Shingeki No Kyojin apparut à la surface du globe en l'an de grâce 2009. Créé par Hajime Isayama, ce phénomène s'étendit à l'occident et une horde de Titans affamés déferla sur la France et l'Amérique du Nord. Succès planétaire oblige, L'attaque des Titans fut porté sur petit et grand écran avec plus ou moins de réussite. Et cette conquête Cross media se poursuit désormais sur le marché du jeu vidéo avec l'éditeur Koei Tecmo et le studio OMEGA Force (One Piece : Pirate Warriors 3, Hyrule Warriors...). L'humanité résistera-t-elle à un nouvel assaut ?
Le club de l'apocalypse
8ème siècle. L'humanité est au bord de l'extinction, piétinée et dévorée par des hordes de Titans. Ces êtres mus par la simple envie de déguster du bipède décimèrent la surface de la Terre. Face à cette menace sans précédent, l’Homme se retrancha derrière des murs répondant au nom de Maria, Rose et Sina. Mais cette période d'accalmie prit fin un siècle plus tard. Un nouveau type de Titan fit trembler cet embryon de civilisation avant de faire voler en éclat ce rempart réputé infranchissable. Lors de cette attaque, le jeune Eren Jäger perdit ses parents. Orphelin de guerre, ce dernier gonfla les rangs de l'armée, rongé par la colère et le désir de vengeance.
Les fans du manga et/ou de la série animée auront reconnu le pitch de la première saison. L'Attaque des Titans : Les Ailes de la Liberté ne réécrit à aucun moment l'histoire. Le studio OMEGA Force ne s'embarrasse pas d'un spin off abscons intégré au forceps au sein du récit originel, mais insuffle une vision vidéoludique à un scénario connu de tous. Le titre de Koei Tecmo récite à la perfection ses gammes avant une saison 2 annoncée pour 2017 qui poursuivra la quête d'Eren, Mikasa, Livaï... et, croisons les doigts, révélera le mystère entourant les aptitudes singulières du héros lors d’une aventure haletante constituée de nombreuses missions principales et de missions annexes ayant pour objectif d’éradiquer la présence des Titans une région à la fois.
L'Attaque des Titans, le jeu, ne réinvente pas la roue et déroule sans accroc une histoire âpre et sanglante où violence et mort hantent les protagonistes. La narration se construit autour de nombreuses cinématiques réalisées avec soins, de séquences de dialogues linéaires certes, mais aucunement dénuées d'intérêt et le changement de héros. Au nombre de 10, Eren, Mikasa, Jean, Armin, Livaï... se démènent pour survivre dans ce monde apocalyptique et offrir à l'humanité un avenir. Les connaisseurs naviguent en terrain connu et redécouvrent ce Seinen par l'intermédiaire de l'interactivité. Et la présence des voix japonaises intégralement sous-titrées est un gage de fidélité à l'heure des doublages en demi-teinte.
Mikasa, toujours aux côtés d'Eren
Un Beat'em All tridimensionnel
Coutumier du genre, OMEGA Force nous sert un nouveau jeu d'action sous licence. Zone de jeu restreinte, ennemis à foison et action constante constitue la sève des productions du studio. De par les spécificités de la saga, L'Attaque des Titans : Les Ailes de la Liberté se devait de renouveler la formule du Musou.
Au-delà de cet univers adulte et dérangeant, les affrontements aériens face à des ennemis culminant à plusieurs dizaines de mètres interpellent. Vitesse, précision et violence abrupte se télescopent dans les airs et sont à l'origine d'un ballet sanglant mettant à rude épreuve votre sens de l'orientation. Transposer en jeu vidéo ces déplacements tridimensionnels et les rendre accessibles au plus grand nombre sous peine de perdre de vue l'un des piliers de luttez saga... le défi était de taille. Et le studio n'a pas à rougir du résultat. Les environnements se traversent avec une aisance déconcertante. Les grappins fusent, le gaz propulse nos héros tandis qu'un sentiment grisant de pur contrôle vous parcourt l'échine.
