Alors que l'épisode original de Shadow Warrior, sorti en 97, s'effaçait progressivement de la mémoire collective, Flying Wild Hog et Devolver Digital ont eu la bonne idée de remettre le jeu au goût du jour en sortant en 2013 un reboot pour le moins réussi. En 2016, la même équipe nous revient avec Shadow Warrior 2 qui, tout en reprenant les bases de son aîné, s'est fendu d'évolutions notables.
Retour en forme
The Wang is back. 5 ans après les événements ayant rythmé Shadow Warrior, Shadow Warrior 2 vous replonge dans les souliers de Lo Wang, ce guerrier ninja un rien branleur et arrogant que l'on a appris à apprécier. Dans un monde où se côtoient désormais humains et démons, notre héros se trouvera à nouveau embrigadé dans une histoire rocambolesque, peuplée d'entité maléfiques et déjantées, à l'image de ce que l'on pouvait trouver dans le premier épisode. Si l'histoire en elle-même n'est pas transcendante, elle propose à nouveau suffisamment de rebondissements pour se parcourir sans déplaisir. Surtout, c'est l'humour omniprésent du jeu, pas toujours très finaud, qui permet de vivre l'histoire de Shadow Warrior 2 un sourire un peu niais constamment collé aux lèvres. Alors, certes, il faudra être sensible à ces dialogues et punchlines directement issus des films d'action des années 80, orientation de toute façon pleinement assumée, pour trouver du charme aux personnages du jeu mais qu'importe, Flying Wild Hog sait qu'il s'adresse à un public friand de ce ton décalé et lui sert donc ce qu’il attend.
Ca va trancher, chérie
Si Shadow Warrior 2 reste le même dans le ton qu'il adopte, il conserve également les bases de son gameplay en proposant des affrontements terriblement nerveux et sanglants à souhait. Lo Wang, grâce à son dash et son double saut, est plus agile que jamais, et s'extirper d'une horde d'ennemis pour mieux retourner dans la mêlée est terriblement plaisant. Sans s'encombrer de mécaniques trop lourdes, Shadow Warrior 2 se laisse très facilement prendre en main grâce à des contrôles d’une fluidité exemplaire, et l'ensemble des combats se mène essentiellement au feeling. Lo Wang a d'ailleurs un panel d'action suffisamment diversifié pour vous permettre de varier les approches. Invisibilité, empalement et onde de choc sont les trois pouvoirs offensifs mis à votre disposition, et leur efficacité autant que leur facilité d'utilisation vous offre de nombreuses combinaisons qu'il est toujours aussi plaisant d'exploiter à outrance. Notons que le bestiaire est assez inspiré, bien qu'un peu timide en variété, à l'image des combats de boss, trop faciles et trop rares.
Vous retrouverez tout naturellement les capacités inhérentes à votre Katana, coup d'estoc et coup à 360 degrés, que vous pourrez améliorer grâce à un système de points de talents refondu pour les besoins de ce nouvel épisode. Si vous pourrez bien sûr affecter des points à votre résistance, votre maximum de santé ou de chi, vous pourrez également les répartir dans des arbres destinés à améliorer vos chances de loot ou l'affliction de dégâts élémentaires. Car effectivement, certains de vos ennemis affichent désormais des dégâts et des résistances à différents éléments : glace, électricité, feu... autant de considérations que vous êtes supposé étudier avant de foncer dans le tas. Pour cela, un système rudimentaire de customisation d'armes a été élaboré.
Shadow Warrior 2 : dans le vif du sujet
Une customisation anecdotique
Effectivement, vos ennemis, un fois terrassés, laisseront au sol des gemmes de différentes natures que vous pourrez sertir sur votre arsenal. Chaque arme dispose de trois emplacements de gemmes, modulables à tout moment, et il vous appartient de choisir quelle statistique vous entendez privilégier, souvent au détriment d'une autre. Effectivement, une gemme augmentant les dégâts diminuera parfois le temps de rechargement de l'arme, tandis qu'opter pour une gemme convertissant un pourcentage de vos dégâts physiques en dégâts électriques rendra l'arme inappropriée pour un combat face à un démon insensible à l'électricité. L'idée n'était pas mauvaise en elle-même mais se voit un brin ternie par deux points. Le premier d'entre eux est que sur l'ensemble d'une partie solo en mode normal, adapter les gemmes en fonction des résistances adverses n'a pas été nécessaire pour voir le bout de l'aventure, sans difficulté. Et la raison pour laquelle nous n'avons que peu recouru à la customisation « élémentaire » des armes et avons privilégié simplement l'augmentation de dégâts réside dans la lourdeur de l'interface.
Une lourdeur d'interface dissuasive
Globalement, la gestion de votre inventaire (qui ne propose pas de limite de poids) est particulièrement peu ergonomique et compte tenu de la quantité de gemmes que vous récolterez, vous vous retrouverez rapidement noyés sous une tonne d'éléments parmi lesquels il faudra péniblement retrouver les statistiques de votre choix. Enfin, si certes les possibilités de personnalisation sont assez étendues, les différents skills étant nombreux, difficile de changer radicalement votre façon de jouer en modifiant la répartition des points ou en privilégiant un arbre plutôt qu'un autre. Le gameplay reste le même d'une façon ou d'une autre : on fonce dans le tas, on tranche dans le gras et on recommence. C'est clairement ce que l'on attend d'un titre comme celui-ci, mais la dimension RPG en devient vite secondaire.
