Les mois, parfois même les premières années, qui suivent la sortie d’une nouvelle génération de consoles sont les témoins de lancements dits “cross-gen”. Ces sorties simultanées sur deux générations de machines suscitent bien souvent des interrogations de la part des joueurs. Il faut dire que les exemples d’expériences vidéoludiques sacrifiées par le passé sur “old gen” ne manquent pas. Outriders est-il en 2021 un exemple à suivre dans ce domaine ?
Avant de rentrer dans le vif du sujet, il convient de préciser que les tests des versions PlayStation 4 et Xbox One ont été effectués majoritairement sur les versions Pro et One X de ces consoles de huitième génération.
A la différence d'un jeu raboté pour entrer “advienne que pourra” sur les consoles de précédentes générations, Outriders semble avoir été pensé pour tourner aussi proprement que possible sur les consoles récentes (PlayStation 5 et Xbox Series X/S) ainsi que sur leurs aînées, à savoir la PlayStation 4, la PlayStation 4 Pro, la Xbox One et la Xbox One X. Si les 60 images par seconde sont à oublier avant même de fouler du pied la surface de la planète Enoch, Outriders parvient à afficher des résolutions honnêtes sur l’ensemble des machines précédemment citées à 30 images/seconde, un framerate qui s’avère généralement stable sur l’ensemble du parc installé.
People Can Fly vise dans le cas présent de la 4K dynamique jusqu’à 3840x2160 sur les consoles de milieu de génération (PS4 Pro et One X) et du 1080p dynamique sur PS4 et Xbox One. Des concessions ont été faites pour garantir ces performances sans ruiner outre mesure le travail des artistes, malgré un clipping (apparition d’objets) léger. La planète Enoch n'a rien perdu de sa superbe, et reste toujours une invitation à la découverte et à l’exploration. Même les combats, pourtant cadenassés à un framerate ne dépassant pas les 30fps, conservent autant que faire se peut, l’intensité et la nervosité des versions Next Gen. Le confort de jeu, loin d’être similaire à celui sur PS5 et Xbox Series avec leurs 60 images/seconde stables, est bel et bien présent… enfin presque.
Les temps de chargement sur les consoles de huitième génération sont parfois longs, ce qui casse le rythme de l’aventure, d'autant plus que la structure même du jeu invite les joueurs à passer d’une zone à une autre régulièrement, ce qui implique autant de chargements supplémentaires. De plus, les nombreux crash recensés sur PlayStation 5 et Xbox Series X et Series S, souvent liés aux serveurs d’ailleurs, sont bien plus présents sur les machines “old gen”, en témoignent les retours utilisateurs ainsi que les différents runs effectués sur PlayStation 4 Pro et Xbox One X.
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Test complet de Outriders sur les Versions PC, PS5 et Xbox Series X/S
Il était une fois l’anomalie
L’histoire de Outriders débute avec une Terre devenue inhospitalière poussant les derniers êtres humains à fuir leur foyer pour une planète inconnue baptisée Enoch. Malheureusement, le premier contact avec ce nouvel astre se solde par l’apparition d’une anomalie décimant les premiers colons. Forcé de replonger en cryostase pour échapper à cette tempête énergétique, l’un des derniers agents de l’ECA (Enoch Colonization Authority) se réveille 30 ans plus tard, non sans constater plusieurs changements majeurs. Alors que le paradis promis sur Enoch n’est plus qu’un environnement hostile perpétuellement en guerre, l’Outrider découvre ses nouveaux pouvoirs, des aptitudes qui pourraient lui permettre de lever le voile sur les mystères entourant l’anomalie ainsi que l’exoplanète.
Le titre de People Can Fly ne se démarque en rien par son récit finalement anecdotique et sa mise en scène sommaire faite de simples cinématiques. Ces dernières se contentent ici de ponctuer les missions, et servent surtout de liant tout au long d’une histoire principale portée par des personnages archétypaux, une histoire qui nécessite une quinzaine d'heures pour se terminer. Il faut tout de même reconnaître à Outriders la qualité de son univers. Si le scénario n’a rien d’exceptionnel, le cadre dans lequel il évolue est à souligner. Il est bien souvent plus intéressant d’en apprendre davantage sur le passé de la planète Enoch et sur les trois décennies à l’origine de la situation actuelle, que sur une aventure qui pourrait se résumer à un Road Trip punk sous stéroïdes avec ce que cela sous-entend en termes d’écriture, et donc de manque de finesse.
A noter que le jeu est intégralement doublé et sous-titré en français (VF + VOSTFR). Toutefois, la qualité des doublages n’est pas toujours au rendez-vous. Outriders prend alors des airs de série B ce qui donne par instant à l’ensemble un côté forcé proche du nanardesque.
