Après l’unique Gris, en 2018, les espagnols de Nomada Studio reviennent aujourd’hui avec Neva, un jeu d’action-aventure porté par une superbe direction artistique. Un nouveau coup d’éclat pour l’équipe ? Neva sera dispo ce 15 octobre 2024 sur PC, PS4, PS5, Xbox Series X|S, Switch et Mac.
En 2018 sortait Gris, premier projet du jeune studio espagnol Nomada… Et je crois que l’expression “coup d’essai coup de maître” s’applique ici. Le jeu de réflexion-plateforme s’est fait remarquer pour son incroyable direction artistique, entre le dessin à la main à l’aquarelle et le surréalisme, ainsi que pour son propos. Sans trop en dire, on suit une jeune femme victime d’une expérience douloureuse et égarée dans un monde fracturé qu’elle a créé de toutes pièces (pour reprendre la description sur Steam). Neva, le nouveau projet de l’équipe, porte un message tout aussi poignant mais dans une aventure à l’apparence et à la première lecture plus conventionnelle.
Neva say neva
Dans Neva, on incarne "Alba", une jeune femme qui vit dans une région particulièrement ensoleillée et fleurie en compagnie d’un louveteau. Mais, des forces obscures - qui ressemblent à un mélange entre Princesse Mononoké et les créatures d’encre de Gris - débarquent sans prévenir et ravagent tout sur leur passage. Les prairies verdoyantes sont recouvertes de miasme, les animaux meurent voire sont possédés. Notre héroïne et son petit compagnon à quatre pattes n’ont d’autre choix que de fuir, tout en caressant l’espoir d’arrêter la catastrophe.
Si Neva reste une “fuite en avant” à l’image de Gris (il n’y a pas d’exploration à proprement parler, ce n’est pas un metroidvania, on va presque constamment de la gauche vers la droite), Nomada fait ici le choix d’accentuer la dimension action-aventure. Sous sa jolie cape rouge, Alba cache un katana et elle n’hésitera pas à s’en servir si des monstres lui barrent la route ! Ses attaques restent toutefois limitées (un combo de trois coups et une frappe plongeante), tout comme sa vie. Alba ne dispose en effet que de trois “coeurs” symbolisés par trois fleurs en bas de l’écran. Si cette réserve tombe à sec, vous devrez recommencer le combat en cours (pas d’inquiétude Neva est généreux en checkpoints).
Enfin, petite originalité. Ici, il n’y pas d’items de soin ou d’objets en général d’ailleurs. Pour récupérer de la santé, vous devrez toucher un ennemi. Chaque attaque réussie vous redonnera un pétale. Pour reconstituer une fleur complète et retrouver un cœur, il faudra enchaîner 6 coups d’affilée (sans vous faire toucher). Une mécanique toute simple mais qui donne lieu à de chouettes moments de tension - certains boss sont franchement mémorables -, sans jamais verser dans une difficulté excessive. En marge de ses talents à l'épée, Alba peut aussi esquiver avec une roulade et dasher dans les airs.
Si le challenge - tout à fait abordable - que réserve Neva vous rebute, Nomada a pensé à vous ! Avant de lancer une partie, ou à tout moment dans le menu pause, vous pouvez choisir entre le Mode Aventure (la difficulté standard) ou le Mode Histoire. Ce dernier vous débarrasse de toute notion de barre de vie, vous rendant invincible. Certains défis sont aussi légèrement plus faciles.
Le meilleur ami de l’Homme
Mais en combat, l’héroïne n’est pas vouée à elle-même, notre fidèle loup peut nous prêter main forte. Parce que oui, dans Neva, le louveteau des premiers instants va grandir au fil des chapitres (il y en a quatre, chacun dédié à une saison) et acquérir de nouvelles compétences. Dans un premier temps, il sera possible d’envoyer l’animal sur des ennemis bien précis quand ces derniers brillent d’une lueur blanche. Par la suite, vous pourrez lancer l’attaque dans toutes les directions / choisir manuellement votre cible. L’un dans l’autre, les combats de Neva amènent à jongler entre les capacités d’Alba et du loup, et même si ça ne réinvente (clairement) pas la roue, ça marche plus que bien. On s’est juste fait surprendre par certaines hitbox. La substance noire qui constitue le corps de la plupart des ennemis n’est pas toujours facile à lire, et on a parfois pris un coup alors qu’on pensait être à bonne distance.
