Sorti le 10 décembre 2015, Devilian est un MMO Action RPG développé par Ginno Game et exploité en occident par Trion. Distribué sur un modèle free-to-play imparfait, Devilian tente l'alliance des codes sociaux et le contenu propre au MMO avec le gameplay et l'approche frénétique du Hack'n Slash. Pour l'heure, malgré les bonnes idées que l'on retrouve dans le titre, le résultat est en demi-teinte pour Devilian. Il faudra certainement repenser le genre et combler les défauts majeurs pour pouvoir parler d'une réelle évolution du MMO.
Histoire et classes
N'y allons pas par quatre chemins, l'histoire de Devilian ne nous a pas captivé plus que ça. Il est une fois encore question de démons primordiaux qui reviennent sur Nala pour anéantir l’humanité. Afin de repousser les envahisseurs, la gardienne de Nala décide de faire appel aux héros mi-démon qui ont jadis su les contrer. Manque de chance, le rituel d'invocation vous rend amnésique et il vous faut repasser par une phase de pex pour retrouver tous vos pouvoirs...
À dire vrai, c'est, à peu de choses prêts, les indications que l'on vous donne durant la séquence vidéo d'introduction. Et la suite du scénario, sans être démagogue, ne nous invite pas à suivre l'intrigue. Quelques informations sont probablement disséminées au court de votre aventure, mais il faut bien s'accrocher si vous souhaitez suivre l'histoire principale parmi la surabondance de quêtes plus fades les unes que les autres.
Comme la plupart des MMO, le premier contact se fait via la création de votre personnage. Si vous n'avez pas de réelles motivations pour jouer à Devilian, il y a des chances que votre expérience s'achève ici. Le jeu ne comporte pas plus de quatre classes, de type « gender locked », c'est-à-dire que vous n'avez pas la main mise sur le choix du sexe de votre classe. Si bien que les options se font entre la Maléficieuse, magicienne qui maîtrise des éléments, le Guerroyeur, classique guerrier à deux armes, Méphistombre, un assassin de l'ombre et l’Armageddine, une fillette qui manie le canon. Et si l'on est malheureusement habitué à voir régulièrement des femmes peu vêtues à forte poitrine comme protagoniste, Devilian franchit allègrement la ligne du bon goût avec cette petite fille en talons aiguilles, cuissardes et ensemble « mini-jupe + culotte apparente ». Un chara-design tristement pathétique et dénué d'originalité. On se consolera tant bien que mal sur le système de personnalisation du personnage qui, même s’il n'est pas particulièrement complet, a le mérite d'exister. Ce qui, reconnaissons le, n'est pas chose courante dans les Hack'n Slash.
Graphiquement, le jeu s'en sort plutôt bien, surtout grâce à la variété des décors et à la DA plutôt qu'à une réelle prouesse technique. Le bestiaire est particulièrement bien fourni et s'insère parfaitement dans l'univers que met en place Devilian. Les effets sonores collent aux effets dévastateurs des compétences, mais aucune musique ne m'a particulièrement marqué. À souligner que l'intégralité du texte et des dialogues ont été traduit en français, ce qui est assez rare de la part d'une production coréenne.
Gameplay et optimisation
Devilian est l'alliance entre le MMORPG et le ARPG. S'il reprend les codes du MMO dans ses fonctionnalités et son contenu, il emprunte d'avantage les codes de l'action RPG pour son gamplay. Particulièrement réactif et dynamique notamment grâce à une esquive similaire à celle de Wildstar, vous avez une pléthore de compétences de zone pour venir à bout de vos adversaires, qui se moquent totalement de la notion de combat à la loyale, en vous attaquant en surnombre. S'ajoutent, aux compétences de votre classe, des compétences de spécialisation. Au nombre de trois par classe, les spécialisations débloquent de nouvelles compétences et des passifs liés à celles-ci. On regrette toutefois le manque de choix à l'intérieur même de ces spécialisations. Autre particularité du titre : mi-démon, les Devilians peuvent faire appel à leur obscur héritage pour éveiller de manière temporaire de nouveaux pouvoirs. Dans les faits, si cette transformation comporte de réels avantages en PvP pour certaines classes, elle reste trop anecdotique pour d'autres.
