Square Enix a depuis très longtemps compris l'intérêt de capitaliser sur sa franchise la plus lucrative, Final Fantasy. Remaster, adaptations sur tous les supports possibles et imaginables, remake de Final Fantasy VII, on ne compte plus les idées de la firme japonaise pour mettre en avant sa poule aux œufs d'or. Toutefois, la firme entend bien offrir un peu de fraîcheur aux joueurs via son studio annexe, Tokyo Game Factory, qui aura la lourde tâche de développer des RPG davantage mû par la passion que la rentabilité en faisant référence aux anciennes gloires passées du genre afin de parler aussi bien aux nostalgiques qu'à un tout nouveau public. C'est donc avec des bras grands ouverts que nous accueillons I Am Setsuna, premier titre du studio donnant le ton des productions à venir. Une bonne nouvelle ? Oh que oui, mais...
Winter is coming
Une machine à remonter le temps. On pourrait comparer I Am Setsuna à l'appareil si cher à H.G. Wells tant le titre de Tokyo Game Factory nous replonge avec délice dans les années 90, époque où les RPG nippons de qualité pullulaient. De fait, tout en proposant un joli visuel 3D associé à une vue aérienne (si caractéristique de la période), le jeu ne cache nullement ses influences, que ce soit dans le gameplay ou bien la trame narrative relativement commune sans être inintéressante pour autant.
Se déroulant dans un pays ployant sous de fortes chutes de neige, I Am Setsuna nous conte l'histoire de Endir, mandaté pour aller tuer la dénommée Setsuna. Comme le titre nous l'indique, cette dernière étant destinée à devenir la protagoniste principale de l'aventure (et accessoirement à sauver son peuple en se sacrifiant), il va de soit que nous ne mènerons pas notre contrat à terme. S'en suivra alors le début d'une grande quête durant laquelle, plusieurs compagnons de route rejoindront notre route. Rien de vraiment original même si on notera que le titre (malheureusement entièrement en anglais) nous propose à plusieurs moments de choisir certaines réponses, ceci influençant davantage le dialogue en cours que la progression à venir de l'aventure. Et si vous avez un trou de mémoire, précisions que vous pourrez également retrouver dans un glossaire les événements marquants qui se sont déroulés jusque là mais aussi quantité d'informations sur l'univers du titre. Bien utile car par opposition aux jeux plus récents, il faudra papoter avec tout le monde dans I Am Setsuna pour savoir où aller. Eh oui, pas de flèche indicatrice, de tips, simplement le besoin de profiter du jeu en discutant avec les pnj afin de mieux apprécier le titre et de savoir où se trouve la prochaine étape.
Entre exploration et combats
Au delà de l'histoire quelque peu surannée, les développeurs ont toutefois eu l'idée d'opter pour une unité graphique, le jeu se déroulant essentiellement dans des endroits enneigés et/ou gelés. Ainsi, l'homogénéité prend le pas sur la variété environnementale (se résumant à des forêts, caves, châteaux et autres villages) et si on peut être déçu par cette absence de variété, l'idée a au moins l'avantage d'accentuer la crédibilité de l'univers ou du moins, de l'histoire racontée.
S'inspirer des classiques en évitant d'être trop classique
Si la structure narrative du titre ne surprend donc pas, le gameplay reprend lui aussi un système solide bâti en grande partie sur ceux des illustres modèles qui l'ont précédé. On retrouve tout ce qui a fait le succès de grandes séries (comme Final Fantasy) à commencer par l'ATB. Pas grand chose de plus à rajouter si ce n'est que votre position pourra changer au cours d'un combat (en fonction des coups reçus ou de vos attaques et non de votre fait, à l'image d'un Grandia 2 pour ne citer que lui, ce qui est plutôt étrange) et qu'elle influera sur les dommages que vous causerez à l'ennemi. En somme, si celui-ci est dos à vous, vous pourrez lui occasionner davantage de dégâts. Ceci sera aussi valable pour l'engagement des combats, le soft délaissant les combats aléatoires, ce qui nous permet de voir les ennemis et ainsi éviter l'affrontement. Une fois le combat débuté, il sera possible d'alterner entre trois choix (Attaque / Technique / Objet). On pourra trouver très étonnant qu'il soit impossible de se défendre, d'autant qu'on ne peut lancer des sorts de soin de groupe au tout départ. On fera avec d'autant que sorti de quelques boss, la difficulté est plutôt relative.
