Trois couleurs, des avions étranges, de la musique techno. Voilà ce que propose Luftrausers, le dernier shoot'em up 2D des Hollandais de Vlambeer, studio déjà connu parmi les amateurs de jeux étranges pour avoir engendré, entre autres, Gun Godz et Ridiculous Fishing. Le joueur avisé remarquera aussi le logo de l’éditeur Devolver Digital, responsable notamment du terrifiant et jouissif Hotline Miami. Avec de telles fées au-dessus du berceau, Luftrausers ne risque pas d’être un jeu comme les autres. Voyons ce qu’il en est et ne nous laissons pas avoir par son esthétique digne de la vénérable Atari 2600.
Fait qui ne trompe pas : Luftrausers a d’abord vu le jour sous la forme d’un jeu flash nommé Luftrauser au singulier. Le principe : un avion (le joueur, baptisé Rauser), le ciel (horizontalement infini mais limité verticalement par la mer et les nuages), et des dizaines d’ennemis (avions comme bateaux) qui veulent votre mort à tout prix, quitte à vous foncer dessus. Une base extrêmement basique justement qui aurait pu tomber dans l’oubli sans un gameplay aux petits oignons. En effet, seules 5 touches sont nécessaires : les quatre directions pour se diriger et X pour faire feu. Là aussi, un gameplay très basique me direz-vous, mais c’est sans compter sur l’inertie de l’avion, couplée à la gravité, qui rend le pilotage si particulier, et étrangement addictif. Rajoutez à cela l’inévitable compteur de points et saupoudrez le tout d’une musique enivrante et vous obtenez l’un des shooters les plus jouissifs de ces dernières années, capable de vous voler plusieurs heures de votre vie sans que vous vous en rendiez compte.
C’est dans les vieux pots
Si je viens de passer un paragraphe entier à parler d’un jeu flash, c’est parce que le Luftrausers vendu 9 € est sensiblement le même jeu. Même esthétique, même principe. 9 € pour un jeu flash ça fait cher. Mais c’était sans compter sur les développeurs qui ont parfaitement compris ce qui faisait le sel du petit frère. Ils se sont donc contentés de rajouter du contenu, afin de contrer la répétitivité et l’impression de tourner en rond que pouvait subir le joueur après quelques minutes de jeu. Pas de prise de risque, on ne change pas une équipe qui gagne, et autant le dire tout de suite, ça marche du feu de dieu.
Adieu le petit avion solitaire et anonyme, désormais, chaque appareil sera composé de trois types de pièces interchangeable : Arme, Fuselage, Moteur. Comptez 5 pièces différentes de chaque type et cela vous donne 125 combinaisons différentes. Ces pièces modifient le look de votre avion mais aussi son pilotage. Aucune arme ne tire pareil (mitrailleuse simple, canon laser, etc.), les fuselages ont une incidence sur la maniabilité et la résistance, tandis que les moteurs modifient la vitesse. Un modèle permettant même de plonger dans l’eau sans subir de dégâts. Afin de garantir une certaine durée de vie, toutes ces pièces ne sont pas disponibles de suite, et il vous faudra accomplir des missions classiques du genre « abattre 20 avions sans jamais ralentir » ou « « couler 2 bateaux en une vie ». Des tâches en apparence simples, mais qui vous donneront du fil à retordre.
Pappy Boyington fait de la résistance
Car vous vous sentirez bien seul avec votre petit avion, lorsque des dizaines d’ennemis de tout poil se dresseront face à vous. Des virevoltants chasseurs aux battleships géants, en passant par les sous-marins et le terrifiant dirigeable, il vous faudra des nerfs d’acier pour survivre plus de 2 minutes. Le coup de main se prend en autant de temps, quelques minutes suffiront pour se prendre pour un Maverick aux commandes de son F-14. Mais il faudra plus d’expérience pour espérer truster les plus hautes places du classement mondial. Si vous ne vous sentez pas l’âme d’un compétiteur, vous pourrez toujours chercher à compléter tous les défis et accéder au niveau 10 (deux petites heures suffiront malheureusement à l’atteindre), ce qui vous permettra de déverrouiller d’autres palettes de couleurs, si le mélange bordeaux / beige vous lasse. Les développeurs ont pris la décision de conserver la direction artistique de la version flash, en plus détaillée tout de même. Ce qui pourrait passer pour un point faible est en réalité l’un des points forts du jeu.
Toute personne ayant joué à un danmaku, ces shoot'em up japonais où les couleurs sont tellement vives qu’il vaut mieux en éloigner les épileptiques, vous le dira, il est extrêmement compliqué de suivre son vaisseau parmi les centaines de boules de feu roses, violettes et bleues qui vous arrivent dessus. Dans Luftrausers, les ennemis et les tirs se distinguent parfaitement du décor. Pour faire court, si vous mourez, c’est votre faute. Le gameplay offre aussi plus de liberté, ici, pas de scrolling. Vous choisissez où vous allez, vous pouvez tourner en rond pendant des heures au-dessus du même point si c’est votre tactique. Mais mieux vaut rester mobile et enchaîner les frags pour réaliser des combos, qui rapportent évidemment plus de points et vous maintiennent dans une sorte de transe destructrice.
Un goût de revenez-y
Cette sensation plaisante est d’ailleurs amplifiée par la très bonne musique du jeu. Comme dans le jeu flash, elle est signée Kozilek, un producteur finlandais de musique électronique qui a déjà collaboré avec Vlambeer. Le rap extraterrestre de Gun Godz, c’est lui. Le style n’a pas changé, on reste dans une sorte de marche militaire 8 bits très rythmée et qui rentre immédiatement dans la tête. Comble du raffinement, chaque pièce de votre Rauser est associée à une piste musicale. Oui, en théorie, cela fait 125 musiques différentes, une pour chaque combinaison possible. Evidemment, elles se ressemblent à peu près toutes, mais l’ensemble est cohérent et accompagne à la perfection les dogfights endiablés.
Luftrausers est donc une excellente surprise, la seule ombre au tableau étant sa durée de vie limitée par le faible nombre de niveaux et par le nombre de pièces que l’on voudrait toujours plus grand. Mais comptez sur lui pour vous occuper pendant des heures, juste pour le plaisir de voir votre Rauser zigzaguer dans les nuages.
Points forts
- Gameplay quasi parfait
- Customisation des avions
- Esthétique globale
- Simple et efficace
- La musique !
Points faibles
- On en veut toujours plus
- Forcément répétitif au bout de quelques heures
Luftrausers est l’exemple type du jeu simple, mais efficace. On ne s’embarrasse pas avec un scénario ou des graphismes mirobolants, on prend juste un gameplay à la limite de la perfection, on ajoute une musique entraînante, et cela suffit à mettre tous nos sens en éveil. Si vous voulez vous muscler les doigts, vous défouler l’espace d’un instant avec un budget limité, Luftrausers est donc un excellent choix.