Il se sera fait désirer ! Six années après la sortie de Forza Motorsport 7 et trois ans après son annonce officielle, la nouvelle simcade de Turn 10 ouvre enfin sa portière à celles et ceux disposant du permis Game Pass. Avant d’écraser la pédale de l’accélérateur, nous vous invitons à passer un peu de temps au stand. Il est l’heure d’étudier ce que ce Forza Motorsport a vraiment sous le capot.
Forza Motorsport a été testé à la manette sur Xbox Series X, avant et après le patch day one. Les captures de cet article ont été faites en mode Performance (4K/60fps) et Performance RT.
Sommaire
- Le feu sur l’asphalte
- Vérifier les niveaux avant de mettre le contact
- Un défi à la carte grise
- Intérieur cuir, couleur beige
- Faire preuve de bonne conduite à plusieurs
Le feu sur l’asphalte
Rangez les cotillons et les feux d’artifice, Forza abandonne la folie du festival Horizon pour retrouver ses fondamentaux, à savoir la compétition encadrée sur circuits. Véritable simcade, genre du jeu de course mélangeant simulation et arcade, le dernier titre de Turn 10 s’appuie sur trois leviers pour redéfinir son expérience : le développement des compétences des pilotes, l’amélioration des bolides et la compétition acharnée en solo comme en ligne. Un programme excitant qui se fait grâce aux multiples modes de jeu qui vont de la carrière au multijoueur, en passant par le jeu libre, les défis rivaux et le réglage des véhicules.
Comme vous l’aurez remarqué en jetant un coup d'œil sur la jaquette du soft, cet épisode n’est pas numéroté. En intitulant sobrement le projet “Forza Motorsport”, le studio américain dirigé par Dan Greenawalt mise sur un nouveau départ pour une franchise née en 2005. L’idée est d’écouter les demandes des fans de jeux de course automobile dans le but de créer une plateforme qui leur est dédiée, fournissant du contenu et des challenges sans cesse renouvelés.
Tout d’abord, Turn 10 est parti d’une copie blanche pour le moteur physique de sa création. Inutile de tergiverser pendant des heures, manette en main, nous sommes face à la nouvelle référence de la simcade. Le poids des véhicules se ressent dès les premiers virages, les collisions sont beaucoup mieux gérées, les différentes forces qui s’appliquent en pleine course sont bien retranscrites, le ressenti des amortisseurs est impeccable et la conduite est plus souple que jamais. Le pilotage varie en fonction des effets climatiques qui peuvent s'intensifier en cours de course. Une pluie soutenue humidifie l'asphalte avant de la transformer en véritable patinoire quand les nuages continuent de verser leurs larmes. De plus, il n’est pas rare de commencer une épreuve lors d’un coucher de soleil pour la terminer sous un ciel étoilé. Tous les circuits du jeu peuvent être joués à différents moments de la journée (de l’aube jusqu’à la nuit noire) et sous de multiples conditions climatiques (ensoleillé, nuageux, en plein orage, brumeux, etc.) évoluant en temps réel.
Il est indispensable de bien doser la puissance dans les gâchettes analogiques (frein, accélérateur) afin de grappiller de précieux centièmes. Les développeurs sont allés particulièrement loin dans l’aspect simulation sans pour autant renier sur l’accessibilité. Par exemple, le jeu prend en compte le caoutchouc laissé par les pneus sur les circuits, modifiant ainsi l’adhérence en fonction du taux d’humidité de la piste. Désireux de s’adapter aux besoins de tous les pilotes, le jeu embarque une impressionnante série d’options et de paramètres avancés. Vous souhaitez modifier le field-of-view (de 25° à 65°) à la première comme à la troisième personne ? Aucun problème, un curseur est là pour répondre à vos attentes.
En ce qui concerne sa structure en solo, Forza Motorsport avance sans pour autant foncer vers des voies insolites. La campagne est classée en catégories (tour moderne, tour des enthousiastes, tour puissant, tour d’héritage, tour de classe libre), elles-mêmes découpées en plusieurs championnats obligeant à piloter différentes classes de bolides. Au rayon des nouveautés, avant chaque course officielle, le pilote est propulsé sur la piste afin d’effectuer des tours de chauffe. Comme nous le disions dans notre preview, ces essais permettent de tester le véhicule sélectionné ainsi que le tracé tout en gagnant des points d’expérience, histoire de motiver les joueurs qui voudraient abréger l’entraînement et continuer le championnat. Cependant, le fait que la progression dans la campagne ne se fasse que par l’intermédiaire de rubriques dans un menu très classique est quelque peu décevant. On aurait aimé plus d’inspiration pour un reboot qui a mis six ans à arriver.
