En parallèle du développement du FPS post-apocalyptique RAGE 2, le studio Avalanche situé à Stockholm penche sur les nouvelles aventures de Rico Rodriguez. Deux ans après son périple sur l'île de Medici, le héros de la franchise Just Cause reprend du service dans un quatrième épisode toujours plus furieux sobrement intitulé Just Cause 4. La formule est-elle arrivée au sommet de son évolution ? Réponse explosive au cœur d'une tornade.
Viva la revolución
Rico Rodriguez et sa célèbre veste en cuir signent un retour virevoltant. Dans cette suite directe, notre héros et son armée du Chaos s'attaquent à l'organisation La Main Noire dans l'espoir de contrecarrer les plans d'Oscar Espinosa. Après une attaque servant de tutoriel et d'introduction aux armes météorologiques, l'histoire démarre pied au plancher sur une île de Solis en proie à la terreur.
La franchise se démarque par la légèreté de son propos et son ton décomplexé rappelant les grandes heures des films d'action et leurs héros "reaganien" crachant plombs et punchlines sur des ennemis en surnombre. Et Just Cause 4 fait honneur à ses aînés au cours d'une aventure Over the Top allaitée à la testostérone et interprétée par une ribambelle de gueules cassées typiques du cinéma de genre. Certe anecdotique, ce récit ponctué de cinématiques éparses cimentent les pérégrinations de Rico et justifient l'épique d'un scénario rocambolesque qui parvient à étonner grâce à ses multiples rebondissements et ses scènes inattendues.
L'île de Solis joue un rôle capital dans ce quatrième épisode de la saga. Ce paradis sud-américain se révolte et vit au rythme du conflit. La mission de Rico Rodriguez est limpide. Détruire l'arme de destruction massive de la Main Noire et éliminer Oscar Espinosa. Pour ce faire, notre héros se doit de libérer les régions une à une.
Une ligne de front représente la progression de l'armée du Chaos et les points de tension. Mission après mission, l'étau se desserre ce qui offre de multiples opportunités pour mettre à mal l'organisation. Le joueur est ici libre de ses mouvements et parcourt la carte comme bon lui semble pour remplir ses objectifs… des missions trop peu variées (rechercher, détruire, protéger, escorter) à l’origine d’une répétitivité certaine après plusieurs heures de jeu. Seule l'avancée de l'armée du Chaos symbolisée par ce système de fronts freine la progression. Et cette progression rime avec destruction, celle des bâtiments et véhicules ennemis en échange d'unités de relève fort utiles pour libérer le pays. Just Cause 4 est une histoire s'écrivant par les actes. Il souffle sur Solis un vent libertaire qui n'est pas pour nous déplaire.
Une mission de recherche et de destruction
Toujours plus loin, plus fort, plus vite…
La franchise des studios Avalanche porte bien son nom et cette quatrième itération repousse toujours plus loin les limites d’une formule prônant le plaisir de jeu avant la vraisemblance. Rico Rodriguez défie les lois universelles de la pesanteur avec une facilité déconcertante. Quelques minutes suffisent pour prendre en mains le moyen de transport préféré de ce héros hors normes… à savoir le grappin iconique de la saga accompagné des inséparables parachute et wingsuit qui complètent ce trio aérien toujours aussi efficace et accessible. Le plaisir de planer et de s'agripper n’importe où n’a rien perdu de sa superbe bien au contraire. Un sentiment grisant de liberté émane de Just Cause 4 et propulse les joueurs à plusieurs mètres du sol pour leur plus grand plaisir.
La formule évolue avec son temps et ne se contente pas de recycler le gameplay du troisième opus. Premier élément à profiter d’une amélioration, le grappin qui accueille trois modificateurs (ballon, treuil et propulseur) et de nombreuses propriétés pour chacun d’entre eux à débloquer en réalisant des missions secondaires. Malheureusement, cette mise à jour se limite rapidement à des phases d’expérimentation aussi fun que marginales. Dans les faits, Rico exploite ces nouveautés avec parcimonie et principalement lors des affrontements ; plusieurs propulseurs bien placés détruisant un hélicoptère de combat en moins de temps qu’il n'en faut pour le dire. Notre héros a tendance alors à privilégier la poudre pour éliminer la Main Noire et se frayer un chemin sur l’île de Solis.