Cette composante de Shadow Warrior 2 emprunte certaines idées d'un Borderlands, en reprenant même parfois ses codes visuels, sans jamais en égaler la profondeur ni l'ergonomie. Par ailleurs, cette volonté de donner une nouvelle orientation à Shadow Warrior se ressent aussi dans la progression générale du jeu. Si vous aurez votre lot de quêtes secondaires (que nous vous recommandons chaudement de faire, tant pour leurs récompenses que pour leurs scénarios) et que la quête principale est sympathique, l'avancée dans l'histoire de Shadow Warrior 2 n'est pas linéaire. Effectivement, plutôt que d'adopter l'approche couloir mais diversifiée de n'importe quel FPS solo, Flying Wild Hog a choisi sur cet épisode d'opter pour la génération procédurale de niveaux – très en vogue, décidément – et de centraliser votre accession aux différents niveaux du jeu par l'intermédiaire d'un hub dans lequel vous pouvez vous téléporter à tout moment.
Le choix du procédural à la faveur du multi
Ainsi, dans ce hub, il sera possible d'acheter / vendre des marchandises mais également de choisir quelle quête vous désirez accomplir par l'intermédiaire d'une carte accessible depuis l'inventaire. L'idée est alors de vous laisser libre d'aller puis de revenir dans chacune des zones traversées au cours des quêtes annexes afin de profiter, une fois les missions remplies, d'ennemis aux emplacements et aux caractéristiques différents. A cela s'ajoute le loot aléatoire, qui vous permettra peut-être d'obtenir une gemme ou une arme supplémentaire. Là encore, l'idée n'est pas mauvaise mais s’avère dans les faits un peu plus discutable. Si effectivement, les spawn d'ennemis ne seront pas les mêmes d'une exploration de zone à une autre, les environnements sont en réalité trop peu variés pour dépayser le joueur. En effet, il existe trois ou quatre grands environnements différents, chacun proposant quelques variantes, mais en définitive, la lassitude se fait rapidement ressentir, même au cours d'une partie solo. Alors certes, on saluera largement la verticalité des niveaux, permettant à Lo Wang d'exprimer sa vivacité à son plein potentiel, mais il y a fort à parier que beaucoup auraient préféré un dépaysement constant, notamment celles et ceux concevant Shadow Warrior comme une licence purement solo.
Car dans ce deuxième épisode, le multijoueur fait son apparition et propose de parcourir la campagne jusqu'à 4 joueurs, le tout en ligne. Concrètement, à partir du prologue, il vous sera possible de rejoindre un groupe d'amis afin de jouer du katana en groupe et de traverser Shadow Warrior 2 d'un bout à l'autre avec vos partenaires. L'incidence sur le gameplay est assez limitée, puisqu'elle ne se manifestera qu'à travers des ennemis plus nombreux et plus puissants. Bien évidemment, si la perspective de profiter de l'expérience du jeu à plusieurs est très réjouissante et se révèle efficace, elle explique aussi la nouvelle approche du jeu, qui implique le procédural, le grind pour obtenir du loot bref, tout ce qui divisera immanquablement la communauté réunie autour de la licence.
Si le plaisir de parcourir à plusieurs l'histoire principale et les intrigues secondaires sera un régal pour beaucoup, le multijoueur n'a de coop' que le nom puisque les interactions entre les différents membres du groupe sont particulièrement limitées, et finalement une fois le jeu terminé, les raisons d'y retourner encore et encore sont assez maigres. Pas sûr alors, que la nouvelle approche parvienne à rassembler les joueurs, qui verront soit dans ce Shadow Warrior une évolution moderne de la licence, soit une distanciation trop prononcée de ce qui fait son ADN. Mais le bouder pour la première raison serait regrettable tant le plaisir de jeu lui, est intact.
Points forts
- Du fun à l'état pur
- Décomplexé et drôle
- Gameplay impeccable
- Des armes à foison
- Plutôt joli
- Possibilité de traverser la campagne jusqu'à 4 joueurs
Points faibles
- Manque de variété des environnements
- Multi qui manque de profondeur
- Dimension RPG trop effleurée
- Interface peu ergonomique
- Combats de boss peu inspirés
- Peu de variété dans le bestiaire
Il n'est pas exempt de reproches, ce Shadow Warrior 2. Il souffre d'une approche RPG pas assez approfondie, d'une génération procédurale de niveau qui ampute le titre d'un dépaysement qu'on aurait aimé plus prononcé et d'un multijoueur qui n'aura pas beaucoup d'intérêt une fois l'aventure principale finie. Mais si Shadow Warrior 2 a pris un virage de forme, il n'a pas opéré un virage de fond. Dans les faits, si vous êtes joueur solo, le titre vous procurera pendant 9 / 11h un fun constant, grâce à son ambiance certes, mais surtout grâce à son gameplay impeccable, fluide, bourrin, défouloir et nerveux qui fleure bon les Fast-FPS d'antan. En définitive, s'il n'est pas impeccable, Shadow Warrior 2 devrait vous procurer une expérience rafraîchissante et décomplexée, pour peu que vous aimiez les jeux à gameplay pur. Et pour moins de 40€ le jeu de Flying Wild Hog mérite d'être encouragé.