Voilà un peu plus de deux ans que Tekken 7 nargue les amateurs de jeux de combat en trois dimensions. Deux longues années, pendant lesquelles il a fallu se satisfaire de vidéos de gameplay postées sur internet par Bandai Namco, la team Tekken ou les joueurs professionnels, qui ont participé à la conception de ce nouvel opus. D'une certaine manière, on aurait presque oublié qu'il n'était toujours pas sorti, tiens. Mais heureusement, les choses ont changé il y a quelques jours lorsque nous avons reçu notre copie du jeu, pour notre test. Et vous pouvez en être certain, après avoir lu ce test, vous aurez hâte d'avoir la vôtre.
Les jeux de combat en trois dimensions se font rares de nos jours. Nés dans le milieu des années 90, alors que les consoles de salon comme la PlayStation étaient désormais suffisamment costaudes pour entrer dans cette nouvelle dimension, le genre a fleuri avant de perdre quelques pétales... et finalement disparaître presque intégralement. Il faut dire que dans le cas du VS Fighting, se déplacer et combattre dans un environnement 3D peut poser de nombreux soucis de gameplay et peu nombreux sont les titres à avoir su maîtriser ce nouvel espace. Parmi eux, Soul Calibur bien entendu, mais aussi et surtout Tekken, une autre série de Bandai Namco. Réputée pour ces combos interminables, la série avait perdu un peu de son prestige après la sortie de Tekken 6. Mais Katsuhiro Harada, le père spirituel de la saga aux poings de fer, est bien décidé à replacer son bébé sur le devant de la scène et a travaillé pendant des années, avec un perfectionnisme typiquement nippon, sur ce qui pourrait bien être l'une des meilleures moutures de son jeu de combat.
Jin tonic
Depuis ses premiers jours, la série Tekken souffre de nombreux clichés dont elle a du mal à se défaire. Il faut dire que Tekken 5, et surtout Tekken 6, n'ont pas aidé. Avec ses combos à rallonge, ses juggles interminables et une certaine accessibilité, le titre n'a pas cherché à s'éloigner de ces stéréotypes, il les a saisi à bras le corps, avec des résultats discutables. Tekken 6 n'a pas été l'opus le plus apprécié de la série, y compris par les fans de la première heure. Sa suite devait donc réussir à convaincre les fans et le grand public, et redevenir le jeu de combat fun et accessible, mais aussi hyper technique et impressionnant. Mission réussie, et il aura finalement suffi de peu.
Tekken 7 dit donc au revoir aux combos infinis pour revenir à quelque chose de plus pur, de plus brut, plus proche du feeling que pouvait procurer Tekken 3. Les combattants semblent plus lourds, ou en tout cas moins léger (la nuance est importante) et reviennent plus rapidement au sol. Certains combattants ont perdu quelques uns de leurs coups qui permettaient justement de maintenir facilement leurs adversaires dans les airs, au profit d'autres attaques capables d'éjecter leurs victimes à plusieurs mètres. Dans les airs, les hitbox semblent plus fines qu'auparavant, demandant aux joueurs un meilleur timing et de meilleurs choix de coup pour réussir ces fameux air combos. La résultante de tout ceci, c'est que les enchaînements sont certes plus courts mais aussi plus violents ; et surtout, les long juggles demanderont une plus grande maîtrise du jeu, là où un Tekken 6 se voulait plutôt généreux.
