Quel a pu être le déclencheur qui a permis la germination de l'idée d'Hironobu Sakaguchi de changer totalement de cap et de passer du fantastique à l'horreur ? Personne ne le sait, mais une chose est sûre, Parasite Eve est l'une des œuvres les plus étranges de Squaresoft. Baignant dans l'horreur tout en gardant l'expertise de la firme en matière de RPG dans une aventure où la biologie est au centre de l'histoire accompagnée d'une direction très cinématographique - voire même hollywoodienne -, peu de firmes se sont attelées à un revirement de cap aussi brutal, je rajouterai même aussi risqué ? Peut-être pas, car ce jeu présente plus de similitudes avec la série phare de Square (aka Final Fantasy) qu'on pourrait le penser, en même temps comment pourrait-on penser le contraire avec un jeu se retrouvant pile dans l'époque de transition entre FF7 et 8 ? Parasite Eve se retrouve alors être le premier jeu ambitieux de Square principalement destiné à un public occidental qui profitera du succès international de Final Fantasy VII et la mainstreamisation du genre du JRPG (et accessoirement de Resident Evil). Vous ne me croyez pas ? Je vous conseille de lancer le jeu pour voir le joli Square USA qui apparaît avant l'écran titre sans parler de la profusion de noms qui m'ont l'air plus américains que japonais dans les crédits de fin. Parasite Eve a été réalisé pour un public particulier, mais il est aussi le jeu recyclage par excellence, où toutes les idées mises à plat durant ces séances de remue-méninges réalisées pour FFVII, Chrono Trigger et consorts se retrouvent exploitées en profondeur dans ce jeu qui dévoile peu à peu des enjeux et des thèmes très intrigants et très inhabituels dans le monde du jeu vidéo.
24 décembre 1997, New York
L'histoire débute un réveillon de Noël avec Aya Brea, fraîchement admise dans la police de New York. Elle se retrouve dans un rendez-vous galant avec un charmant jeune homme pour assister à un opéra dans le fameux Carnegie Hall. Cependant, Aya a un mauvais pressentiment sans pour autant mettre le doigt dessus. Tout se déroule bien jusqu'au climax de l'opéra qui est la prestation de la cantatrice qui dévoile sa magnifique voix qui résonne à travers la salle. Cette magnifique performance est malheureusement entachée par un événement assez particulier que personne n'aurait pu prédire. Les yeux de Melissa Pearce - la cantatrice - se mettent subitement à avoir une teinte verte et décident de faire chauffer la salle d'une manière peu orthodoxe. Par une prouesse inexpliquée, tous les spectateurs se mettent à entrer dans une combustion spontanée sans raison apparente : la panique s'installe, le Carnegie Hall est en feu et tout le monde s'enfuit la queue entre les jambes. Aya se décide alors à agir, elle est surtout la seule à pouvoir agir car sans savoir pourquoi, elle n'est pas touchée par la combustion. Durant sa confrontation, Melissa Pearce semble être différente, elle se voit dotée de pouvoirs particuliers et dit s'appeler Eve, tout comme la mère de l'humanité dans le mythe. Cependant, elle ne sera bientôt plus la seule à en avoir, Aya se retrouve subitement à en avoir aussi sans raison apparente. C'est ainsi qu'Eve lui explique qu'il est temps pour son corps de se réveiller. Qu'est-ce que cela veut dire ? Pourquoi n'est-elle pas touchée par les pouvoirs d'Eve ? Pourquoi Aya se retrouve à en avoir aussi ? Aya n'a pas la réponse, mais Eve les a, et elle sait qu'elle est la seule à pouvoir combattre cette menace. C'est ainsi que durant ces 6 jours, Aya se retrouvera à pourchasser Eve et à comprendre que cette rencontre n'était pas aussi accidentelle qu'elle le pensait et que tout cela est intimement lié à son passé...