Quitter le plancher des vaches pour le plaisir des cieux répond à la nécessité de combattre des géants. Une fois à portée de grappins, ces derniers se plantent dans la cible fraîchement acquise. Et à ce petit jeu-là, les articulations et la nuque s'avèrent des mets de choix. Tournoyant autour du Titan, notre héros attend une fenêtre de tir pour fondre sur le malandrin et lui sectionner un membre avant de se ruer sur sa nuque et d'en faire des sashimis, seule manière de venir à bout d'un ennemi démesuré. Sanglant à juste titre, la nervosité de ces affrontements n'a d'égale que la violence qui s'en dégage lorsqu’un Titan s'écrase à vos pieds sous un nuage de poussière avant de tout simplement s’évaporer. Et cette danse morbide se poursuit d’un Titan à l’autre sans jamais reposer un pied à terre. Fouler le sol étant bien trop souvent synonyme de mort. Seule ombre au tableau, la caméra tend à se prendre les murs dans les endroits exigus où perdre de vue la cible une fois plusieurs ennemis remplissant l’écran et vu la taille des créatures, la gêne peut devenir conséquente.
Virevolter et se déplacer à grande vitesse nécessite ce précieux gaz vous propulsant de Titan en Titan et les bonbonnes alimentant votre harnais tridimensionnel ne sont en rien inépuisables. Au milieu du champ de bataille, surveiller cette jauge est une question de survie. Une fois vide, Eren & Co. sont à la merci des Titans, incapables de s’éloigner de la zone de combat ou de prendre de la vitesse pour attaquer. Et les lames servant à cisailler du géant s’abîment à mesure que vous frappez sans relâche. Une fois cette lame émoussée, voire cassée, toute attaque se résume à une chatouille sans efficacité aucune. Aux rayons des items à utiliser en combat, les fortifiants vous requinquent après une attaque prise de plein fouet alors que les grenades aveuglantes/assourdissantes paralysent pour quelques secondes les créatures avoisinantes, celles-ci n’étant sensibles qu’à un unique type de grenades. Dans cette gestion de vos ressources réside votre survie et finalement la victoire de l’Homme.
Cette faculté à dominer les airs ne sera pas de trop face aux hordes de Titans dévorant sans sourciller les derniers survivants de l’humanité. A la différence des autres Musou de l’éditeur, L’Attaque des Titans balaye d’un revers de la main la pluie d’ennemis pour concentrer l’action sur une poignée d’adversaires coriaces en diable. Du simple Titan de quelques mètres au Déviant capable de courir ou de se protéger des attaques directes à la nuque, les affrontements parviennent à briser un aspect redondant attendu. Sans altérer ce cycle sans fin de combats, OMEGA Force joue avec les environnements (plaines, cités, forêts) et les types d’ennemis histoire de fournir aux joueurs leur dose d’adrénaline et éviter cette forme d’ennui inhérente au genre.
Les prouesses guerrières de Livaï
Une force titanesque
Secret le moins bien gardé de l’univers « manga », la transformation d’Eren en Titan est au cœur du récit. Jeune soldat de la 104ème Brigade d’entraînement et membre du Bataillon d’Exploration, sa capacité à muter en géant de 15 mètres à la force colossale alimente le mystère entourant les autres Titans spéciaux avec en première ligne Annie Leonhart et sa forme « titanesque ».
Suivant les arcs narratifs de la série, Eren ne se transforme qu’après quelques heures de jeu. Et ne vous attendez pas à déclencher cette fureur comme bon vous semble. Entre les différents personnages et la volonté d’OMEGA Force de suivre à la lettre le manga, seules certaines séquences vous offriront un moment de pur destruction. Du haut de votre colère, le sol tremblera, les immeubles s’effondreront et les Titans exploseront sous vos coups de poing répétés et autres projections ne laissant qu’une cité en ruine une fois le nuage de poussière dissipé. Vent de fraîcheur laissant vagabonder votre soif de destruction, le contrôle d’Eren donnera des frissons aux fans malgré un panel limité d’attaques et un aspect générique se dégageant des affrontements.
Eren sous sa forme "Titan"
Les rouages de la guerre
Afin de garantir la victoire de l’Homme, l’armée s’emploie à améliorer l’équipement de ses soldats. Débutant avec de simples lames d’entraînement, un lanceur et un harnais de base, les personnages ont l’opportunité d’en développer de nouveaux moyennant des Fonds du Régiment gagnés en accomplissant diverses missions et en revendant les matériaux récoltés. De la simple pièce de métal au bambou en passant par le morceau de cuir, ce butin de guerre s’emploie à améliorer les équipements développés . Recycler vos anciens équipements étant une autre possibilité afin de fortifier ceux fraîchement équipés. Que ce soit le tranchant ou la durabilité des armes ou encore le nombre de lames embarquées dans un lanceur, le gain de puissance, de vélocité et d’agilité est nécessaire sous peine de périr dans les missions à venir.
