Près d'un an ans après son arrivée sur PC et Switch, Hades sort enfin sur PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series et une chose est claire : Supergiant Games semble ne jamais vouloir se cantonner au même genre. Le studio basé à San Francisco continue d’explorer de nouveau type de jeu tout en y apposant sa patte. Après l’Action-RPG et le jeu de sport fantastique, les créateurs de Bastion, Transistor et Pyre s’attaquent au Rogue-Lite. Et le moins que l’on puisse dire c’est que le pari est réussi.
Après un lancement en septembre dernier sur PC et Switch, Hades s'offre enfin une sortie sur consoles PlayStation et Xbox. Contrairement au portage Switch, le rogue-lite profite ici de performances bien plus stables sur ces nouveaux supports, autant sur consoles old-gen (PS4 et Xbox One) que sur next-gen (PS5 et Xbox Series) d'ailleurs. Même dans des étages supérieurs où l'on a souvent à faire à un déluge d'effets à l'écran, le framerate demeure constant et l'action reste fluide. Pas quoi de rougir face à la version PC, donc.
Finalement, les plus grands ajouts de ces portages se trouvent essentiellement au niveau de la manette. En particulier, c'est surtout la version PS5 qui est la plus agréable à parcourir grâce à la DualSense. Si sur PS4 les vibrations sont assez discrètes (quand on carresse Cerbère par exemple), elles sont omniprésentes sur PS5 et accompagnent les coups portés par Zagreus. Du côté des gâchettes haptiques, ces dernières sont plutôt discrètes puisqu'elles ne servent qu'à déclencher les capacités d'Appel. Ainsi, ces portages consoles jouissent de performances similaires aux PC et donc supérieures à celles de la Switch dont le principal argument reste de pouvoir y jouer où l'on veut en mode portable.
Test original de Hades sur PC (par Aubin_Gregoire, le 23/09/2020)
comme un beau diable
Alors qu’il n’en peut plus du climat régnant dans la demeure familiale, Zagreus, fils d’Hadès, décide de braver les interdictions de son pôpa et d’entamer une ascension jusqu’à la surface. Pour mener à bien cette quête, il pourra compter sur l’aide des dieux de l’Olympe qui se manifestent pour lui prêter main-forte. La tâche ne sera pas aisée, car le paternel revanchard, régissant les allées et venues des enfers, mettra des hordes de sbires de plus en plus puissants en travers de la route du “jeune” Dieu. Salle après salle, combat après combat et mort après mort, Zagreus en apprendra plus sur sa nature et sur les secrets gardés par son acariâtre de père concernant les mystères de l’Olympe et des enfers.
Supergiant oblige le scénario et les dialogues ont une place non négligeable dans l’expérience de jeu. Entre chaque tentative d’ascension, Zagreus peut converser avec les habitants des enfers. L’occasion pour le joueur d’apprécier le travail effectué sur l’écriture et les doublages de ce Hades. Chaque intervenant jouit d’une excellente caractérisation. Les divinités sont charismatiques et c’est un plaisir de découvrir ou redécouvrir ces figures mythologiques. Les échanges sont pleins de cynisme et ne manquent pas d’esquisser un sourire à l’amateur des mythes grecs qui peut apprécier de nombreuses références bien trouvées au matériau de base. Hades Junior discute également avec les divinités olympiennes au cours de ses escapades.
C’est lors de toutes ces conversations que le joueur peut attester de 2 des plus grandes réussites d’Hades, sa direction artistique sublime et sa narration parfaitement calibrée. Car si Supergiant nous a habitués à des DA fortes qui témoignent du talent de ses artistes, cela n’a jamais été aussi flagrant qu’en jouant à leur dernier bébé. Les multiples portraits de dieux et de créatures mythologiques sont superbes. Mais ce qui impressionne surtout c’est que ces redesign de personnages vus et revus ne sombrent jamais dans la facilité. Découvrir la vision qu’ont les illustrateurs des divinités est un plaisir. On est constamment surpris par le traitement opéré sur l’apparence du panthéon grec qui, sans tomber dans la redite visuelle, semble tomber sous le sens et soutenir à la perfection les personnalités marquées. Difficile de rester de marbre face au charisme d’Arès ou à la bonhommie de Dionysos.
