté d’une définition 4K - en 16/9e, et une bande-son qui elle aussi bénéficie d’un lifting. D’ailleurs, pour vous convaincre de l’évolution graphique, vous pouvez vous amuser à cocher et décocher l’option des graphismes HD pour faire une comparaison instantanée. Et si l’envie vous prend de jouer avec les graphismes d’époque au beau milieu d’une mission, c’est tout à fait possible.
Les doublages français sont toujours proposés, et ils ont été actualisés pour coller à ceux de Starcraft II, ce qui explique le réenregistrement des voix des principaux personnages. Graphiquement, les portraits animés des personnages ont également bénéficié du même traitement pour proposer une cohérence avec le second opus de la franchise. Entre chaque mission, une série d’illustrations vient étoffer la narration et met en avant les conséquences de la mission que l’on vient d’achever. Il s’agit là d’une réelle nouveauté puisque rien de tel n'était présent dans la version originale du jeu.
Dans toute cette démarche de rafraichissement, on peut s’étonner que les cinématiques soient restées d’origine, et qu’elles ne bénéficient que d’un simple passage en 16/9e pas vraiment convaincant. Par ailleurs, alors qu’elles étaient en français dans la version d’origine, elles sont ici proposées en anglais sous-titré. Pas forcément très dérangeant puisqu’elles sont assez rares, mais c’est tout de même un choix étonnant. Autre point suceptible de déranger les puristes qui s'attardent sur les détails : les animations des unités n'ont pas été fluidifiées. Blizzard s'est contenté de les mettre à jour graphiquement sans ajouter de frames, ce qui entraîne un effet saccadé forcément plus visible avec des graphismes HD.
Le classique reste un classique
Pour le reste, côté campagnes, on retrouve la proposition exacte de la version originale du titre. On a le droit aux trois campagnes de base, Terran, Zerg et Protoss, à faire dans l’ordre pour bien comprendre l’histoire. Si vous faites partie de ces joueurs qui ont joué à Starcraft II sans avoir fait Starcraft, vous découvrirez notamment le destin tragique de Sarah Kerrigan, qui est largement au cœur de l’intrigue de Starcraft II… mais le scénario de Starcraft est riche en rebondissements, en trahison et en héroïsme, si bien que certaines missions paraissent parfois bien longues pour arriver au prochain chapitre de l’histoire. Evidemment, Brood War est inclus dans Starcraft Remastered. On trouve donc 26 missions supplémentaires et une histoire qui débute au moment exact où celle de Starcraft se terminait.
Starcraft Remastered se joue exactement de la même manière que Starcraft, avec ses raccourcis clavier, ses contrôles de troupes limités qui nécessitent d’organiser plus que jamais son armée par escouades avant d’attaquer, ses systèmes d’upgrade des unités qui demandent beaucoup d’organisation… les missions sont souvent lentes et exigeantes. A l’époque de la sortie du jeu en 1998, tout cela nous semblait particulièrement normal, mais y rejouer aujourd’hui avec tout l’historique de ces 20 dernières années – Starcraft II en tête, d’ailleurs – montre aussi que si Starcraft est un classique, il emploie aujourd’hui des mécaniques qui ont assurément pris de l’âge.
Mais on ne va pas râler pour ça : Blizzard n’a pas changé le gameplay d’un pouce, misant tout sur l’esthétique, et c’est un parti-pris qui se comprend et qui se justifie notamment dans l'approche multijoueur du titre. Même sans casualisation, Starcraft se joue encore de manière plaisante, et la narration insufflée dans les campagnes de ce RTS n’a, de son côté, pas pris une ride.
Il faut seulement avoir à l’esprit que cette nouvelle version de Starcraft n’est pas un remake, mais une remasterisation, et que les joueurs qui découvrent ici le titre vont sans doute être interpelés par un gameplay rigide par rapport aux productions actuelles. De leur côté, les vieux de la vieille pourront satisfaire leur nostalgie en redécouvrant les campagnes avec des maps, des sprites et une interface en HD franchement réussis. Quitte à profiter d’un morceau non négligable de l’histoire du RTS, autant le faire sans avoir les yeux qui piquent, non ?
Une volonté de pousser le multijoueur
Mais en réalité, ce qui a probablement motivé Blizzard de sortir ce remaster n’est sans doute pas lié à la nostalgie du joueur solo désireux de revenir sur le combat épique entre Terrans, Zergs et Protoss. Car l’éditeur a profité de cette remise au goût du jour pour peaufiner la partie multijoueur de son titre, histoire d’y attirer des adeptes qui feront vivre Starcraft Remastered dans la durée.
