Il y a deux ans, Tearaway entrait dans la cour des grands et s'offrait un joli succès d'estime grâce à son ingénieuse utilisation des capacités de la PS Vita. Désireux de renouveler l'expérience sans casser son charme original, Media Molecule s'est remis au travail pour proposer une version PlayStation 4 de son titre. Avec succès ?
Si elle partage de nombreux points communs avec l'aventure originale, cette nouvelle version propose plusieurs nouveautés que nous avons résumé dans cet encart afin de vous faciliter la lecture du test. Les images comprises dans l'ensemble du test concernent la version PS4, mais le corps du texte qui suit cet encart est le même que celui de la PS Vita et vous permettra d'en savoir davantage sur l'ambiance du titre original, qui n'a que peu évolué lors du passage sur console de salon.
Le scénario d'Unfolded est sensiblement équivalent à celui de l'épisode Vita et ne se distingue que par les nouveautés de gameplay dues au nouveau support. On retrouve ainsi quelques objectifs supplémentaires mais également de nouvelles parties pour les niveaux, avec notamment l'arrivée de décors de nuit dans lesquels vous pourrez tirer profit des fonctions gyroscopiques de la manette pour orienter un faisceau lumineux. Pour le reste, c'est du côté du pad tactile qu'il faudra regarder avec notamment l'ajout du vent comme élément pouvant être façonné à notre guise, selon la direction dans laquelle on fera glisser notre doigt. Autre ajout intéressant qui sied parfaitement à l'incorporation de notre petite personne en tant que dieu de l'aventure, votre héros (ou heroïne) pourra notamment vous envoyer directement un élément avant de vous demander de le jeter avec force sur une partie du décor pour la détruire.
Le PlayStation caméra est également mis à contribution mais a le bon goût (ou plutôt l'intelligence) de rester facultatif. Si vous l'activez, vous verrez de temps à autre apparaître votre trogne dans l'environnement, toujours dans le but de rappeler qu'une passerelle s'est créée entre notre monde et celui de Tearaway. En brisant le fameux quatrième mur, l'aventure propose comme son homologue Vita un parti-pris original qui se justifie pleinement grâce au gameplay. Le changement de support n'aura donc pas eu de conséquence malheureuse pour cette version que l'on peut considérer comme un véritable remake de l'aventure originale, conservant tout son charme et s'embellissant même grâce à un affinage graphique bienvenu.
Si cette nouvelle version parvient à retranscrire avec efficacité l'expérience proposée il y a deux ans, elle n'est toutefois pas parvenue à en gommer son défaut principal, à savoir sa caméra qui s'oriente par défaut sur les points d'intérêts de l'environnement. Un choix qui permet de guider les joueurs occasionnels mais devrait faire pester les habitués du genre qui préféreraient sans doute avoir un contrôle total sur cette dernière. Il en est de même pour les phases de dessin encore trop imprécises et qui souffrent de la taille famélique du pavé tactile de la manette. Le résultat reste toutefois séduisant et sans appel pour l'aventure : Si vous n'avez pas encore joué à Tearaway, on vous conseillera sans hésitation d'essayer cette version Unfolded.
Un extrait du gameplay nocturne de Tearaway Unfolded sur PS4
Faisant partie intégrante du patrimoine vidéoludique, le genre plates-formes parvient encore aujourd'hui à séduire via des valeurs sûres comme Mario ou le « reboot » réussi de Rayman. Si Tearaway n'a nullement à rougir face à ces ténors, notons qu'il opère un certain changement dans la continuité grâce à son univers de papier. En effet, le soft de Media Molecule doit énormément à son ambiance à nulle autre pareille dans le sens où on évoluera constamment dans un monde où chaque élément du décor se plie, se déroule, se froisse. Au-delà de ce parti pris esthétique ne souffrant d'aucun défaut, d'autant que l'évolution artistique est constante à mesure qu'on progresse, le pitch de départ est lui aussi d'une fraîcheur vivifiante.