Malgré le fait qu'il ne lésine pas sur les ajouts, Forza Motorsport garde de rares traces du passé que l’on aurait préféré ne pas retrouver, à l’image du rewind qui rembobine par tronçons entiers plutôt que de laisser le joueur décider quand arrêter, ou l’absence du constructeur japonais Suzuki, marque qui esquive le soft de Turn 10 depuis le quatrième volet.
Vérifier les niveaux avant de mettre le contact
Grâce à son moteur physique flambant neuf, Forza Motorsport jouit de fondations maîtrisées pour que des millions de joueurs se disputent les meilleurs temps, pendant de longs mois. Malgré la force tranquille de sa création, Turn 10 a voulu forcer le destin, ou plutôt le taux de rétention, en mettant en place un système d’amélioration des engins achetés qui ne colle pas vraiment avec la philosophie du jeu.
Que serait un bon pilote sans une bonne voiture ? Pour surpasser ses adversaires, le joueur est invité à passer du temps dans son garage histoire d’ajouter diverses améliorations. Se délestant des mods de Forza Motorsport 7, qui donnaient un aspect jeu service qui n’était pas du goût de tous les fans, le soft édité par Microsoft revient à des réglages à l’ancienne. Enfin presque. Si dans les précédents épisodes il était permis d’acheter toutes les améliorations possibles dès l’achat d’une voiture, ce reboot de Forza Motorsport introduit une mécanique directement empruntée aux RPG, avec des pièces qui ne se bloquent qu’une fois un niveau d’XP précis atteint avec la voiture ciblée. Et ce pour les 500 engins du jeu !
Les mécaniciens en herbe qui aiment expérimenter et trouver leurs paramètres idéaux devront donc passer beaucoup de temps à farmer. Si nous comprenons l’envie de Turn 10 de donner un sentiment d’accomplissement et de progression au joueur, la solution trouvée est particulièrement contraignante, d’autant plus que les pièces d’amélioration débloquent divers réglages perso supplémentaires.
Pression des pneus, rapports de vitesse, portance négative, aérodynamisme, suspension, freinage, direction… les paramètres à changer sont nombreux quand le joueur prend le temps de faire évoluer le niveau de son véhicule. Si fouiller dans les entrailles de vos jolies caisses n’est pas forcément à votre goût, Turn 10 a eu la bonne idée d’inclure une option d’améliorations rapides, histoire de laisser la machine gérer toutes les questions techniques.
Un défi à la carte grise
À l’instar des autres jeux de la franchise, Forza Motorsport récompense la prise de risques. Trois options de difficulté (Club, Sport, Expert) sont proposées. Le principe est simple : plus le joueur accepte d’être mis au défi, plus il gagne de crédits. Comme à l’accoutumée, le pilote est également invité à choisir le niveau de difficulté des drivatars (l’IA de Forza qui cherche à simuler les comportements humains). Là encore, plus il augmente leur intelligence, plus il est récompensé. Bizarrement, le bonus de crédits entre les modes Sport et Expert est presque négligeable. Pour un challenge largement plus ardu à cause du rewind retiré, le soft n’octroie que 4 % de crédits en plus. Le petit coup de pouce des développeurs vient du fait que l’XP soit constamment sauvegardée, même quand nous quittons une course non terminée. Merci, on prend !
En solo comme en multijoueur, Turn 10 fait la chasse aux comportements agressifs. Les pénalités sont présentes peu importe la difficulté, bien qu’elles soient plus accentuées en Expert. Après plusieurs heures de jeu, nous n’avons pas constaté d’énormes abus dans l’appréciation des fautes. Le juge est assez tolérant : il retire quelques centièmes/secondes seulement quand il estime que le joueur s’est servi d’une collision avec un adversaire pour rester sur la piste, ou s’il a fait du hors-piste pour gagner du temps.
L’intelligence artificielle est de bonne facture quoique très agressive et parvient à éviter la bonne vieille file indienne. Elle sait attaquer, peut-être un peu trop, et n’est pas à l'abri de faire des erreurs pouvant l’entraîner dans le décor. Les réglages de la difficulté sont suffisamment nombreux pour que l’on puisse être mis perpétuellement au défi, même en solo. Bien qu’il s’adresse officiellement à tous, le soft exerce une pression constante que ce soit grâce aux adversaires lors des rencontres, les notes de segment, ou via les zones chronométrées durant les essais, soulignant le design du jeu articulé autour de la progression des compétences.
Une tonne d’options est disponible en jeu libre comme en multijoueur privé dans le but d’assurer des rencontres répondant aux exigences du/des participant(s). Course sur circuit, course chronométrée, multiclasse, choix de la piste, des conditions climatiques, du nombre de tours et même de l’échelle de temps, permettant une vitesse à laquelle passe le temps totalement arcade (jusqu’à x12) ou 100 % simulation (vitesse réelle, avec un cycle jour-nuit de 24 heures)... tout est là pour coller aux attentes. Il est à noter qu’aucun jeu en écran partagé n’est accessible pour le moment en partie personnalisée.
