La guerre, c'est une affaire d'hommes, de vrais. Avec des bras poilus, un torse musclé et des guns. Et ça c'est pas l'agent Armstrong qui vous dira le contraire, non ma bonne dame ! Vous pouvez d'ores et déjà oublier l'infiltration subtile, les cachettes sous les caisses, Armstrong porte bien son nom : inutile avec Agent Armstrong de jouer dans la finesse.
Ces dernières années, l'industrie vidéoludique a su assez bien faire ressusciter le prototype du héros musclé, viril et au look balafré. Un peu oublié, Duke a malgré tout des héritiers spirituels que l'on peut retrouver dans un Borderlands ou un Shoot Many Robots. Librement inspirés de certains Rambo ou autres Mad Max, ces héros décomplexés sont davantage des caricatures de leurs aînés qui eux, se prenaient sans doute un peu trop au sérieux. C'est dans cette veine que s'inscrit Agent Armstrong sorti un an après Duke Nukem 3D. Et il faut avouer que ce jeu ne va pas se contenter de répondre au cliché du héros de guerre.
Agent Armstrong repose sur un gameplay assez intéressant. Alors que Quake et Doom sont déjà sortis depuis quelques années, les développeurs de chez King of the Jungle Ltd ont choisi de proposer un univers en 2D. Soit, et d'ailleurs pourquoi pas. Et effectivement, si on pourrait regretter que le jeu ne soit pas dans un univers en 3D, et de ce fait sans doute plus immersif, il gagne en finesse et finition des détails. Car il faut l'avouer, il est plutôt joli, et même 15 ans plus tard il continue de flatter la rétine, sans doute grâce à un aspect cartoonesque grossier, mais agréable. On notera aussi une qualité dans l'animation des protagonistes, qu'il s'agisse du personnage que l'on incarne ou des différents types d'ennemis que l'on pourra rencontrer. En plus de son aspect shoot'em up, Agent Armstrong saura proposer quelques phases de plates-formes au travers de plusieurs niveaux parfois labyrinthiques où l'exploration est nécessaire afin de remplir les objectifs principaux et secondaires. Ces temps de plates-formes seront toutefois assez convenus et même assez simplistes, mais ils sauront rythmer à loisir les phases de tirs et celles d'exploration. On regrettera tout de même la linéarité de celles-ci : il n'est absolument pas difficile de découvrir des endroits cachés et de toutes manières les récompenses se contenteront de proposer des bonus de vie, de munitions et de dégâts.
C'est effectivement là que le jeu laisse parfois à désirer. Bien que la difficulté soit progressive, elle reste néanmoins un peu en deçà de ce que tout joueur espérant un peu de challenge pourrait présumer. De plus, un système de scoring aurait été bienvenu afin de donner un peu plus d'épaisseur au contenu. On se rend compte à ce sujet que le soft n'est clairement pas orienté arcade, ce qui est dommage car tout laisse penser dès la cinématique d'introduction qu'on a là un jeu sur lequel on va pouvoir se défouler. En fait, une plus-value lui aurait été sans doute accordée s'il avait été débarrassé d'un scénario cliché au possible (combattre les forces d'une organisation terroriste pseudo-IVème Reich) où il est difficile de déterminer s'il s'agit de la même ironie comique que Shoot Many Robots.
On notera aussi une légère faiblesse à l'intérieur du gameplay en 2D. Comme dans de nombreux shoot'em up de ce genre, Armstrong peut se déplacer sur plusieurs niveaux de perspective et peut même utiliser tous les axes de direction pour tirer. Bien que l'idée soit louable, et c'est sans doute ce qui fait le charme de ce jeu face à une 3D isométrique qui est souvent catastrophique (rappelons-nous Sonic 3D), il souffre d'une difficulté à faire percevoir où sont situés les ennemis par rapport à la position du personnage. Il en résulte une grande lassitude quand on tombe plusieurs fois de suite dans le même trou ou qu'on pense ne pas se faire toucher par des ennemis qui sont en fait juste devant soi. Mais malgré ces quelques reproches, il est indéniable que Agent Armstrong est un jeu fun et a l'avantage d'être très varié. De plus, bien que sorti il y a une quinzaine d'année, il a étonnamment très bien vieilli, que ce soit au niveau de son esthétisme ou de son gameplay fort sympathique.
- Graphismes15/20
Dès la cinématique d'introduction, on est sous le charme. Une large palette de couleurs au service d'un aspect cartoon très agréable à l'oeil. Les animations sont très fluides et les décors bénéficient d'une véritable direction artistique. Peu de redondance dans chaque série de décors et même à l'intérieur des stages.
- Jouabilité13/20
Les niveaux se suivent et ne se ressemblent pas. On appréciera un level design sobre mais qui aura l'occasion de transformer des phases run and gun répétitives en phases de plates-formes et d'exploration. Le choix d'une 2D à couloir plutôt qu'une 3D isométrique ou qu'une 3D tout court pourra surprendre au premier abord mais se révèle tout à fait charmant. Malheureusement une optimisation un peu douteuse et un angle de caméra mal choisi n'aident pas forcément le joueur à se sentir à l'aise et à bien se situer dans l'espace.
- Durée de vie16/20
Comme de nombreux shoot'em up, la durée de vie est significative. L'agent Armstrong accompagnera le joueur au sein de 30 niveaux où il aura l'occasion d'affronter 5 boss. La rejouabilité est d'ailleurs au rendez-vous étant donné qu'en plus des objectifs principaux à accomplir pour terminer chaque niveau, de nombreux objectifs secondaires seront proposés afin de parfaire l'exploration.
- Bande son12/20
Bien que très convenus, les bruits d'explosions et de balles tirées savent convaincre. On aurait apprécié une plus grande variété de sons, notamment peut-être avec les ennemis que l'on dégomme à toute berzingue. Les musiques ne volent pas très haut, se contentant souvent de reprendre celles entendues dans des films de guerre des années 1970-1980.
- Scénario11/20
Encore une fois, Agent Armstrong ne brille pas par son scénario. Très cliché, il sert davantage de fil rouge pour lier les niveaux entre eux. De plus, il aura tendance à se prendre un peu trop au sérieux, comparé à la jaquette du jeu et la cinématique d'introduction qui auraient supposé une plus grande place à l'humour.
Agent Armstrong a tout pour plaire. Plutôt joli, bien fini avec une direction artistique irréprochable qui vieillit très bien. On notera une certaine sobriété dans le game design, mais qui sera largement au service d'un plaisir de jeu qui saura alterner des phases répétitives et d'autres plus réfléchies. Néanmoins on pourra regretter un manque de partis pris bien assumés : S'agit-il d'un jeu uniquement arcade ou le gameplay est-il au service d'une histoire ? Peu d'éléments permettent de trancher, et même après plusieurs heures de jeu on se demande encore s'il s'agit d'un hommage ou d'une parodie des films de guerre aux héros musclés.