Encensé par la critique après un premier épisode de haute volée, Xenoblade Chronicles revient avec un deuxième opus très attendu. Ce dernier reprend une orientation narrative là où le spin-off X mettait plutôt le gameplay en avant. Est-ce un retour réussi ? Là est la vraie question.
Ce test est garanti sans spoiler. Entendez par là que nous n’y parlons pas d’éléments scénaristiques avancés ni de features de gameplay qui ne sont pas déjà connues avant la sortie du jeu. Ainsi, vous garderez tout le plaisir de la découverte. Cela dit, soyez bien conscient que si vous vous rendez sur la visionneuse, vous risquez de trouver des images qui ne sont pas présentes dans le test et qui comportent des éléments qui peuvent être considérés comme du spoil. Vous êtes prévenus.
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Malgré son statut de suite, Xenoblade Chronicles 2 ne reprend pas directement l’univers du premier opus, même si l'on retrouve certaines thématiques. L’histoire se déroule sur Alrest, un monde constitué de Titans qui se déplacent sur des océans de nuages. Tous les êtres vivants habitent sur ces Titans, que ce soit la faune sauvage ou les races plus évoluées qui ont pu bâtir des villes. Le héros principal de l’aventure se nomme Rex, un adolescent qui vit principalement à la Guilde d’Argentum de son métier de récupérateur d’objets (voyez ça comme un plongeur, dans les mers de nuages). Alors que rien ne le prédestine à une vie fantastique, il va rapidement accepter un job plutôt secret qui aura un impact radical sur son futur. Voilà tout ce que nous pouvons dire sur le pitch initial sans trop en révéler. Rapidement, Rex découvre de près le rôle des Lames, des entités qui peuvent se lier à des combattants (alors appelés Pilotes), leur fournissant leur arme et leurs capacités. On en arrive tout naturellement à la première véritable force de Xenoblade Chronicles 2.
Un univers exceptionnel !
Bien que dans les J-RPG, les créateurs essaient toujours d’établir un lien entre le gameplay et l’univers, rares sont ceux qui le font aussi bien que Xenoblade Chronicles 2. Aucun élément ne semble tomber d’un arbre et le lien entre le Pilote et sa/ses Lame(s) a autant d’importance dans le scénario que dans les combats. Mais la densité de l’univers de Xenoblade Chronicles 2 va bien au-delà de cela. Titans, Lames, Pilotes, exploration des mondes, tous ces éléments sont liés dans une histoire qui mêle politique et philosophie avec une pertinence rarement atteinte dans le genre. Croyez-nous, même si le titre est incroyable bavard, vous ne zapperez pas un dialogue ! Que ce soit les cinématiques les plus importantes ou les balbutiements du poivrot du coin, chaque propos approfondit le contexte, ce qui donne à XC2 une profondeur d’une densité exceptionnelle.
La seule ombre au tableau, et pas des moindres, est l’incroyable maladresse des scènes cinématiques. D’un côté, celles qui utilisent le moteur du jeu choquent par leurs animations archaïques, gâchant prodigieusement une grande partie de la mise en scène. Dur de prendre au sérieux des personnages qui se tournent comme des robots et répètent les mêmes mouvements dans des contextes pourtant différents. On frôle parfois le ridicule alors qu’encore une fois, le propos est intéressant. Quant aux cinématiques animées, à l’heure d’écriture du test, elles sont tout simplement buggées, pour la plupart. Allez savoir comment cela a pu arriver, mais le nivelage du son est catastrophique, les dialogues étant couverts par la musique. Malgré de jolies chorégraphies de combat, c’est une nouvelle fois la mise en scène qui en prend un coup. Pire, certaines cinématiques sont mal encodées avec, un vilain décalage sonore. Si l'on suppose fortement que cela sera corrigé dans le futur, cela reste notable au moment du test. A noter que ce test a été réalisé avec les voix anglaises, qui sont d’ailleurs de bonnes factures (les voix japonaises seront disponibles en patch à la sortie).
Vaste, grandiose, magnif… oh.
On le sait avec le premier opus, XC2 propose de gigantesques zones ouvertes aux dimensions impressionnantes. Que ce soit dans leur largeur ou leur verticalité, ces environnements à dos de Titans sont tout ce qu’on attendait du titre en matière de superficie, avec une distance d’affichage qui force le respect. Mais l’exploit de XC2, c’est d’avoir réussi à remplir ces larges espaces grâce à un excellent world design, qui va de pair avec l’univers et l’importance des Titans dans le scénario. Chaque lac, chaque colline, chaque bâtiment semble parfaitement ancré dans les lieux, à tel point qu’on a rarement besoin de la carte pour se déplacer. La faune est parfaitement bien incorporée, vivant par groupe en toute logique. Il n’est pas rare de voir de gigantesques oiseaux se poser sur le flanc des montagnes, offrant d’ailleurs quelques ballets aériens qui s’ajoutent au panorama.