Le jeu se veut donc plus technique, mais aussi plus nerveux, avec un vrai travail effectué sur la défense et les possibilités de contre-attaques. Là où l'on attendait trop souvent une faille dans l’enchaînement d'un combo adversaire, misant sur une bonne garde, Tekken 7 introduit le système de Power Crush, qui permettra aux meilleurs joueurs de créer eux-mêmes des fenêtres d'ouverture... et de punir les joueurs amateurs de button-mashing et autres spécialistes du « j'appuie sur tous les boutons on verra bien s'il se passe quelque chose ». Ces coups, identifiés par une icône rouge dans la liste des attaques de chaque personnage, permettent au combattant qui les utilisent d'absorber une attaque et de frapper alors même que l'adversaire attaque. Ce qui signifie qu'en utilisant un Power Crush, le joueur reçoit bien les dégâts du coup encaissé, mais il n'est touché par aucune forme d'impact ou de stun, l'animation faisant fi de l'attaque ennemie, lui permettant d'infliger un contre sévère qui permet de renverser le combat. Cela peut paraître exagéré sur le papier, mais dans la pratique les choses sont plus compliquées. D'abord parce qu'il faut une véritable science du timing pour le déclencher, ensuite parce que les Power Crush ne fonctionnent que sur les coups medium et high. Ce qui signifie qu'il est possible de les contrer avec un coup low, ou même une chope. C'est là que le mindgame prend toute son importance puisqu'il faudra se tenir près à être contré. Varier ses attaques sera d'autant plus important dans Tekken 7...
D'ailleurs côté variété, le titre a enrichi le système de Rage de l'opus précédent. Avec R1/RB, il est possible de lancer un Rage Art, sorte de Super Attaque particulièrement violente, mais aussi d'utiliser le Rage Drive, un coup unique qui a la capacité de briser la garde adversaire... et donc de placer ensuite un combo plus long. Dans l'absolu, Tekken 7 n'est pas un game-changer dans la mesure où si vous étiez déjà bon à Tekken, vous ne devriez pas perdre de votre superbe. En revanche, le jeu est plus technique qu'auparavant et les débutants devront jouer un petit moment pour se faire à ce gameplay, qui mettra tant à contribution ses mains que son cerveau. Les parties entre potes promettent d'être pleines de rebondissements...
The Law Must Go On
Car Tekken 7 n'oublie pas la dimension « spectacle ». Sur la scène e-sport, Tekken a toujours su captiver les foules et ce nouvel épisode devrait faire très fort. Le jeu a été pensé en ce sens, mais pas uniquement. Ainsi, il est possible d'organiser soi-même des tournois online, d'y participer et de regarder les matches en cours, en tant que spectateur. Et toujours dans l'idée de rendre les combats plus « télégéniques », les développeurs ont implanté un petit système de ralenti qui intervient lorsqu'un échange de coup décisif a lieu. Si l'un des joueurs est sur le point de gagner le round et que les deux joueurs ont attaqué en même temps, le jeu zoom et ralentit sur la potentielle zone d'impact. Effet garanti : le joueur devient, le temps de quelques dixièmes de secondes, un spectateur qui prie de toute son âme pour être celui dont le coup touchera en premier. Une excellente idée, en somme.
Heihachi Parmentier
Bandai Namco a longuement communiqué sur le mode Histoire de Tekken 7, supposé mettre un terme au conflit opposant Heihachi Mishima à son fils Kazuya. Intitulé « La Saga Mishima », ce nouveau story mode vous permet d'incarner plusieurs personnages du jeu mais surtout Heihachi et Kazuya. Le jeu perd ici beaucoup de temps à raconter des détails qui n'intéresseront que les plus gros fans de la série. Avec ses nombreuses cinématiques et ses séquences « plan fixe sur un dessin avec voix off », le mode est extrêmement bavard et aurait gagné à être concis par endroits. Toutefois, l'utilisation de transitions dynamiques, entre les combats et les cinématiques, donne parfois l'agréable sensation que cette alternance n'est pas si rigide que cela. Il n'est d'ailleurs pas rare de se faire tromper et de recevoir un coup parce que l'on a été surpris par le dynamisme et la fluidité de ces transitions, ce qui parfois peut se montrer assez désagréable.
