Il y a presque un an jour pour jour, nous avions pu poser nos mains sur Children of Morta. Puisant ses inspirations dans les hack and slash et Rogue Legacy, le titre de Dead Mage avait de quoi intriguer. Sa proposition de rogue-lite, couplée à une ambition narrative inédite au genre, nous avait séduit mais tient-elle sur la longueur ?
Le mont de Morta est en proie à la corruption. Gardées par la lignée des Bergson depuis des décennies, les montagnes et ses divinités se voient misent en péril. La famille aura donc la lourde tâche de purifier la région en débarrassant son coeur de la malédiction. Dans un premier temps, nous sommes placés dans les bottes du père, John, doté d’une épée et d’un bouclier pour un court tutoriel.
Classique, mais efficace
On se familiarise très vite avec les commandes : Coup horizontal, coup d’estoc une fois le bouclier levé, dash pour se repositionner, attaque de zone avec délai de récupération, jauge d’endurance… Nous sommes en terrain connu. Les capacités principales de notre avatar se débloquent en attribuant des points de compétences obtenus à chaque passage de niveau. À cela s’ajoute une barre de rage qui se remplit lentement en fonction des dégats infligés et subis qui accroît largement l’efficacité et la puissance de nos attaques.
Une fois ce coeur de gameplay rudimentaire assimilé, nous sommes amenés à nous aventurer dans les tréfonds des montagnes environnantes par le biais de portails situés sous la bâtisse familiale. Notre objectif est simple, se frayer un passage dans des donjons générés procéduralement pour occire le boss de la zone. Dans son maniement, Children of Morta hérite des mécaniques et de la philosophie des Diablo. Le nombre conséquent d’ennemis nous contraint à bien nous positionner et à utiliser nos compétences avec parcimonie. Gérer ses cooldowns et contrôler les foules est donc le nerf de la guerre. Cependant en structurant sa progression tel un rogue-lite, les modificateurs d’attaques ne découlent que très peu de la montée en niveau de notre avatar, mais plutôt du loot aléatoire qu’on perd à chaque fin de run. Augmentation des dégâts infligés, triple coup, sorts alternatifs sont un échantillon des possibilités disponibles. Certains perks étant exclusifs à certains personnages, ils sont une bonne raison de varier les plaisirs. Notez que l’apparition d’ennemis et la profusion du loot ne varie pas si vous jouez en coop. Vous pouvez donc parcourir les donjons du mont Morta seul ou à deux en local (une mise à jour permettant la coop en ligne est prévue). Dans le second cas vous devrez vous partager le loot, mais un joueur supplémentaire permet une bien meilleure gestion de la foule.
Les personnages, justement, parlons-en. Ces derniers se débloquent au gré de l’avancement du scénario. Au nombre de 6, chacun incarne un archétype du Hack and Slash. John, le chevalier, Linda l’archère, Kevin l’assassin - que pour les besoins du test nous appellerons Kevin le Ninja, parce que ça sonne vachement mieux- , Mark le moine, Lucy la pyromancienne et Joey la grosse brute au marteau. Chacun dispose évidemment de ses capacités et statistiques propres. Si la jauge d’endurance de Linda lui permet de se déplacer tout en décochant des flèches, celle de Kevin le Ninja se transforme en une jauge de vitesse d’attaque. Plus Kevin le Ninja assène de frappes, plus les prochaines s'enchaînent rapidement. Chaque personnage voyant ses ressources mises à profit de manière différente, nul doute que chacun trouvera un archétype qui lui convient. Même si ces derniers sont vus et revus, les modificateurs et compétences suffisent à leur conférer un gameplay agréable et satisfaisant.