Parasite Eve est tiré du roman d'horreur éponyme écrit par Hideaki Sena. Le jeu vidéo prend cependant une tournure bien différente de celle du roman, bien que partageant les mêmes bases. Il s'approche plus d'une suite distante que d'une adaptation mais s'il y a une chose qui ressort de ces deux romans, c'est bien le mot mitochondrie qui est au centre de l'histoire. Tout d'abord, un peu de science, la mitochondrie est un micro-organisme qui est présent dans les cellules du corps humain et a existé en symbiose avec le nucleus (le noyau d'une cellule) pendant des centaines de millions d'années. Elle est primordiale pour permettre la production d'énergie dans le corps humain, elle possède son propre code génétique et la capacité d'évoluer et de se multiplier. Le cas de figure présent dans Parasite Eve est le fait que la mitochondrie évolue a un stade critique où elle est capable de prendre contrôle de l'hôte. C'est ce cas de figure qui se passe pour Melissa Pearce, les
mitochondries ont pris le contrôle de son corps et lui confère des "pouvoirs" comme la possibilité de provoquer la combustion spontanée de personnes vivantes. Le fait qu'elle s'appelle désormais Eve est d'ailleurs en référence à l'Eve mitochondriale qui est l'ancêtre commune de l'humanité en ce qui concerne la mitochondrie dans la lignée maternelle, il s'agit d'ailleurs d'une femme qui a vécu il y a de ça 150 000 ans. Le roman comme le jeu vidéo accorde une importance primordiale à Mitochondria Eve qui essaye alors d'avoir la main-mise sur l'humanité, cependant, comme on peut le deviner, il s'agit d'un trait qui n'est présent que chez la femme, les hommes n'étant pas touchés. Eve a alors un projet particulier pour mettre son plan à exécution...
Christmas Eve
L'histoire n'est pas ce qu'on peut appeler des plus classiques, le fait de s'être inspiré très grandement de l'oeuvre d'Hideaki Sena a permis au jeu d'offrir une aventure très particulière. Il s'amuse beaucoup dans tout ce rapport à la science et à la mitochondrie et offrent des situations improbables mais qui contribuent à l'ambiance et au gameplay du jeu. Il y a d'abord le fait que tous les ennemis dans le jeu sont des animaux échappés de Central Park et qui ont muté après contact avec Eve, cela permet une multitude d'ennemis abominables mais qui sont reconnaissables par leurs espèces, on verra alors un rat qui se voit pousser trois queues et nous lance des boules de feu ou un ours en lambeau qui a un faible pour l'électricité. Cela a deux particularités, déjà, il s'agit d'ennemis qui ne sortent pas de nulle part, il ne s'agit pas de l'inconnu mais de quelque chose de vivant et qui nous était proche, contribuant au malaise et renforcé par la profusion de cinématiques montrant la métamorphose d'animaux en monstre sanguinaires. La deuxième est le rapport à la nature, on se retrouve alors à être confronté par la nature elle-même ravagé par la mitochondrie qui fait partie de l'homme. Décèle-t-on un message environnemental ? Ce qui n'est pas la première fois que ça arrive dans un jeu de Sakaguchi (Bonjour FF7). En dehors de tout le délire mitochondrial, on assiste avec Aya à une course contre la montre pour arrêter la menace Eve et éviter qu'elle ne fasse plus de victimes. Il s'agit surtout d'une enquête où Aya est sur les traces d'Eve, assistant à l'ampleur des dégâts sur son passage et devenant de plus en plus troublé au fur et à mesure de son avancement, à la fois par Eve ainsi que par elle-même car elle est la seule à pouvoir enquêter grâce à ses nouveaux pouvoirs et par son passé qui se retrouve être lié à celui d'Eve...Et puis c'est tout.
