Pour beaucoup, la série WipEout représente la quintessence du fun en matière de courses futuristes. Porte-étendard de la génération 32-bits, à l'image de Destruction Derby, elle fut l'une des premières killer-app de la PlayStation. Pendant près de vingt ans, la saga va faire vibrer les joueurs avec sa vitesse décoiffante et sa bande-son venue tout droit de la scène électro. C'est finalement Sony, son papa de toujours, qui mettra un terme à sa carrière en fermant le mythique studio de Liverpool : Psygnosis (renommé SCE Studio Liverpool). Depuis 2012 et cette terrible nouvelle, les amoureux de vitesse et de montagnes russes surveillent chaque jeu-hommage avec un œil averti. Après FAST Racing NEO, sorti en fin d'année dernière, c'est au tour de Redout, un mix entre F-Zero, WipEout ou encore Rollcage, de nous replonger dans la folie furieuse des années 90. Pari gagnant ?
Près d'une année après son arrivée sur PC, Redout fonce sur les consoles du moment et débarque avec ses DLC Europa et Neptune. Malheureusement, l'adaptation n'est pas un modèle d'optimisation.
Si l'intérêt global n'est pas remettre en cause, on ne peut pas en dire autant de la stabilité de l'animation et de la partie graphique. Par rapport à la version PC, qui est plutôt fine et nette, les moutures PlayStation 4 et Xbox One souffrent d'un trop plein d'effets (avec une bonne overdose de blur) qui gênent la visibilité et font subir aux courses de violentes chutes de framerate. C'est notamment le cas lors des passages où le vaisseau traverse de la fumée. Il aurait fallu que les développeurs atténuent certains éléments pour conserver une fluidité parfaite. Et c'est encore plus vrai sur Xbox One où l'animation peut baisser de moitié sur certaines pistes.
Clairement, sur ces machines, l'expérience n'est pas mauvaise mais elle est moins grisante que sur PC. Pour obtenir un ressenti proche de ce qu'on trouve sur PC, il faut se tourner vers la PlayStation 4 Pro. L'animation tourne à 60 images par seconde et reste parfaitement stable. Sachant que Redout sera optimisé pour la Xbox One X, il sera intéressant de refaire un point en novembre prochain.
Dès la première course, l'inspiration WipEout saute à la figure. Vitesse supersonique, vaisseaux profilés, pilotage en courbes... l'aura du hit de Psygnosis ne cesse de graviter autour du jeu de 34BigThings. Redout reprend, dans les grandes lignes, les forces de son modèle. Clairement destiné à la manette, le jeu se pratique avec les deux sticks analogiques et reprend le gameplay du protégé de Sony. Le stick gauche permet de tourner tandis que le droit offre la possibilité d'accentuer la courbe de son aéronef. Le freinage, quant à lui, aide à négocier les virages les plus raides. Pour compléter le tout, le joueur peut interagir sur l'inclinaison de son bolide, soit en le cabrant soit en le faisant piquer vers le sol. Cette option, loin d'être anodine, est indispensable sur certaines portions des circuits (trous noirs, revêtements rouges...). Comme la maniabilité est bien réglée (même si les vaisseaux sont parfois un peu trop légers), on retrouve très vite ses marques. Le fun est au rendez-vous et on prend un plaisir certain à défier l'IA agressive. Pour autant, n'allez pas penser que Redout n'impose pas ses propres règles.
SA PROPRE IDENTITÉ
Cela peut paraître surprenant mais les chocs contre les bords de la piste se révèlent beaucoup moins punitifs que dans un WipEout. Dans certaines conditions, les parois aident même à négocier un virage plus facilement, à défaut d'obtenir la trajectoire parfaite. Au départ, il faut avouer que c'est un peu déstabilisant mais on s'y fait vite. En ligne, cette légèreté est telle qu'il n'est pas rare de voir les adversaires se frotter aux rambardes pour repartir de plus belle. L'autre bonne idée provient de l'expérience acquise au fil des courses. En plus de gagner des deniers qui permettent d'acquérir de nouveaux vaisseaux et d'upgrader son équipement, le jeu intègre un système de propulseurs - actifs et passifs - conçu pour épauler le pilote durant la course. Ces propulseurs peuvent prendre différentes formes : soit une aide salvatrice améliorant la trajectoire ou la résistance de l'aéronef (un bouclier, un drone de réparation...) ou bien un dispositif ciblant les pilotes adversaires (drainage d'énergie. vague d'ondes...). Ces éléments apportent un côté stratégique dans le mesure où il faut faire le bon choix en fonction de la piste et du mode de jeu sélectionnés. Par exemple, on optera plus facilement pour le stabilisateur magnétique dans le cadre d'un contre-la-montre là où le bouclier sera adapté à une course contre des adversaires. En revanche, ne comptez pas sur l'utilisation d'armes. Redout mise avant tout sur le pilotage.