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Une exoplanète instable
La planète Enoch brille par la richesse de ses environnements, et la diversité de ses biomes qui à chaque nouvelle zone découverte surprennent par l’ampleur de leur végétation ainsi que les structures humaines ou non qui les défigurent. Il est plaisant, entre deux affrontements, de vagabonder dans les déserts, les forêts, les marécages et les montagnes qui font de cet astre une invitation à la contemplation, même fugace. Les artistes de People Can Fly se sont inspirés de nombreuses œuvres afin de concevoir cette exoplanète qui emprunte pêle-mêle à Mad Max, Le Seigneur des Anneaux, Destiny, etc. et ainsi forger une esthétique qui n’appartient qu’à Outriders. Il en résulte un univers de science-fiction fantaisiste punk à la fois intriguant et séduisant.
Sans jamais prétendre au titre de claque visuelle Next Gen, Outriders fait honneur à la puissance de la PlayStation 5, des Xbox Series et des PC (selon leurs configurations) en affichant de vastes terrains de jeu, qui sont bien trop souvent vides, exception faite des forces ennemies. Développé avec le moteur Unreal Engine 4 d’Epic Games, le titre de Square Enix tire son épingle du jeu pour tout ce qui touche aux effets visuels. Ces derniers transforment ainsi les pouvoirs naissants des agents et des belligérants en véritable spectacle “son et lumière” à 60 images par seconde, le tout en 4K dynamique, sauf sur Xbox Series S naturellement avec une résolution fluctuante jusqu’à 1440p.
Néanmoins, l’instabilité avérée des premières versions du jeu est à déplorer. Plusieurs problèmes techniques, souvent liés aux serveurs, entachent l’aventure des Outriders sur la planète Enoch. L’erreur CE-34878-0 (sur système PlayStation) est à l’origine de plusieurs crashs ce qui dans une expérience 100% connectée devient vite un problème majeur. Il est également récurrent de devoir relancer le jeu, la faute à une connexion, obligatoire au demeurant, qui échoue pour d’obscures raisons.
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Les agents du chaos
Les studios People Can Fly nous ont habitué par le passé à des joutes nerveuses, et Outriders est l'héritier de cette vision explosive des gunfights. Sur Enoch, la moindre escarmouche se veut agressive, et force les agents de l’ECA à puiser dans leurs aptitudes pour survivre. Outriders fait le pari de transformer le sempiternel système de soin par autorégénération, et le fusionne avec les pouvoirs surnaturels des avatars. Mettre le feu aux ennemis, les abattre à bout portant, etc. la manière de récupérer des points de vie dépend de la classe sélectionnée ce qui modifie en profondeur l’approche classique des TPS (Third Person Shooter). Le jeu abandonne sciemment le concept de “cover” pour laisser exprimer toute la puissance des Outriders. Quant au ressenti armes en main, il ne fait qu'accentuer ce sentiment de puissance et d'urgence qui se dégage des affrontements.
Outriders pousse à une constante mobilité lors des combats sous peine de manger rapidement les pissenlits par la racine. L’immobilisme est synonyme de mort sur cette planète hostile où toutes créatures conscientes cherchent inexorablement à vous éliminer. Nous étions en droit d’attendre un bestiaire riche de dizaines, voire de centaines, de nuisibles en tout genre aux capacités variées, mais dans les faits, il n’en est rien. La variété des ennemis est principalement visuelle. Les forces en présence se résument trop souvent à certains archétypes et à quelques variantes, ce qui manque cruellement d'exotisme sur une planète aussi mystérieuse, à deux ou trois exceptions près.
L'intelligence artificielle est également une source de déception sur Enoch. People Can Fly compense ce point faible par le nombre et les statistiques des ennemis qui agissent sans véritable stratégie. Il en résulte des individus qui foncent tête baissée sans aucune approche tactique, et agissent parfois contre toute logique. Fort heureusement, les combats de boss, trop peu nombreux, brillent par leur intensité. Ces séquences de jeu mémorables se disinguent par leur difficulté et leur singularité sur un astre qui a tendance à recycler les créatures qui le peuplent.
