Des insectes et des hommes, cela ne ferait-il pas un bon titre de roman ? Arrivant des lunes après le film, l'adaptation de Starship Troopers a fini par trouver sa route vers les bacs des marchands. L'ennui c'est qu'il lui reste maintenant à se frayer un chemin jusqu'aux chaumières des joueurs, et là, je compte bien faire barrage.
Première chose : planter le décor. A l'origine, nous trouvons Starship Troopers, le film de Verhoeven, satire acide et drôle d'une Amérique ultra patriotique dépeinte à travers son armée conquérante. Une fausse apologie de la guerre dans laquelle l'armée US se voit ornée de symboles évoquant sans ambiguïté l'imagerie fasciste qu'elle brandit dans sa lutte contre une espèce d'aliens insectoïdes, présentée comme l'agresseur, alors que dans les faits, ce sont bien les terriens qui sont venus chercher des noises à des E.T qui n'avaient rien demandé. Aujourd'hui nous avons Starship Troopers, le jeu. Il va de soi que dans une telle adaptation, il importe de renouer avec l'esprit initial de l'oeuvre. Pour ce faire, Strangelite ne s'est pas trop foulé le neurone en nous collant une myriade d'extraits du film à la qualité de compression déplorable. Evidemment, on aurait pu trouver ça potable si ces extraits avaient leur place dans l'histoire du jeu. Or, une fois que l'on sait que celui-ci se déroule 5 ans après le film, on a bien du mal à faire le lien entre ces clips tout moches et les missions qu'ils sont supposés introduire. Bref, ça commence bien.
Mais la suite est pire. Dans le rôle d'un Maraudeur, à savoir un super soldat d'infanterie qui agit seul contre 300 ennemis sans même suer des aisselles, vous allez devoir en découdre avec des centaines d'arachnides, défendant souvent des créatures plus volumineuses. Comment décrire l'action du jeu ? En gros, imaginez des centaines d'ennemis, dépourvus d'IA - mais vu le contexte on n'en fera pas une histoire - et vous au milieu ou en face. Et là, vous commencez à faire feu pour ne plus vous arrêter. Jamais. Au début c'est plutôt marrant, je le concède, mais alors au bout de 20 minutes, on réalise avec effroi à quel point tout cela est creux. Certes, il y a des objectifs, mais qu'est-ce qu'on s'en tamponne d'aller chercher un truc ou de ramener un bidule.
Décalquer des mites géantes à la mitrailleuse est non seulement ennuyeux à mourir, mais ça peut aussi devenir un calvaire dès lors que vous êtes encerclé. Là, on atteint des sommets dans le grand n'importe quoi, on ne voit plus rien, on ne comprend plus rien, on ne fait que garder l'index bien collé au bouton de la souris jusqu'à ce qu'on ait nettoyé la zone. Et là, horreur, c'est le respawn magique. Toutes ces saletés reviennent à la charge. Une situation que l'on vit fréquemment à partir du moment où l'on doit se débarrasser d'une sorte de boss. Genre une bestiole quelconque qui a pour habitude de cracher du plasma ou du feu. Au final, tout ce que l'on voit à l'écran, ce sont des pattes d'araignées géantes qui vous submergent, les flammes de votre flingue, le plasma qui vous tombe sur la tronche et l'écran de votre combinaison qui s'illumine de bleu ou de rouge. Je le répète, la meilleure façon de qualifier le gameplay de Starship Troopers est : n'importe nawak. Et si vous n'êtes pas convaincu, je vous en prie, jetez un oeil aux screenshots et imaginez tout ça en train de bouger. Je vous laisse envisager à quoi ressemble une mission d'escorte dans ce foutoir. "Bonjour c'est vous que je dois escorter ? Ah non, moi je suis un cadavre, l'escorte c'est 145 araignées plus loin"
Pourtant, on peut encore aggraver les choses si on s'attaque à la réalisation. En commençant par les bugs de clipping qui vous font adhérer aux parois de manière irréversible, ne vous laissant comme autre choix que de recharger le niveau. Trop super ça comme petit bonus, le mode glu. Globalement, on peut apprécier la performance du moteur qui affiche effectivement des centaines d'ennemis à l'écran. Soit, on ne reviendra pas dessus, mais d'abord ce sont tous les mêmes et en plus ils sont moches. Et si le nombre de bestioles est élevé, on le paie. D'abord il a fallu faire nombre de concessions. Ainsi, en dépit de sa gourmandise en termes de configuration, le moteur de Starship Troopers fait de la peine avec ses textures simplistes, son absence totale de physique et surtout ses chutes de frame rate qui ne font que compliquer les choses pour le joueur. Quant au level design, il fait honneur à la planète où se déroule l'action en brillant par son caractère désertique. Pour couronner le tout, les bugs de collision évoqués plus haut ne sont pas les seules failles du jeu qui fait montre d'une stabilité très relative. On terminera ce chapitre avec la bande-son, dont le mixage est simplement honteux, les voix couvrant les armes, quand ce n'est pas le contraire. Même les hordes d'arachnides font à peine plus de bruit qu'un seul criquet un soir d'été. De toutes façons, l'ambiance sonore est inexistante, ce qui ne fait que réduire encore la possibilité de se plonger dans l'action. Et vu le niveau, vouloir plonger là-dedans, c'est aussi suicidaire que de sauter dans un dé à coudre.
- Graphismes11/20
Le moteur ne sent pas le neuf et si le pari d'afficher des centaines de créatures est tenu, c'est au détriment de la qualité graphique globale. Starship Troopers n'est pas laid, mais il est froid. Les modèles 3D sont grossiers, les textures peu détaillées et les performances franchement discutables.
- Jouabilité6/20
Si vous cherchez un shooter limité, vous l'avez trouvé. Le principe est bon, malheureusement il est mal appliqué par Strangelite qui nous propose de nous plonger au milieu d'une kyrielle de bestioles dans un indicible chaos. On ne voit rien, on ne sait même plus dans quelle direction on avance. Et même quand on comprend ce que l'on fait, c'est pour mieux réaliser à quel point c'est sans intérêt.
- Durée de vie12/20
On peut reconnaître une durée de vie assez longue au titre, en partie due à son niveau de difficulté. Encore faut-il avoir envie de poursuivre l'aventure.
- Bande son5/20
Même si la bande-son n'était pas mixée avec les pieds, son contenu est trop pauvre pour convaincre. Les effets n'ont aucune crédibilité et les doublages manquent sérieusement de conviction. De manière générale, on souffre trop souvent de l'absence d'ambiance sonore, ce qui contribue à rendre l'action inconséquente.
- Scénario5/20
Avoir un scénario squelettique n'est pas rare dans les FPS, mais au moins fait-on un effort de cohérence. Nous refiler des extraits du film pour mettre en scène une histoire qui se déroule 5 ans après, faut peut-être pas pousser non plus.
Starship Troopers est un pur concentré de bonheur, à condition évidemment d'aimer 3 types de situations. Premièrement : tirer sans discontinuer sur un tas d'ennemis clonés ; deuxièmement : être plongé au milieu d'un tas d'ennemis clonés au point de ne plus distinguer que 249 paires de pattes et un tir de plasma en provenance d'une plus grosse paire de pattes ; troisièmement : l'une ou l'autre des deux précédent propositions mais en restant collé dans un morceau de décor. Alors franchement, si ça vous botte pas, moi je comprends pas.