Fait curieux, le challenge et même en difficulté "Moyen", est assez relevé, à tel point qu'il faudra parfois recommencer certains combats à plusieurs reprises avant de pouvoir continuer. Ce sera l'occasion pour beaucoup d'apprendre et de maîtriser les subtilités de ce Tekken 7, mais aussi de s'agacer contre un ennemi qui semble parfois lire nos coups à l'avance. Notez qu'en descendant d'un cran le niveau de difficulté, votre ennemi ne sera pas beaucoup moins retors : le niveau de difficulté sélectionné ne semble pas avoir d'impact sur sa capacité à vous rappeler les pires moments de vos années collège. Seule l'utilisation de combos sera plus aisée, puisqu'il suffira de tapoter Carré/X ou Triangle/Y pour réaliser un enchaînement qui en temps normal serait plus compliqué à réaliser. Le problème, c'est qu'ainsi le jeu vous permet d'avancer plus facilement à travers les différentes missions du jeu, mais ne vous aide pas franchement à vous améliorer, à apprendre les véritables commandes des personnages... De quoi attraper de mauvais réflexes. De fait on déconseillera fortement de lancer la Saga Mishima dans son mode de difficulté le moins élevé.
Akuma Matata
Que serait un bon jeu de combat sans son roster ? Dès son lancement, Tekken 7 fait fort avec pas moins de 36 personnages à affronter et à maîtriser. On retrouve bon nombre d'anciens combattants, comme Heihachi, Jin, Nina, Kuma, Law, King ; des plus récents, comme Asuka, Bryan ou Bob ; et neuf nouveaux personnages : Claudio, Gigas, Josie, Kazumi, Katarina, Shaheen, Lucky Chloe, Master Raven, et bien sûr Akuma, tout droit venu de Street Fighter. Un mot sur celui-ci : la team Tekken a réussi à l'intégrer assez brillamment au gameplay de Tekken. Sans faire de compromis sur son movest et la façon de jouer très « main gauche » de Street Fighter, Akuma se joue à coup de 623 + Carré/X, ou 412 + Croix/A, etc. Les Tatsumaki et autres Hadoken sont bien sûr de la partie et l'on peut pratiquement jouer Akuma comme si l'on était dans un Street Fighter. Assez plaisant.
Les petits nouveaux sont forcément plus classiques mais apportent une belle diversité dans le roster du jeu, sans créer de doublons inutiles. Par certains aspects, la portée et l'envergure des coups de pied de Katarina rappellent la Asuka Kazama de Tekken 5, et certains coups de Gigas semblent s'inspirer du moveset de Marduck, hélas porté disparu. Mais passés ces détails, chaque combattant a sa personnalité propre et il sera une fois de plus difficile de ne pas trouver chaussure à son pied. Lucky Chloe s'ajoute à cette catégorie de personnages très rapides et aux mouvements extrêmement fluides, tandis que Master Raiden se veut plus technique, avec de nombreuses feintes et disparition en tout genre. On pourra toujours pousser un soupir à la vue du décolleté et du string apparent de Katarina, ou la gestuelle maniérée de Claudio, en se disant que les clichés sur le Brésil et l'Italie ont encore de beaux jours devant eux, mais l'un comme l'autre sont très plaisants à utiliser en match. Surtout la première, qui devrait faire le bonheur des débutants à la recherche d'un personnage abordable et efficace.
Barbie et Tekken
Bien évidemment, vous aurez tout le loisir de personnaliser vos combattants préférés grâce à l'éditeur dédié. Vêtements, accessoires, chevelures, couleurs, les combinaisons sont nombreux mais on aurait peut-être souhaité un peu plus de variété dans les accessoires exclusifs à chaque personnage. C'est d'autant plus vrai que la plupart des costumes alternatifs proposés d'emblée par le jeu sont la plupart du temps des coloris alternatifs. On sera donc tenté de débloquer un maximum d'items et pour cela, le jeu a deux solutions. Gagner de l'argent via les différents modes de jeu existants, soit en passant son temps dans le mode Combats au Trésor. Ce dernier, hors-ligne, vous demandera de combattre une succession d'ennemis ; à chaque combat, vous gagnerez un coffre, dans lequel se trouvera un nouvel item de personnalisation. Plus vous enchaînez les victoires, et plus les loots sont intéressants. De quoi s'éviter des factures salées : comptez 2 millions de G (la monnaie in-game) pour recréer l'uniforme d'écolière d'Asuka, aperçu dans Tekken 5.
