La chasse aux fantômes n'est pas chose aisée. Entre la terreur provoquée et leur manque d'enveloppe physique, on peut supposer que la tâche est hautement compliquée. Mais quand le principal problème vient de la maniabilité au GamePad, c'est une toute autre histoire, qui nous est malheureusement contée dans Project Zero : La Prêtresse aux Eaux Noires.
Le Mont Hikamiyama n'est certainement pas la destination de vos prochaines vacances. Outre son surnom « La Montagne de la Mort » qui met tout de suite en garde les potentiels aventuriers, ce lieu autrefois idyllique est aujourd'hui connu pour les fréquents suicides et les disparitions mystérieuses qui s'y déroulent. Les trois protagonistes vont tour à tour visiter les lieux, Camera Obscura à la main, pour découvrir les secrets qui les hantent. C'est avec frissons que l'on retrouve une ambiance digne du cinéma d'horreur japonais, avec tous les codes que ce dernier porte en lui. Des scènes d'une atrocité visuelle édifiante, une intense pression psychologique, des possessions maléfiques et des personnages principaux d'une incroyable passivité, plus spectateurs qu'acteur.
Et le malheur surgît
Cette passivité des protagonistes se retranscrit bien évidemment dans le gameplay. Pour faire simple, on peut juste marcher, courir, ramasser des objets au sol et prendre des photos. Ce manque d'action et d'agilité a toujours été un élément important dans les survival-horror de cet acabit. Malheureusement dans ce Project Zero, c'est extrêmement mal maîtrisé. Alors oui, la série nous a habitué à un contrôle lent et peu pratique quand il s'agit d'échapper aux spectres qui nous poursuivent. Mais ici, l'utilisation du GamePad en tant qu'appareil photo, bien qu'ingénieuse, s'avère catastrophique. Alors qu'on est pressé par la menace, nos yeux passent frénétiquement de l'écran TV à l'écran GamePad, car ils sont tous les deux indispensables : l'écran TV est le seul vrai moyen de se déplacer car on a une vue à la troisième personne plus large alors que l'écran de GamePad est le seul moyen de voir les points faibles des ennemis. Dans la pratique, on perd totalement le fil, surtout couplé à la lenteur des déplacements. Alors oui, l'effet de panique, sans doute voulu, est présent, mais c'est largement la frustration et l'énervement qui prédominent. D'autant plus que les esprits maléfiques ont tendance à se mettre sur notre position (nous passant à travers), nous obligeant alors à nous déplacer « rapidement ». Quand ils sont plusieurs, forcément, c'est le dawa.
Mais le gameplay n'est au final pas le seul problème de Project Zero. A vrai dire, les phases d'exploration ne sont pas logées à une meilleure enseigne. On se contente souvent de suivre le chemin indiqué par les traces spirituelles, nous pointant systématique la bonne direction. Les quelques bifurcations que l'on peut se permettre nous amènent souvent à des objets comme du film supplémentaire pour les photos. Mais le plus dommageable, c'est de se rendre compte que le titre nous ramène toujours aux mêmes endroits, sans grands changements, sous prétexte qu'on joue avec un personnage différent. Pourtant, que l'on soit Miu Hinasaki, fille de l'héroïne du premier opus, Yûri Kozukata, une jeune femme capable de percevoir les esprits ou encore Ren Hojo, écrivain poursuivi par des rêves (ou souvenirs enfouis ?) macabres, ça ne change pas grand-chose et on ne prend pas de vrai plaisir à revisiter les mêmes environnements.
Tout n'est pas à jeter
Ce qui est navrant, c'est que La Prêtresse des Eaux Noires fait partie de ces jeux qu'on aurait aimé aimer. Entendez par là que les histoires qu'il veut raconter et le cadre dans lequel il veut mettre le joueurs sont initialement de très bonnes raisons de se laisser tenter. Abordant des thèmes comme l'occultisme, la violence, l'amour ou encore (et surtout) le regret, il essaie de jouer avec les émotions et y parvient souvent. Peu importe si les jump scare sont totalement inefficaces (mais je n'ai jamais été bon client il faut dire), c'est ce qu'on peut imaginer derrière qui marque le plus. Des images à déconseiller aux plus jeunes car bien plus qu'un GTA ou un COD, le titre ne galvaude pas son logo PEGI 18. Voir un homme poursuivre de jeunes filles pour leur plonger une lame dans la gorge avant de les décapiter, tout ça à l'écran, ce n'est pas vraiment à la portée de tous les yeux...
Dans ce qu'il fait bien, ce Project Zero garde aussi tout ce qui tourne autour de l'utilisation théorique de la Camera Obscura, malheureusement occulté par le gameplay général. L'idée de bouger son GamePad de façon à prendre les photos dans le bon angle pour découvrir des secrets ou exorciser plus d'âmes a quelque chose d'immersif et on peut toujours améliorer l'appareil avec des objectifs pour des effets précis ou plus puissant. En combat, prendre la photo au bon moment et capital, si possible au dernier moment en attendant l'assaut ennemi, ce qui malgré des temps d'attente parfois trop long, s'avère être un fonctionnement plutôt intéressant. Mais est-ce assez pour oublier tous les défauts ? Malheureusement non. De cette manière , il est difficile de totalement conseiller ou déconseiller ce Project Zero. De ce que je vois, il ne me semble adapté qu'aux fans absolus, sans doute les seuls capables de passer outre ces nombreux écueils. Certes, la vingtaine de chapitre passe plutôt vite, mais ce n'est pas le genre de jeu sur lequel on aime traîner 50h de toutes façons. Pour les autres joueurs, il vaudrait mieux passer votre chemin.
Points forts
- L'horreur à la japonaise
- Rien ne nous est épargné en termes d'imagerie sanglante
- Dans le principe, le jeu au GamePad facilite l'immersion
Points faibles
- Maniabilité trop lourde en combat pour le combo GamePad/TV
- L'exploration trop soporifique
- Indicateurs de danger très mal fichus et induisent en erreur
- On revisite bien trop souvent les mêmes zones
- Jump scare inefficaces
Les possesseurs de Wii U attendaient beaucoup de ce Project Zero : La Prêtresse des Eaux Noires. Les survival-horror à l'ancienne ont toujours du succès et c'est bon de savoir que des licences ne font pas le pas vers l'action. Malheureusement, arborer tous les codes du genre n'empêche pas l'accident et un gameplay lourdingue ne sauve pas la bonne idée d'utiliser le GamePad comme appareil photo et seule arme. Su ce nouvel opus a des choses à raconter, les combats et l'exploration sont bien trop fastidieux pour que l'on puisse vous le conseiller. Bref, vous êtes prévenus.