Ne vous méprenez pas, il y a pleins d'autres choses dans l'histoire de Parasite Eve mais elle n'a qu'un seul objectif, c'est de se concentrer sur le combat entre Aya et Eve sans jamais s'en détourner ne serait-ce qu'une seule seconde. N'essayez pas de trouver une quête annexe ou d'autres choses typiques d'un RPG pour étoffer le background. Cela n'est pas du tout le cas dans Parasite Eve qui présente une expérience très linéaire tant en matière de jeu que d'histoire. Bien que tout cela a plus tendance à handicaper un RPG, cela n'est pas du tout le cas dans Parasite Eve car il a une autre particularité, le rythme. Il n'y a aucun temps mort dans le jeu, tout s'enchaîne à la vitesse de l'éclair, peut-être même trop vite mais cela permet d'avoir une véritable aventure où tout est maîtrisé : l'ambiance reste la même, le jeu ne s’essouffle à aucun moment et le gameplay garde toujours sa saveur. Il s'agit avant tout d'une expérience très cinématographique et Parasite Eve ne nous le fait comprendre. Cela a malheureusement un coût car le rythme a été sacrifié au profit de la durée de vie qui est très court pour un RPG, il suffit de 15h pour arriver jusqu'à la fin mais chacune de ces heures seront riches en rebondissements et ne vous ennuieront à aucun moment. Parasite Eve ne dément sûrement pas à son appellation de Cinematic RPG.
Resonance
Comme on pourrait s'en douter de Squaresoft, le gameplay de ce RPG est très proche de celui des Final Fantasy mais présente certaines particularités très différentes. D'abord les combats sont fixes, les ennemis ne sont pas visibles sur l'écran mais apparaissent toujours à chaque fois que vous entrez dans une zone dites "hostile" (hormis si vous revenez sur vos pas, auquel cas vous avez une chance sur deux de devoir refaire le même combat). Au moment où vous vous retrouvez dans la zone hostile, il y aura un plan en négatif et les ennemis apparaîtront. Tout le reste est très proche des Final Fantasy avec la barre ATB qui permet de faire une action uniquement quand elle est remplie, cependant, la grande différence est qu'Aya est totalement libre de ses mouvements dans cette zone (qui est toutefois délimitée). Vous devrez alors vous déplacer afin d'esquiver les attaques ennemis ou pour se rapprocher de l'ennemi afin de pouvoir attaquer. Vu qu'Aya n'utilise que des armes à feu (ou un tonfa comme arme au corps-à-corps), la zone d'action sera délimitée par un cône autour d'Aya qui permettra d'analyser la portée de votre arme. Si l'ennemi est dans ce cône, vous êtes assuré de faire les dégâts que peuvent infliger votre arme, si vous êtes très proche, vous êtes même assuré de pouvoir faire des coups critiques ! Par contre, si l'ennemi est en dehors du cône, les dégâts seront très bas et pourront même être ratés. A vous alors de déterminer le danger de votre adversaire et d'ajuster votre position en conséquence. Le jeu ne vous fait pas de cadeaux, vous avez de fortes chances que l'ennemi en face vous inflige une altération d'état qui sont parfois très handicapants, le poison est dévastateur et vous enlève une bonne partie de votre vie toutes les 3 secondes, vous pouvez vous faire paralyser, ce qui ralentit vos déplacements et baisse la vitesse de la barre ATB, ce qui est très dangereux surtout contre plusieurs ennemis. On peut même vous infliger une cécité qui rend la portée de votre arme inexistante et vous n'avez rien d'autre à faire qu'à attendre. Le jeu vous pousse alors à être dynamique, analysez votre adversaire, réagissez en conséquence et reste en permanence sur vos gardes, le pire peut arriver à n'importe quelle confrontation.
Pour vous aider dans votre tâche, vous aurez accès aux pouvoirs qu'a récemment acquis Aya nommé la Parasite Energy mais malheureusement, vous n'aurez pas la possibilité de faire brûler les ennemis comme Eve mais vous aurez accès à une multitude de sorts de soin comme le heal ou l'antidote pour contrer les effets du poison ou de buff très utile. Pour essayer de palier à la très grande vitesse d'un ennemi, vous pourrez par exemple vous servir du sort "haste" qui vous rendra plus rapide et augmentera la vitesse de la barre ATB. Tout cela consumera votre barre de Parasite Energy et si vous n'en avez pas assez pour lancer un sort, vous devrez attendre qu'elle se régénère automatiquement pour pouvoir s'en servir à nouveau. Vous n'avez que très peu de sorts offensifs, l'un d'eux est l'"energy shot" qui permet de concentrer toute votre énergie en un seul coup, mais cela consume toute votre barre de PE et vous rend étourdi pendant quelques secondes ce qui peut s'avérer être assez dangereux. Néanmoins, ces sorts peuvent très souvent vous sauver d'une mauvaise passe.
