La mort n’est que le commencement

Avant d’évoquer l’intrigue du jeu, il convient de clarifier un "point de détail" qui a son importance. Gotham Knights n’est d’aucune manière la suite, que ce soit directe ou spirituelle, de Batman Arkham Knight développé par Rocksteady. L’histoire débute avec une révélation faite dans les dix premières minutes du jeu qui bouleverse l’univers de DC. Le Chevalier Noir est mort ce qui a pour conséquence de plonger la ville nord-américaine dans le chaos. Face à la recrudescence de la criminalité et à une menace séculaire qui dirige la cité dans l’ombre, la Bat-Family reprend le flambeau, déterminée à lever le voile sur le mystère entourant la disparition du protecteur de Gotham.

L’aventure s’articule autour d’un chassé-croisé de plusieurs arcs narratifs nommés "dossiers" mettant en scène la Cour des Hiboux ainsi que plusieurs vilains parmi les plus emblématiques du Batverse. Cependant, certaines absence remarquées pourraient décontenancer les fans. Nos quatre justiciers (Barbara Gordon, Dick Grayson, Jason Todd et Tim Drake) donnent ainsi la réplique à Harley Quinn, Oswald Cobblepot et bien d’autres au cours d’une aventure menée tambour battant et dont la durée avoisine la vingtaine d’heures de jeu. Warner Games puise allégrement dans le matériau source, à savoir les comic books, afin d’imaginer un récit haletant et fidèle aux valeurs de Batman, mais sachant s’en émanciper. Gotham Knights n’est pas une adaptation d’une œuvre en particulier. C’est une réinterprétation du mythe de l’homme chauve-souris avec pour héros ses apprentis.

La mise en scène est à la hauteur du drame porté à l’écran. Le décès de Batman marque les esprits, ceux des justiciers, des alliés de longue date, des méchants prompts à se réinventer, mais aussi des joueurs qui découvrent une ville de Gotham en pleine ébullition. De nombreuses cinématiques réalisées avec soins balisent une épopée souhaitée épique, et content l’histoire des Chevaliers de Gotham avec un sens aiguë de l’héroïsme. Gotham Knights parvient ainsi à tracer sa propre voie, sans Batman, et à le faire avec un talent certain. L’absence de Bruce Wayne aurait pu être préjudiciable. Dans les faits, il n’en est rien. Nos quatre héros se hissent à la hauteur de leur mentor avec force, persévérance et courage.

Il était une fois Gotham

Il est coutume de qualifier de personnage une ville particulièrement centrale dans une œuvre. Si ce rapprochement peut paraître exagéré par instant, dans le cas de Gotham Knights, cela ne saurait être plus vrai. La ville de Gotham imaginée par les artistes de Warner Games est la plus grande jamais bâtie, ce qui est un fait, et n’est comparable à aucune autre. La cité portuaire nord-américaine, composée de plusieurs districts reliés par des ponts, brille la nuit de mille feux sous les néons et les éclairages inspirés des films Noir. Gotham est surtout humide, sale et crasseuse comme se doit de l’être cette cité fictive visuellement étourdissante et rongée jusque dans ses fondations par un Mal ancestral.

Pour se déplacer dans Gotham, nos justiciers peuvent compter sur la Batcycle - la moto de Batman - ainsi que sur l’incontournable grappin leur permettant de se mouvoir à leur guise sur les toits de la ville. Survoler la cité, se déplacer de toit en toit avec aisance, et filer à tout berzingue sur une monture motorisée s’avèrent d’une efficacité rare et extrêmement grisant. Fort heureusement, la technique suit. Gotham Knights n’a pas à rougir de la concurrence, bien au contraire, et offre aux fans du Chevalier Noir une épopée solide qui ne souffre d’aucun raté. La progression se fait sans heurt, et donc sans bug… un fait à saluer tant les développeurs ont soigné leur copie.