Seulement quatre classes, trois spécialisations sans de choix réel... et pourtant Devilian propose une optimisation impressionnante si vous vous en donnez les moyens (et le temps). Choisir les stats de votre équipement, la gestion des résistances élémentaires comme pour Path of Exile, les runes de compétence du mode Devilian, les artefacts à sertir dans votre pièce d'équipement, le raffinage pour rejeter la valeur des statistiques d'une pièce d'armure ainsi que des enchantements… être totalement optimisé, vous demandera beaucoup de temps. Mention spéciale au système de Talisman, qui reprend le système des cartes d'évolution de Warframe ainsi que le système de Maîtrise qui ressemble au Parangon de Diablo 3 et donne la possibilité de monter des passifs grâce à l'expérience accumulée une fois le niveau maximum atteint. Malheureusement, si l'optimisation est un moyen intéressant de rajouter de la durée de vie et donner un sens au farm, il ne devrait pas être un but, mais un moyen d'arriver aux contenus difficiles. Et c'est là que le bas blesse : Devilian manque cruellement de difficulté.
Joueurs contre environnement
Qu'on se le dise, il est rare de voir un MMO F2P proposer autant de contenu PvE. Mais quantité ne rime pas forcément avec qualité. Les quêtes sont en mousse, et ce n’est pas le mannequin homonyme qui dira le contraire (pardon). Tuer des monstres, parler à un PnJ, ramasser ou activer un objet. Voilà l'intégralité des quêtes que l'on trouve dans Devilian. En 2015, c'est loin d'être suffisant. De plus, elles sont fades du début jusqu'à la fin. Il est d’ailleurs particulièrement étonnant de voir une quantité si impressionnante de quêtes sans saveur alors que l'on aurait préféré en voir moitié moins, mais bien plus qualitative. On arrive même à penser que l'alliance ARPG et MMORPG montre ses limites lorsque l'on passe plus de temps à se déplacer d'une quête à une autre qu'à les réaliser. Et cela, sans même lire ou écouter les PnJ nous raconter leurs malheurs...
Par chance, enchaîner les quêtes ne constitue pas la seule méthode pour gagner de l'expérience. Devilian regorge de donjons. Au nombre de 17, il vous est possible d'y entrer seul ou accompagné de deux autres joueurs. La difficulté s'adaptant au format. Ou du moins, la non-difficulté.
Défaut majeur du titre, le jeu est bien trop simple. Et ce n'est pas le mode héroïque ou infernal au niveau max qui rajoutera de la difficulté étant donné qu'un niveau d'objet minimum est requis pour y rentrer : à partir du moment où vous avez l'équipement nécessaire, la potentielle difficulté se dissipera, si bien que la stratégie adoptée par les joueurs est de pull le plus de monstre possible pour "aoe" dans le tas. Qui plus est, la mort d'un ou de plusieurs joueurs n'est pas synonyme d’échec. Un simple "rez" sur place moyennant une petite somme et vous voilà de retour en combat.
Il est également regrettable de voir que seulement 4 donjons, sur les 17 proposés, sont reportés en end-game en version héroïque puis infernal. Gâchis particulièrement ennuyeux quand on sait le nombre de donjons qu'il est nécessaire de terminer pour s'optimiser et avoir accès au dernier donjon disponible : le donjon archidiable. Rayons de lumière dans ce paysage trop accessible, les donjons Archidiable proposent du challenge pour peu qu'on les fasse au niveau indiqué. Au nombre de deux, l'un est disponible au niveau 46, l'autre au niveau 52 (niveau maximum). La raison de la complexité de ce type de donjon est simple : il est tout simplement impossible de ce "rez" en combat. Dommage que ce ne soit pas la norme...
Entre quelques quêtes sans saveur et deux à trois donjons bien trop simples, vous avez la possibilité de passer vos nerfs dans des terrains de chasse infinie. Ces zones de farm disposent de créatures « Élites » avec un temps de repop relativement court si bien qu'il est possible d’enchaîner les packs à l'infinie. On y retrouve des quêtes journalières particulièrement généreuses en expérience. Attention, ne vous y attardez pas trop longtemps seul, la difficulté est un poil supérieur aux quêtes de base. Les créatures sont "Elites" tout de même !
Joueurs contre joueurs
Si vous n'êtes pas un grand amateur de PvE, Devilian propose également du PvP avec ses BG, appelés Arènes. Divisé en trois catégories : 3v3 à mort, 6v6 contre des boss, et un 20v20 capture de point. Nous n'avons malheureusement eu accès qu'à cette dernière et le résultat ne nous a pas spécialement convaincu. Si on met de côté le sérieux problème d'équilibrage entre les classes privilégiant les personnages à distance, le fonctionnement même du BG est particulièrement classique. On se retrouve à bouger en bus de point en point. Étrangeté du mode, il est très difficile de récupérer de la vie, si bien que dans un duel, vous allez tuer et mourir à tour de rôle. Au final, il est inintéressant de survivre in extremis à un combat si c'est pour en commencer un autre avec 10 points de vie...