Fusion
Parlons plus en détail des armes, il y en a de toutes sortes, vous débutez d'abord par une arme de poing assez basique mais vous pourrez très vite avoir accès à des fusils d'assaut, mitrailettes, fusils à pompe et même des lance-grenades. Chaque type d'arme a une caractéristique spéciale, l'arme à poing est sans conteste l'arme la plus rapide car la barre ATB se rechargera beaucoup plus rapidement et vous permettra de tirer plus souvent, cependant les dégâts ne sont pas les plus importants du jeu. Pour le fusil à pompe, c'est l'inverse, votre barre ATB sera aussi rapide qu'un escargot, mais chaque coup que vous pourrez tirer sera très puissant, ils ont aussi la caractéristique de pouvoir frapper plusieurs ennemis en un seul coup s' ils sont groupés. L'arme que vous portez sera alors dictée par votre style de jeu que vous voulez adopter et par rapport à l'ennemi que vous avez en face. Contre un ennemi rapide, vous ferez mieux de vous coller avec une arme de poing ou une mitrailette, contre un ennemi lent mais puissant, vous ferez mieux d'essayer d'en terminer au plus vite avec un fusil d'assaut ou un fusil à pompe.
Il y a aussi des compétences que vous pouvez assigner à votre arme, vous pouvez alors mettre une compétence qui décidera du nombre de coups que vous voulez tirer avec votre arme, vous pouvez par exemple choisir d'en tirer 5, ce qui permettra de pouvoir frapper plusieurs ennemis à chaque tour, cependant, étant donné qu'Aya ne peut pas bouger pendant le moment où elle tire, cela fera de vous une cible facile et les dégâts seront partagés entre les tirs, vous devez alors être beaucoup plus prudent. Par contre, si vous décidez de faire en sorte que votre arme ne tire que 2 coups, les dégâts seront conséquents et vous serez plus agile mais vous devrez jongler entre les attaques en attendant que la barre ATB se recharge pour pouvoir agir. Il y a aussi la compétence "first strike" qui vous donne une chance de commencer le combat avec une barre ATB pleine et pleins d'autres. Vous aurez l'occasion de trouver des compétences abusées qui vous permettront d'éliminer vos ennemis en un rien de temps, mais tout cela dépendra de la customisation que vous en faites. Mais comment obtenir ces compétences ? Voici une autre particularité du gameplay de Parasite Eve, les compétences ne sont disponibles que dans les armes que vous obtenez durant votre aventure et si vous voulez que la compétence d'une arme se retrouve dans une autre, vous aurez besoin d'un "outil", objet assez rare dans le jeu et cela aura un contre-coup car si vous voulez mettre la compétence d'une arme dans une autre, la première arme sera perdue dans ce processus, vous amenant alors à réfléchir et à faire des choix : Vais-je modifier mon arme maintenant ou vais-je attendre d'avoir une arme plus puissante plus tard pour le faire ? Vous pouvez aussi faire passer les statistiques d'une arme à une autre pour qu'elle devienne plus puissante, pour augmenter sa portée. Ces choix vous poussent d'ailleurs à faire une chose, c'est de vous adonner à l'exploration. Aya gagne d'ailleurs de l'expérience à chaque combat et chaque niveau augmentera vos statistiques mais vous octroiera aussi des BP (Bonus Points) que vous pourrez assigner à d'autres statistiques comme la puissance de votre arme ou par exemple la barre ATB pour qu'elle se recharge plus rapidement ou à augmenter le nombre de place de votre inventaire qui n'est qu'au nombre ridicule de 15 au début.