Pour tenter d’en cerner la raison, il faut rappeler que Starcraft II est un cheval sur lequel Blizzard a beaucoup misé en eSport, en particulier en Corée du Sud où le premier Starcraft a bénéficié d’un colossal succès pendant plus de 10 ans. Un succès que Starcraft II n’a pas été en mesure de réitérer puisque malgré un accueil critique et commercial très positif, le jeu est en très nette perte de vitesse dans cette partie du monde depuis plus d’un an. On imagine donc qu’avec Starcraft Remastered, Blizzard espère reconquérir ce marché et faire d’autres adeptes au passage.
Du coup, Blizzard a revu le mode multijoueur du titre, pour faciliter le matchmaking, mais également ajouter un système compétitif via des matchs classés. Si vous voulez juste faire des parties sans pression de classement, c’est tout à fait possible : il vous suffit de chercher une partie ouverte, qui correspond à vos attentes, dans la liste proposée par la communauté. Vous pouvez également choisir d’en créer une selon des critères choisis par vos soins, et si vous voulez jouer entre amis, vous pouvez la fermer à l’aide d’un mot de passe. Enfin, on constate non sans un certain plaisir que la totalité des cartes proposées à la belle époque de Starcraft, y compris les cartes personnalisées, restent toutes compatibles avec Starcraft Remastered. De quoi raviver les instincts des habitués du titre, qui l’avaient laissé de côté depuis quelques années.
S’il s’avère assez simple de trouver une partie, sachez cependant que vous aurez beaucoup plus de chance de jouer rapidement si vous optez directement pour le multijoueur de Brood War, bien plus fréquenté, ce qui n’est pas étonnant vu que l’extension propose des unités de jeux supplémentaires.
Les parties classées se font quant à elles en 1 vs 1 et sont les seules à disposer d’un système de matchmaking automatique, qui se charge de vous trouver un adversaire d’un niveau similaire au vôtre. Sans être aussi poussé que celui de Starcraft II, le système exploite cependant les mêmes bases et permet de jouer plutôt rapidement, avec la promesse d’un match équilibré. Il est ensuite possible de suivre son classement parmi les joueurs européens ou bien à l’international, avec un classement qui rassemble les joueurs de tous les serveurs.
En somme, le multijoueur a été révisé pour satisfaire un maximum de joueurs, aussi bien les occasionnels que ceux qui veulent se faire une place dans un classement qui demande des compétences non négligeables. Mais on imagine cependant que le défi attirera davantage ceux qui ont déjà joué à Starcraft, plutôt que des débutants : bien loin d’être un jeu casual, le titre de Blizzard peut se montrer davantage décourageant en multijoueur qu’en solo, ce qui n’est pas foncièrement étonnant.
Points forts
- Une mise à jour graphique et sonore réussie
- Des interludes illustrés originaux
- L'extension Brood War est incluse
- La sauvegarde dans le cloud
- La refonte efficace du multijoueur
Points faibles
- Un gameplay qui a quand même vieilli
- Un travail minimaliste sur les cinématiques
- Pas de travail sur les animations
Si Starcraft Remastered vaut autant le détour qu’une bonne note, c’est avant tout parce que la matière originelle est excellente. En ne changeant pas les mécaniques bien huilées de son jeu sorti il y a 19 ans, Blizzard ne prend pas le risque de vexer sa communauté, conserve ce qui a fait le succès de Starcraft à sa sortie et s’inscrit dans la tendance la nostalgie exigeante déjà largement prisée par d’autres éditeurs – Capcom, par exemple. Outre la conséquente mise à jour esthétique et sonore, Blizzard a habilement actualisé le multijoueur pour le mettre au goût du jour sans en modifier l’essence. C’est sans doute ça qui fera la différence auprès de la communauté.
Quant à répondre à la sempiternelle question, à savoir si un remaster de Starcraft était nécessaire, rappelons que Blizzard propose de télécharger gratuitement le jeu et son extension dans leur version d’origine : il est donc possible de rapidement se rendre compte si l’on peut encore supporter, ou pas, les graphismes de 1998. Une chose est cependant certaine : une fois qu’on a joué à la version remasterisée, il est clairement impossible de faire marche arrière !