Qui n'a pas déjà rêvé de conquérir l'espace ? Avec le succès fulgurant de jeux comme OGame, et tous les dérivés qui ont pu en découler, la soif de conquête galactique des joueurs est pour le moins rassasiée. En quelques sortes, en tous les cas. Mais parmi cette foule immense d'OGame-like, à ne plus en savoir quoi en faire, quelques jeux arrivent à se hisser hors de l'eau pour offrir une expérience rafraîchissante à leurs utilisateurs. L'aventure Eplanet est bien plus qu'un jeu, c'est l'histoire d'un petit bonhomme, qui commence en 2007.
Les captures d'écran ont été prises avec le module FireShot de Firefox, version 0.98.77. Le fond d'écran, en jeu, étant fixe, cela produit un encart noir en-dessous sur les captures élargies (plus grandes que mon écran utilisé pour le test). Cet effet n'apparaît évidemment pas pendant la partie, et le fond d'écran s'adapte à la taille de l'écran.
Egalement, il faut savoir que la version mobile du jeu a été désactivée suite à la découverte d'une faille.
Les captures d'écran présentant des informations privées (notamment les ressources) ont été truquées pour camoufler, par sécurité.
C'est l'histoire d'un petit bonhomme, donc, étudiant français en ingénierie, qui en 2007 décide de publier son propre jeu en ligne, via navigateur, de stratégie spatiale en tour par tour. Créé uniquement avec la combinaison victorieuse de PHP, SQL et Ajax, le jeu s'adapte très bien au navigateur. Le début de toute une histoire, qui 8 ans plus tard, continue encore d'évoluer. Sans doute était-il loin de s'imaginer jusqu'où cela allait le conduire, lorsqu'il mit sur la toile la toute première version d'Eplanet. Très vite, le nombre de joueurs inscrits augmente. Et Vince, ce petit bonhomme, finit par être victime de son succès, et n'arrive plus à suivre le rythme de sa propre création. La preuve qu'un étudiant ne peut pas être Dieu.
Un gameplay pas si traditionnel
Outre ce petit trait d'humour, entrons dans le vif du sujet. Aux premiers abords, le jeu ne paraît pas cacher un réel potentiel. L'interface peut paraître lourde, il y a pleins de boutons, peu de texte, quelques infobulles cachées. Le nouveau joueur a vite-fait de décamper. La faute à qui ? La faute à une tête pleine d'idées, pardi ! Le jeu renferme une telle richesse, qu'il est difficile pour un non-initié d'en découvrir la facette tout de suite. Ce dernier ne se focalise alors que sur ce qu'il voit. Et c'est bien dommage. Pour les plus téméraires, qui auront la force de dompter cette première frayeur (qui n'a pas lieu d'être), celui-ci trouve vite ses habitudes : régler l'imposition et les heures de travail équitablement pour gérer le bonheur de sa population, gagner des ressources, construire de nouveaux bâtiments, puis attendre le tour prochain que ses investissements portent ses fruits. Rien de folichon, a priori, et pourtant...
Ces ressources ! Parlons-en. Le jeu se concentre autour de 4 ressources de base : or, nourriture, métal, et hydrogène. Ces ressources servent pour TOUT. Elles permettent de construire des bâtiments (logements et infrastructures), des unités militaires, de lancer des attaques, financer des recherches. Ceux sont ces ressources qui sont produites en masse, entre quelques centaines par les jeunes joueurs, et une dizaine de millions pour les plus gros. Le jeu utilise d'ailleurs un système bien pensé pour limiter les joueurs tellement énormes qu'ils écraseraient l'univers entiers à eux-seuls. Chaque ressource est ainsi taxée en or par des "coûts de stockages" proportionnels à la quantité de ressources que l'on a dans notre poche. Arrivé à un stade, il devient difficile de ne pas sombrer dans le négatif !
