Attendu de longue date par les amateurs d'aventures atypiques et d'ambiances spatiales, mais aussi par les férus de réalité virtuelle puisqu'il s'agit de l'un des titres de lancement de l'Oculus Rift, ADR1FT s'est offert à nous à l'orée de ce mois d'avril 2016. Faisant inévitablement penser au film Gravity de par son concept, le jeu se décrit d'après ses développeurs comme l'expérience de la solitude et de la survie en milieu hostile et silencieux, avec quelques inspirations héritées de 2001 comme le précise l'équipe. Manque de bol, il n'y aura ici ni mystère, ni même aventure au sens propre du terme pour combler le vide intersidéral qui entoure un concept pourtant alléchant sur le papier...
Un bon concept, trop vite épuisé
Nous vous en parlions déjà lors de notre preview réalisée il y a quelques semaines : ADR1FT est lent… Très lent… Trop lent… Du fait de son gameplay basé sur l'apesanteur et sur un habile concept de jauge d'oxygène servant à respirer et à se déplacer, ADR1FT n'est pas le genre de jeu qui se savoure à toute berzingue. A dire vrai, les développeurs ont même dans l'idée que les joueurs vont avant tout user de l'immobilité et des petits boosts pour se déplacer dans l'espace.
Manque de bol, on s'ennuie tellement face à la monotonie des objectifs, des environnements, et des situations, que notre seule envie est de rusher le jeu... Néanmoins, l'ambiance et l'épopée graphique proposées par ADR1FT constituent deux très bons points, malheureusement entachés donc par l'exemplaire pauvreté de la composante aventure du jeu, lequel tourne en rond au bout de 10 minutes et ne parvient pas à nous faire oublier les travers d'un game design qui rebutera une grande partie des joueurs.
Gravity sous prozac
Commençons par le commencement, au moins pour ceux qui n'auraient pas lu notre aperçu. Vous incarnez donc ici le commandant Oshima, une astronaute qui tente de regagner la Terre après l'explosion de sa station, incident qui a coûté la vie à tout l'équipage. Au fil de son pèlerinage trépident, qui consiste ici à aller activer une myriade de stations informatiques pour repartir sur Terre en navette, Oshima va récupérer quelques Audiologs pas vraiment mémorables histoire d'enrichir le background assez fin du titre et d'agrémenter un script faiblard. On remarquera aussi deux ou trois séquences musicales, loin d'être inoubliables, mais qui font quand même le travail. Là où ADR1FT pèche violemment, c'est sur son côté "gravity immobile" : rien ne bouge si ce n'est quelques morceaux de station inoffensifs et l'on aurait espéré ici des séquences un peu plus dingues, avec des morceaux de la station qui se percutent entre eux, des débris nous forçant à agir vite et sous pression. Autant de séquences qui auraient crevé l'écran, surtout en réalité virtuelle. Mais il n'en est rien.
Quasiment aucune mise en scène ne viendra troubler votre train-train. On tentera parfois, dans un élan d'audace désespéré, quelques sorties de route, en marge des sentiers battus, pour aller un peu plus vite vers l'objectif et risquer l'étouffement, mais qu'importe... Si l'on doit passer les 5 prochaines minutes à errer dans des couloirs copiers-collers, à avancer aussi vite qu'une étoile de mer unijambiste pour parvenir sans trop de difficulté à notre objectif, cela vaut le coup de pimenter un peu le concept, non ? Encore faut-il que l'on trouve sur notre route une ou deux bonbonne d'oxygène afin d'éviter la mort et le retour au checkpoint... Ces tentatives constituent d'ailleurs nos seuls moments de folie où l'on se sent véritablement « jouer le jeu », perdu à des kilometres de la surface de la Terre, les yeux rivés sur cette planète à l'atmosphère parfois incompréhensiblement verdâtre, comme si les développeurs voulaient nous dire "Regardez, on a tenté de faire des aurores boréales, ça ne rend pas bien, on le sait, mais on l'a quand même intégré au jeu".
"Jamais vu un radar aussi vicelard..."
