Avec l'expérience, on a appris à se méfier des sorties de jeux en catimini. Même si des exceptions existent, l'absence de communication autour d'un titre est rarement un bon signe. Et ce n'est pas ce nouveau jeu Tortues Ninja qui va nous faire dire le contraire. Alors que l'on pouvait espérer un beat'em all dans la veine de l'agréable Transformers : Devastation, TMNT : Des Mutants à Manhattan n'est rien d'autre qu'une production "alimentaire" visant à renflouer les caisses de PlatinumGames. Profitant de l'arrivée prochaine du second film (depuis le retour de la franchise au cinéma), le jeu ne parvient à aucun moment à nous faire revivre les folles péripéties d'un Turtles in Time ou même d'un Teenage Mutant Ninja Turtles sur NES. Si le talent du studio japonais n'est plus à prouver, les fans des Chevaliers d'écaille vont pourtant au devant d'une cruelle désillusion.
Depuis peu, les actes de criminalité explosent dans les rues de New York. Déterminés comme jamais, les Foot sèment la pagaille en ville pendant que Shredder et Krang mettent au point un projet maléfique dans le plus grand secret. Terrées au fond de leur égouts, les Tortues voient d'un mauvais présage les agissements de leurs ennemis et décident de tirer cette situation au clair. Guidés par la dévouée April O'Neil et le très sage Splinter, elles vont ainsi arpenter les avenues de la Grande Pomme et ses environs pour mettre à mal les plans de leur ennemis.
CARAPACE VIDE
Ce qui est sûr, c'est que le scénario du jeu ne vous collera aucun frisson. Fade et sans intérêt, il a juste le mérite de faire intervenir des personnages phares de la série. Bebop, Rocksteady, Karai, Slash, Armaggon ou encore Wingnut sont autant de boss que vous allez devoir vaincre ! Du côté des Tortues, les rôles sont respectés : Leonardo fait office de chef de groupe, Raphael est ténébreux et colérique, Donatello est le spécialiste hi-tech tandis que Michelangelo est le plus gourmand mais aussi le plus drôle de la bande (d'ailleurs, tout l'humour gravite autour de ses maladresses). L'ambiance se situe ainsi quelque part entre le comics et la récente série de Nickelodeon. Le problème, c'est que l'aventure ne parvient jamais à décoller. Les objectifs (éliminer une vague d'ennemis, défendre un stand de pizza, désamorcer des bombes...) sont d'une platitude sans nom et le level design est d'une pauvreté indigne de PlatinumGames. Le joueur se farcit ainsi une succession de stages (map faussement ouverte ou couloirs) sans aucune saveur, accumulant les "astuces" pour gonfler une durée de vie express. Ne vous étonnez pas, à la fin du jeu, de vous retaper l'ensemble (!) des boss dans un seul et même niveau ! Au final, que ce soit en solo ou en multi, la sentence est la même : on s'ennuie ferme !
PIZZA SANS MOZZARELLA
Là où le constat est amer pour le studio japonais, c'est qu'ils se sont plantés dans un domaine dans lequel ils excellent en temps normal : le gameplay ! En plus des attaques standard, peu excitantes (où sont passées les chopes ?), chaque reptile dispose de quatre capacités spéciales upgradables. Ces ninjutsu, à vocation offensive ou défensive, apportent un sentiment de puissance non négligeable et il faut refaire les niveaux plusieurs fois pour pouvoir accéder aux aptitudes les plus destructrices. Le souci, c'est qu'elles mettent trois plombes à se recharger ! Par ailleurs, le joueur peut assigner des items et des charmes permettant de réagir en cas de mauvaise posture. Cela va de la pizza régénératrice en passant par des bombes, des tourelles, un butin amélioré, une guérison automatique, une augmentation de la vitesse d'attaque, etc. Pris dans sa globalité, l'ensemble paraît plutôt convaincant et riche. Malheureusement, les développeurs ont fait un choix qui annihile le système d'esquive et l'intérêt des combats. Par souci de fidélité à l'œuvre originale, PlatinumGames a opté pour un affichage simultané des quatre tortues à l'écran, avec la possibilité de changer de personnage à la volée. L'idée, intéressante sur le papier (surtout quand on passe d'une tortue à une autre), se transforme en un véritable capharnaüm visuel ! On ne sait plus qui fait quoi et les affrontements se transforment en brouillon indéchiffrable. On passe ainsi son temps à matraquer les boutons de la manette, en relevant de temps à autre ses frangines tombées au combat (ou vice-versa) et en s'acharnant sur des ennemis très (trop ?) résistants et des boss protégés par plusieurs barres de vie. Et forcément, au bout d'un moment, la pilule a sérieusement du mal à passer...
INDIGNE DE CETTE GÉNÉRATION
Comme si cela ne suffisait pas, TMNT : Des mutants à Manhattan balance un véritable uppercut à tous les fans... mais pas dans le bon sens du terme. Si certaines animations sortent du lot, la réalisation fait peine à voir. Les graphismes, en plus d'être assez sombres, se limitent au strict minimum et le cel-shading, pourtant très efficace sur un jeu comme Transformers Devastation, n'apporte pas grand-chose. Et que dire des environnements ? La ville de New York, en plus d'être totalement vide, est entourée de murs noirs et elle est recyclée sous différentes conditions (de nuit, de jour, sous la pluie). À cela s'ajoutent les égouts, le coffre d'une banque, le métro, un chantier... Pas de quoi esquisser un large sourire. Le constat est le même du côté du son, avec des musiques et des bruitages passe-partout, sans parler des doublages en français peu convaincants. PlatinumGames a bien tenté de redorer le blason de son jeu avec des combats de méchas et des boss hargneux (selon le mode de difficulté, ils se battent même en duo), mais rien n'y fait... On termine l'aventure comme on l'a commencé, en essayant de récupérer tous les comics cachés, et on passe à autre chose. Triste.
Points forts
- Le changement de tortue instantané
- Michelangelo est un vrai pitre
- Certains boss sympa
- Les déplacements (grind, escalade, parachute...)
- Les personnages, soignés esthétiquement
- Le multi en ligne, amusant quelques parties
Points faibles
- Pas de multi en écran splitté
- Durée de vie rachitique en ligne droite
- Décors qui se répètent sans cesse
- Objectifs sans la moindre once d'intérêt
- IA à la rue
- Combats brouillons
Si Teenage Mutant Ninja Turtles était un livre, il serait le guide des erreurs à ne pas commettre dans un jeu vidéo. En plus de proposer des environnements moches, recyclés et sans âme, le jeu d'Activision se traîne des tares insupportables. Missions répétitives, scénario inexistant, doublages perfectibles, gameplay qui se cherche... la liste est longue et on n'éprouve aucun plaisir (sauf peut-être à plusieurs) à incarner nos quatre tortues. Pour couronner le tout, la réalisation est à des années-lumière des standards du moment et le degré d'attachement aux ninja en carapace est de l'ordre du zéro. Quand on sait de quoi est capable le studio PlatinumGames, c'est vraiment un énorme gâchis. Une vraie soupe de tortues, et frelatée en plus !