A ces 4 ressources, s'ajoutent les ressources rares et les biens de consommation. Les ressources rares sont l'épices et le cristal, et n'arrivent que vers le plus haut stade d'une partie, et servent à produire une unité spéciale du jeu (pour le cristal), ou essentiellement à répondre aux besoins des populations très aisées (pour l'épice et le cristal). Et comme elles sont rares, autant dire que les conflits n'ont pas été aussi rares pour se les approprier ! Le système fonctionne ainsi : une planète créée est aléatoirement soit : à épice, à cristal, rien du tout. Le nombre de planètes capable de produire ces deux ressources rares sont donc limitées, et en plus, il n'est pas possible d'exploiter autant que l'on veut ces ressources, un temps de régénération est nécessaire. Tout est fait pour les limiter, et c'est tant mieux.
Pour se développer, il est donc essentiel de produire les ressources de base. Mais il est également important de faire des recherches. Recherches qui débloqueront de nouveaux concepts, de nouveaux bâtiments, ou même d'autres recherches ! Il est ainsi possible d'allouer des chercheurs parmi sa population, tout comme pour produire les ressources, dans le but de compléter ses recherches. Il n'y a néanmoins pas de recette miracle, de recherches à faire avant d'autres, tout est fonction de la manière de gérer du joueur. Certains préfèrent plancher sur les recherches économiques, tandis que d'autres vont vite se jeter sur les recherches militaires pour sécuriser les environs ou s'étendre rapidement. Les deux stratégies se valent !
A la conquête de Cydonia !
Cydonia, c'est le nom de cette petite galaxie composée de plusieurs centaines de joueurs. Sachez qu'il existe un serveur payant, peuplé d'une poignée de dirigeants, et aux règles quelques peu différentes, remis à zéro à intervalle régulier. Mais le jeu, dans son entièreté sur le serveur Cydonia, est gratuit sans aucune publicité. Très vite, à force de recherche, et d'exploration sur le jeu, le joueur se rend compte de l'immense richesse cachée sur Eplanet, essentiellement au sein de la planète Sénat.
Ce Sénat Intergalactique regroupe les dirigeants en un seul lieu, pour un aspect communautaire hors du commun. On y retrouve plusieurs lieux : l'Agora, le Sénat, la Bibliothèque, la Bourse, les Organisations, et l'Institut de l'Elévation. Il est possible donc pour un dirigeant d'enfiler la toge de sénateur en devenant membre du Sénat. Quel intérêt ? Le sénateur paye chaque jour une taxe (définie par le président du Sénat, lui-même sénateur), il peut ainsi participer au sein de l'amphithéâtre et voter aux référendums, et élections sénatoriales. Le Sénat a toujours été au cœur des intrigues du jeu, et des grandes guerres galactiques entre grandes alliances. Il confère un aspect politique à un jeu pourtant essentiellement gestion et stratégie. C'est tout l'aspect Rôle Play qui prend alors son sens. Le sénateur peut ainsi participer aux élections, et se faire élire président du Sénat. Sera-t-il le grand président aimé par la communauté galactique ?
Ou deviendra-t-il le plus grand dictateur, reléguant Dark Vador au rang de pingouin de l'espace ? Car il faut savoir que le Sénat possède une armée, les Prétoriens, et que le président a quelques pouvoirs bien placés. Avec quelques amis, il peut rapidement causer violence et fracas à travers Cydonia. Car oui, en une journée, tout peut basculer. C'est la force d'Eplanet, sa capacité d'adaptation aux récits des joueurs. Le Rôle Play joue un rôle important dans le jeu, au même titre que la gestion de son empire. Il est évidemment possible de le mettre de côté, pour les joueurs pressés par le temps (5 minutes par jour suffisent), mais il est essentiel pour les plus férus et passionnés.
Les interactions dans l'amphithéâtre sont nombreuses, entre les dirigeants venus plébisciter leurs causes. Mais également à l'Agora, où il est possible de participer à des aventures inventées de toutes pièces par les joueurs, soit en publique, soit en privé en petit groupe. Les parties en cours sont d'ailleurs limitées à trois par joueur, pour éviter une invasion de récits. Il est possible, bien sûr, de fermer une partie terminée, pour pouvoir en ouvrir une nouvelle quand la limite est atteinte. Ces récits, sont appelés "salle de l'agora" dans le jargon d'Eplanet.
