Prenez un grand classique du jeu vidéo, ajoutez-y un studio respecté, un zest de modernisme et une pincée de Battle Royale. Secouez le tout pour mélanger chaque ingrédient et découvrez la nouvelle édition d’Arkanoid, le célèbre casse-brique de 1986 ! Ouvrez vos livres d’histoire, on repart sur les traces de la grande épopée des jeux d’arcade !
Pour comprendre d’où vient Arkanoid, il faut s’intéresser à un autre jeu : Breakout. Au début des années 1970, alors que tout reste à inventer, la compagnie Atari renverse tout sur son passage avec Pong, une « simulation » de tennis. L’accueil du public est si fulgurant que les patrons de bars appellent l’entreprise en expliquant que la borne ne fonctionne plus. En réalité, le monnayeur est bloqué par les innombrables pièces qui s’accumulent dans le compartiment prévu à cet effet. Sur sa lancée, Atari, par la voix de son fondateur Nolan Bushnell, demande à deux de ses ingénieurs d’élaborer un nouveau concept. Le duo, composé de Steve Wozniak et Steve Jobs, les futurs fondateurs d’Apple, imaginent alors un PONG jouable en solitaire en suivant la conceptualisation de Nolan Bushnell et Steve Bristow. Cette variation donne naissance à Breakout, un titre redoutable reposant sur une idée toute simple : grâce à une raquette placée en bas de l’écran, le joueur propulse une balle pour briser des briques positionnées en hauteur. Lorsque la balle touche une brique, celle-ci disparaît, mais la balle poursuit son parcours. Il faut alors gérer les rebonds et les déplacements du projectile en le faisant rebondir, vous l’aurez compris, sur la raquette. Sans quoi, la balle tombe dans le vide et le joueur perd un crédit. Le jeu est un succès, mais Steve Wozniak avouera, des années plus tard, que son compère Steve Jobs s’est joué de lui en lui donnant 375 dollars alors que le contrat signé par Jobs était, sans qu’il le sache, de 5 000 dollars. Quoi qu’il en soit, c’est Breakout qui a donné les lettres de noblesses à Arkanoid une dizaine d’années après.
Des hommes et des briques
Au milieu des années 1980, la direction de Taito décide de créer un casse-brique et cherche un moyen pour que le projet soit une réussite. Pour obtenir le meilleur jeu qui soit, elle met en place un concours entre employés avec, à la clé, une belle prime et la commercialisation du jeu. Le duo qui se détache alors est composé d’Akira Fujita et Hiroshi Tsujino. Tout en reprenant le concept de Breakout, ces derniers élaborent un univers (la raquette est remplacée par une pagaie appelée Vaus) et intègrent une série de bonus pour aider le joueur. En cours de partie, en brisant certaines briques, des items tombent vers le bas de l’écran et l’utilisateur peut se munir de différents effets : agrandissement de la pagaie, balles supplémentaires, balle qui colle à la pagaie et même activation de tirs laser ! Mais borne d’arcade oblige, Taito est aussi là pour empocher un maximum de pièces et le challenge est endurci par la présence de briques plus résistantes voire carrément indestructibles. Pour mener à bien ce projet, les concepteurs japonais s’inspirent du film Tron pour l’esthétique futuriste et poussent le vice technique jusqu’à créer des modèles 3D reconvertis en éléments 2D. À sa sortie, Arkanoid est un tel phénomène qu’il devient le jeu le plus rentable de 1987 – et la conversion la plus rentable des États-Unis. En bref, un carton commercial devenu un classique.
Réimaginer un concept vieux de 35 ans
Installé à Paris, le studio Pastagames est réputé pour ses productions de qualité (Rayman Legends, Rayman Mini, Pix’n Love Rush, Pix the Cat, Pang Adventures…) et Arkanoid avait tout de la suite logique après la sortie de leur Pac-Man Party Royale en 2019. Mais à quoi faut-il s’attendre ? Comme pour l’original, tout commence lorsque le vaisseau Arkanoi est attaqué. Parvenant à s’extirper, le petit aéronef Vaus se fait malheureusement emprisonner dans une dimension parallèle et n’a plus que son courage pour ne pas sombrer dans un vide intersidéral. Pour retrouver sa liberté, l’équipage doit détruire des « space walls », autrement dit des murs spatiaux afin d’atteindre l’entité maléfique, Doh, à l’origine de la destruction du vaisseau-mère Arkanoid. Si les plus anciens seront ravis de retrouver l’original – disponible immédiatement parmi les différents modes de jeu – les curieux vont se pencher sur ce qui fait la force de cette édition 2022 : son Battle Royale !