Mais encore une fois, il faut apporter un sacré bémol à la beauté prétendue de Xenoblade Chronicles 2. Les ambitions de Monolith Soft dépassent largement les capacités de la Switch, et cette superbe distance d’affichage existe au détriment de la technique, à un point qui annihile l’idée de balancer un potentiel « ok mais on s’en fiche ». Dans le cas présent, l’exploration est censée nous offrir monts et merveilles mais il est impossible de faire fi de la résolution affreusement basse (et en dents de scie), de l’aliasing catastropique et des ralentissements intempestifs. Les chutes de framerate sont régulières il va falloir avoir un esprit bien compatissant pour apprécier Xenoblade Chronicles 2 à ce niveau. Si le Titan Gormott est celui qui s’en tire le mieux par son environnement boisé et floral, d’autres « continents » plus avancés dans l’histoire , bien plus mornes dans leur structure, en pâtissent énormément. Vraiment dommage.
Xenoblade Chronicles 2 : Exploration de Gormott
Combat !
Avant même de commencer à jouer, nous étions pour ainsi dire dubitatifs sur le rendu des combats dans Xenoblade Chronicles 2. Les premières vidéos montraient un système complexe avec beaucoup d’indications à l’écran et il était difficile de discerner quoi que ce soit. Bonne nouvelle, manette en mains, c’est plus clair qu’il n’y paraît de prime abord. Vous contrôlez un des trois personnages, chacun étant capable d'interchanger trois Lames pendant les affrontements. Chaque Lame disposant d’un élément, vous pouvez initier des combinaisons avec vos compagnons selon un arbre qui permet de sceller des compétences ennemies selon l’élément utilisé. Si vous arrivez à enchaîner trois Combos de Lame, vous placez un orbe élémentaire sur l’ennemi (en lui infligeant de gros dégâts), qui devient alors moins sensible à cet élément, vous obligeant à varier les combinaisons.
A cela s’ajoute une jauge de groupe qui une fois remplie permet de réaliser un Enchaînement. Le temps s’arrête alors et chacun de vos personnages attaque tour à tour avec le Combo de Lame de votre choix. Si vous avez placé des orbes sur l’adversaire, vous pouvez les casser plus rapidement en utilisant l’élément inverse (il peut y avoir plusieurs orbes sur un ennemi). Chaque fois que vous cassez un orbe, vous gagnez un tour supplémentaire d'enchaînement et boostez le multiplicateur de dégâts. Il s’agit là d’un concept aux résultats exponentielles qui se doit d’être parfaitement maîtrisé pour les combats les plus importants. Mais XC2 va bien au-delà de ça avec un autre système de combo qui permet de déséquilibrer, puis faire tomber l’ennemi pour ensuite l’envoyer dans les airs avant de le rabattre sur le sol, quatre phases qui doivent être enchaînées dans l’ordre pour un maximum d’efficacité et qui dépendent totalement des compétences que vous utilisez. Enfin, vos compétences (appelés Arts) se rechargent plus ou moins vite selon les situations et vous pouvez les « feinter » avec un timing précis pour booster vos dégâts.
Si la maîtrise du système de combat vous prendra quelques dizaines d’heures, elle s’avère aussi gratifiante qu’exigeante. Quand vous parvenez à varier attaque et soin, mettant l’adversaire au sol à plusieurs reprises tout en lui plaçant trois ou quatre orbes avant de commencer votre enchaînement, vous savez que vous avez réussi votre affaire. Toutefois, il faut constamment rester vigilant car une mort peut arriver très rapidement si on n’est pas attentif. Si votre tank ne prend pas l’aggro, autant dire que vous êtes fichus et il suffit d’une ou deux mandales pour vous faire mordre la poussière. Le suspense est constant lors des affrontements les plus ardus, une très bonne nouvelle. Malheureusement, le manque de lisibilité peut être vraiment pénible par moment, dû à un HUD des plus invasifs (bien que nécessaire), mais aussi dû aux limitations techniques de la Nintendo Switch et donc, à une résolution basse.
Autre point, l’intelligence artificielle de vos compagnons peut parfois vous mettre dans la panade. De base, elle est pourtant performante, se plaçant plutôt bien autour de l’ennemi et ramassant elle-même les fioles de vie quand nécessaire. Malheureusement, en combat, elle ne comprend pas vraiment les aléas dus au terrain et peut parfois chuter dans un précipice bêtement, annihilant vos chances de victoire. Dans un jeu aussi vertical où l'on ne peut pas toujours choisir où l'on va affronter l’ennemi, c’est plus que dommageable. Pire encore, l’IA n’a aucune conscience de la présence de marécages empoisonnés, pourtant fréquents, rendant ces zones pratiquement impraticables en combat. Bref, un problème récurrent plus que navrant pour un jeu de la dimension de Xenoblade Chronicles 2.
Xenoblade Chronicles 2 : Sus au crapaud !
