En 2001, alors que beaucoup d'entre vous étaient encore bambins, Mare Sheppard et Raigan Burns fondaient le studio de développement Metanet Software. Ces deux petits génies venus de Toronto avaient toujours rêvé de créer un jeu vidéo à mi-chemin entre un cours de géométrie et une salle des tortures fun à parcourir. Leur premier bébé sortit donc en 2004, un jeu en flash connu sous le sobre nom de N.
En 2006, après avoir fait suer bon nombre de joueurs, le studio décida de développer Robotology, un jeu futuriste, en 3D cette fois, dans lequel nous aurions dû, comme son nom l'indique, incarner un robot. Néanmoins, ne réussissant pas à aller au bout de leurs idées, les deux programmeurs décidèrent tout simplement d'annuler ce projet, devant par la même occasion rembourser le gouvernement de l'Ontario qui avait aidé au financement du titre. Afin de contenter les fans de la première heure, et a fortiori de sortir la tête de l'eau financièrement parlant, Metanet Software autorisa alors le portage externe de N. Ce dernier, renommé N+ pour l'occasion, vit donc le jour en 2008 sur Nintendo DS, PSP et sur le Xbox Live Arcade. Cinq ans plus tard, en 2013 donc, monsieur et madame Metanet annoncèrent qu'ils travaillaient à l'élaboration de N++, la suite tant attendue du jeu qui les avait propulsés sur le devant de la scène des années auparavant.
N COMME NINJA
Le cours de flashback étant terminé pour aujourd'hui, vous pouvez ranger vos sous-vêtements Pierre Cardin, nous voici revenus en cette bonne vieille année 2015. N++ est désormais disponible exclusivement sur PlayStation 4 au tarif de 19,99 € (17,99 € pour les abonnés au PlayStation Plus). Mais alors pourquoi une telle hype autour de cette licence ? De quoi s'agit-il exactement ? Eh bien, tout d'abord, ce drôle de platformer est ce que l'on appelle dans le jargon un die & retry, comprenez par là "mourir et recommencer". OlliOlli, Hotline Miami, Cloudberry Kingdom, Titan Souls, Trials Fusion... Nombreux sont les jeux à proposer à l'heure actuelle ce genre d'expérience sadomasochiste. Il faut bien avouer que les joueurs adorent ça puisqu'ils en redemandent, et c'est une notion que les différents éditeurs / développeurs ont bien compris. Dans N++, vous incarnez donc un ninja ressemblant à un mix entre Stickman et le héros de La Linea. Vous avez pour mission de traverser des niveaux proposés sous forme de tableaux. Certains sont d'une facilité déconcertante, tandis que les 99,9% restants sont d'une difficulté sans nom. L'ampleur de la tâche est en effet mise à mal par quelques critères que l'on qualifiera de déstabilisants.
Tout d'abord, il est important de noter que l'on meurt en un coup : une chute violente ou un contact (voire un frôlement) avec un ennemi vous sera immédiatement fatal. Alors quand la majorité des levels se compose de champs de mines, de missiles à tête chercheuse, de plates-formes extrêmement hautes, de tourelles automatiques ou encore de rayons lasers, il semble évident que vos tentatives se compteront par centaines, et ce pour chaque niveau. N'ayez crainte, il y en a 2.360 à parcourir, nous vous laissons par conséquent le plaisir d'évaluer la durée de vie du soft. Concernant le gameplay en lui-même, les commandes sont d'une simplicité enfantine. Vous déplacez le ninja latéralement à l'aide de la croix directionnelle (ou du stick gauche, selon vos envies). Vous pouvez également sauter avec la touche Croix et... c'est tout. Pas de réelle esquive, pas de glissade, pas de super-pouvoirs non plus, mais la possibilité de sauter en prenant appui sur les murs afin de réaliser des envolées beaucoup plus lointaines. Tout un art qu'il vous faudra maîtriser avec de l'entraînement... beaucoup d'entraînement !
LES TORTURES NINJA
Si visuellement N++ se montre simpliste au possible, c'est aussi et surtout pour tromper son monde. Peu d'effets à noter (si ce n'est les explosions dans lesquelles votre corps devient une espèce de bouillie de pixels peu ragoûtante), et ce n'est pas forcément un mal. Le jeu évite ainsi les bugs et autres soucis techniques que l'on retrouve un peu trop souvent dans les jeux actuels. On appréciera en revanche la customisation possible de l'expérience de jeu. Entendez par là qu'à tout moment le joueur pourra switcher parmi les 64 musiques du jeu (de manière aléatoire ou par ordre alphabétique), ou encore changer le thème de couleurs affiché à l'écran. Le blanc et bleu vous fait mal aux yeux ? Aucun problème, le noir et mauve vous satisfera peut-être un peu plus, à moins que votre choix ne se porte sur le rose et orange ou le gris et jaune. Les thèmes visuels en question sont très nombreux et vous les débloquerez automatiquement au fur et à mesure de votre périple. Du côté de la technique pure et dure, vous serez sûrement ravi d'apprendre que N++ tourne de manière impeccable en 1080p et 60 images par seconde. Une feature appréciable là encore, d'autant que le jeu est jouable en coop locale jusqu'à 4 joueurs, rien que ça ! Concrètement, rien de plus simple, il suffit aux nouveaux venus d'appuyer sur le bouton Croix pour débarquer dans l'écran de sélection de level.