Selection
Parasite Eve est scindé en deux phases très distinctes, les phases d'histoires et les phases d'actions. Pour la première, vous allez vous retrouver dans des cinématiques qui durent plus de 10 minutes jusqu'à que vous soyez amené à une phase d'action. Vous serez alors transporté dans un hub ou vous devez avancer et occir les monstres sur votre passage. Cela permet aussi de faire un peu d'exploration et de chercher des armes, des objets nécessaire à votre survie et d'autres items. N'attendez pas à voir un magasin comme tout bon vieux RPG ou si vous en voyez un, il est probablement rempli de cadavres, dépouillé jusqu'à l'os par des vandales durant l'évacuation de Manhattan. Vous vous retrouvez littéralement dans une jungle urbaine (en plus il y a des animaux qui veulent votre peau donc le terme est plus que correct) et vous allez devoir faire avec ce que vous avez. Vous êtes bas en munition ? Personne n'ira vous aider, vous êtes seul(e) alors vous allez devoir chercher chaque coffre, chaque armoire et vous allez même devoir vous la jouer risqué en vous servant d'un tonfa qui a la capacité "steal", ce qui vous expose au danger d'être au corps à corps, de frapper avec des dégâts dérisoires et de prier à chaque seconde que l'ennemi daigne vous laisser le délester de munitions même si il n'en a pas besoin vu qu'il préfère vous lancer des boules de feu.
Votre arme est trop faible ? Vous allez devoir sacrifier vos Bonus Point pour augmenter la puissance de votre arme ou prendre le risque de continuer jusqu'à trouver une arme plus puissante plus loin, ou peut-être vous mettre à chercher les lieux pour des outils qui permettront d'améliorer votre arme en sacrifiant une autre. Vous êtes libres dans ces hubs et à vous de choisir si vous voulez tout explorer au risque de rencontrer plus de monstres sanguinaires au profit d'items d'utilité variables ou ne prendre aucun risque et d'aller en ligne droite en prenant le risque de vous faire rétamer par le boss qui apparaitra à coup sur à la fin de l'hub. Dans tous les cas, vous n'aurez pas le temps de souffler, tout peut arriver à n'importe quel moment, l'hiver est rugueux, les cadavres jonchent votre route et vous savez qu'Eve n'est pas loin car ils sont encore fumants. Il faut faire un choix.
Parasite Eve est un jeu assez particulier dans son développement, il a été réalisé par l'équipe de Square USA avec Hironobu Sakaguchi aux commandes. Le staff à la charge du jeu était donc très varié et on dit même qu'une bonne partie du staff de Resident Evil 2 (le 1.5) est parti pour venir travailler sur Parasite Eve, forçant Shinji Mikami à remanier entièrement le jeu ! La particularité du jeu est qu'il s'agit d'une expérience très cinématographique dans l'ensemble, très différent de ce qu'a pu faire Squaresoft à l'époque. Il est aussi marquant sur le fait qu'il s'agit du premier jeu de Squaresoft a recevoir la classification Mature par l'ESRB. Le jeu a aussi d'énormes ressemblances avec Final Fantasy VII. Il s'agit du premier jeu auquel s'est tourné Sakaguchi après le développement de Final Fantasy VII donc certaines idées se sont sans doute retrouvées dans la production de Parasite Eve. On citera surtout le fait que Manhattan s'apparente beaucoup à Midgar dans sa construction, ce qui n'est pas si surprenant que ça étant donné qu'il s'agissait du lieu qui a le plus marqué les joueurs à l'époque, Sakaguchi a sans doute voulu explorer cette pente un peu plus profondément surtout que l'intrigue se déroule toujours dans Manhattan. On peut alors penser que Hironobu Sakaguchi a sans doute voulu approfondir l'esprit de ville moderne dans son jeu. D'autres similitudes sont aussi présentes qui seront dévoilés plus loin dans le test.
