La Terre du Milieu : L'Ombre du Mordor est sorti il y a maintenant plusieurs mois, mais il continue de faire parler de lui. Après avoir raflé les récompenses aux DICE Awards 2015, dont le prix de meilleur jeu d'aventure de l'année, le titre de Monolith Productions revient sur le devant de la scène avec un nouveau DLC, Seigneur de Lumière. Un DLC qui s'annonçait des plus alléchants, notamment pour les amoureux de l’œuvre de Tolkien.
L'Ombre du Mordor, malgré un certain manque d'originalité, brillait par sa réalisation, son gameplay et surtout grâce aux nombreuses références faites aux divers écrits de J.R.R. Tolkien, parfois très pointues. C'était assurément une bonne surprise, en tout cas pour moi qui n'en attendais pas grand-chose. Alors forcément, lorsque j'appris que l'un des futurs DLC du jeu mettrait en avant le personnage de Celebrimbor, mes yeux se sont mis à briller. La déception n'en fut que plus grande, une fois que j’eus terminé la nouvelle aventure que l'on m'offrait.
Un scénario pour le moins ubuesque
En tant que fan de l'oeuvre de Tolkien, j'avais été ravi de voir que les développeurs de L'Ombre du Mordor s'étaient énormément documentés sur l'univers de la Terre du Milieu : les références et allusions étaient parfois extrêmement pointues, ce qui donnait au jeu une force, le rendait crédible, même. Alors certes, il y avait quelques erreurs, mais globalement c'était franchement bien joué de la part de Monolith Productions. Je serais en revanche beaucoup moins dithyrambique concernant ce DLC, qui m'a fait pousser quelques « NON MAIS OUAT ZE FEUK ?! » en plein milieu de la rédaction. Explications.
Seigneur de Lumière vous propose donc de vivre la vie de Celebrimbor, un grand seigneur elfe, petit-fils du fameux Feänor, celui-là même qui avait créé les Silmarils et combattu Morgoth, le premier Seigneur des Ténèbres, au Premier Age. Celebrimbor avait hérité des talents de son grand-père et, au Second Age, après la destruction de Beleriand, il s'installa en Eregion. Sauron se présenta un jour à lui, parvint à séduire ses forgerons et leur enseigna l'art de forger, de créer des anneaux magiques. Vous l'avez compris, c'est ainsi que furent créés les 19 anneaux de pouvoir, qui donnèrent à Sauron son surnom de Seigneur des Anneaux. Ensuite, vous connaissez l'histoire : Sauron forga en secret l'Anneau unique et tenta grâce à lui de contrôler les porteurs des autres anneaux. Il lança une attaque contre l'Eregion et captura Celebrimbor, l'amenant en Mordor pour qu'il lui révèle où se trouvaient les anneaux. Le fils de Curufin, sous la torture, finit par lui donner ces informations, mais ne révéla jamais où se trouvaient les Trois ; c'est justement le seigneur elfe en personne qui les avait forgés, en les tenant à distance de Sauron, dont il se méfiait.
Voilà, ça, c'est ce qui est dit dans les différents ouvrages de Tolkien. Et si je me permets de rédiger un tel résumé, c'est parce qu'il est important que vous compreniez la portée de ce qui va venir ensuite.
Monolith Productions, en choisissant de s'attaquer à un tel personnage, prenait forcément des risques (d'autant que l'on sait assez peu de choses sur sa vie), mais après avoir joué à L'Ombre du Mordor, il y avait toutes les raisons d'être confiant : ce DLC s'annonçait particulièrement savoureux d'un point de vue scénaristique. Et en fait, non. Non puisque le DLC nous présente une histoire complètement différente : selon Seigneur de Lumière, Celebrimbor aurait participé à la création de TOUS les anneaux, y compris celui de Sauron, l'Anneau unique, qu'il aurait "perfectionné", toujours selon le jeu. Ce qui n'a proprement aucun sens. Mais mieux (ou pire, c'est selon), dès le début du jeu, Celebrimbor est vu combattant Sauron ; il finit même par lui voler l'Unique, et c'est ainsi que commence la partie... en Udun, avec Celebrimbor, le Maître Anneau à l'index. On vire là dans le plus grand des n'importe quoi, c'est véritablement décevant.
Puisque le DLC est grosso modo un copier-coller des aventures de Talion, qui est remplacé ici par Celebrimbor, on assiste à des choses assez étonnantes. Comment l'Elfe peut-il ressuciter après chaque défaite, alors qu'il est pourtant encore un être vivant ? L'Anneau unique, aux dernières nouvelles, ne permettait pas de revenir à la vie après s'être fait décapiter par un Orque. Orque qui est bien sûr très surpris de voir revenir sa victime à chaque fois. Un non-sens curieux, si l'on y réfléchit.