Intérieur cuir, couleur beige
Turn 10 fête l’arrivée de son premier jeu sur Xbox Series X|S en affublant sa production de jolis graphismes. Disposant d’un rendu moins tape à l'œil lorgnant du côté de Polyphony Digital avec son Gran Turismo 7, ce nouveau FM flatte la rétine grâce à de belles modélisations, des textures détaillées et des reflets aussi nombreux que précis. De nuit, les réverbères produisent un éclairage volumétrique qui projette des reflets ainsi que des ombres dans le cockpit pour un rendu impressionnant à l'écran. Certes, les dégâts sont toujours très légers visuellement, mais au moins, ils sont là. Les animations du pilote, que ce soit en vue interne ou lors des cutscenes, sont largement plus réalistes que celles de FM7. Ne vous fiez pas aux captures d’écran qui ne lui rendent pas justice, en mouvement, cet épisode est ce qui se fait de mieux dans le domaine de la simcade. Si nous voulions chipoter, nous dirions que les ombres qui se dessinent parfois un peu trop tard gâchent un tantinet le plaisir visuel.
Les joueurs qui aiment avoir le choix seront ravis de trouver trois modes graphiques dans les options vidéo. Le premier, Performance, assure un 4K/60fps très propre. Le deuxième, Performance RT, livre du 60fps avec ray tracing au prix d’une résolution variable. Le dernier est Graphismes, assurant de la 4K constante avec du ray tracing, mais en 30fps. Nous avons passé beaucoup d’heures à switcher entre les deux premiers modes. Si Performance RT apporte plus de précision, il n’empêche pas des artefacts visuels sur la piste humide lorsque les essuie-glaces balaient le pare-brise, ce qui est dommage. Il est par ailleurs impossible de changer de mode graphique à la volée en cours de partie.
Comme d’autres softs sortis récemment, Forza Motorsport alterne un affichage en 30fps (menus, cutscenes) et en 60fps (ingame). Les replays, eux, sont forcément en 4K/30fps. Nous n’aurions pas été contre le fait de pouvoir choisir la vitesse de défilement pour visionner nos meilleures performances. Le plus gros raté réside dans les départs lancés, puisque le jeu tourne en 30fps pendant le décompte avant de passer soudainement en 60fps quand le joueur prend le contrôle. Nous avons hâte qu'un patch corrige ce problème.
Sa technique avantageuse et son challenge à la carte ne doivent pas faire oublier un point essentiel : si tout le monde peut effectivement s’amuser en compagnie du titre édité par Microsoft, Forza Motorsport est destiné aux amoureux des voitures. Ceux qui aiment passer du temps dans le garage et sur les circuits pour gagner quelques centièmes. Dans sa présentation générale comme dans son contenu, le soft ne s’encombre pas de fioriture. N’espérez pas une carte du monde avenante comme celle de Gran Turismo 7, ou découvrir des activités qui sortent de l'ordinaire. FM va “straight to the point” comme disent nos amis anglo-saxons. Il vise l’essentiel, peut-être même un peu trop. D’une certaine façon, cet opus cultive sa différence avec son petit cousin foufou Horizon afin qu’il y ait définitivement deux identités distinctes.
À force de se concentrer sur le plaisir de pilotage, Turn 10 en a presque oublié les bienfaits du tourisme. Les 20 circuits disponibles au lancement (bénéficiant de variantes) sont très classiques. Exceptés Maple Valley et Hakone Circuit, les autodromes se suivent et se ressemblent, quand bien même divers fumigènes et hélicoptères tenteraient d’égayer les rencontres. Par le passé, les développeurs ont régulièrement tenté de casser la routine en intégrant des tracés plus extraordinaires avec le Fujimi Kaido, les Alpes bernoises ou encore les circuits de Prague, de Rio de Janeiro et Dubaï. Ici, le studio joue la sécurité et fait l'impasse sur les pistes urbaines. Nous savons malgré tout que FM sera régulièrement mis à jour avec du contenu additionnel, que ce soit au niveau des véhicules ou des circuits. Nous espérons de bonnes surprises pour la suite.
Si l’on ajoute à cela les chargements fréquents, les menus sommaires, les compositions musicales loin d’être captivantes et l’absence de musiques pendant les courses, cela fait de Forza Motorsport un titre définitivement austère. Si vous souhaitez hocher de la tête pendant que vous enchaînez les meilleurs temps, il faudra ouvrir Spotify, Deezer, ou mettre un CD dans la console. Heureusement, le sound design est escellent. Nets, puissants, bourrés de variations et de détails, les bruitages sont un véritable régal pour nos oreilles.