L’ombre et la proie

Batman est à l’origine un détective, comme l'indiquent les initiales DC pour Detective Comics, et les studios en charge du projet l’ont bien compris. Le meilleur détective du monde a transmis ce savoir à ses acolytes qui mènent désormais l’enquête en lieu et place de leur mentor. Ils analysent les scènes de crime, relèvent des indices, et les recoupent afin de définir les prochains objectifs. Cette volonté de revenir aux origines du Chevalier Noir est à mettre au crédit des designers. Toutefois, cette dimension "enquête" est finalement (trop) balisée. Nul besoin d’être un expert en criminologie pour dénouer les fils du mystère. Tout se fait naturellement, une mission après l’autre, sans se creuser les méninges outre mesure. Néanmoins, certains puzzles et autres énigmes qui pimentent et renouvellent l’aventure pourraient vous ralentir quelques instants

Les Chevaliers de Gotham sont également passés maître dans l’art de la dissimulation et de l'infiltration. Avant de fondre sur l’ennemi et de faire parler leurs poings, nos héros sont invités à faire preuve de discrétion et à éliminer la menace sans se faire repérer. Si certains personnages, notamment Batgirl et Robin, possèdent des prédispositions dans ce domaine, nos quatre justiciers peuvent aisément se défaire de la menace sans se faire repérer. Plusieurs missions sont d’ailleurs pensées dans ce sens, et invitent à ne pas éveiller les soupçons sous peine d’échouer. Gotham Knights applique ici une formule qui a fait ses preuves par le passé face à des ennemis suspicieux, mais dont l’intelligence demeure artificielle.

La voie des chevaliers

Batgirl, Nightwing, Red Hood et Robin ne sont pas forcés de rester tapis dans l’ombre et peuvent privilégier une approche frontale, histoire d’appliquer une justice expéditive, face à un bestiaire riche. Le système de combat, qui s’éloigne de celui de la saga Arkham pour mieux s’inspirer de celui de Marvel’s Spider-Man, repose en majorité sur un mix d’esquives, d’attaques et d’aptitudes variées. Sans surprise, les affrontements souhaités à la fois accessibles et techniques occupent une place de choix, et prodiguent un vrai sentiment de montée en puissance au cours de l'aventure. Combattre le crime dans les rues de Gotham est extrêmement gratifiant que ce soit face au menu fretin ou aux boss d’un tout autre calibre.

Néanmoins, la caméra s’égare par instant, perdant son sujet de vue une fraction de seconde. Couplé à un indicateur d’attaque situé sur l’ennemi, cela peut s’avérer handicapant dans les niveaux de difficulté plus élevés. Gotham Knights se dote également d’une surcouche Light-RPG traduisant la montée en puissance des différents justiciers. Le gain d’expérience lié à la réussite des missions et la résolution des crimes débloque de nouvelles compétences propres à chaque héros. Enfin, de nouveaux costumes et équipements aux propriétés variées sont régulièrement mis à disposition des héros à condition de les fabriquer avec l’aide de matériaux et de plans dénichés dans Gotham. Cela ne révolutionne en rien la formule des Action-RPG, mais participe grandement à l’immersion.

La Bat-Family

L’absence de Batman se fait sentir durant les premières minutes de jeu avant de laisser place à un sentiment nouveau, celui de la découverte. Les quatre héros de Gotham Knights, bien que formés par le Chevalier Noir en personne, sont tous très différents. Ce sont des reflets déformés de leur mentor possédant un style, une philosophie de vie ainsi qu’une vision de la justice bien à eux. Nightwing est un acrobate et leader né. Red Hood mise sur la force brute et ses armes à feu. Robin met sa discrétion et ses gadgets à profit. Quant à la badass Batgirl, elle fait montre d’un sens du piratage et du corps-à-corps sans pareil. Il est même possible, et fortement conseillé, d’alterner entre les personnages entre deux missions, leur montée en puissance se faisant en parallèle.

Le “S” de Gotham Knights n’est pas là pour faire beau. Le titre de Warner Games est intégralement jouable en solo et en coopération à deux joueurs. L’aventure principale ainsi que l’ensemble des missions annexes peuvent être partagées avec un allié sans pour autant être enchaîné à ce dernier. Les justiciers peuvent parcourir la ville comme bon leur semble, combattre le crime séparément avant de se rejoindre afin de faire progresser une intrigue en particulier. Les développeurs ont même intégré des attaques combinées, histoire de rendre toujours plus concrète la synergie entre les personnages. Il en va de même pour les combats de boss qui diffèrent que vous soyez seul ou accompagné… une initiative bien trop rare !

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Conclusion