On se doutait de son arrivée, et c’est maintenant chose faite. Super Mario 64, Sunshine et Galaxy posent leur valise sur l'hybride de Big N dans une compilation regroupant les trois titres en version remasterisée. L’occasion parfaite pour accorder de nouveau du temps aux aventures du plombier de l’ère Nintendo 64, Gamecube et Wii. Le plaisir est-il intact et l’adaptation Switch réussie ?
Cinq années séparent Mario 64 de Sunshine, et rebelote entre ce dernier et Galaxy. Le premier, sorti en 1997, est une révolution absolue du jeu vidéo 3D, à une époque où des personnages comme Tomb Raider se déplacent comme des semi-remorques. Sunshine s’inscrit par la suite dans le prolongement de son illustre grand frère, et marquera moins les esprits malgré une recette efficace (on en reparle plus bas). Pour ce qui est de Galaxy, il repoussera les limites de ce que l’on pensait alors possible pour le genre de la plateforme, avec son level design sphérique formidablement bien géré.
Une chose est sûre, refaire ces titres aujourd’hui a un véritable intérêt, ne serait-ce que pour comprendre l’évolution des Mario 3D à travers le temps. Mais il y a aussi un autre intérêt, bien plus simple : s’amuser. Car même sous le poids des années, 64, Sunshine et Galaxy restent de très bons - voire d’excellents - jeux. Attention toutefois avec cette compilation : elle sera seulement disponible entre le 18 septembre 2020 et le 31 mars 2021, en édition physique comme en numérique.
(Presque) pas une ride
Faisons les choses dans l’ordre. Malgré son âge, Mario 64 se fait encore très bien aujourd’hui. Les niveaux et les objectifs sont variés, les déplacements - bien que quelques fois approximatifs, surtout lorsque le plombier change subitement de direction - précis, le challenge présent et progressif, les musiques entêtantes... Le jeu réussi pratiquement tout ce qu'il entreprend, alors que ce "tout" n'existait pas il y a vingt ans.
Mais deux ou trois trucs ont évidemment vieilli. À commencer par la caméra assez rigide, qui vous empêchera - à de rares occasions - d’apprécier les distances pour un saut. Ou encore le seuil de tolérance pour agripper la queue de ce cher Bowser, qui est assez exigeant. Mais rien de bien méchant. Après tout ce temps, on ressort de Mario 64 avec toujours la même admiration et le même plaisir.
C’est en revanche un peu moins le cas pour Mario Sunshine - du moins de notre point de vue. On dit souvent que le titre est moins marquant que son grand et petit frère, et avec un peu de recul, il y a bien un arrière-goût de ce genre-là. Pas forcément à cause du gameplay, plus réactif et permissif grâce au canon à eau, mais plutôt de la structure des niveaux, plus fouillis et moins inspirée, à l'instar du gimmick de la grille.
Super Mario 3D All-Stars - Dix minutes de gameplay
Sans oublier un détail déconcertant : dans Mario Sunshine, la suite de l’aventure semble se débloquer avec un nombre précis de Soleils mais sans que ce dernier ne soit indiqué au joueur. On enchaînera ainsi les zones - pas toujours très intéressantes donc - à l’aveugle, ce qui pourra perdre un petit peu les joueurs. Mais attention, on ne passe clairement pas un mauvais moment et certaines idées marchent toujours aussi bien (les zones plus difficiles sans le canon à eau). Pas de quoi crier au génie pour autant.
On se laissera par contre bien plus aller à d’innombrables compliments avec Mario Galaxy, dont la superbe magie est toujours intacte. Pas besoin de s’égarer en explications : l'opus Wii est beau, formidablement bien construit, rythmé et varié, sa BO est superbe. Que dire, si ce n’est que l’épopée spatiale du plombier vaut toujours la peine d’être vécue.
Point technique
Sans surprise, les qualités et défauts des trois Mario sont ce qu’ils sont. Mais qu’en est-il des ajouts de cette version 3D All-Stars ? Ce qui saute d'abord aux yeux, c'est bien sûr le lissage haute définition, avec une sorte de 4/3 (960 x 720) pour 64 et 16/9 sur Sunshine et Galaxy. De docké à portable, ces derniers passent de Full HD à HD alors que la résolution de l'épisode Nintendo 64 ne bouge pas. Pour le premier Mario 3D toutefois, les textures semblent avoir été améliorées.
- Mario 64 : En docké comme en portable 960 x 720 (sorte de 4/3 HD) / 30 fps
- Mario Sunshine : En docké 1920 x 1080 (Full HD) et 1280 x 720 en portable (HD) / 30 fps
- Mario Galaxy : En docké 1920 x 1080 (Full HD) et 1280 x 720 en portable (HD) / 60 fps (docké comme portable)
Précisons aussi que ce passage à l'ère moderne sied particulièrement bien à Mario Galaxy, faisant ressortir les couleurs et reflets déjà très réussis de l'époque. Et comme en 2007, le voyage spatial du plombier tourne à 60 images par seconde, que ce soit en docké ou en portable. Ce n'est en revanche pas le cas pour Sunshine et 64, qui affichent un solide 30 fps (à quelques exceptions près pour l'opus Gamecube - on en reparlera). Au global, les temps de chargement semblent avoir été raccourcis. Et Nintendo a aussi revu la jouabilité pour adapter les titres sur Switch. Mais pas forcément pour le meilleur.
Galère galactique
On commence cette fois avec l’opus Wii. Vous vous souvenez sans doute que le jeu mélangeait des déplacements traditionnels avec un peu de motion-gaming, le pointeur de cette bonne vieille Wiimote permettant d’attraper des fragments d’étoiles colorés. Pour reproduire le même cocktail sur Switch, Nintendo vous laisse plusieurs options : faire appel à l’écran tactile en mode nomade ; utiliser les deux Joy-Con comme les manettes d’une Wii en docké ou console posée sur la table ; et enfin dans cette même disposition, utiliser un contrôleur avec le gyroscope comme pointeur.