Sans surprise, Arkanoid Eternal Battle reprend les poncifs du jeu de 1986. Il est donc toujours question d’un petit vaisseau, le Vaus, positionné en bas de l’écran et d’une balle de plus en plus folle rebondissant sur les briques du haut de l’écran. Les mécaniques de jeu sont instinctives et la marge de progression, énorme, permet de profiter des différentes idées des concepteurs de Pastagames. Artistiquement, le studio s’est fait plaisir en propulsant le joueur dans un univers électro-futuriste très réussi. La musique des menus est ultra entraînante et le jeu fourmille de détails visuels : traînées de lumière, flashs stroboscopiques, vibrations, artefacts graphiques, couleurs illuminant l’écran… pas de doute, l’immersion est totale ! L’interface est également agréable et permet de passer facilement d’un mode à un autre.
Seul face au monde
Le mode Battle Royale est incontestablement celui qui retient l’attention car il permet d’affronter 24 joueurs en simultané qui ont tous un seul et même but : survivre ! Le principe est simple : on passe de tableau en tableau et chaque erreur fait perdre des places au classement qui s’affiche en temps réel. Doh se chargeant d’éliminer les trainards, l’objectif est tout simplement d’obtenir la meilleure place. Si vous parvenez à rester parmi les derniers participants, vous obtenez le droit d’affronter Doh dans un duel épique où le boss ne fait aucun cadeau (laser destructeur, etc.). Durant les parties, il est tout à fait possible de gêner ses concurrents directs en leur envoyant des power-ups (altérations visuelles, Vaus rétréci, augmentation soudaine de la vitesse…) via les touches latérales de la manette. Pour rythmer les parties, les développeurs ont intégré différents types de briques : celles qui détruisent les blocs à proximité, celles qui transforment la balle en balle antimatière ou encore celles qui augmentent leurs valeurs. Les items quant à eux offrent une dizaine d’effets (diminution de la vitesse, balle transperçante, Vaus collant, vie supplémentaire, niveau suivant, etc.). Il est même possible de « dasher » pour déplacer très rapidement son vaisseau d’une direction à une autre. Arkanoïd conserve son essence d’antan, mais se voit boosté par cette relecture moderne addictive. Et en plus, il est crossplay, ce qui permet de jouer avec des utilisateurs d’autres supports.
DOH, et pas d’OH !
Visuellement percutant et bien pensé, Arkanoid Eternal Battle propose un mode solitaire intitulé Neo ainsi qu’un multijoueur réunissant jusqu’à 4 joueurs (avec choix du nombre de rounds et ajout d’un ou plusieurs joueurs gérés par l’IA si nécessaires). Comme indiqué plus haut, la marge de progression est colossale et la frustration des premières parties s’estompe vite dès lors que l’on prend la mesure des différentes mécaniques et de la vitesse du Vaus. Le petit vaisseau accélère dans ses déplacements lorsque l’on maintient l’une des directions et la sensibilité des contrôles est paramétrable dans les options. Arkanoid Eternal Battle n’a rien du jeu qui emploie les gros moyens, mais il fait ce qu’on attend de lui. Le Battle Royale, quand il y a du monde (car ce n'est pas toujours le cas), est très prenant et le multijoueur sur ce type de jeux est toujours aussi efficace. En somme, c’est du tout bon ! Maintenant, il faut que le jeu se fasse connaître pour que tout le monde s’affronte en ligne.
Conclusion
Points forts
- Une direction artistique réussie
- Des musiques dans le ton
- Les nouvelles mécaniques
- Des modes solo, multi et en ligne
- Respectueux de l'oeuvre originale
- Le combat final contre Doh
Points faibles
- Des récompenses anecdotiques (skins pour décorer)
- On aurait aimé plus de thèmes musicaux
- Perturbations visuelles liées aux éléments qui s'affichent en plein jeu
Note de la rédaction
À s’en dégourdir les phalanges ! Très respectueux du hit d’antan, Arkanoid Eternal Battle se pare d’un look électro réussi et de mécaniques inédites qui raviront les amateurs du genre. Casse-brique décomplexé, le titre de Pastagames a la bonne idée d’intégrer un mode Battle Royale ingénieux, mais aussi un mode solo ou multijoueur pour les longues soirées d’hiver. Si le contenu pouvait être plus généreux – ne serait qu’en termes de récompenses – la marge de progression est telle qu’on y revient régulièrement pour améliorer ses réflexes. Un bon p’tit jeu qui n’attend plus qu’une grande communauté pour donner tout son sens à la Battle Royale.