En dehors de ces écarts de conduite, conséquences d'un ennui profond vécu sur la "trame classique" du jeu, il n'y a pas grand-chose à retenir de l'aventure. Cette dernière est belle, vous mettra une belle claque durant les premières minutes, et procure une véritable sensation de solitude, en plus d’énerver par son absence de variété et par son HUD indigeste.
Entre surcharge abusive de l'affichage tête haute et radar très mal conçu, vous risquez fort de pester. Parlons-en d'ailleurs, de ce fameux radar : à moins que nous n'ayons rien compris à son fonctionnement, la mini-map n'est pas du tout pratique dans le contexte spatial puisqu'il s'agit là d'un plan 2D servant à se repérer dans un volume 3D où la moindre erreur de direction coûte du temps et de l'oxygène, l'un déterminant votre ennui sur le jeu, l'autre, votre potentiel game over…
Ajoutez à ça des changements subites de marquages ainsi qu'une abondance illisible de points d’intérêts listés et vous obtenez le pire guide pour vous frayer un chemin dans les méandres aussi célestes que répétitifs. Finalement, ce bon vieux ADR1FT relève plus de l'excellente démo technique pour Oculus Rift que du véritable jeu capable de captiver les joueurs sur une période supérieure à une quinzaine de minutes, que ces derniers soient avec ou sans casque.
Intérêt zero sans réalité virtuelle ?
Par ailleurs, il est bon de rappeler que l'expérience VR sur le titre est tout à fait concluante et vous immerge totalement grâce à un affichage sphérique du HUD et à la présence d'un véritable scaphandre dans lequel vous pouvez bouger votre tête et tenter d'observer au mieux votre environnement, sans repères, sans gravité, et sans cette satanée lenteur dans les déplacements de tête latéraux, nécessaires pour bouger l'angle de vue et observer les salles dans lesquels vous progressez… L’intérêt est donc légèrement plus prononcé en VR, mais la réalité rattrape très vite les joueurs : ADR1FT, même en VR, ne vous captivera pas bien longtemps. Pour un jeu à 20€ à sa sortie, une durée de vie de 4 à 5 heures avec 90 % de séquences répétitives ne suffit malheureusement pas pour satisfaire nos attentes, malgré une ambiance atypique et plutôt savoureuse dans les premiers instants.
Nous avons fait le test du jeu sans Oculus Rift étant donné que le jeu requiert la version commerciale du casque et que nous ne l'avons toujours pas reçu. En revanche, nous avons pu essayer le jeu sur le Rift durant notre preview et pouvons donc estimer que les possesseurs du casque peuvent considérer la note du jeu comme rehaussée de deux points tant l'immersion procurée par le casque VR constitue un excellent point positif, malheureusement à la portée d'une poignée de joueurs uniquement..
Points forts
- Un concept intéressant : survivre en se déplaçant le moins possible...
- La beauté des 10 premières minutes...
- Une ambiance sonore minimaliste, timide, mais globalement réussie
- Un seul environnement... mais quel environnement !
- Extrêmement immersif en réalité virtuelle
Points faibles
- la nullité absolue des objectifs : va ici, active ce PC, va là-bas, active cet autre PC...
- L'ennui total éprouvé sur les 4 heures restantes...
- La lenteur abusive des déplacements
- Une recette qui ne change pas du début à la fin... Ah si, parfois il y a de l'esquive de zones électrifiées... youhou.
ADR1FT a tout de la bonne démo VR qui aurait dû en rester à ce stade. Casque de réalité virtuelle vissé sur la tête, le monde créé par Three One Zero s'avère splendide et l'immersion "à l'intérieur du scaphandre" fonctionne terriblement bien. Toutefois, pour ceux qui n'ont pas de casque, comme pour ceux qui comptent jouer au jeu plus de 15 minutes, il faut bien avouer que le titre manque de tout. Zero variété dans les missions et le déroulement, une aventure qui arrive à être terriblement longue et ennuyeuse pour seulement 4 à 5h de jeu (vendu 20€ au lancement), des déplacements horriblement lents, des checkpoint relativement éloignés, bref il s'agit là d'une bonne démo technique, assurément, mais le côté ludique de la chose semble être passé à la trappe... Dommage.