Les gunfights gagnent en intensité et en explosivité. Le level design est pensé pour provoquer des réactions en chaîne aussi démentes que dévastatrices et profiter des aptitudes du grappin. Rico Rodriguez, personnage à la gâchette facile, est un partisan de la pyrotechnie à outrance et du nettoyage par le vide. Et l’ajout d’un tir secondaire impacte grandement ces phases constituant le coeur de l’expérience. Le ressenti armes en main témoigne d’une volonté de débrider l’action afin de la rendre aussi attractive et dynamique que possible. Cependant, le manque chronique de munitions entrave souvent les velléités guerrières de Rico et de son armée du Chaos. Courir après une arme chargée n’est pas rare et casse le rythme des affrontements.
Les véhicules deviennent indispensables dans ce Just Cause 4 et diffusent plusieurs radios qui agrémentent les balades. Facilement maniables dans la majorité des cas, ces derniers permettent au héros de mettre Solis à feu et à sang sur terre, mer et dans les airs. De plus, les voyages rapides assurent un transport sans danger aux quatre coins de la carte en un minimum de temps, de quoi optimiser le temps de jeu. Toutefois, l’ajout majeur de cet opus sur lequel repose la campagne de communication autour du titre réside dans les intempéries qui frappent l’île et plus particulièrement les armes météorologiques tactiques. Malheureusement, cette feature prometteuse ne prodigue que trop rarement l’effet escompté. Au-delà de l’aspect visuel qui laisse à désirer, les tornades et les tempêtes impressionnent uniquement lors des missions scénarisées. Le reste du temps, elles vaquent à leurs occupations, souvent à plusieurs lieues sans réel effet sur le gameplay.
A la poursuite d'une tornade
Une tempête technique
La série ne s’est jamais imposée comme un modèle de perfection visuelle et de photoréalisme, et Just Cause 4 poursuit sur cette lancée. Pourtant, ce TPS exploite l’APEX (Avalanche Open World Engine) développé en interne pour bâtir une île de Solis immense mettant l’accent sur le dépaysement à travers plusieurs environnements à découvrir. Monts enneigés, vallées arides, plages sud-américaines et forêts tropicales composent une carte postale exotique qui pique la curiosité. Ces biomes sont également peuplés de différents animaux sans impact sur le gameplay. De plus, la météo dynamique et le cycle jour/nuit complètent ce tableau et y ajoutent de la vie pour un résultat honorable à défaut de couper le souffle.
Malgré toutes ces bonnes intentions et des environnements partiellement destructibles, Just Cause 4 pêche dans la réalisation. L’ensoleillement trop prononcé brûle toutes les couleurs à l’écran. Les tonalités sont tout simplement saturées de lumière ce qui gâche certains visuels. Et la technique dans son ensemble souffle le chaud et le froid sur l’expérience. Si les temps de chargement réduits sont à saluer, l’apparition d’éléments de décors, l'aliasing excessif, les bugs divers et variées et les quelques crashs subis sur la version pré-patch confirment un manque notable de finitions et donc probablement de temps pour peaufiner le titre avec pour preuve une réutilisation à outrance des mêmes assets pour composer les bases et autres lieux stratégiques de la Main Noire.
Sur terre, sur mer et dans les airs
Points forts
- Un scénario décomplexé hommage aux films d'action 90's...
- La liberté de progression dans l'aventure
- La diversité des environnements visités
- Les gunfights explosifs et intenses
- Le sentiment de liberté dans les déplacements
- Les modifications du grappin et la créativité qui s'en dégage
- Le système de lignes de front
Points faibles
- … mais anecdotique
- Des visuels saturés par une luminosité trop vive
- L'absence de vie dans les décors
- Une aventure répétitive
- Le manque de variétés des missions
- Une technique en dents de scie (aliasing, crashs…)
Just Cause 4 est le digne héritier d’une saga débutée en 2006. Il émane de ce TPS en monde ouvert un sentiment de liberté enivrant propre à la série. Le titre d’Avalanche Studios conserve toutes les forces de la franchise, et certaines de ses faiblesses, mais améliore sa formule bac à sable. Les affrontements gagnent en intensité tandis que la carte tient un rôle central dans la progression. Cependant, les changements météorologiques n’impactent que trop peu une expérience au demeurant répétitive. Et si l’île de Solis est bel et bien une source de dépaysement, celle-ci souffre d’une technique ballottée par les intempéries qui ne rend pas justice à cette épopée décomplexée et libertaire incarnée par Rico Rodriguez.