A partir de là, vous aurez le choix de jouer soit aux centaines de niveaux du mode Solo, soit aux centaines de niveaux du mode Coop. Dans ces derniers, le level design est pensé de sorte à pousser l'aspect coopératif à son paroxysme. Ainsi, il ne sera pas rare d'être obligé de se suicider (ou de faire que nos compagnons d'infortune se jettent malencontreusement sur une mine), et ce afin de débloquer le mécanisme verrouillant la porte de sortie. Notez que les collisions entre joueurs sont bien évidemment désactivées, ce qui a pour effet d'adoucir quelque peu ce climat anarchique qui a vite tendance à s'imposer lors de nos parties à quatre. N'oublions pas non plus le mode Race. Ici, que vous soyez seul ou accompagné, votre but ultime sera de terminer la série de niveaux imposée (composée de 5 levels) en un temps record. Bien sûr, le vice est toujours présent, et ce sous la forme de lingots d'or à ramasser dans les endroits les plus dangereux du niveau parcouru. Libre à vous de les laisser là où ils sont et de vous concentrer sur votre survie, assurée par le confort douillet d'une porte qui s'ouvre et vous sort de cet enfer. Mais il faut tout de même savoir que cet or augmente votre capital temps, et ainsi votre place sur les classements en ligne.
Cette notion est d'ailleurs applicable à l'ensemble du jeu. N++ vous demandera certes de terminer tous les niveaux en un temps record, mais aussi et surtout de ramasser tous les lingots d'or mis à votre disposition sur votre passage. Bien évidemment, si les premières dizaines de niveaux vous permettront d'accomplir cette tâche sans trop de soucis, vous imaginez bien à quel point l'objectif de marier le score et la rapidité tiendra rapidement du miracle, à mesure que vous avancez dans le jeu. Seuls les plus talentueux d'entre vous en sortiront indemnes, vous pouvez nous faire confiance.
PLUS, PLUS, TOUJOURS PLUS
En termes de contenu, on peut donc dire que N++ place la barre assez haut. Mais c'était sans compter sur l'éditeur de niveaux mis à notre disposition dès le départ. Car en effet, quand bien même vous réussiriez à voir le bout des 2.360 levels mis à disposition par Metanet Software, il est important de noter que vous avez accès dès les premières minutes du jeu à tous les niveaux créés par la communauté de joueurs. Autant vous prévenir, il y en a déjà des centaines, et beaucoup d'entre eux sont absolument époustouflants. De la parodie de Pac-Man aux niveaux dits automatiques vous donnant le tournis en quelques secondes, tout porte à croire que vous n'aurez aucun mal à trouver votre bonheur dans cette mare gigantesques de tableaux. Ainsi, vous pourrez, d'une simple pression sur la gâchette R2, ajouter le niveau de votre choix à vos favoris ou encore le signaler aux développeurs. Une bien belle initative, encore une fois. Bien sûr, on pourra reprocher au jeu d'être un brin répétitif dans ses mécaniques de gameplay (voire même en ce qui concerne son aspect visuel). Certains déploreront l'absence d'un vrai mode online tandis que beaucoup se contenteront de jouer en multi local, une expérience que nous vous conseillons d'ailleurs très fortement. Le tarif pourra, lui aussi, refroidir les ardeurs des plus hésitants. Il est vrai que, pour une vingtaine d'euros, les trailers de gameplay sur le Net ne suffiront sans doute pas à convaincre les plus réticents, et on les comprend. Pour autant, passer à côté de N++ c'est se priver d'une expérience gratifiante, toujours prenante et (presque) jamais lassante. La frustration fait partie intégrante du gameplay, c'est une évidence, mais c'est le prix à payer pour crier victoire à chaque level terminé sans encombre.
Points forts
- Réellement addictif
- Multi local très fun
- Bande-son adéquate
- Contenu gargantuesque
- L'aspect customisation bienvenu
Points faibles
- Extrêmement frustrant
- Pas de multi online
- Direction artistique discutable
- Un brin répétitif
- Tarif un poil trop élevé
Proposant un aspect visuel, une maniabilité et un gameplay tout ce qu'il y a de plus accessible, N++ est le genre d'expérience que tout le monde peut avoir envie d'essayer. Pour autant, derrière ce tableau simplifié à l'extrême se cache un redoutable simulateur de mort, dans lequel votre sentiment d'impuissance n'aura d'égal que le taux de frustration généré pour chaque niveau. Fort de 2.360 levels à parcourir, d'un éditeur (et donc de millions de nouveaux dangers potentiels), ainsi que d'un mode multi local jouable jusqu'à 4 personnes, nul doute que ce N++ fera retrouver à Metanet Software sa gloire d'antan. A moins bien sûr que les joueurs soient vite refroidis par, notamment, un tarif un poil élevé ou encore le manque de risque pris par les développeurs en ce qui concerne la direction artistique du titre.