La nostalgie est à la mode, frappant à nos portes semaine après semaine galvanisée par cette éternelle rengaine “Le jeu vidéo, c’était mieux avant”. Et comment ne pas donner raison à ces quelques mots, tout du moins en partie, face à la production triple AAA bien trop souvent édulcorée ? Face à cette vague de jeux au style “Retro” frappant nos rives depuis plusieurs années, les amateurs de gameplay old school et autres amoureux transis du pixel ressortent leur manette d’antan, prêts à en découdre avec une difficulté revenue de l’au-delà. Projet initié sur Kickstarter comme tant d’autres, Hyper Light Drifter sut convaincre les contributeurs explosant son palier de 27.000$ en moins de 24 heures pour atteindre la coquette somme de 645.158$ en fin de campagne le 12 octobre 2013. 2 ans et demi plus tard, l’Action RPG du studio Heart Machine débarque sur Steam l’épée au vent et le pixel en émoi.
La rédemption par l'épée
Quant il s’agit de jeu vidéo, le passé rime sans cesse avec difficulté. Bornes d’arcade, titres édités par Infogrames et j’en passe… le joueur né dans les années 80’s transpirait sur son canapé, crispé à s’en briser les doigts sur un pad plaintif. Désireux de ressentir cette tension à nouveau, les adeptes du “Hardcore” espérait un retour aux sources, une résurgence de la difficulté par et pour le gameplay. Super Meat Boy, Hotline Miami et bien entendu la saga des Souls reprirent le flambeau… une flamme entretenue par Hyper Light Drifter, un Action RPG à la croisée d’un Dark Souls et d’un jeu d’aventure, Zelda en tête.
Terrasser des hordes d’ennemis aux patterns prédéfinis, accéder à des donjons pour y débusquer des artefacts et autres gemmes à même d’améliorer votre équipement et vos compétences, échapper à des pièges mortels… à première vue Hyper Light Drifter ne réinvente pas la roue. Et pourtant, la simple approche Hardore du titre mérite le coup d’oeil. La difficulté se ressent dans chaque affrontement. Apprendre les attaques de chaque adversaire et savoir y appliquer la réponse adéquate résume une expérience aux pics de difficultés indéniables. Ainsi la simple absence de frame d’invulnérabilité après avoir été touché donnera des sueurs froides aux joueurs les plus tenaces.
Extrait de gameplay de Hyper Light Drifter : La voie du sang
Pour se dépêtrer de ces situations précaires, le Dash sera votre salut autant que votre capacité à trancher dans le vif. Cette capacité à dasher dynamise des combats nerveux et tactiques vous offrant l’opportunité de frapper par derrière, d’esquiver en rythme pour optimiser la contre-attaque toute épée dehors. Et si la voie de l’épée ne suffit plus, celle de l’arme à feu viendra sonner le glas d’ennemis s’entassant à vos pieds, des armes à feu que vous débusquerez sur les cadavres encore tièdes de pauvres bougres. Pistolet, fusil à pompe, Railgun… les moyens les plus simples sont souvent les plus efficaces. Face à cette difficulté retorse et à la véhémence de l’univers, le simple skill épée et gun en mains ne fera rempart qu’un temps aux assauts répétés des ennemis. La découverte de “gemme or” assurera l’amélioration des compétences du Drifter via des achats à effectuer dans le village situé au centre de la carte vous apportant diverses capacités telles que repousser les projectiles ennemis, le triple dash… pour un pouvoir de mort décuplé malgré un aspect RPG tout juste survolé.
La maladie et les quintes de toux rythment la vie d’un héros cherchant tant bien que mal à soigner un monde en perdition. Parcourant les terres sauvages à la recherche d’artefacts, l’exploration sera la sève d’un périple ponctué de donjons habités par des ennemis en tout genre et parsemés de pièges (lance-flammes, murs amovibles, trappes dérobées...). Oiseau bipèdes lançant des lasers, crapauds samurai, plantes belliqueuses… le bestiaire s’en donne à coeur joie et occire ces êtres enclins à vous faire passer l’arme à gauche n’en sera que plus plaisant. Notre Drifter est en mission. Celle de rassembler des “artefacts” symbolisant connaissances et technologies et pour ce faire, il devra traverser plusieurs zones aux environnements variés (ruines, montagnes, laboratoires, caves…) ; des labyrinthes complexes articulés autour d’ascenseurs, d’interrupteurs à activer et de recherches de clés avec pour finalité un combat de boss dantesque, vous obligeant à tenter votre chance encore et encore. Du Die & Retry dans la plus pure tradition.