Notons qu'il sera aussi permis de profiter d'un gain de puissance lors de nos attaques (en appuyant au bon moment alors que notre personnage se prépare à attaquer), pour peu que nous ayons attendu que la jauge associée soit remplie. Facile me direz-vous sauf que pour se faire, il ne faudra pas bouger pendant quelques secondes, une fois l'ATB arrivé en fin de course, afin de récolter jusqu'à trois points SP (Special Power), ceci vous laissant à la merci de vos ennemis. Tout sera donc question de «stratégie», consistant à attaquer tout de suite ou à patienter pour blesser davantage l'adversaire. A vous de voir même si il faudra bien choisir également les trois membres de votre équipe afin de toujours avoir sous la main un mage, un guerrier et un personnage neutre.
Cependant, le plus important sera d'être bien préparé avant la bataille, ceci passant par le choix d'armes, de talismans divers et de pierres spirituelles qui vous permettront de lancer des sorts magiques ou des attaques spéciales. Fait notable, vous ne gagnerez jamais d'argent en éliminant des monstres. En effet, vous recevrez simplement des items et des matériaux qu'il faudra ensuite revendre pour pouvoir acheter de nouveaux équipements. Déstabilisant dans le sens où on se retrouve tributaire des prix en vigueur et du nombre d'objets dans notre besace.
Un premier boss qui passe comme une formalité
En somme, I Am Setsuna nous offre ce qu'on attend de lui et uniquement ça, sa propension à ne jamais aller au delà de ses promesses initiales étant quelque peu ennuyant. On se retrouve donc avec une progression très répétitive basée sur un schéma donjons/villages qui n'évolue pas, l'implication du joueur s'étiolant à mesure que les heures défilent. Et c'est bien là le principal problème du jeu de Tokyo Game Factory qui sous couvert de très bonnes intentions, semble prisonnier de son univers en cherchant coûte que coûte à rentrer dans une case (RPG old school) tout en omettant volontairement d'injecter suffisamment d'originalité afin que la magie opère pleinement. I Am Setsuna reste pourtant, au sens propre comme au sens figuré, une bouffée de fraîcheur même si on aurait apprécié être davantage secoué, autant émotionnellement que vidéoludiquement.
Points forts
- Style graphique charmant
- Un gameplay efficace et plutôt étoffé
- Un hommage aux classiques d'antan...
- Bon équilibre entre phases d'exploration et combat
Points faibles
- Le jeu devient vite répétitif
- … Qui n'arrive malheureusement jamais à vraiment s'émanciper de ses influences
- Difficulté réduite (hors certains boss, le jeu offre peu de challenge)
Bien que I Am Setsuna soit pétri de bonnes intentions, il se prend un peu les pieds dans ses influences en n'arrivant jamais vraiment à rendre hommage tout en s'émancipant suffisament. De fait, on survole le jeu un sourire complice aux coins des lèvres tout en poussant quelques soupirs après une dizaine d'heures à cause d'une trop grande redondance dans la construction, des donjons notamment principalement basés sur une même architecture verticale. Néanmoins, grâce à un chouette système de combat, un très bon équilibre combats/exploration et un style graphique très agréable à l'oeil, I Am Setsuna parvient à retenir l'attention, surtout si l'évocation de Chrono Trigger, Final Fantasy, Suikoden ou Breath of Fire suscite en vous un très long râle de nostalgie.