Cette caractérisation visuelle s’accompagne de doublages anglais irréprochables. Le ton solennel des intervenants, couplé à un accent british du plus bel effet, colle à merveille à l’univers dépeint. De plus ces échanges sont nombreux et variés. Même après avoir enchainé des dizaines de tentatives les unes après les autres nous n’avons jamais entendu la même ligne de dialogue plus d’une fois. Mieux encore la plupart de ces répliques s’adaptent à la progression du joueur. Artémis n’hésitera pas à vous faire une réflexion ciblée si vous avez déjà croisé Athéna lors de votre run par exemple. Les boss affrontés se remémorent leurs dernières rencontres, las de voir Zagreus se pointer encore et encore. Le tout est porté par une bande-son qui allie guitares saturées et synthétiseur pour offrir quelques moments de bravoures mémorables. Tous ces éléments donnent corps à l’univers d’Hades tandis que cette narration et les mystères entourant la destinée de notre héros deviennent vite les moteurs principaux de la progression, ce qui n’est pas courant pour un Rogue-Lite.
Si vous vous questionnez sur la plateforme sur laquelle effectuer votre achat, voici la réponse : Préférez le PC si possible. Sans être désagréable à jouer, la version Switch d’Hades souffre de quelques soucis techniques. Cette dernière tourne en 720p à 60 fps la plupart du temps, mais le framerate chute régulièrement lors d’affrontements chargés en effets visuels. Ces ralentissements ne gâchent pas l’expérience pour autant et le titre reste tout à fait recommandable sur l’hybride de Nintendo. Notez également que les modèles 3D subissent un léger flou, à l'inverse des décors qui restent toujours aussi sublimes. Vous pouvez attester de la qualité visuelle de cette version Switch à l'aide de notre gameplay maison, visionnable ci-dessous.
Tout feu, tout flamme
Si Hades conte l’histoire de Zagreus, sa boucle de gameplay elle, s’apparente bien plus au mythe de Sisyphe. En effet, comme tout bon Rogue-Lite, Hades nous demande de pourfendre nos ennemis, encore et encore, en alternant entre réussites et échecs pour parvenir à nos fins. Là où l’analogie avec le mythe grec se fait un peu plus prégnante, c’est dans la progression à travers les niveaux qui ne varient que très peu. Si l’enchainement des salles est géré de manière procédurale, le joueur traversera systématiquement les mêmes zones dans le même ordres. D’abord le Tartare, ensuite Asphodel et enfin l’Élysée… Et si ces environnements s’avèrent sublimes artistiquement parlant, la structure du jeu redondante ne joue pas en leur faveur. Ces lieux abritent systématiquement les mêmes boss, ce qui a du sens d’un point de vue narratif. Malheureusement cet enchainement figé des zones de jeu n’est pas toujours des plus palpitants d’un point de vue ludique, car il induit une répétitivité encore plus marquée que dans d’autres titres du genre qui y sont pourtant déjà sujet.
Pour briser cette monotonie, on peut toutefois compter sur des systèmes de jeux tout bonnement excellents. Les affrontements permettent des esquives, des saillies rapides et des projectiles aux multiples synergies. Zagreus fond sur ces cibles en une fraction de seconde et réagit au doigt et à l’oeil. Il en résulte des affrontements nerveux qui ne sont que rarement pris en défaut par des soucis de perspectives inhérents à la vue zénithale. Ces derniers peuvent être réglés à l’aide de la visée automatique activée d’emblée. Finalement ce qui impressionne le plus dans ce système de combat c’est le fait qu’aucune des 6 armes disponibles ne semble être laissée pour compte ou mal implantée. Épée, Lance, Arc, Bouclier, etc. Tous ces archétypes sont agréables à manier et seront plus ou moins adaptés à certains combats. Ce coeur de gameplay est donc très efficace et pourrait presque se suffire à lui tout seul. Mais c’est loin d’être fini.