Quand les « à-côtés » représentent 80 % du jeu
Même en dehors des combats, vous avez beaucoup de choses à faire dans Xenoblade Chronicles 2. D’une, la gestion de vos Lames a une importance primordiale sur pratiquement tous les aspects du jeu. Pour monter leurs compétences via leur « sociogramme », vous devez effectuer des tâches d’une variété rare, qui vont de l’utilisation de compétences au ramassage de fioles de vie, en passant par la découverte de zone secrète, la réussite de quêtes personnelles (scénarisées), ou différents objectifs thématiques comme devoir parler à des personnages de race spécifique, par exemple. Si le nombre de Lames que l’on peut invoquer (via des objets trouvés en combat ou dans des trésors) est à peu de choses près infini, il existe une quarantaine de Lames Rares qui disposent d’un design et voice acting spécifique, de quêtes perso et de compétences uniques. Sans exagérer, vous pouvez facilement passer des centaines d’heures à améliorer votre équipe dans Xenoblade Chronicles 2, un jeu qui possède d’ailleurs de nombreux ennemis à affronter post-game.
Mais l’évolution de vos Lames a aussi un impact sur l’exploration, une grande partie des trésors et passages secrets ne s’ouvrant que si vous disposez des bonnes compétences de terrain sur vos Lames. Puisque ces compétences s’additionnent, il n’est pas rare de passer par le menu pour changer les Lames équipées afin de s’ouvrir un passage, ce qui nous fait toutefois regretter le manque d’ergonomie desdits menus, franchement mal fichus. Autre point, vous débloquez assez rapidement la possibilité d’envoyer des équipes de Lames parmi celles que vous n’utilisez pas, pour des missions qui rapportent objets, argent et autres joyeusetés. Un système qui est lui aussi lié au scénario et très bien incorporé au jeu, d’autant que certaines compétences de Lames ne peuvent s’obtenir que par ce moyen.
Enfin, sachez que Xenoblade Chronicles 2 dispose d’un système plutôt intéressant d’évolution sociale sur les différents Titans. En effectuant des quêtes et en achetant des produits en magasin, vous aidez les villes à prospérer, ce qui ouvre de nouvelles quêtes (notamment de mercenaires) et déclenche l’arrivée de nouvelles marchandises à vendre. Vous pouvez même devenir propriétaire de magasins en achetant des exemplaires de tous leurs produits, ce qui vous octroie des capacités passives ! Ca vous prendra du temps, mais croyez-nous, ça vaut le coup.
Il y aurait encore beaucoup à dire sur le contenu de XC2, notamment les quelques « mini-jeux » comme le système de récupération ou encore le Tiger Tiger, que je vous laisse découvrir par vous-même. Quoi qu’il en soit, s’il faut bien 70 heures pour finir Xenoblade Chronicles 2 en ligne droite, il n’y a aucun intérêt à tracer la route et ce sont justement ces « à-côtés » qui font tout le sel de l’aventure. D’une durée de vie exceptionnelle, il squattera votre Nintendo Switch pendant des centaines d’heures, au format portable ou non, la possibilité de sauvegarder à tout moment facilitant le jeu en déplacement soit dit en passant.
Pour finir, abordons une autre grande qualité de Xenoblade Chronicles 2 : la bande originale est tout simplement exceptionnelle ! Des morceaux épiques aux accompagnements d’exploration, on est constamment subjugué par le talent de Yasunori Mitsuda, avec une mention spéciale pour les nombreux chants. Un travail impressionnant qui continue d’appuyer un titre qui fait tout dans des dimensions exagérées. Les petites variations selon l’heure de la journée font leur effet, il n’y a pas à dire...
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Points forts
- Un univers d’une incroyable densité
- Des zones vastes, sans être vides de sens
- Les combats, techniques, intenses et récompensateurs
- L’exploration, pleine de secrets
- Les personnages attachants (les Nopons en tête)
- Une difficulté mesurée
- La durée de vie absolument titanesque
- Le voice acting très complet, y compris des Lames
- Une des meilleures bandes originales de ces dernières années
Points faibles
- La résolution, allant du passable au catastrophique
- Visuellement tellement en deçà qu’il est parfois illisible en combat
- Les cinématiques (très) mal mises en scène, des problèmes de son
- L’IA des alliés qui peut ruiner quelques combats en zone dangereuse
- Le chapitre 8
- Les menus qui manquent d’ergonomie
- Des premières heures poussives à cause des tutoriels intempestifs
Xenoblade Chronicles 2 est un jeu qui va diviser. S’il possède certaines qualités dignes d’un chef-d’oeuvre du genre, ses défauts posent de vrais problèmes qui ne peuvent pas être ignorés. D’une densité exceptionnelle, le titre mêle savamment son gameplay et son contexte pour plonger le joueur dans un monde unique, dont la grandeur des environnements ne fait qu’appuyer sa profondeur. Avec un système de combat vraiment gratifiant, bien que complexe à maîtriser, il offre d’incroyables sensations et nul doute que vous vous souviendrez de votre expérience. Toutefois, la Nintendo Switch n’a pas les épaules pour un jeu aussi exigeant et les environnements titanesques de Xenoblade se font au détriment de la résolution et des graphismes, voire des performances avec des chutes de framerate vertigineuses. Toutefois, nous vous invitons vivement à passer outre du mieux que vous le pouvez, parce qu’il serait dommage de rater ce que nous considérons comme l’un des univers les plus grandioses de ces dernières années