Bref, pour en revenir à nos moutons - notre loup plutôt -, notre fidèle compagnon gagnera d’autres compétences que nous n’allons pas développer ici (ça fait partie de l’effet de surprise). En gros, ce qu’il faut retenir, c’est que la structure de Neva nous donne concrètement le sentiment que notre compagnon à quatre pattes “grandit”, ce qui permet également à Nomada d’intégrer régulièrement de nouvelles mécaniques ou situations. Le titre est court (4h) mais donne envie d’être avalé d’une traite, et même si la structure très linéaire du titre est un peu old-school, vous aurez toujours envie d'avancer et de découvrir ce qui suit.
Après un premier chapitre sans doute un peu trop classique (mais qui fait office de bonne rampe de lancement), le studio se lâche davantage par la suite - jouant avec le level design, les séquences de plateforme, l’emplacement des adversaires et bien sûr, avec la direction artistique ! Malgré son trait moins mémorable et "plus simple" que Gris, Neva réserve de sacrés tableaux, aidé ici par des effets de lumière et de brume de toute beauté. Vous allez en prendre plein la vue (et les oreilles puisque la bande-son est tout aussi remarquable). On n’oublie pas le chara-design et l’animation de l’ensemble des personnages à l’écran, d’un très haut niveau, ainsi que le contraste réussi entre les paysages du début et de la fin de l'aventure.
Un jeu peut en cacher un autre
Malgré tout, Neva pourra décevoir ! Au-delà des phases d’action, le titre ne propose finalement que peu d’interactions avec le loup, bien qu’un bouton de la manette lui soit entièrement consacré. Alba peut, en effet, l’appeler quand il est éloigné - on apprécie d’ailleurs que le ton du “au pied” change en fonction du contexte - et le caresser quand il est à proximité... Avec le recul, seul le premier chapitre vous enverra au secours de l’animal lorsque ce dernier se fait choper par un monstre ou voit sa route bloquée par un obstacle. Même dans les passages où Alba et le louveteau sont séparés, d’une façon assez étrange, on ne ressent pas de manque. Car dans le fond, c’est pas ce que Neva veut raconter.
Nous n’allons pas vous donner notre lecture du titre (de nouveau, ça fait partie de l’expérience) mais de toute évidence, le sens véritable de Neva est étroitement lié à celui de Gris. Finalement, le bébé de Nomada n’est pas vraiment un jeu sur une jeune femme et son loup : Alba n’est pas là pour aider l’animal à grandir, c’est même plutôt l’inverse, c’est lui qui veille sur l’héroïne. Et voir un propos aussi lourd et intemporel émerger d’une œuvre en apparence “banale”, c’est assez génial.
Conclusion
Points forts
- Visuellement superbe
- Un rythme à toute épreuve
- Dimension action-aventure réussie
- Une BO toujours là où il faut, quand il faut
- Un propos lourd caché dans un jeu “banal”
Points faibles
- Un premier chapitre en retrait
- Quelques soucis de hitbox
Note de la rédaction
Après le sublime Gris, Nomada Studio est de retour avec un jeu d’action-aventure qui, sous ses airs de fable écologique avec une jeune femme et son loup, porte en réalité un propos bien plus lourd. Et on a aimé la manière dont Neva nous a pris de court. Le dernier bébé de l’équipe espagnole revient en plus avec une superbe direction artistique, où la nature pleine de détails contraste avec le “vide” de certains passages, empreints d’un surréalisme qui fait écho à Gris… Dans Neva, Nomada propose également - pour la première fois - des phases d’action-aventure et s’en sort plus que bien. Les démons qu’Alba doit affronter donnent lieu à des phases d’action prenantes, bien mises en scène, où règne une certaine tension (sans jamais verser dans un challenge excessif). Une très belle aventure qu’on vous recommande.