Guilde me more
Qui dit MMO, dit guilde. Et Devilian n'échappe pas à la règle. Coffre de guilde, expérience et talents de guilde, bonus aux membres... les outils et les possibilités pour les chefs de guilde ne manquent pas. De plus, les guildes peuvent s'affronter via des Terrains de chasse infinis, qui offrent, selon le canal, des zones de PvP sauvage pour peu que votre guilde tente d'en prendre le contrôle. Ainsi, la guilde ayant récolté le plus de points prendra le contrôle temporaire de la région, inscrivant son nom sur la carte et augmentant ses récompenses dans cette même zone.
Autre avantage de faire partie d'une guilde dans Devilian, c'est de pouvoir participer aux donjons de guilde. Ces donjons offrent des combats de boss à 9 joueurs, qu'il faudra vaincre en moins de 10min. N'ayant pu tester cette fonctionnalité, espérons que la difficulté tant recherchée se situe icin, même si les rumeurs ne vont pas dans ce sens...
Et le modèle économique dans tous ça ?
Devilian est un MMO annoncé comme F2P. Si c'est vrai pour certain, ce n'est pas forcément le cas pour d'autres. Alors que l'on pourrait s'attendre à une boutique P2W comme bon nombre de MMO coréen, il n'en est rien, chaque élément de la boutique est accessible IG sans débourser le moindre pécule. Les bonus accordés dans les divers packs et pour les abonnés ne donnent pas non plus de bonus significatif pour les joueurs, du moins pas assez pour remettre en cause l’appellation F2P. Pourtant, il y a bien une faille dans le modèle économique, et on la doit à Trion, l'éditeur de Devilian. En effet, sous couvert de sécurité, tous les comptes n'ayant jamais dépensé un centime pour l'un des jeux de Trion (Rift, Defiance, ArcheAge, Trove ou Devilian) se voient affublés d'un jeu relativement réducteur :
- Vous ne pouvez murmurer qu'à vos amis.
- Vous pouvez acheter des objets à l'hôtel des ventes, mais ne pouvez pas en vendre.
- Vous ne pouvez pas proposer d'échanges en jeu, mais vous pouvez toujours les accepter.
- Notre facteur vous enverra vos courriers, mais il n'acceptera pas de messages de votre part.
- Vous ne pouvez pas demander des objets de la Boutique à des joueurs que vous ne connaissez pas, mais vous pouvez toujours envoyer des requêtes à vos amis.
Sous couvert de la sécurité anti-bot, cette solution de limitation fait doucement grincer des dents au regard du nombre de messages IG de vente d'argent ou autre joyeuseté du genre. Palme d'or au système de mégaphone qui permet de passer un message à tous les joueurs du serveur sans qu'ils ne puissent le cacher. Trion, les gold-seller vous en remercient.
Difficile de faire un test sans évoquer les problèmes de maintenance que rencontre l'un des serveurs Europe depuis la release. Si les joueurs ont été dédommagés à la suite d'un rollback des serveurs de près de deux jours, entraînant la perte de l'équipement acquis durant cette période, la compensation ne fut pas la même pour tout le monde. À titre personnel, l'équipement que l'on m'a rendu était bien supérieur à celui que j'avais, mais l'inverse est également vrai pour d'autres joueurs. Toujours est-il que le problème ne semble pas encore réglé et le serveur Seadrif subit régulièrement des maintenances interminables.
Points forts
- Un bestiaire et des environnements riches et variés
- Un large choix d'optimisation
- Beaucoup de contenu pour une release et de réelles bonnes idées
Points faibles
- Un chara-design honteux et stéréotypé couplé au « gender locked »
- Une quantité astronomique de quêtes sans saveur
- Manque de difficulté en PvE et un déséquilibre des classes en PvP
- Un end-game décevant au regard du contenu impressionnant du leveling
- Seulement 4 classes et des spécialisations peu malléables
Devilian n'est et ne sera sans doute jamais LA référence du genre. Trop cliché, trop simple et plusieurs fausses notes font que, passé l’excitation du début, farmer encore et toujours les mêmes donjons ne suffit plus. Pourtant le jeu n'en reste pas moins agréable à jouer et possède de réelles bonnes idées en PvE. Qui plus est, plusieurs améliorations sont à venir : on connaît déjà la prochaine classe qui abordera, une fois n'est pas coutume, les traits d'une femme sursexualisés et Devilan dispose de toute l'infrastructure pour accueillir des RAID. Fan du genre MMO et Hack'n Slash, Devilian peut être une agréable solution en attente de Lost Ark, qui espérons-le, saura combler toutes les lacunes.