L’apprentissage à la dure assure aux protagonistes une montée en puissance et donc un gain d’expérience traduit en niveaux. Mécaniques tirées des RPG, L’Attaque des Titans ne réinvente pas la poudre à canon, mais s’assure une profondeur de jeu. Chaque mission octroie des points d’XP augmentant respectivement vos compétences de Régiment et de Soldat selon vos faits d’armes et les médailles décernées sur le champ de bataille et débloque de nouveaux équipements disponibles pour tous et des aptitudes propres aux héros. Et OMEGA Force pousse la personnalisation avec le choix de votre monture et votre tenue. Sans jamais complexifier à tort cette customisation, les choix déterminent tout de même votre manière d’appréhender un combat et pourvoient un vent de nouveautés à mesure que l’aventure se déroule.
Une mission d'exploration en compagnie d'Eren
Regarder la mort en face
A l’image des autres productions du studio OMEGA Force, L’Attaque des Titans : Les Ailes de la Liberté ne se démarque pas de la concurrence par sa technique et ses visuels. Sans jurer à l’heure de la 4K et des 60 images par seconde, ce Beat'em All assure l’essentiel sans jamais parvenir à l’excellence.
La direction artistique s’appuie de nouveau sur un modèle d’éclairage non photo-réaliste connu sous le nom de Cel Shading et des textures en aplats pour un résultat inspiré de la série animée. Traits de crayon apparents et ombrages forcés rendent hommage au manga sans pour autant devenir génériques. Et cette vision apocalyptique prend tout son sens lors des affrontements. Des hectolitres d’hémoglobine giclent à l’écran à chaque coup porté avec précision. Les effets de particules explosent à chaque accélération. Des lignes de vitesse tirées des animés exacerbent ce sentiment de vitesse se dégageant des manœuvres. Fidèle visuellement à l’œuvre d’origine, le titre de Koei Tecmo ne flatte à aucun moment la rétine, mais reste plaisant à découvrir, l’intérêt résidant les combats avant tout.
Malheureusement les environnements sont vides à en pleurer. Les zones visitées sont dépeuplées et les rues subissent l’absence d’assets. Aucune charrue, aucun débris… rien de rien ne donne corps au conflit. Et les destructions en temps réel résument à elles seules une réalisation précaire. Les bâtiments se détruisent selon un schéma prédéfini, la palme revenant à ces amas de pierres s’écroulant sans aucune logique physique tels des rochers en polystyrènes. De plus, les amateurs de framerate rongeront une nouvelle fois leur frein. Stable à 30 images par seconde, l’aventure perd pied une fois la présence des Titans intensifiée. En nombre réduit la majorité du temps, ces derniers pullulent parfois et mettent à mal la fluidité du titre.
Bande-annonce de L'Attaque des Titans centrée sur le personnage d'Armin
Points forts
- Une adaptation fidèle de la saga
- Un sentiment de liberté porté par des déplacements tridimensionnels grisants
- Des combats nerveux et intenses face à des ennemis titanesques
- Des mécaniques RPG à l’origine d’une personnalisation des héros
- Une direction artistique, hommage à l’œuvre d’origine
- Une vingtaine d’heures de jeu à plusieurs mètres du sol
Points faibles
- Un scénario tiré de la saison 1 et des mangas, et donc connu des fans
- Une réalisation technique sommaire (caméras dansantes, framerate instable,...)
- Des environnements tristement vides
- Une certaine redondance après une dizaine d'heures de jeu
Adaptation fidèle de l’œuvre créée par Hajime Isayama, L’Attaque des Titans : Les Ailes de la Liberté transpose avec brio cette uchronie manettes en main. Malgré un scénario déjà-vu tiré de la saison 1 et des mangas, cette version vidéoludique oscille entre une dizaine de héros, tous jouables, et nourrit le fan transi attendant avec impatience une saison 2 planifiée pour 2017. Force de la saga, les déplacements tridimensionnels et les affrontements face aux Titans prennent vie à l’écran et procurent des sentiments décuplés de liberté et de puissance. Virevoltant dans les airs, se balançant de Titan en Titan, la mort s’abat sur des ennemis imposants avec aisance. Pour autant, le titre du studio OMEGA Force prend de plein fouet une technique précaire et une réalisation sans emphase malgré une direction artistique rappelant le manga et la série animée. A conseiller aux fans de la première heure, L’Attaque des Titans : Les Ailes de la Liberté n’en reste pas moins une expérience à vivre à plusieurs mètres du sol, administrant la mort… au son du métal qui pénètre la chair.