En mars dernier, Warner nous permettait d'approcher le divin enfant, qui nous fut présenter par ses heureux parents. Une session de jeu plus tard, nous repartions globalement convaincu, comme en attestait cet aperçu. Tt Games semblait avoir trouver la bonne formule pour renouveler une série qui peinait à surprendre. Entre la réalisation technique de qualité, les nouveautés de gameplay et quelques séquences pas piquées des hannetons, Le Réveil de la Force version LEGO nous avait séduit, ou tout du moins, était parvenu à nous amuser. Mais qu'en est-il après une session de jeu autrement plus longue ? Eh bien... le constat est sans doute moins positif, même si LEGO Star Wars : Le Réveil de la Force n'a pas à rougir de sa performance.

Le film comme si vous y étiez, ou presque

On n'en attendait pas moins de sa part, mais le nouveau jeu de Tt Games est extrêmement fidèle au matériau original. Si vous n'aviez pas encore vu l'Épisode VII, sa version LEGO vous donnera plus qu'un bon aperçu du script du film. Le joueur revit tous les moments marquants du film, qui s'enchaînent avec une fluidité agréable. Le titre se permet même de raccourcir plusieurs scènes pour se concentrer sur certains éléments plus essentiels, et évite ainsi de se perdre dans des cinématiques trop longuettes.

Vous imaginez bien que pour faire tenir le jeu sur plus d'une dizaine d'heures (comptez 15h pour le boucler, et beaucoup plus pour tout débloquer, comme les 205 personnages jouables), les développeurs ont dû allonger certains passages du film. C'est particulièrement probant au tout début du jeu, lors de l'évasion de Poe Dameron et de Finn, qui non contents de piquer au Premier Ordre un Tie Fighter, vont également déclencher un joyeux bazar dans le hangar du croiseur sur lequel ils se trouvent. Les scènes de gunfight se multiplient, et on aurait même tendance à trouver ça un peu long. Toujours dans l'idée de rallonger certaines séquences, chaque niveau est séparé d'une petite phase d'exploration durant laquelle le joueur devra résoudre différents puzzles. On en retrouve un peu partout, comme sur le Faucon Millenium, après avoir échappé aux Rathtars, et donc avant de lancer la mission sur Takodana ; Ces passages un peu forcés sont, du reste, assez peu intéressants et l'on a à chaque fois hâte de les passer, d'autant qu'on remarque ici et là quelques soucis de caméra qui rendent l'expérience désagréable.

Si vous êtes habitués aux jeux LEGO, vous savez probablement que la série est connue pour son ton humoristique, voire carrément parodique et sarcastique par moments. Une recette qui marchait plutôt bien au début, et qui, avouons-le, fonctionne peut-être moins bien dorénavant. Si certaines blagues passent très bien (on retiendra notamment le Trooper qui joue avec l'interrupteur, au tout début du jeu, où les passages avec Kylo Ren), une bonne partie d'entre elles passe sous les radars. Sans doute une question d'habitude : ceux n'ayant jusque là jamais joué à un jeu LEGO y trouveront sans doute du plaisir, mais il faut le reconnaître, tout cela sent un peu le réchauffé : le jeu peine à faire sourire, là où il voudrait nous faire rire aux éclats. C'est parfois un peu gênant, à la manière de ce tonton trop alcoolisé qui, au repas du dimanche, pense amuser la galerie avec une succession de blagues toutes aussi peu inspirées les unes que les autres.

Les Troopers sont souvent mis dans des situations... embarrassantes.

Le plein de nouveautés

Sans doute conscients que la série tournait en rond, les petits gars de Tt Games ont fait chauffer l'huile de coude et ont travaillé sur de nouvelles idées de gameplay. Ce qui était une bonne idée, car en effet, les jeux LEGO commençaient à sentir la naphtaline : passé le plaisir de découvrir un nouvel univers (Tolkien, Marvel, Batman, Harry Potter...) à la sauce LEGO, le joueur retrouvait vite une construction et des éléments de gameplay calqués les uns sur les autres d'un épisode à l'autre. On alternait entre phases de plate-formes et combat, toujours à la recherche d'un élément du décor à détruire pour pouvoir bricoler un passage vers l'écran suivant.

Avec LEGO Stars Wars Le Réveil de la Force, on sent une véritable volonté d'améliorer la formule. Bien entendu, cela ne révolutionne pas la licence, mais cela a au moins un mérite : les développeurs ne se reposent pas sur leurs lauriers. On trouve notamment deux grandes nouveautés : le multi-build et les phases de shoot façon TPS. Néanmoins, elles n'apportent pas tant que ça au jeu... Le multi-build vous propose en fait de construire, à partir de la même base de pièces détachées, jusqu'à trois éléments différents, afin de débloquer une situation donnée. Cela donne lieu à un petit puzzle plutôt sympathique au début mais qui se révèle vite rébarbatif après plusieurs heures de jeu, mettant d'ailleurs le doigt sur un problème en particulier, et sur lequel nous reviendrons ensuite. En somme l'ajout est sympathique mais ne change absolument rien à la donne, comme on le comprend après quelques heures de jeu.