D'autant plus que la narration, ensuite, n'a rien de passionnante. On se contente d’enchaîner les missions répétitives et peu originales tandis que le Seigneur des Ténèbres fulmine et menace Celebrimbor à distance. Galadriel, de son côté, avertit notre Elfe des dangers qu'il encourt en portant l'Unique... mais lui, plutôt caractériel, décide de retourner contre Sauron ses troupes d'Orques tout en dressant ici et là des Tours de Lumière en plein Mordor, bisque bisque rage. Ok ok...
Des missions peu passionnantes
En ligne droite, vous n'aurez pas besoin de plus de deux ou trois heures pour terminer Seigneur de Lumière. Il vous suffira d'accomplir une série de missions pour permettre la construction de ces fameuses tours. Des missions aussi originales que "Convertis 15 Orques à ta cause", "Protège les machines de siège des attaques orques" ou encore "Tuez le capitaine local". On s'ennuie, vraiment. D'autant que Monolith a revu la difficulté à la hausse et les Orques sont particulièrement résistants désormais, la plupart d'entre eux portant de lourdes armures. On note au passage que leurs répliques viennent toutes directement de L'Ombre du Mordor. Il aurait sans doute fallu revoir la chose, cela aurait évité aux joueurs d'entendre des phrases complètement hors de propos, du genre « Quand le Maître sera revenu... », alors que... eh bien, le maître en question, il est là, justement, tranquillement installé dans sa Tour de Barad-dûr, sans doute bien bougon de s'être fait soutirer son Précieux par un Elfe qui organise des pique-niques sur ses terres.
On s'amuse quand ?
Honnêtement, je me suis peu amusé en jouant à Seigneur de Lumière. Puisque si j'ai réussi, au bout de 10 minutes, à mettre de côté les attentes que j'avais concernant le scénario, et le respect de l’œuvre de Tolkien (Celebrimbor qui vole l'Unique, je ne m'en suis toujours pas remis), j'ai eu beaucoup de mal à finir ce DLC, pour la simple et bonne raison que j'avais l'impression de jouer à L'Ombre du Mordor... en moins bien. Le contrôle des armées de Sauron n'a aucun intérêt, les armes ne peuvent accueillir que peu de runes, et de toute manière, les compétences que vous aurez débloquées avec Talion seront disponibles dès le début de la partie. Moi qui les avais toutes, je m'en suis retrouvé bien peiné.
Vous vous contenterez donc de massacrer de l'Orque, cette fois avec l'aide de l'Anneau unique. Celui-ci vous permet de ralentir le temps et d'utiliser sans limites certains coups spéciaux, comme les Exécutions vous permettant de décapiter d'un coup d'épée vos ennemis. Il faudra ensuite attendre que la jauge affiliée à l'Anneau se remplisse entièrement pour pouvoir bénéficier à nouveau de ses effets. Mouaif. Il y avait probablement mieux à faire ici, même s'il faut admettre que son pouvoir peut se montrer pratique, notamment parce que les objectifs donnés par le jeu sont parfois un peu extravagants, ou en tout cas assez exigeants, ce qui d'ailleurs ne sert pas vraiment le jeu.
Les images apparaissant dans ce test sont issues de la version PlayStation 4 du jeu.
Points forts
- Quelques subtiles références
- Des combats toujours aussi efficaces
- Le Mordor nous montre enfin qu'il est la Terre des Ombres
- Le combat final
Points faibles
- On cherche encore où est passé le respect pour l’œuvre de Tolkien
- Des missions peu attrayantes
- Une mise en scène minimaliste, pour ne pas dire quasi inexistante
- Celebrimbor qui vole l'Unique à Sauron. Sérieusement ?
- En plus, l'utiliser n'est même pas vraiment intéressant
Seigneur de Lumière est une sacrée déception. Peut-être parce que le choix du personnage et de l'époque laissait envisager des possibilités trop folles pour les développeurs, mais une fois la partie terminée, on a vraiment l'impression qu'ils ont fait le strict minimum. C'est dommage, tant il y avait à faire. Néanmoins, ceux ayant adoré L'Ombre du Mordor pourront prolonger l'expérience (et donc le plaisir) puisque le DLC en est extrêmement proche. Il faut néanmoins qu'ils sachent dans quoi ils s'engagent : Seigneur de Lumière est plutôt court, répétitif et les missions qu'il propose sont peu inspirées. Mais le plaisir de trancher de l'Orque est toujours présent.