Pour peu que vous soyez amateurs de ce genre de customisation, le jeu devrait vous occuper un moment. Ce qui n'est pas un mal, puisque s'il y a bien quelque chose que l'on peut reprocher à Tekken 7, c'est bien son manque de contenu local. Si de nombreux joueurs devraient surtout utiliser les fonctionnalités online, d'autres préfèrent jouer tranquillement en local, contre le CPU, et ici les possibilités sont des plus limitées. Sorti de la Saga Mishima et du mode Arcade, il reste le mode Combat au Trésor... Et c'est tout ! Pas de Versus contre l'ordinateur, pas de Time Attack, ou même de mode Survie. Franchement dommage...
Heureusement que de son côté, le mode online fonctionne du tonnerre. Il est encore difficile de juger de l'efficacité du matchmaking vu que peu de personnes disposent actuellement du jeu, mais les parties que nous avons pu dispuster se sont déroulés sans encombre. Pas de latence, pas de chute de framerate intempestive, bref rien que du beau jeu. Tekken 7 devrait donc s'éviter les débuts poussifs de Street Fighter V.
Le plaisir des yeux et des oreilles ?
Il convient de terminer ce test de Tekken 7 par l'enrobage général de celui-ci. Ici le résultat est plus contrasté. On sent que le jeu est disponible depuis un petit moment déjà et visuellement parlant difficile de croire qu'il s'agisse d'un jeu de 2017. Et pour cause, ce n'est pas le cas. Pour autant on était en droit d'en attendre plus du nouveau bébé de Bandai Namco, qui sans être vilain, manque souvent de finesse. C'est assez parlant sur certains visages, qui manquent parfois de détails. Et si le jeu est parfaitement fluide, il tousse subitement dans une arène en particulier, et plus précisément à un endroit très spécifique. Il semblerait que la PlayStation 4, comme notre Xbox One, avait un peu de mal à gérer à la fois les combattants et les flammes qui se trouvaient à proximité. Le framerate s'est alors effondré et c'est seulement en s'éloignant de cette zone que l'on aura retrouvé la fluidité habituelle du titre.
Nos oreilles sont en revanche plus gâtées que nos yeux, grâce à une succession de compositions très efficaces, notamment celle à la guitare espagnole, ou celles mélangeant grosses guitares saturées et instruments traditionnelles japonais. Dans l'ensemble, la BO de ce Tekken 7 nous a surpris à plusieurs reprises, en se tenant à l'écart des clichés habituels du genre. Sans être particulièrement originales, les différentes compositions rythment agréablement les combats. Il est aussi possible de les écouter directement dans le Jukebox proposé dans le menu principal, où les fans seront ravis de trouver une galerie très fournie dans laquelle il est possible de visionner la plupart des cinématiques d'introduction de la série. Un petit bonus des plus agréable.
Points forts
- Un mode Histoire bien fichu...
- Des combos toujours aussi agréables à sortir, notamment grâce à l'excellent sound-design du jeu
- Les Power Crush
- 36 personnages jouables : difficile de ne pas trouver le sien
- La customisation de personnages
- La musique
- Le online qui fonctionne au poil
Points faibles
- ... mais trop bavard
- Sans être laid, Tekken 7 aurait vraiment pu être plus joli
- Certains modes de jeu hors-ligne, des classique du genre, manquent à l'appel
Il était attendu de pied ferme, et il n'a pas déçu. Plus sobre que son prédécesseur, Tekken 7 est également plus technique, plus précis, plus exigeant. Pour autant, il n'en est pas moins amusant, grâce à son vaste casting et le plaisir ressenti à chaque fois que l'on réussit à infliger une série de coups. Tekken 7 devient vite addictif et on passera des heures à perfectionner sa technique, pour le plaisir de la gagne, ou simplement du beau jeu. Accessible mais sans aucun doute possible plus profond que ses prédécesseurs, Tekken 7 pèche finalement par son manque de modes de jeu hors-ligne, et une réalisation technique un peu en dessous. Mais c'est bien tout ce que l'on a à lui reprocher, tant le reste fonctionne à la perfection. Voilà un jeu qui devrait animer bien des soirées entre amis, et causer des ampoules à de nombreuses mains.