Après avoir mis le monde à ses pieds avec Dark Souls puis Elden Ring, FromSoftware peut-il faire de même avec Armored Core, une licence en vol stationnaire depuis dix ans ? Spoiler, oui. Encore une fois, l’équipe japonaise crève le plafond… signant sans doute le meilleur jeu d’action de 2023.
Il faut battre le fer tant qu’il est chaud, dit le dicton… Mais après avoir secoué l’action-RPG pendant des années, avec Dark Souls | Elden Ring, FromSoftware revient aujourd'hui à l’un de ses premiers amours : “Armored Core”, une licence où l’on contrôle un mécha dans tout un tas de missions. Pas grand chose à voir avec les univers dark fantasy, donc, même si le studio explique ici s’appuyer sur la "philosophie de game design des Souls". Autrement dit, ce sixième volet, Fires of Rubicon, pousse à fond les manettes du gameplay, au sein d’une aventure exigeante où la personnalisation du robot occupe - toujours - une place centrale… Alors, est-ce que c’est un retour en force ? Voici notre avis.
Retour vers le futur
Si vous ne connaissez pas Armored Core, une petite mise à jour s’impose : Fires of Rubicon est un jeu d’action qui se découpe en 5 chapitres d’une quarantaine de missions au total. Il ne s’agit donc pas d’un monde ouvert | semi-ouvert. Les objectifs de ces séquences sont différents à chaque fois (récupérer des données, détruire des cibles, attaquer une base), même si on note de temps à autre le retour d’un décor que l’on vient d’explorer. D’ailleurs, on suit un récit vraiment plus limpide que dans Dark Souls ou Elden Ring. Ici, on incarne C4-621, humain amélioré qui cherche à offrir ses services au plus offrant sur la planète Rubicon ! Ce caillou perdu dans l’espace, dévasté il y a longtemps par une tempête de flammes, est convoité par plusieurs corporations, lancées dans une guerre sans fin. Leur but : contrôler le “Corail”, une ressource surpuissante que l’on trouve uniquement à cet endroit.
C’est d’ailleurs une première bonne surprise d’Armored Core 6 : le scénario, en plus d’être agréable à suivre, cache son lot de surprises. En tant que mercenaire "neutre", vous serez balancés d’un camp à l’autre, devant par exemple rendre service à Dafeng Industries alors que vous avez aidé le Front de libération de Rubicon l’instant d’avant… Bien sûr, vos actes attireront les faveurs des uns ainsi que les foudres des autres, alors que la grande histoire se mêlera avec celle de votre personnage. L’un dans l’autre, la structure en mission individuelle de Fires of Rubicon - qui nous paraissait old-school dans notre preview - participe, avec l'histoire qui nous est contée, à créer un rythme prenant et un certain côté “addictif”. Que ce soit une phase linéaire qui pète dans tous les sens ou un niveau plus ouvert avec une pointe d’exploration, nous sommes toujours plongés directement dans l’action. Qui plus est, après quelques heures, vous débloquerez l’Arène, un boss rush en “1v1” face à 30 autres robots. De quoi consolider davantage le rythme, et donner un shoot d’adrénaline entre deux quêtes principales (qui peuvent durer entre 5 et 30min). Après un certain temps, vous aurez aussi accès au "NET", c’est-à-dire le PvP. Malheureusement, dans le cadre de ce test, nous n’y avons pas eu accès.
Petit arrêt au garage
Le NET (comme l’Arène ou l’Entraînement d’ailleurs) se trouve dans le Garage, un hub dans lequel vous reviendrez après chaque mission. C’est le centre névralgique de cet Armored Core. En marge des activités annexes, vous pourrez peaufiner votre mécha avec des pièces fraîchement gagnées, après avoir validé une mission, ou achetées, dans un magasin disponible à tout moment. Au vu des challenges qui vous attendent, vous ferez souvent des emplettes. Comme dans les autres épisodes de la licence, Fires of Rubicon demande de se préparer avec le plus grand soin pour venir à bout de certaines missions | boss. Un simple changement d’équipement peut faire la différence. Un exemple, contre le second ennemi majeur de l’aventure, protégé par un blindage impénétrable à l’avant : faire appel à un lance-missiles vertical, afin de contourner automatiquement la carapace de métal. Ici, les meilleures stratégies ne sont jamais servies sur un plateau d’argent, les trouver fait vraiment partie du charme de l'expérience. À ce propos, Armored Core 6 nous simplifie la vie. Il y a presque tout le temps un checkpoint avant de franchir la porte d’un boss, et il est possible de changer d’équipement entre deux échecs. Par contre, ce dernier cas concerne seulement les pièces achetées au préalable.