Oh mon Dieu !
Ainsi, après avoir choisi d'incarner Iota (ou son équivalent féminin, Atoi), le jeu opérera une habile transition entre notre monde, visible à l'écran grâce à la caméra de la Vita, et celui de Tearaway qui prendra place via une transition des plus réussies. On entre alors, au sens propre comme au sens figuré, dans le jeu dans lequel on va porter une double casquette, celle de Iota, qu'on dirigera tout au long de l'aventure, et celle de Vou, déité symbolisée par notre bobine qu'on verra à plusieurs reprises, à l'intérieur d'un soleil notamment, et qui pourra aider ledit Iota grâce à nos doigts et au pavé tactile arrière de la machine. Si le principe de départ ne manque donc pas d'originalité, ce concept interactif entre le monde réel et celui de pixels trouvera également écho dans des idées fort sympathiques à l'image de la séquence durant laquelle Iota essaiera de nous atteindre par tous les moyens possibles et imaginables. En parallèle à cette complicité unissant notre personne et notre avatar, il s'agira aussi d'aider le personnage central à avancer afin d'apporter une importante missive dans un monde gangrené par les Scraps, créatures n'ayant pour autre vocation que de tout détruire.
Vous voulez un jeu Vita ? Oh, juste un doigt...
En marge de son atmosphère, Tearaway entend bien faire comprendre à qui en doute encore que lorsqu'un jeu Vita est bien pensé en amont, les fonctionnalités de la console peuvent porter un concept. De fait, le soft de Media Molecule est un enchantement de chaque instant tant les développeurs ont réussi à injecter du sang neuf à mesure que les heures passent tout en trouvant un parfait équilibre entre réflexes et réflexion, cette intelligence résultant une fois encore d'une évolution en termes de jouabilité. En somme, si au tout début Iota aura très peu de mouvements à sa disposition, il récupérera après quelques heures le saut ou bien encore la roulade. Du coup, ces mouvements induiront de nouvelles phases de plates-formes, une approche différente des combats, etc. Pour autant, n'allez pas croire que le début du jeu sera morose puisque si Iota ne pourra pas vraiment compter sur ses capacités, ce sera à Vou (donc à nous... vous me suivez ?) de lui venir en aide. Il suffira alors, dans certaines zones prédéfinies, d'user du pavé tactile arrière de la Vita afin que nos doigts déchirent littéralement le sol pour venir à bout d'ennemis ou pour se servir des tambours qu'utilisera Iota comme trampolines afin de progresser. Mais ce n'est pas tout, car plutôt que de se baser sur deux ou trois idées, Tearaway en injectera constamment de nouvelles pour maintenir le joueur éveillé. De fait, plus on progressera et plus le gameplay sera étoffé en switchant constamment entre les actions de Iota et celles de Vou. Si cette complémentarité est donc au cœur du jeu, on aura toutefois un peu de mal à passer certains passages. Si diriger Iota tout en tapotant le pavé tactile avant pour éliminer des monstres sera chose aisée, il sera en revanche plus difficile d'utiliser deux doigts sur le pavé tactile arrière pour pousser des ponts de papier tout en usant du stick pour faire passer Iota.