Le multijoueur, au cœur du jeu
Il ne faut pas l'oublier, Eplanet est un jeu d'abord multijoueur. Ce qui veut dire : interactions. Il est possible de créer des alliances (limitées à 6 membres). Très vite, des métas-alliances apparaissent (regroupement d'alliances diverses), pour former des forces puissantes. Les guerres entre métas-alliances sont souvent grosses, dévastatrices, et se renouvellent régulièrement. Les causes des guerres sont souvent une envie de s'étendre (conquérir de nouvelles planètes, ou de nouvelles lunes), mais aussi le fait d'espionnage ou simplement par une volonté de suprématie. Car oui, il est courant de voir des dirigeants trahir leur alliance en offrant quelques informations à d'autres intéressés.
On voit ainsi apparaître trois courants de pensées chez les joueurs. Les expansionnistes, les neutres, et les pacifistes. Ces trois catégories ne sont pas fixes, et ne sont pas non plus une étiquette. Il est libre à chacun de définir sa voie. Le pacifiste étendra son empire par la colonisation, et privilégiera la diplomatie. Tandis que l'expansionniste aura régulièrement recours aux armes.
Quelques lacunes entachent un tableau prometteur
Il faut savoir qu'à par le développeur et propriétaire d'Eplanet, le reste du jeu est rendu vivant par la communauté de joueurs. Il n'y a pas de véritable équipe pour s'occuper du jeu. Et c'est le principal problème. Vince, le propriétaire et fondateur, n'a pas forcément le temps pour s'occuper de son petit bijou. Eplanet est un jeu Made in France, certes, mais surtout indépendant et amateur. Ce qui veut dire, aux moyens financiers limités. Une fonction de compte premium, n'offrant aucun bonus sur les autres joueurs, mais étendant les possibilités RP (comme la possibilité d'avoir des personnages secondaires, dits avatars) a été implémenté pour financer le serveur. De même, une équipe de joueurs passionnés s'occupe de régler les litiges entre joueurs (sous le nom du Conseil des Sages). Mais une équipe de joueurs passionnés, bénévoles, ne fait pas tout.
Les mises à jour du jeu tardent à arriver. Et les corrections de bug sont parfois longues. Heureusement, quand un problème arrive, Vince est sur le pont immédiatement. Ouf. Mais, cela découvre toute la faiblesse d'Eplanet. La communauté regorge de vie, d'idées, mais ces idées finissent rapidement par retomber au fond du puit. Le nombre de joueurs est passé de plus de 1 000 joueurs en 2010, à seulement 400 environs fin 2015, pour une bonne part la moitié non-active. Cela n'empêche pas le jeu de rester toujours aussi actif, les passionnés étant toujours sur le pied de guerre. Néanmoins, les lacunes commencent à peser. Et c'est terriblement dommage, pour un jeu avec un tel potentiel.
Points forts
- Une possibilité de Rôle Play infinie
- Un design rafraîchissant et innovant mélangeant 2D et 3D
- Une communauté de joueur forte et active
- Des heures et heures de jeu
- Convient autant aux joueurs occasionnels qu'aux joueurs à plein temps
- Le mélange Gestion/Stratégie/RP
Points faibles
- Rareté des mises à jour
- Parfois quelques jours avant la correction d'un bug gênant
- Une partie molle au début, intense au milieu, peu folichonne en fin de partie
- Aucune version mobile actuellement
Eplanet est une bonne surprise. Un produit peu connu, mais pourtant bien actif. Un mélange subtil de gameplay traditionnel, et de rôle play, donnant une couche finale assez bien développée. Le joueur se prend à devenir le dirigeant de son empire, à le développer, et participer en politique, pour défendre ses valeurs ou sa vision de l'univers. Il prend du plaisir à gagner des batailles, ou perdre, et devoir recommencer. Le taux de suppression de compte pour se réinscrire et repartir de zéro est important, signe d'un renouvellement sans cesse des parties et donc, d'une bonne durée de vie. Le jeu ne nécessite que quelques minutes par jour, mais il est possible d'y passer des heures, juste pour s'amuser. C'est la force d'Eplanet.