Extrait de gameplay de Hyper Light Drifter : Un combat de boss épique
Un monde hanté par un passé sombre et violent
Hyper Light Drifter ne s’embarrasse à aucun moment des fioritures inhérentes aux productions triple AAA. Les cinématiques et longs discours laissent place à une narration 100% visuelle. Les lignes de dialogues s’effacent au profit de saynètes courtes dépourvues de texte. Le joueur découvre ainsi des terres sauvages marquées par un passé sombre et violent, un univers en quête de connaissances. Hanté par une maladie incurable, notre héros vagabonde au gré de ses découvertes, un “Drifter” à la recherche des connaissances et technologies perdues à travers les âges avec l’infime espoir de trouver un remède à cette maladie rongeant son corps et le monde qui l’entoure.
Postulat de départ conventionnel de prime abord, le scénario se veut l’écho des jeux d’antan. Expéditif à plus d’un titre sans jamais être simpliste, l’univers de Hyper Light Drifter se dévoile par d’habiles touches, pour une narration lapidaire privilégiant le mystère. Le lore s’apparente à un puzzle incomplet que le joueur pourra à sa guise compléter au gré des ses péripéties et de ses rencontres : un personnages entouré de corps sans vie, un ennemi désireux d’en découdre… Le visuel est et restera la seule source d’information à condition d'arpenter l'univers de Hyper Light Drifter l'épée à la main.
Extrait de gameplay de Hyper Light Drifter : Un vaste monde à explorer
Le Pixel pour pilier d’un univers sur le déclin
Le pixel a le vent en poupe. Véritable machine à remonter les temps vidéoludiques, ces petits cubes digitaux reviennent sur le devant de la scène avec la montée en puissance des productions dites “indépendantes”.BroForce, Hotline Miami, Zombie Night Terror… le pixel art connaît une seconde jeunesse depuis une décennie pour le plus grand plaisir des nostalgiques.
La splendeur passée de l’univers fantastique dépeint par le studio Heart Machine n’a d’égale que la minutie avec laquelle les artistes du studio surent insuffler la vie à un amas de pixel aux couleurs criardes. Une direction artistique 8/16 bits n’aura jamais été aussi vivante. Les décors fourmillent de détails. Des brins d’herbe plient sous les bourrasques. Les flocons de neige virevoltent tandis que des papillons et autres oiseaux planent dans les cieux et que ce monde ravagé s’anime sous nos yeux. Et ce sens du détail se perçoit dans le moindre plan. De l’animation de l’eau à celles des ennemis et du héros, Hyper Light Drifter rime avec perfection. La finesse des mouvements et des effets à chaque impact, chaque explosion flatte la rétine prouvant sans contestation possible que l’art du pixel n’est pas mort. Bien au contraire, tel le Phoenix, le pixel renaît de ses cendres emporté par une bande originale composée par l'artiste derrière les musiques du jeu de plate-forme FEZ.
Bande-annonce de Hyper Light Drifter
P.S. Hyper Light Drifter sortira en 2016 sur PlayStation 4 et Xbox One.
Points forts
- Le Pixel au sommet de son Art
- Une narration visuelle dans le détail
- Un monde immense et labyrinthique à explorer
- Des combats à la fois dynamiques et tactiques
- Un bestiaire copieux aux comportements variés et complexes
Points faibles
- Un scénario à peine murmuré
- Un aspect RPG tout juste survolé
Hyper Light Drifter est un pur délire régressif surfant sur cette vague “Retro” s’emparant du marché vidéoludique depuis plusieurs années. Le titre de Heart Machine se démarque de la concurrence par la justesse de ses traits entre Pixel Art soigné dans le détail issu de l’ère 8/16 bits et bande originale venue des années 80’s. Et pourtant, cet Action RPG se démarque avant tout par sa vision du jeu vidéo. A la fois “hardcore” dans son gameplay et riche de par son univers tout juste murmuré, Hyper Light Drifter frappe le nostalgique en plein coeur pour ne plus le lâcher une quinzaine d’heures durant.