Dessiner, c'est gagner
Si Tearaway aurait pu se reposer entièrement sur le contenu décrit plus haut pour haranguer les foules, il n'en est rien. En effet, en plus d'une excellente bande-son, riche et s'adaptant parfaitement à ce qui se passe à l'écran, le titre fourmille de petites trouvailles lui conférant beaucoup de charme. Parmi celles-ci, on citera la possibilité de dessiner divers objets réclamés par les nombreux NPC qui croiseront notre route, en échange, le plus souvent, d'un petit cadeau. On ne se fera alors pas prier pour créer la couronne d'un écureuil, des moufles pour se protéger du froid, une moustache volée à son propriétaire, etc. Marrant même si dans les faits, l'idée révèle vite ses limites. Le premier souci est lié à la visibilité lors de la phase de dessin, car après avoir choisi sa feuille de couleur, vous utiliserez un crayon virtuel pour tracer votre dessin. Outre le nombre de traits plutôt limité, et bien que vous ayez le choix de gommer une partie de ce que vous venez de faire, on aura du mal à être précis puisqu'en posant le doigt sur l'écran pour tracer, on ne verra plus ce qu'on fait sans parler de la difficulté à relier deux points. Problématique pour la phase suivante durant laquelle, via un ciseau virtuel, on coupera notre création pour la voir dans le jeu. En somme, s'il y a trop d'espace entre deux traits, le découpage nous donnera plusieurs formes qui ne ressembleront plus à grand-chose « in-game ». Si le tout est donc frustrant, ceci n'est pas vraiment préjudiciable vu que quelle que soit la qualité de votre dessin, ça ne vous empêchera pas d'avancer puisque les NPC seront tout le temps ravis.
Tu veux ma photo ?!
En plus de cet aspect, on nous demandera aussi de nous adonner aux joies de la photographie. Pour cela, il suffira de trouver des éléments ou des personnages entièrement blancs et de les mitrailler afin qu'ils retrouvent leurs couleurs. Ceci aura alors deux effets bénéfiques. Le premier rapportera des confettis que vous pourrez utiliser pour acheter plusieurs éléments de customisation (bouches, yeux, stickers...), afin de faire évoluer le look de Iota, ou pour récupérer des filtres pour votre appareil photo. Le second effet sera synonyme de patrons pour chaque élément photographié afin de les reproduire chez vous sous forme d'origamis. Idée excellente s'il en est d'autant que chaque modèle a un niveau de difficulté et, bien entendu, des indications sur la façon de procéder pour arriver à quelque chose de présentable. Dès lors, à vous les joies de créer un écureuil de papier et de pouvoir scander haut et fort : C'est moi qui l'ai fait ! Pour rester dans le domaine de la photo, notez que vous pourrez partager vos œuvres avec la communauté mondiale en les transférant online.
La perfection faite main ?
Au final, Tearaway ne se contente nullement de réciter la formule de LittleBigPlanet puisque tout au long du jeu, son seul objectif est de proposer aux joueurs une expérience, une véritable expérience aussi bien dans le fond que dans la forme. En résulte une symphonie d'originalité dont on se délectera de nombreuses heures durant. Si l'ensemble présente quelques imperfections, on ne peut que féliciter Media Molecule qui a réussi à user habilement des capacités de la Vita, non par souci d'obligation mais plutôt comme moteur d'un jeu frais, charmant et hypnotique. Du coup, on ne se fera pas prier pour craquer devant ce design fascinant, ce gameplay accrocheur ou ces idées foisonnantes. De là à dire qu'on se trouve devant le meilleur jeu de la Vita, qui plus est vendu pour une bouchée de pain, il n'y a qu'un doigt...
Points forts
- Esthétique somptueuse
- Bande-son riche et parfaitement adaptée aux événements
- Gameplay évolutif
- Bonne utilisation des capacités du Dualshock 4
- Terriblement intelligent dans sa progression
- Scénario marrant et astucieux mettant en avant le monde réel et celui du jeu
Points faibles
- Les phases de dessin peu précises sur le pavé tactile
- Caméra foldingue
Tearaway était une bouffée d'air frais pour la Vita, il n'a rien perdu de son charme et s'offre même un petit lifting réussi sur PlayStation 4. On apprécie pleinement ce qu'il a à nous offrir : une aventure originale, parfaitement calibrée pour la console et bourrée de bonnes idées. A la fois drôle, jouable et construit autour d'une créativité de chaque instant, le titre de Media Molecule, bien que reposant sur une construction somme toute classique, transcende une nouvelle fois le matériau de base en offrant une fabuleuse aventure aux joueurs qui tire parfaitement profit des capacités de la console de Sony.