Né d’un père américain et d’une mère française à la suite de la Première Guerre Mondiale, le héros de The Piano se retrouve piégé dans une partition cauchemardesque de sa vie où il se retrouve accusé de la mort de ses frères, tous trois des pianistes renommés. Perdu dans les rues d’un Paris altéré, le jeune héros se retrouve persécuté par des ombres inquiétantes tandis qu’il cherche la vérité sur l’origine de tous ces sombres événements. Dans cette histoire qui narre le destin d’une fratrie légendaire du clavier, c’est au joueur d’utiliser le sien afin de sortir John de son labyrinthe émotionnel. Avec tout le manque de virtuosité des laissés-pour-compte.
Paris à tout prix
À l’intérieur d’un Paris cauchemardesque, le héros du jeu, prénommé John, doit éviter des entités humanoïdes qui se baladent dans les rues jusqu’à trouver des sphères noires qui font office de téléporteur. Dès que la clé de sol ouvre la première porte, The Piano enseigne ses règles qui nécessitent de la part du joueur une certaine ouverture d’esprit. Ici, différentes réalités entrent en collision. Les repères mettent donc du temps à arriver, d’autant plus que les mécaniques de gameplay sont assez nombreuses. Dans ce thriller psychologique qui emprunte beaucoup au genre du survival-horror, il faut aussi bien inspecter les longues ruelles à la recherche d’indices, combiner des objets afin de réussir des énigmes, assembler des observations entre elles dans le but de trouver des réponses, ou encore de s’infiltrer dans les décors en évitant les rondes d’ennemis fantomatiques et passer au chapitre suivant.
Dans la peau de John, le joueur part donc à la recherche d’éléments pouvant l’aider dans sa progression. Il est par exemple exigé de trouver un pied de biche qui permet d’ouvrir la portière d’une voiture dans laquelle il est nécessaire de réparer le levier de vitesse, ou encore de reconstituer une mélodie au piano (objet qui sert aussi de point de sauvegarde) en fonction des notes peintes sur des murs. Au milieu de ces actions se cachent des souvenirs qui donnent des informations sur l’histoire du titre, et sur le rôle véritable du personnage incarné. Les machines à écrire qui flottent et brillent dans les rues doivent donc attirer l’attention. Les séquences d’infiltration, plutôt nombreuses, sont relativement simples grâce à des adversaires aussi aveugles que peu combatifs. De manière générale, les monstres ne posent pas de problème, hormis peut-être les fonceurs qui émanent des nuages de fumée. Courir tout droit vers l’objectif en essayant d’éviter de croiser le chemin d’une entité est suffisant dans la plupart des situations rencontrées.
Opéra broke
Il est facile d’identifier une inspiration venue de Silent Hill dans la portée de The Piano, puisque les décors urbains inquiétants sont couverts par une musique dissonante. Le fait que des entités indestructibles se déplacent dans les rues et que des corps morts cachés sous des draps abondent sur les pavés aide également à faire ce rapprochement, au niveau de l’ambiance. La comparaison avec l’inoubliable série de Konami s’arrête néanmoins ici, tant ce simulateur de marche n’arrive pas à imposer ses choix de design. À la manière d’un Cthulhu, John dispose par exemple d’une jauge de résistance mentale qui chute lorsqu’il rencontre d’effrayantes entités. N’espérez pas d’effets particuliers lorsqu’elle est vidée puisqu’elle fonctionne comme une barre de santé, et mène donc directement vers un précédent checkpoint lorsqu’elle arrive à zéro. Quelques injections de Laudanum suffisent à retrouver ses esprits, grâce à des doses disséminées un peu partout dans les allées parisiennes. John dispose également d’un pouvoir sensoriel lui donnant accès à une autre réalité au sein des niveaux, et ainsi faire apparaître de nouveaux éléments, voire rendre certaines zones accessibles. Le fait que cette compétence vide elle aussi une jauge qui se recharge petit à petit rend l’exploration légèrement laborieuse.
En évitant de trop noircir le tableau puisqu’il s’agit d’un petit studio qui n’a clairement pas les moyens humains de faire comme les plus grands, The Piano semble être sorti à l’état de prototype. Les modèles 3D sommaires baignent dans des décors dont la modélisation prête à sourire en 2018. Les animations sont datées, les textures sont floues, les effets spéciaux absents, et même la musique d’ambiance du premier niveau ne boucle pas de manière correcte. Il est également regrettable de constater que pour un jeu qui se veut narratif, les cutscenes sont filmées sans soin particulier au niveau du cadrage. Il nous est également impossible de passer sous silence les divers bugs, qui vont de l’artefact visuel à la collision oubliée sur une route qui empêche le joueur d’avancer, sans aucune raison apparente. Le scénario, s’il est plutôt bien écrit, n’est pas une raison suffisante pour se lancer dans cette aventure bien trop grignotée par des errances à la fois techniques et mécaniques.
Points forts
- Une histoire pas inintéressante
- Quelques musiques réussies
Points faibles
- Une gameplay qui se disperse et qui n’apporte rien de vraiment satisfaisant
- Raté techniquement et artistiquement
- De nombreux bugs (visuels, et de collision)
- Intégralement en Anglais
La mélodie de The Piano a bien du mal à se faire entendre au milieu de tout le bruit de ses imperfections. Le titre échoue à mener le joueur là où il le souhaite. S’essayant à diverses mécaniques allant de l’infiltration à l’enquête, de la résistance mentale aux pouvoirs liés à des artefacts, The Piano est en fait très dispersé et peine à offrir une expérience satisfaisante dans chacun des domaines qu’il essaye de couvrir. Tout repose au final sur l’histoire dépeinte au fil des indices trouvés, mais cela n’est malheureusement pas suffisant pour entrer dans la danse et tromper l’ennui. Une monotonie qu’aucun quick time event - utilisé lors d’affrontements - ne vient rompre pendant les interminables déambulations.