DES CONCURRENTS REDOUTABLES
S'il y a bien une chose qu'on ne peut enlever à Redout, c'est son challenge. Lors des premières courses, il y a vraiment de quoi déchanter. Les pilotes adverses vous collent littéralement aux basques et n'attendent qu'une erreur de votre part pour vous chiper la place. En gagnant de l'argent, cette sensation de "faiblesse" s'estompe mais n'espérez pas gratter de nombreuses secondes sur vos concurrents ! Au-delà de l'agressivité des opposants, le joueur doit aussi apprendre chaque tracé par cœur (aucune map n'est affichée à l'écran) afin de répondre au mieux. Comme dit plus haut, certaines zones obligent les pilotes à incliner leur vaisseau de différentes manières et il faut également apprendre à négocier les sauts et autres loopings. Pour un débutant, Redout peut paraître difficile à appréhender mais il laisse finalement pas mal de marge de manœuvre, ne serait-ce que par les chocs atténués ou les items à disposition. Au fil des courses, et à mesure que les performances des vaisseaux augmentent, on gagne en maîtrise et le jeu devient alors de plus en plus grisant. Cette progression bien étudiée est vraiment l'un des atouts de Redout.
BEAU ET COMPLET
Du côté du contenu, Redout n'a pas grand-chose à se reprocher. En dehors du mode Carrière, classique mais efficace, il est possible de s'adonner à des courses rapides offrant une multitude de règles (contre le chrono, vitesse ultime, le dernier du peloton est éliminé, le bouclier du vaisseau s'affaiblit à mesure de la progression, etc.). De quoi s'amuser pendant des heures, tout en glanant de l'argent qui permettra de bien vous équiper. Une fois que le pilotage est maîtrisé, il ne reste plus qu'à se confronter à des adversaires en ligne. Si le netcode est stable en toutes circonstances, on regrette que les options ne soient pas plus nombreuses, l'absence de matchmaking se faisant particulièrement ressentir. Heureusement, cela n'efface en rien les qualités globales du titre, à commencer par son enveloppe visuelle. Conçu à l'aide de l'Unreal Engine 4, Redout offre des courses très agréables à l'œil. La direction artistique est réussie, l'animation est d'une fluidité exemplaire (il est même possible d'augmenter le nombre d'images par seconde jusqu'a... 200) et les circuits imposent leur propre identité. C'est indéniable, le jeu de 34BigThings est vraiment soigné et il est évident que les développeurs ont écouté les joueurs après les retours de l'early access.
LE FILS DE WIPEOUT ?
Vu sous ces angles, Redout offre un catalogue (ha, ha !) plutôt attirant. Malheureusement, tout n'est pas parfait. La musique manque d'inspiration et fait penser aux innombrables morceaux techno/dance que l'on oublie aussi vite qu'on les écoute. Par moment, on se croirait même sur les logiciels de conception musicale de la fin des années 90. En ce sens, on est très loin de la bande son explosive d'un titre comme Formula Karts, dont les musiques étaient d'excellente qualité. En terme de lisibilité, le jeu s'en sort également avec les honneurs mais aurait mérité à être moins copieux en effets visuels. Du motion blur, de la transparence, de la pyrotechnie, des particules dans tous les sens... on n'est pas loin de l'overdose par moments. On ne serait que trop vous conseiller de passer dans les options pour atténuer ce feu d'artifice.
Points forts
- Beau et fluide
- Un pilotage tout en finesse
- L'impression de vitesse
- Contenu solide
- Direction artistique soignée
- Mode Carrière efficace
Points faibles
- Pas assez d'options en ligne
- Des musiques peu inspirées
- Overdose d'effets visuels
- IA parfois trop agressive
- Pas de multijoueur en local
En se frottant au mythique WipEout, les créateurs de 34BigThings ont pris un risque mais n'ont jamais perdu de vue leur trajectoire. Avec son impression de vitesse grisante, sa direction artistique soignée et son contenu alléchant, Redout est un palliatif convaincant à la mythique saga de Psygnosis. S'il n'a pas la prestance du hit de Sony, ne serait-ce que par son ambiance passe-partout, il impose ses propres idées et propose du challenge non-stop. Beau, bien pensé et très fluide, Redout saura convaincre les amateurs de sensations fortes. Cela tombe bien, c'est tout ce qu'on lui demande.