Super Mario 3D All-Stars - Trailer
Et c’est là que ça se gâte. Car si les sensations comme sur Wii en mode docké sont bel et bien là, le pointeur des Joy-Con vous embêtera rapidement. Il lui arrive en effet de disparaître sans prévenir d’un écran à l’autre, vous obligeant à le faire revenir à l’aide d’une gâchette. Surtout, en pleine partie, l’alignement entre la manette et le pointeur se décale souvent. Il est bien sûr possible de réinitialiser la position de ce dernier. Mais sans rentrer dans les détails, la manip est laborieuse, et vous fera rapidement envoyer un fragment d'étoile dans le décor, la touche pour actualiser la position et celle pour envoyer un projectile étant la même.
En mode nomade, c’est donc le tactile qui prend le relais du pointeur dirigé par le Joy-Con dans le cas d'avant. Et même si côté précision, cette option n’a rien à envier à la précédente, il faudra très souvent toucher l’écran pour réaliser des actions toutes simples, comme naviguer dans le menu pause. De plus, en pleine partie, le tactile se révèle assez laborieux pour ramasser des fragments d’étoiles, eux qui sont parfois importants pour progresser dans un niveau, débloquer des levels cachés voire combattre des ennemis (un projectile permettant généralement d'immobiliser un adversaire). Et devoir lâcher un côté de la console pour faire glisser son doigt ne pousse pas à en ramasser, et donc privera à terme les joueurs de certains avantages et récompenses. C'est un peu dommage.
Comme dans sa version originale, le remaster de Mario Galaxy comprend un mode multijoueur. Dans ce dernier, une personne contrôle Mario et l'autre un second pointeur sur l'écran, afin de ramasser plus de fragments voire faciliter l'avancée du plombier. Sur Switch standard, pas de soucis, puisque les deux Joy-Con suffisent pour s'amuser entre amis. Sur Lite en revanche, il faudra connecter une paire de manettes sans-fil pour pouvoir en profiter.
Remaster-risée
Alors attention. Les problèmes que nous avons décrits sont mineurs et n'entravent pratiquement pas l'expérience de jeu. Mais impossible de ne pas les évoquer. Surtout qu'en nomade sur Galaxy, encore une dernière chose nous a interpellé : les épreuves qui utilisent le gyroscope des Joy-Con. Attendez-vous donc à incliner exagérément votre Switch, pour par exemple faire rouler une boule en avant. Comme si vous vouliez montrer d'une manière pas du tout discrète vos cartes au Poker.
Pour Mario 64 et Sunshine, pas de soucis à signaler côté gameplay, les contrôles des deux titres ayant été initialement pensés pour la manette (même si l'opus Gamecube perd ses gâchettes analogiques, qui servaient auparavant à envoyer de plus en plus d'eau jusqu'à immobiliser Mario et viser à la manière d'un TPS - il faudra dorénavant jongler entre les gâchettes R et ZR). Notez d'ailleurs que le remaster de Galaxy a le bon goût de rajouter une touche pour effectuer l'attaque tourbillon, à l'époque uniquement faisable en agitant la Wiimote. Mais les opus Nintendo 64 et Gamecube traînent aussi quelques casseroles, à commencer par ce dernier où nous avons noté de petits ralentissements (difficilement acceptables pour un jeu de 2002) ainsi qu'un gros bug de collision dans un niveau sous l'eau.
Bien que les jeux aient fait un petit bond dans le temps grâce à la HD, des soucis d'un autre temps subsistent, comme l'affichage tardif de pièces voire de plateformes dans Mario 64. Et dans Galaxy et Sunshine, les cinématiques sont clairement en plus basse résolution que le jeu lui-même. Alors de nouveau, rien de dramatique, mais ça commence à faire pas mal. Et ce n'est pas la possibilité d'écouter la BO des trois épisodes qui sauvera les meubles. Mario 3D All-Stars reste une bonne compilation, mais bien plus avantagée par ses jeux que ses supposées qualités d'adaptation moderne.
Points forts
- Trois jeux cultes réunis en une compilation
- Après des années, ça se joue toujours aussi bien
- Un lissage HD qui fait du bien
- Les trois BO à emporter partout
Points faibles
- Quelques contrôles laborieux, notamment sur Galaxy
- On aurait aimé plus d'améliorations
Super Mario 3D All-Stars n'est pas particulièrement bon dans sa manière d'amener Mario 64, Sunshine et Galaxy à l'ère de la HD sur Switch, même si les améliorations visuelles sont-là. Mais rien qu'avoir ses trois titres dans une compilation commune lui donne de l'intérêt. Il s'agit en effet de trois excellents jeux (même si l'opus Gamecube nous a paru un peu moins réussi avec le recul), bourrés de qualités et qui, mis bout à bout, vous occuperont pendant au minimum 45 à 60 heures. Même Mario 64, l'opus le plus ancien, se fait encore très bien aujourd'hui, et c'est même grisant de rejouer dans de bonnes conditions à un titre qui a tant innové et tant réussi. Le travail de remaster est cependant loin d'être exemplaire, et outre quelques ralentissements sur Mario Sunshine et cinématiques en basse qualité sur ce dernier et Galaxy, les contrôles de l'opus Wii, notamment le pointeur pour ramasser des fragments, sont parfois assez laborieux. Ces problèmes sont-là, mais ne vous empêcheront vraiment pas d'apprécier les trois Mario. Alors on ne boude pas son plaisir. Et comme dit le plombier moustachu : "Whouhou !".