À ces mécaniques de base s’ajoutent tous les systèmes de progression. Avant de pénétrer dans une salle, le joueur devra souvent choisir entre plusieurs portes surmontées d’une icône. Cette dernière détermine la nature de la récompense trouvée dans ladite salle. Le joueur pourra récupérer des modificateurs de comportement d’armes, des bénédictions divines ou encore des ressources permettant d’améliorer les enfers ou Zagreus de manière permanente entre chaque run. Ces bénédictions sont proposées sont forme de sélection aléatoire de 3 buffs parmi lesquels le joueur devra choisir. Plus l’on avance plus on décèle la profondeur vertigineuse du système d’amélioration qui permet de concevoir des builds redoutables. Par exemple il est tout à fait possible de centrer une progression d’équipement autour du tir en rafale de l’arc. En boostant cette capacité et en la couplant aux Bienfaits d'Arès, il est possible de lourdement maudir ses ennemis qui subiront des centaines de dégats en une fraction de seconde. Et si le tout est évidemment soumis à l’aléatoire le joueur peut légèrement contrôler la chance en rentrant dans la pièce de son choix et en s’équipant d’artéfact favorisant l’apparition d’un certain dieu. La montée en puissance de Zagreus est jouissive et les combinaisons possibles donnent à elles seules la furieuse envie de retenter une ascension. D'autant plus que beaucoup des bienfaits de divinités synergisent entre elles et qu'il ne tient qu'au joueur de les découvrir.
Si la difficulté s’avère au rendez-vous, les améliorations permanentes offrent une aide bienvenue. À la manière d’un Rogue Legacy, Zagreus peut ici apporter des modifications à ses quartiers et ainsi améliorer de nombreuses statistiques. Taux de drop, dash supplémentaire, dégâts supplémentaires sous certaines conditions,etc. C’est ici qu’Hades frappe le plus fort. Car si dans l’absolu cet aspect lite RPG semble anodin ou assez commun, on remarquera vite la propension du jeu à constamment tendre une nouvelle carotte venant redistribuer les cartes. Dès lors qu’il croit avoir fait le tour d’une mécanique ou vu tout ce qu’un élément du gameplay avait à offrir, le joueur se voit offrir un nouvel outil à exploiter. Une fois toutes les armes débloquées, Zagreus pourra opérer des dons de sangs de Mégère pour révéler la vraie forme de son arsenal. Chacune de ces armes peut revêtir jusqu’à 4 Aspects différents offrant chacuns des subtilités dans leur maniement. Par exemple la capacité secondaire de la lance permet à Zagreus de la projeter et de la rappeler à la manière de Thor. S’il choisit le bon Aspect, il peut au contraire se précipiter jusqu’à elle pour foncer au coeur de la mêlée. Les possibilités de builds se voient démultipliées et nous n’en avons jusqu’ici que gratté la surface. Ces subtilités couplées à la RNG, en partie manipulable par le joueur, permettent de continuellement se rapprocher d’une combinaison optimale qui permettra de vaincre le boss de fin.
Les boss d’ailleurs parlons-en. Si on peut regretter l’ordre systématique dans lequel on les affronte, c’est bien le seul reproche que l’on pourra leur faire. Particulièrement charismatiques ces derniers disposent de patterns parfaitement lisibles qui poussent Zagreus à donner le meilleur de lui-même. Au nombre de quatre, ces antagonistes disposent de variantes se manifestant au fil des essais. Ainsi Mégère fera appel à ses soeurs bien plus agressives, tandis que Thésée invoquera l’aide de divinités différentes à chaque partie. Les patterns peuvent être complètement différents dans certains cas, alors que dans d’autres on a plus affaire à des potards de difficultés tirés vers les extrêmes. Notez qu’une fois le boss de fin vaincu, vous aurez accès à une tripotée de modificateurs de difficulté augmentant les récompenses.
Points forts
- Une réussite artistique à tous les niveaux
- Des doublages excellents
- Une narration parfaitement amenée
- Des affrontements nerveux et bien équilibrés
- Une progression finement calibrée
- Des builds jouissifs et de synergies surpuissantes, en veux-tu en voilà
- D'excellents boss
- Une OST qui vaut le détour
Points faibles
- Une structure un peu redondante (même pour un Rogue-Lite)
- Une version Switch en deçà techniquement (sans pour autant que cela ne gâche l’expérience)
Après avoir expérimenté avec différents genres, Supergiant Games livre ici son meilleur cru. Beau à se damner, jouissif à prendre en main et terriblement addictif, Hades ne pèche que par sa structure identique à chaque run qui pourra déplaire à certains. En contrepartie, il offre une histoire prenante portée par un panthéon grec plus charismatique que jamais et une narration parfaitement amenée. Fort de systèmes de jeux solides, Hades révèle toujours plus à mesure que l’on pense en avoir fini avec lui. Que vous soyez bon client du studio ou du genre Rogue-Lite, n’hésitez pas une seule seconde, car le dernier né de Supergiant est, à n’en pas douter, un immanquable de la rentrée.