Évidemment, la clé d’Armored Core 6, ce n’est pas qu’une bonne arme au bon moment. Comme par le passé, le système de personnalisation renferme un monde fascinant de complexité | de détails, où vous pourrez construire le “build” de vos rêves à condition de respecter certaines contraintes (ici, une limite de poids et d’énergie). Le robot a douze paramètres à modifier : l’équipement sur les deux bras et épaules - souvent des armes -, la tête, le torse, booster, générateur, les jambes... Il est même possible de changer de processeur, ici appelé SCT, pour que votre héros de métal soit plutôt efficace en combat rapproché ou à distance. En fin de partie, nous avons compté plus de 150 pièces au total.
Autant dire qu’il y a pas mal de combinaisons. Le tout peut avoir une jolie incidence sur le gameplay, surtout quand on parle du choix des jambes. Sur ce point, il y a en quatre types : les jambes bipèdes, idéales pour les configurations moyennement lourdes ; les jambes “aviaire”, plus légères et capables de bondir en guise d’esquive ; les jambes “trétapode” - qui peuvent faire du vol stationnaire ; et enfin les jambes tank, moins mobiles dans les airs mais assez balaises pour porter plein d’armes lourdes. Ici, pas besoin de points d’XP. Dès que vous achetez | débloquez la pièce, vous pouvez l’équiper sans attendre. Pour faire le parallèle avec Elden Ring, c’est comme s'il était possible de changer de classe en un clin d'œil. Pratique pour aborder rapidement un obstacle sous un nouvel angle. Du coup, nous serions tentés de dire qu’Armored Core 6 est plus accessible qu'un Dark Souls ou autre jeu du genre.
Le Garage d’Armored Core 6 cache un autre trésor... personnaliser l’apparence de votre mécha. Un aspect qui fait honneur à la licence ! Ici, c’est simple, vous pouvez faire ce que vous voulez : choisir la couleur de la moindre pièce, son reflet ou son taux d’usure - que ce soit pour l’armure ou vos armes. C’est la même chose pour les logos, que vous pouvez placer comme il vous plaît. D’ailleurs, il est carrément possible de créer ses propres emblèmes grâce à un éditeur d’images.
Rouler des mécaniques
Forcément, après avoir évoqué la personnalisation, un autre point vient à l’esprit : le gameplay. Alors, comment ce Fires of Rubicon s’approprie la philosophie de game design des Souls, comme évoqué plus haut ? Eh bien avec un gameplay quasi-irréprochable, plus action | tactique que dans les autres épisodes de la franchise. Ici, en marge de l’habituelle énergie (équivalent de l’endurance dans Elden Ring), des munitions et de la santé, la jauge de vacillement fait son apparition. Le principe est très simple : plus votre adversaire encaisse des tirs, plus sa barre se remplit. Quand celle-ci atteint 100%, le méchant s’immobilise quelques secondes (c'est plus ou moins longtemps selon sa configuration lourde ou légère), et les dégâts reçus sont décuplés ! C’est à ce moment-là qu’il ne faut pas se foirer et balancer tout ce que vous avez. Plus facile à dire qu’à faire : toutes les armes sont soumises à un état de recharge ou de surchauffe quand elles sont utilisées longtemps sans s’arrêter. En gros, il faut veiller à ne pas griller ses meilleures cartes au moment de déclencher un vacillement, demandant de toujours garder un œil sur les informations relatives à votre arsenal, en bas à droite de l’écran. Notez que le vacillement vaut aussi pour vos petites fesses de métal - et que ça peut rapidement être fatal.