Parlons maintenant de ces phases de shoot façon TPS. C'est sans doute l'un des éléments les plus surprenant de ce nouveau jeu, car il apporte un véritable plus au titre. Comme vous le savez, le film comporte différentes sections d'action plutôt intenses, et le jeu parvient à leur rendre honneur avec cette petite nouveauté. Ainsi, par moments, le jeu forcera un passage vers ce que l'on appellera par facilité « le mode TPS » : la caméra se place très proche du dos du personnage contrôlé, qui se protège derrière un élément du décor. En pressant L2 / LT, le personnage en question se redresse et peut tirer sur ses adversaires ; il a également la possibilité de passer d'une zone de couverture à une autre, afin de profiter d'un meilleur angle de tir. Par moments, ces séquences apportent un véritable plus au jeu, comme sur Takodana, lorsque le Premier Ordre attaque le repère de Maz : les Tie Fighters filent dans le ciel, les explosions enflamment l'écran, les étincelles de blasters jaillissent de toutes parts... Clairement, en terme de « mise en scène », ce nouveau jeu LEGO en met plein les yeux, et ces séquences de shoot sont plus que bienvenues.

On rencontre plusieurs phases de ce genre à travers le jeu

Le problème, c'est que les commandes sont assez mal pensées : on aurait aimé pouvoir viser avec le stick droit, par exemple, car pour quiconque aura joué ne serait-ce qu'un peu à un shooter, le geste est beaucoup plus naturel. En outre, le réticule de visée est parfois assez imprécis, et il faudra donc faire plusieurs tests puis ajuster son tir, avant d'arriver à toucher un ennemi. Forcément, on perd pas mal en dynamisme... Ce qui n'est pas forcément le point fort de ces passages, où la difficulté inexistante ne génère aucun sentiment d'urgence. Si les premières phases de gunfight de ce genre sont amusantes, on finit vite par décrocher, éliminant les ennemis méthodiquement, un par un, sans y prendre plaisir.

De la variété...

Néanmoins, il faut saluer les efforts déployés par Tt Games pour proposer un jeu plein de rythme. LEGO Star Wars a le bon goût d’enchaîner de manière assez fluide les séquences de jeu différentes. Outre les phases de plate-formes classiques de la série, on trouvera au cours de l'aventure différentes phases à véhicule, que ce soit façon rail-shooter (l'évasion du Faucon Millenium, avec Rey et Finn), ou dans des zones plus ouvertes, sur terre ou dans l'espace. Ces dernières sont fichtrement bien fichues et rappellent presque les sensations ressenties sur un titre tel que Star Wars Rogue Squadron II : Rogue Leader. Les scènes, particulièrement dynamiques, reposent sur une belle impression de vitesse, la bonne exploitation de la bande-son officielle de Star Wars et une construction intelligente des niveaux. On file à toute vitesse, bombardant de lasers les véhicules ennemis, et franchement, on adore ça ! Cela aurait pu être encore mieux si la direction n'avait pas été aussi sensible : une légère flexion du joystick et votre vaisseau fait une embardée peu gracieuse. Il vous faudra un petit moment pour avoir le contrôle total de votre véhicule, mais cela ne vous garantira hélas pas une précision de tous les instants. Ce qui peut se révéler frustrant.

… Et pas mal d'agacement

« Frustration », voilà le mot qui pourrait résumer ces heures de test. Car il y a un domaine où LEGO Star Wars VII pèche particulièrement : celui de l' affordance. Derrière ce mot un peu barbare se cache en fait une notion de game-design toute bête. Ainsi, la forme d'un objet, la perception que l'on a de lui où de ce qui l'entoure doit permettre aux joueurs de comprendre qu'une interaction est possible. C'est, d'une certaine manière, une façon d'orienter celui qui tient la manette, sans le prendre par la main pour autant. Le sujet est particulièrement intéressant mais nous n'avons hélas pas le temps d'en débattre aujourd'hui : parlons plutôt du gros problème de ce jeu LEGO. Un souci que votre serviteur rencontrait déjà dans les précédents jeux LEGO, soit dit en passant.

Le fait est que beaucoup trop souvent, le joueur est bloqué parce que le jeu fait mal comprendre ce qui est possible de faire, et ce qui ne l'est pas. D'abord parce que les décors sont souvent inutilement surchargés et qu'ils mettent mal en avant les items avec lesquels une interaction est possible. Le problème prend de l'ampleur avec le multi-build, dont nous parlions plus haut : on construit souvent un peu au hasard, afin de voir toutes les possibilités, pour finalement tenter une combinaison un peu hasardeuse. Ensuite parce que le jeu vous laisse souvent dans le flou quand à l'endroit vers lequel vous diriger. C'est ici un problème de level-design, qui devrait être pensé de telle manière que le joueur progresse à travers un niveau de manière naturelle, car la construction de celui-ci lui suggère plus ou moins où aller.

Attention, il ne s'agit pas de difficulté ou bien d'une volonté des développeurs de créer un titre alambiqué : il n'en est rien, les structures des différents niveaux sont relativement simples, mais leur construction est parfois un rien chaotique, comme si l'on avait disposé ici et là des éléments sans penser à une quelconque cohérence. Cela étant, le problème n'est pas généralisé au titre dans son ensemble puisque la progression est assez linéaire. Il est toutefois regrettable de constater que, lorsque le titre ne tient plus le joueur par la main, celui-ci se retrouve perdu dans un ensemble aussi mal structuré.

Les images utilisées pour illustrer ce test sont issues de la version PlayStation 4 du titre