Afin de favoriser l’essai d’autres classes, un membre de la famille tombé au combat se voit amputé d’une part de sa barre de vie qui ne se régénère que s’il se repose au foyer familial. N’ayez crainte, l’xp empochée étant indexée à la difficulté du donjon, un personnage bas niveau rattrapera très vite ses homologues après s’être défait de quelques monstres. Pour aller dans ce sens et garder une continuité dans la progression, on peut dépenser de l’or glané ici et là auprès de l’oncle Ben ou de la grand-mère Rea afin d’améliorer définitivement l’ensemble de la famille : Augmenter les chances de loot, les PV de tous les membres, les chances de coups critiques, activer des autels pour obtenir des bonus à durée limitée, etc.
Rogue-lite et narration, un bon ménage
La demeure où s’effectue ces achats est également le lieu central de la narration. En effet, après chaque run, réussie ou non, une cut-scene se déclenche faisant continuellement progresser l’histoire. Certaines se voient indispensables pour dérouler les évènements tandis que d’autres sont des tranches de vie plus intimistes. Une partie de ces évènements se déclenchent en finissant un donjon spécifique (au nombre de 3, eux-mêmes subdivisés en 3), alors que d’autres se produisent après un nombre arbitraire de run. L’ensemble est narré par une voix chaleureuse et mystérieuse, qui apporte beaucoup à l’atmosphère. Cette volonté de narration est probablement l’élément le plus singulier de Children Of Morta, car intégrer un scénario traditionnel à un rogue-lite peut s’avérer particulièrement ardu. Ce choix s’avère fructueux, la présence de la voix off lors des donjons aide à fluidifier l’ensemble. L’arrivée de nouveaux protagonistes qui se voit liée au scénario et à la progression de la famille va dans ce sens également. Il en résulte le sentiment agréable d’avancement constant même en cas d’échecs. Même si le rythme en profite grandement, on ne pourra cependant pas éviter une sensation de répétitivité. Ce constat est inévitable tant les deux genres dont le jeu puise ses fondations y sont déjà sujets.
La propriété de Bergson qui sert donc de hub central est aussi l’occasion d’observer ses membres vaquer à leurs occupations, discuter et apprécier la finesse du pixel art. Si les sprites des personnages peuvent diviser, on ne peut pas en dire autant des environnements. Détaillés et foisonnants, les décors sont agréables à parcourir. D’autant plus qu’un pan non négligeable de la caractérisation de l’univers passe par l’univers. Au détour d’une caverne on peut croiser les restes d’une immense créature ou un squelette géant assis sur un trône. La narration environnementale n’a pas été négligée et fonctionne plutôt bien. Et si les sprites de nos héros ne seront pas au goût de tout le monde, on ne peut pas en dire autant de leurs animations.Vives et très bien articulées elles procurent à elles seules un dynamisme et un sentiment de puissance non négligeable en combat. Le constat est similaire pour les ennemis qui se voient pulvérisés sous nos coups en un nuage de pixels pourpres. On regrettera peut-être une lisibilité parfois prise à défaut, notamment à cause d’ennemis aux teintes un peu trop proche des décors. Et bien qu’il soit visuellement réussi, le bestiaire met un certain temps à se diversifier. En effet le premier tiers du jeu est principalement occupé par des squelettes, des araignées et des chauve-souris. Il faudra donc attendre 5 heures de jeu pour voir apparaître des adversaires moins conventionnels.
Points forts
- Un scénario bien intégré
- Très, très bien animé
- Intégralement jouable à deux (en local)
- Une bonne durée de vie
- 6 personnages différents
- Un challenge au rendez-vous
Points faibles
- Répétitif par nature
- Un bestiaire qui tarde à se renouveler
- Un manque de lisibilité ponctuel
En puisant tour à tour ses mécaniques dans les rogue-lites et dans la saga Diablo, Children of Morta propose une aventure prenante mais empreinte d’une répétitivité inhérente à ces deux genres. Toutefois la narration, introduite à la structure même du jeu, apporte un rythme certain à l’ensemble. Le tout est enrobé d’un pixel art fin et superbement animé. Si vous savez dans quoi vous vous engagez et que pourfendre du mob par paquet de 100 est votre crédo, nul doute que Children of Morta est fait pour vous.