Une exploration façon Zelda Breath of the Wild et un hommage artistique à l'Œuvre de Mœbius : voici le vaste programme proposé par le mystérieux Sable, dévoilé pour la première fois lors de l'E3 2018. Après tant d'années d'attente, le voyage dans l'open-world indé de Shedworks vaut-il le détour ?
Première production d'un duo anglais formé sous la bannière Shedworks, Sable raconte le rite de passage vers l'âge adulte d'une héroïne éponyme. Cette étape lui requiert d'explorer les quatre coins d'un monde dont il ne reste plus que les vestiges de civilisations disparues. Au volant d'un aérocycle, notre nomade débute un périple en toute liberté entre rencontres, petits mystères et immenses étendues.
Les joies de l'escalade
Cœur de l'aventure, l'exploration façon Breath of the Wild de Sable repose sur une navigation singulièrement libre dans un vaste monde ouvert. La carte à disposition dans votre inventaire est pratiquement vierge ; c'est à vous de la compléter au fil de vos trouvailles. Le jeu vous lance essentiellement à la recherche de ses habitants, bâtisses et énigmes, que vous découvrirez généralement après de longues traversées désertiques. Ainsi, une bonne quinzaine d'heures seront finalement nécessaires pour boucler chaque quête et fouler toutes les parcelles de terre. Pour ce faire, notre jeune Sable possède quelques atouts particulièrement séduisants ; elle est capable de gravir presque n'importe quelle surface. Il suffit seulement de veiller à la bonne tenue de sa barre d'endurance, laquelle s'insère plaisamment dans l'appréhension de l'espace qui vous est demandée. Et puis elle dispose d'une "pierre de glissement", sorte de bulle qui lui sert de planeur, parfait pour les rebords lointains. Ces attraits font de l'escalade l'atout majeur du voyage. Cà-et-là, vous tomberez sur quelques hauteurs qui paraissent impénétrables et que vous aurez diablement envie d'atteindre. L'étude de certaines d'entre elles peuvent alors vous happer de longues minutes.
Les ascensions et les plateformes seront notamment le propos de nombreuses énigmes plus ou moins nébuleuses logées dans certains édifices. Il s'agit de trouver le moyen d'atteindre des sommets, d'activer des interrupteurs, ou de mettre la main sur de petites statuettes à insérer dans les bons orifices. À la clé, des habits, des artefacts ou de l'argent à échanger contre des bouts de carte ou d'autres matériaux utiles. Le défi est plaisant, parfois très fastidieux, mais la réussite semble rarement généreusement récompensée. Et au cours de vos longs trajets, un sentiment de vide s'installe par instant, à la fois dans la narration, la progression et dans votre compréhension de l'univers.
Exploration en dents de scie
De cette promenade tout de même très paisible, on peut aussi reprocher un framerate vascillant, une caméra capricieuse, des bugs de collision et surtout un méchant clipping ; terme qui désigne l'apparition brutale et donc peu naturelle d'éléments de décors dans notre champ de vision. Ajoutons à cela d'occasionnelles coupures de son et bugs d'affichages. La technique fait également défaut à votre moyen de locomotion principal. Pour vous aider à naviguer plus rapidement, on vous confie un aérocycle. Libre à vous de le personnaliser et d'y intégrer quelques améliorations notables. Mais attention à ne pas l'égarer : s'il est possible de le rapatrier à vos côtés via un simple bouton, il aura souvent tendance une grande partie du temps à se cogner contre les murs et à rester coincé derrière des obstacles, sans possibilité de vous rejoindre. Vous serez ainsi forcés d'entreprendre de longues randonnées où les quelques glissades sur les dunes de sable sont de vrais soulagements.
Contemplation façon Mœbius
Hommages très marqués à l'art des bandes dessinées de Mœbius, les paysages de Sable honorent sa maîtrise des couleurs et de ce que l'on appelle la « ligne claire » ; ce style qui associe à chaque cellule isolée sa couleur. Le résultat est un panorama chatoyant fait tantôt de longues surfaces planes désertiques puis de complexes métalliques hautement détaillés ou de tours vertigineuses. Et les teintes varient entre le jour et la nuit. La patte fait facilement son petit effet. La contemplation est sublimée de mélodies atmosphériques propres à chaque lieu et des compositions indie pop du groupe Japanese Breakfast.
Sans véritable fil rouge, le jeu se construit autour d'une longue quête initiatique qui se forge au fil des découvertes de nouveaux peuples nomades et étranges. Chacun prend position sur des campements pourvus d'une identité qui leur est propre. L'histoire, très suggestive, surgit après de longs silences dans les anecdotes de vos rencontres. L'héroïne, elle, n'hérite pas de ses propres lignes de dialogue. À la place, elle nous gratifie d'une narration à la première personne qui décrit sa parole. L'écriture n'est est que plus particulière. L'univers de science-fiction de Shedworks charme pour sa singularité et ses secrets. Difficile en revanche d'en retirer une réelle consistance. Enfin notez que le jeu n'est disponible qu'en anglais et qu'un bon niveau est nécessaire pour comprendre nos personnages.
Conclusion
Points forts
- Une direction artistique alléchante
- Une bande-son qui sonne parfaitement juste
- La liberté d'explorer à sa façon
- Les énigmes environnementales
Points faibles
- La technique boîteuse
- L'aérocycle raté
- Un sentiment de vide à certains moments
Note de la rédaction
Hommage visuel à Mœbius, Sable séduit d'abord par ses traits et ses couleurs si captivantes. On lui accorde également une exploration riche d'une grande liberté et de quelques mystères happants. Mais la technique en dents de scie fait terriblement défaut au voyage. Et l'univers manque d'une certaine consistance, peinant à nous engager complètement durant sa longue balade.