Evolution
Venons alors au thème que je considère comme le plus important de Parasite Eve. Avez-vous noté quelque chose d'inhabituel dans ce test ? Dans les personnages que j'ai dépeint ? Rien ? Regardez plus près, il y a bien quelque chose qui vous a interpellé...non ? Je vais vous le dire alors, c'est le fait que tout le jeu ne tourne qu'autour de femmes. Ca peut paraitre con mais ça fait toute la différence. Alors bien sur, étant donné que tout le jeu tourne autour de mitochondries dans la lignée maternelle, ce serait un peu malvenu qu'Eve devienne Adam et qu'Aya se transforme en Cloud (oui je l'ai pas mis comme rien ce nom) mais tout de même...Women only ? On pourrait mettre ça sur le compte du roman mais l'un des personnages principaux de l'oeuvre est un homme. Alors bien sûr, il y a votre coéquipier Daniel aka le black qui est trop vieux pour ces conneries (Je pensais pas ressortir cette phrase deux fois en deux tests) mais il n'a qu'un rôle mineur et il repose tout sur les épaules d'Aya car il ne peut rien faire sous peine de cramer vivant. 90% de l'aventure est composé d'Aya et Eve se livrant une bataille entre eux. Tout ce charabia au niveau de la mitochondrie montre quand même une certaine supériorité de la femme. Tout tourne autour de ça et d'ailleurs le projet secret d'Eve le montre particulièrement bien...
On est bien entendu bien loin de la girl power, on a une véritable dualité entre Aya et Eve qui n'est pas sans rappeler celle de Cloud et Sephiroth (ding !), Aya doit arrêter la menace que pèse Eve sur le monde mais elle la pourchasse aussi car elle détient les clés de son passé. La "rivalité" est la même et la construction du scénario est très semblable à FF7 aussi pour cette chasse à "l'homme" (ou la femme pour PE) sauf que la particularité de Parasite Eve est d'épurer le jeu au point de n'en laisser que l'histoire, pas de saynètes pour raconter le background d'un personnage en particulier, de toute façon, il n'y a pratiquement que ces deux personnages. Tout cela pour préciser qu'on se retrouve alors avec une rivalité qui est juste, sans pour autant être un simple copié/collé à ces deux femmes.
Cela est surtout renforcé par le personnage d'Aya qui est à mon goût l'un des meilleurs personnages féminins que j'ai pu jouer dans le monde du jeu-vidéo. Bien entendu, les récents jeux n'ont pas fait honneur à cette pauvre demoiselle la reléguant au rang de point d'accroche à un public tout comme Lara Croft en son temps mais détrompez-vous, Parasite Eve dépeint une Aya Brea totalement différente, plus sobre. Déjà, d'un côté vestimentaire, la seule tenue sexy qu'elle porte dans le jeu est une robe fendue pour son rendez-vous à l'opéra, tout ce qu'il y a de plus normal. Toute l'aventure se déroule avec une Aya qui porte un jean, un T-shirt et une veste par dessus. Rien à voir avec les vêtements qui se détachent à chaque dégât pris dans The 3rd Birthday. Bien entendu, je ne dis pas qu'Aya n'attire pas par son sex-appeal, dès le premier opus, la volonté était de la transporter en tant que sex-symbol vidéoludique mais le jeu n'en prend pas exemple pour renforcer cette volonté. Aya Brea reste avant tout une femme forte, avec du caractère qui s'aventure toute seule pour arrêter les machinations d'Eve. On a alors un véritable Cloud au féminin en quelque sorte sans pour autant être un simple copié/collé. Aya Brea a tout simplement la classe.
