On s'est lancé dans l'aventure Fashion Dreamer avec une idée en tête : devenir une nouvelle icône de la mode et baigner dans un océan de créations tendances le sourire au lèvres, au cours d'une expérience fun et chaleureuse. Finalement, le constat est un peu plus triste que ça.
Après le cultissime La Maison du Style sur DS, le studio japonais syn Sophia largue la boutique de vêtements qui faisait le succès de son jeu de mode pour une nouvelle approche davantage dans l’air du temps : l’influence. Fashion Dreamer vous impose d'être un pilier du style et de concevoir vos propres tenues pour les offrir aux muses du monde entier. Était-ce une bonne idée ? Sur le papier, probablement...
Fashion oui, Dreamer pas trop
Comme tout bon jeu de style qui se respecte, Fashion Dreamer vous propose d’entamer son expérience par la création de votre muse, nom accordé à votre personnage et à tous ceux qui composent le titre. Vous pouvez donner vie à quatre d’entre elles en leur prêtant l’apparence que vous souhaitez selon des présélections de très bons goûts ainsi que quelques préférences en termes de style (décontracté, kawaii...). Une première étape très agréable, bien que certains choix très limités sont assez déconcertants : un seul type de corps est disponible pour plusieurs tailles différentes et aucun vêtement n'est mixte. Tâchons tout de même de garder le sourire, l'aventure ne fait que commencer. Mais il est vite délicat de ne pas le crisper lors de nos premiers pas dans le monde virtuel du jeu (baptisé Eve), lesquels sont désorientés par des espaces nébuleux et des indications approximatives qui nous donnent l’impression d’être tombés dans une sorte de Metaverse édulcoré ou dans un univers un peu douteux situé entre la vie et la mort. Nintendo promet des “rues modernes, des allées surélevées, un paysage urbain pop et futuriste”, mais difficile de voir autre chose qu’un gloubi-boulga de néons pastels déstructurés.
Sur ce territoire péniblement identifiable, une poignée de PNJ aux noms absurdes (mais un peu amusants) attendent éperdument, bras ballants, que vous les relookiez en suivant quelques indications très sommaires qui ne devraient jamais vous donner trop de fil à retordre. Certaines muses veulent par exemple que vous leur trouviez une tenue rose et mignonne, quand d’autres préfèrent une tenue beige et décontractée. La tâche peut s'avérer assez divertissante une fois votre garde-robe suffisamment complète, doublée à une autre occupation du quotidien, comme le binge-watching de votre série du dimanche. En réalité, refourguez ce que vous souhaitez au sujet, et vous récolterez très souvent au minimum deux étoiles sur trois, avec en prime un petit compliment sur vos talents. On a fait le test avec un ensemble dépareillé et atroce au possible, la muse a adoré. Personne ne semble jamais détester nos propositions outrancières, ce qui est quand même un peu dommage.
La fausse création
Quand les tenues de vos muses sont assemblées et affichées dans une sorte de réseau social ultra simplifié, vous récoltez des “J’aime”, lesquels génèrent des E-points à dépenser pour créer vos propres pièces. Par “création”, entendez plutôt “assignation d’une nouvelle couleur à un modèle déjà créé” parmi plus de 1400 propositions, tout de même. Si la création pure est donc très limitée et décevante au possible, force est de constater que la garde-robe s'étoffe quand même d’une grande variété de vêtements plus ou moins tendances (si on fait l’impasse sur les jeans slims troués et les ballerines plates…).
Une fois quelques habits assignés aux passants qui errent sans but sur des trottoirs sans fin, nous aussi, nous nous mettons à déambuler tel un fantôme dans ce monde étrange, à la recherche d’une destinée, d'une grande mission à accomplir ou d’une bribe de scénario à suivre. Un coup d'œil craintif dans l’onglet “quête” nous laisse amèrement comprendre que ces dernières ont déjà toutes été achevées une fois le tutoriel passé. Fashion Dreamer est-il vraiment terminé en une poignée de minutes ? Pas vraiment... Le véritable objectif du jeu, et ce qui justifie sa durée de vie (d'environ huit heures) est la recherche de popularité. Être un influenceur fashion, voilà le propos de l’expérience, qui aurait gagné à profiter d’un peu plus de matière scénaristique. Tout repose plus ou moins sur un principe de “j'aime”. Dans la zone d’affichage des tenues tendances du moment, ou même auprès des muses que vous croisez, il suffit de donner un “j’aime” pour obtenir une pièce de vêtement que vous convoitez. Pas besoin d’argent donc, un simple pouce en l'air vous permet de repartir avec une pile d'accessoires et votre dur labeur vous octroie des tickets de bingo et des jetons de machine gacha. Le rêve de tout salarié, non ? La machine gacha et le bingo vous offrent quelques avantages et tenues inédits (bien que l’on ait déjà remporté trois fois la même paire de chaussettes). Le goût de l’inconnu, on aime ça, et ces deux petits divertissements sont donc bienvenus.
Le selfie et le mode multi pour tout sauver ?
Les habits que vous personnalisez peuvent être fièrement exposés dans votre propre showroom, une petite salle que vous avez le loisir de décorer à votre guise. Les pièces de votre marque ont alors la possibilité de recevoir des « J'aime » et d'être portées par des joueurs du monde entier. N’est-ce pas ça, le secret de la gloire finalement ? Les showrooms constituent en tout cas l’un des points d’intérêt de l'expérience ; en mode multi, où l’aventure vous semblera sensiblement moins déprimante, vous pouvez visiter le showroom d’inconnus à la manière des petites maisons que vous explorez dans Animal Crossing, à la différence qu’ici, la sélection de l'hôte est aléatoire. Et libre à vous de chourer les créations des autres pour ajouter un peu plus de style à votre collection de basiques. N'hésitez pas également à utiliser le drone à disposition pour prendre des photos de vous et de vos muses et de capturer des clichés, disons-le, plutôt mignons et assortis d’une belle panoplie de pauses. Globalement, le mode multi offre à peu près le même contenu que le mode solo, qui consiste à relooker inlassablement le premier venu, mais le job se montre quand même un poil plus amusant avec de véritables joueurs. Vous aurez néanmoins à cœur d'essayer de bien le comprendre les premières heures, l’interface souffrant d’une organisation assez peu agréable : impossible de trier les pièces par couleur, ou par accessoire, par exemple.
Conclusion
Points forts
- Une vaste garde-robe de vêtements
- Le mode photo, plutôt mignon
- Légèrement plus fun en multi grâce aux showrooms
Points faibles
- Extrêmement répétitif
- Un contenu très limité
- La création qui s'apparente plus à de l'attribut de couleur
- Des retours trop superficiels sur vos "créations"
- Des interfaces et espaces mal organisés
Note de la rédaction
Moins fun que la Maison du Style, moins pédagogique que Jeune Styliste, Fashion Dreamer a tout à envier à ses prédécesseurs en raison d’un contenu bien trop pauvre et d’un fun ultra limité. Si proposer inlassablement des tenues à des PNJ et des joueurs sans profiter d'aucun apport scénaristique ou de réels objectifs de jeu vous suffit, l’expérience vous conviendra peut-être. De notre côté, on retient surtout un jeu d'habillage sans grand effort et surtout extrêmement répétitif. Bref, clairement l'une des pires exclus Nintendo Switch de l'année.