Faire preuve de bonne conduite à plusieurs
En ligne, le joueur a accès à plusieurs séries (pototype, tourisme, GT, etc.) une fois les trois premières épreuves d’introduction terminées. Les courses effectuées changent deux indices liés au profil du joueur : le score de compétence, qui juge de son efficacité au volant, et son score de sécurité, indiquant s’il est un gentleman de la route respectant les règles. Les épreuves spéciales donnent accès à des voitures préréglées tandis que les épreuves ouvertes autorisent les pilotes à utiliser leurs propres bolides. Les championnats accessibles se font à intervalles réguliers et ont une date limite, ce qui a pour objectif de pousser les pilotes à revenir fréquemment. Comme nous l’avons déjà précisé, des sessions privées sont également de la partie pour inviter ses amis à participer à des compétitions maison.
La structure du jeu en ligne varie quelque peu par rapport à l’expérience solo. Si les essais sont toujours là pour s’habituer aux circuits, il y a cette fois-ci de vraies qualifications déterminant la place des pilotes sur la grille de départ. Avant de commencer une course, le joueur dispose d’un peu de temps pour changer le revêtement de ses pneus ainsi que la quantité de carburant. En ce qui concerne les pénalités, ces dernières sont toujours prises en compte : elles retirent du temps en cas de faute avérée en plus de gonfler un score de sécurité pouvant mener à la disqualification pure et simple.
Durant nos parties en ligne, nos amis de la presse mondiale jouaient le jeu et les participants cherchaient à éviter le contact. Mais comme chacun le sait, il faudra attendre l’arrivée des joueurs pour savoir si les parties en ligne ne seront pas gâchées par des nigauds en manque de tôle froissée. En cas d’accrochage, une simple pression sur le d-pad envoie un petit mot d’excuse. Faute avouée à demi pardonnée, non ? Grâce au replay, il est théoriquement possible de regarder la trajectoire du top player afin de s’inspirer de son pilotage, mais un bug nous a empêché de vérifier tout ça. En outre, les données de réglage des voitures des concurrents ne sont pas accessibles.
Pendant notre test, les serveurs n’ont montré aucun signe de fatigue, quand bien même certaines voitures auraient des mouvements peu naturels et se téléporteraient parfois d’un ou de deux mètres. Comme d’habitude, la qualité du jeu en ligne dépendra de votre connexion et de celle de vos concurrents. Dans son aspect strictement communautaire, le titre de Turn 10 possède un mode photo complet, de quoi créer et partager ses livrées ainsi que ses réglages pour les bolides acquis. De l’habituel pour un Forza. Dans les petits plus, nous apprécions qu'un pilotage automatique s'active quand le joueur met en pause lorsqu'il est en ligne. Cela permet de régler une situation urgente dans la vraie vie sans devoir obligatoirement finir dans le talus ou quitter l'épreuve. Attention, si le jeu 100 % déconnecté d’Internet est bien autorisé, ce dernier se cantonne au mode course libre. En d’autres termes, si vous souhaitez avancer dans la campagne solo, il faudra impérativement être connecté.
Conclusion
Points forts
- Les sensations de conduite, très bonnes
- Une tonne de paramètres et aides pour convenir à tout le monde
- Cycle jour-nuit et météo dynamique (aux effets variés) sur toutes les pistes
- 500 véhicules à améliorer jusque dans leurs moindres détails
- Beau et fluide, avec du ray tracing même en 60fps
- Bruitages et sonorisation exceptionnels
- IA qui prend le relai à plusieurs quand on met en pause (mode autonome)
- Multi en ligne réussi et 100 % personnalisable
- Un mode photo, un éditeur de livrées, des dégâts visibles…
Points faibles
- La progression dans la campagne trop à l’ancienne… et avec connexion obligatoire !
- Austère dans sa présentation générale (menus, chargements réguliers, absence de musiques en course, etc.)
- 20 circuits seulement, avec des absences remarquées (pistes urbaines)
- L’amélioration de pièces qui se débloque avec de l’XP est inutilement contraignante
- Pas de multijoueur en écran partagé
Note de la rédaction
Avec ce Forza Motorsport édition 2023, Turn 10 remet les compteurs à zéro et livre un jeu de course automobile disposant d’un châssis en titane capable de porter la licence pendant plusieurs années. Beau, fluide, offrant de très bonnes sensations "simcade" de conduite, il propose les modes qu’il faut avec les paramètres nécessaires pour satisfaire presque tout le monde. À la fois ultra permissif (dans son challenge) et restrictif (dans les améliorations à débloquer), ce reboot se cherche un peu. Visant un très large public grâce à ses nombreuses options, il n’en demeure pas moins dédié aux férus de jolis bolides, ceux qui sont capables de passer outre son aspect définitivement austère (et l'absence de circuits urbains) pour se laisser happer par les joies de la compétition motorisée, en solo comme en ligne. Du beau boulot.