Une gymnastique à reproduire contre les ennemis les plus musclés (en 1 contre 1), et qui s’applique aussi à votre énergie. Eh oui, quand votre cible “vacille”, ce sont les armes au corps-à-corps qui font le plus de dégâts, mais celles-ci consomment de l’énergie… Ce n’est bien sûr pas la seule capacité dans ce cas : tout ce qui touche à la mobilité (esquive, saut, vol, ruée vers l’avant) s’appuie sur cette ressource, et vous en aurez largement besoin pour éviter les nombreux projectiles qui ménacent de vous refaire une beauté. De nouveau, tout est affaire d’équilibre et de gestion des ressources, savoir quand éviter les tirs | quand foncer pour faire des dégâts. Ça demande un peu d’entraînement, mais comme d’habitude avec FromSoftware, c’est super grisant à maîtriser. Dans l’ensemble, nous avons été totalement conquis par le gameplay d’Armored Core 6, dont le style est à toute épreuve (en plus, côté lisibilité, c'est très rarement brouillon). Si vous sortez d’Elden Ring, à moins d’être allergique à la taule, c’est presque certain, vous allez accrocher. Il faut juste s’habituer à la maniabilité verticale et au ciblage automatique ("léger", avec une reticule sur l’ennemi, ou “fort”, avec la caméra qui gravite autour de l’adversaire). Un choix qui peut étonner, mais vu la vitesse de l’action, c’est pour le mieux.
Sur PS5 - en marge de quelques textures et effets faiblards - Fires of Rubicon livre souvent des panoramas captivants et impressionnants, qui rappellent le génie d’Elden Ring. Sur PS4 Fat, la résolution et la technique pure sont en deçà, mais pour un résultat qui reste très satisfaisant. Le “problème” sur l’ancienne génération, c’est qu’il faudra se contenter d’un framerate à 30 images par seconde, avec de légers ralentissements. Clairement, avec son action méga-dynamique, ce sixième volet est taillé pour la famille des PS5 et Xbox Series, en 60 FPS au moins… Notez que sur la dernière console de Sony, il y a également un “mode résolution”, avec un framerate divisé par deux et une meilleure qualité d’images. Sur le plan visuel, l’écart ne saute pas aux yeux, tout comme l’option ray-tracing d’ailleurs. Bref, si vous voulez un conseil, privilégiez le mode 60 FPS.
Laisse-moi kiffer la vibe avec mon mech
À mesure que l’on appréhende et maîtrise les mécaniques de Fires of Rubicon, on en veut toujours plus. Plus de challenge, surtout, qui retombe d’ailleurs un peu dans la deuxième partie de l’aventure (on aurait aimé que ce soit l’inverse). La faute à des boss moins démesurés | créatifs, dont l’échelle s’apparente à celle de votre personnage… Heureusement, c’est aussi à ce moment que les missions installent plus de contraintes, faisant l’impasse sur les habituels checkpoints et les ravitaillements pour récupérer munitions et kits de réparation (à ce propos, vous ne pouvez en porter que trois au max). Cependant, notez qu’Amored Core 6 fait l’impasse sur le "end-game", même s’il est possible de rejouer n’importe quelle phase pour récupérer plus de crédits - même des pièces d’équipement, qui sont cachées dans les niveaux plus vastes. Franchement, nous ne serions pas contre y retourner, tant certaines zones affichent la folle patte artistique de FromSoftware, parfaitement transposée au cadre futuriste post-apo. À croire que l’équipe japonaise transforme en or tout ce qu’elle entreprend.
Conclusion
Points forts
- Gameplay grisant et addictif
- Bon rythme, action survoltée
- Un “futur post-apo” fascinant
- Même le récit est intéressant
- Réelles stratégies à adopter
- Un volet personnalisation top
- L’éditeur de figurine Gundam
Points faibles
- Un léger manque de contenu
- Les boss lors de la 2nd partie
Note de la rédaction
Avec Armored Core 6, FromSoftware montre avec brio que son savoir-faire ne se limite pas qu’à Dark Souls ou Elden Ring. Le studio japonais livre ici un jeu d’action avec un gameplay assez irréprochable, à la fois tactique, exigeant et ultra-dynamique, fer de lance d’un titre au rythme effréné… Ne vous fiez pas à la structure prétendument old-school avec des missions individuelles. Fires of Rubicon vous plonge directement dans l’action, et sait dégainer quand il le faut des phases linéaires, plus ouvertes, des boss, sans oublier des panoramas toujours aussi impressionnants. Malgré une légère déception pour les ennemis majeurs, dans la 2nd partie de l’aventure, et un petit manque de contenu, Armored Core 6 est un titre addictif, qui colle à la peau. Un excellent jeu d’action, même si vous n'en pincez pas pour les méchas.