Jouable intégralement en solo, Outriders prend prend de l'ampleur en multijoueur. 2 ou 3 agents peuvent ainsi coopérer au cours de l’histoire principale et des expéditions (End Game). Le cross play, uniquement consoles à l’heure d'écrire cet article, est également mis en œuvre par les studios People Can Fly qui ont désactivé la fonctionnalité sur PC faute de stabilité. Les joueurs des écosystèmes PlayStation et Xbox ont l’opportunité de parcourir ensemble la planète Enoch via l’utilisation d’un simple “code” à transmettre aux intéressés. Toutefois, le matchmaking public souffre de son incapacité chronique à trouver des joueurs disponibles, principalement pour avancer dans le scénario. Néanmoins, ce problème s’estompe quelque peu une fois l’histoire terminée et les expéditions commencées. Le Cross Save, fonctionnalité qui permet de transférer ses sauvegardes d’une machine à une autre en utilisant un compte Square Enix, est un autre point fort de Outriders.
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Les disciples d’Enoch
Un Looter-Shooter va de pair avec une montée en puissance constante d’un avatar qui gagne de l’expérience, débloque de nouvelles aptitudes, et chine des équipements aux statistiques toujours plus impressionnantes. Outriders ne déroge pas à la règle. Au contraire, il applique les fondamentaux du genre à la virgule près. Aussi redondantes soient les missions proposées, et elles le sont en majorité, le plaisir vient de la personnalisation de l’agent de l’ECA incarné, et de toutes les opportunités offertes par un système qui intègre parfaitement les principales mécaniques d’un RPG, à commencer par la présence de 4 classes (Technomage, Pyromage, Illusionniste, Telluriste) qui définissent la manière d’aborder les combats. Attention, cette décision prise en début d’aventure est définitive. Changer d’archétype signifie recommencer de zéro.
Ces disparités de gameplay, présentes dès les premières minutes, s’accentuent fortement au fil des heures. Les agents de l’ECA débloquent plusieurs pouvoirs, au nombre de 8 par classe, ainsi que des aptitudes passives renforçant leur emprise sur les événements. Au sein d’une même classe, il est possible et fortement encouragé de tracer sa propre voie en sélectionnant les compétences, mais également les armes et les équipements en adéquation avec un style de jeu précis. People Can Fly, dans ce domaine, assure bien au-delà de l’essentiel. Le plaisir dans Outriders vient du Loot qui en général récompense parfaitement les efforts consentis pour explorer la planète Enoch, éliminer les forces hostiles, et remplir les objectifs de missions.
Chaque sortie est synonyme de gains sous toutes les formes imaginées par les studios. Les armes et équipements, régis par un système de rareté bien connu des amateurs de RPG, peuvent ainsi être altérés pour accroître la puissance et l’efficacité sur le terrain des Outriders. Avec l’artisanat, l’achat et la revente, les agents ne manquent pas d'opportunités pour dépasser leur simple statut d’être humain. En effet, Enoch regorge de défis qui se traduisent en jeu par un “Niveau de Monde” qui augmente progressivement la difficulté, et donc les récompenses qui vont avec en cas de succès. Terminer le scénario principal et les quêtes secondaires n’est que le début de l’aventure sur cette planète. Les expéditions (End Game), tel est le véritable objectif des Outriders.
Autre point qui devrait ravir les joueurs, Outriders, malgré sa structure et le genre auquel il appartient, celui du Shooter-RPG, n’est pas un Game as a Service (Jeu en tant que Service), et se veut complet à sa sortie. Aucune microtransaction, même pour des cosmétiques, ne vient altérer l’aventure.
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Points forts
- L'univers de science-fiction fantaisiste punk
- Les doublages et les sous-titres en français (VF + VOSTFR)
- Une aventure jouable en solo ou en coopération (2 à 3 joueurs)
- L'intensité et l'agressivité des combats
- Un vrai sentiment de montée en puissance de l’avatar
- La richesse visuelle de la planète Enoch
- Le design des armures et des armes
- Le Cross Play (console) et le Cross Save
- L’absence de microtransaction
- La durée de vie (histoire principale + expéditions)
Points faibles
- Le scénario de série B anecdotique
- La mise en scène sommaire
- La redondance des missions et des objectifs
- Le bestiaire trop limité
- Une instabilité accrue du jeu sur PS4 et Xbox One
Les versions “old gen” de Outriders n’ont pas à rougir de la comparaison avec leurs équivalents sur consoles de nouvelle génération. Le poids des années au niveau du hardware se ressent dans le framerate, les temps de chargement ainsi que les résolutions affichées, ce qui empiète un peu sur le confort de jeu sans pour autant être rédhibitoire, bien au contraire. Le jeu de People Can Fly et Square Enix conserve sur PS4 et Xbox One toutes les qualités et les défauts des versions PlayStation 5 et Xbox Series, à commencer par un système de combat percutant, une montée en puissance enivrante de l'avatar, une planète Enoch mystérieuse, mais aussi une instabilité générale responsable de plusieurs crashes.