Liberation
Que penser de ce Parasite Eve alors ? Serait-il le jeu parfait ? Pas vraiment car bien que l'histoire soit très bien réalisé, une personne ayant quelque connaissances en biologie se rendra vite compte de l'impossibilité de cette évolution mitochondriale jusqu'au contrôle de l'hôte, mais il s'agit avant tout d'une histoire et tout comme le roman, ce n'est pas la crédibilité qui compte mais de la façon dont c'est narrée et force est de constater que Parasite Eve est fort à ce sujet, on y croit. Du moins, il n'y a pas de raison de moins y croire alors que notre époque croule sous les jeux de personnes qui deviennent l'hôte de champignons pour devenir infecté. Un autre point, c'est que bien que le jeu soit fantastiquement bien narré, force est de constater qu'il n'y a pas de juste milieu entre histoire et gameplay comme dit précédemment. L'expérience étant vraiment cinématographique, le jeu préfère scinder au lieu de fusionner ce qui fait que le schéma est toujours hub/10 à 20 minutes d'histoire/Repeat. Certaines personnes se retrouveront sans doute ennuyés par le fait que tout cela soit un peu trop scindés et pas plus homogène ensemble. L'autre défaut serait justement le manque de side-quest en dehors du jeu, cela contribue au rythme du jeu et le fait qu'il se concentre uniquement à présenter un expérience unique dans la storyline principale mais le gameplay est si soigné qu'on aurait bien voulu avoir un peu plus de contenu, un peu plus d'ennemi, un peu plus de liberté. Il s'agit du véritable sacrifice fait pour permettre au jeu de s'affirmer en tant que Cinematic RPG. Toutefois, on pourra toujours se consoler avec le contenu EX-Game qui est un New Game + très généreux en bonus point pour permettre l'amélioration de votre personnage plus rapidement et vous permettra d'affronter le Chrysler Building qui est un donjon totalement aléatoire ou vous affronterez des ennemis ardus et ou vous ne pouvez sauvegarder uniquement tous les 10 étages. Il vous permettra aussi d'obtenir le meilleur stuff possible et surtout, une surprise très importante à la fin du donjon. Les fans du gameplay peuvent donc s'en donner à coeur joie dans ce donjon même si tout cela vous enclave dans un donjon ou vous n'êtes pas vraiment absorbé comme durant le reste de l'aventure vu son côté optionnel et aléatoire.
Parasite Eve est alors assez spécial, le jeu attire irrémédiablement par son ambiance complétement maitrisé, des décors pré-calculés de toute beauté, une OST incroyable made in Shimomura, mais à peine à-t-on le plaisir de savourer tout ça qu'on se rend compte que c'est déjà terminé, vous vous retrouvez devant les crédits de fin assez abasourdi par tout ce qui vient de se passer. On est forcément un peu déçu que l'aventure ne dure pas plus longtemps, qu'elle aurait gagné à être plus approfondi surtout dans un genre aussi peu commun et surtout aussi réussi que Parasite Eve. Cependant, l'aventure vécu n'en est pas moins excellente et c'est justement pour ça qu'on en demande plus, bien plus. Parasite Eve reste alors unique en son genre, jamais égalé, ni même par ses suites qui manque l'ambition cinématographique dont fait preuve ce jeu ou part dans une direction qui sacrifie le RPG, la volonté à laisser s'installer une ambiance particulière à l'horreur pur et simple. Rien n'a été laissé au hasard dans Parasite Eve et si il y a une dernière chose que je voudrais souligner, c'est le manque de doublage dans ce jeu. Ce qu'on pourrait souligner comme un défaut est pour moi un choix excellent dans le jeu et qui contribue à installer une ambiance, bien qu'il s'agit d'un cinematic RPG, ce qui est à l'honneur n'est pas les paroles mais tout ce qu'il y a autour, le bruit des pas d'Aya dans la neige, l'eau qui s'écoule dans les égouts, les bruits étranges dans un hopital, tout ça contribue à mettre l'emphase sur tout le sound design et de ne jamais le masquer par autre chose ce qui crée une atmosphère incroyable, le silence est roi et vous met encore plus mal à l'aise que si on se retrouve avec des cris partout, typique du jeu/film d'horreur.
Points forts
- Excellente histoire
- Bon gameplay original
- L'une des meilleures OST par Yoko Shimomura
Points faibles
- Court, 15 heures environ
- Enormement de dialogues durant les premières heures de jeu
- Certains objets-clés ne sont pas du tout évident à trouver
Parasite Eve excelle dans cette volonté de vous mettre mal à l'aise, il ne fait pas forcément peur, mais vous ne vous sentirez jamais tranquille. On obtient ici la preuve d'un grand jeu qui a su nous emmener la ou il le voulait sans interruption, sans temps mort. Une grande aventure.