Depuis juin 2019, les auto-battler, et plus particulièrement les “auto-chess” sont partout. Mobile, steam, launcher de LoL, bientôt Epic Games Store : les développeurs souhaitent tous prendre une part de ce beau gâteau, popularisé sur Warcraft 3 grâce à un mode Pokémon et revenu sur le devant de la scène en Janvier 2019 grâce à Dota 2 Auto-Chess. Tâchons donc de voir ce que vaut TFT, pour Teamfight Tactics, la proposition “auto-chess” de League of Legends, probablement la plus populaire à l’heure où nous écrivons ces lignes… Ah et rassurez-vous, si vous ne comprenez rien aux auto-chess, vous êtes également au bon endroit.
Bien comprendre le principe de l’Auto-Chess
Comme on l’explique dans la vidéo ci-dessous, l’auto-chess mêle stratégie, tactique, spectacle et chance. Sachez par ailleurs qu'il est tout à fait normal d’être perdu au début, et commençons donc par résumer les différents mécanismes qui forgent TFT et qu’on retrouve sur la totalité des titres du genre, sauf exception. Dans les auto-chess, plusieurs joueurs s’affrontent sur différents terrains, par équipe de champions interposée. Notez qu’il s’agit d’un auto-battler et qu’il est donc impossible de prendre les commandes d’un champions : tout le monde, sur le terrain, est contrôlé par l’IA. Le but du jeu ? Être le dernier joueur en vie.
Au fil des parties, on compose notre équipe, on y greffe des objets (jusqu’à 3 par champions), on fait évoluer les membres et on soigne les synergies entre les différentes classes dans le but d’avoir l’équipe la plus forte parmi les joueurs. Régulièrement, des rounds contre des monstres gérés par l’ordinateur viendront rythmer la partie, offrant la possibilité d’obtenir de nouveaux objets, que l’on pourra d’ailleurs combiner pour créer des objets plus puissants. Une fois par phase, une draft est organisée, privilégiant les plus faibles qui pourront choisir en premier le champion et l’objet associé qui les intéresse le plus. Si on survit, tant mieux, et si l’on perd, c’est la somme des champion adverses encore sur place et de leur niveau (bronze, argent, or) qui définit combien de points de vie sont perdus. Une fois votre compteur de vie à 0, c’est perdu.
L’art d’empiler des champions
Pour passer un bronze en argent, il suffit d’en avoir 3 versions, trois clones, qui fusionnent automatiquement en une version “argent”. Au bout de trois versions “argent”, le champion se transforme en champion “or” et améliore considérablement ses capacités, que cela soit au niveau de ses points de vie, de ses attaques, qu’il déclenche automatiquement contre la cible qu’il estime être la plus intéressante, ou de son sort, unique attaque spéciale qu’ont les champions et qui, bien souvent, consomme du mana, accumulé en attaquant ou en étant attaqué.
Pour renforcer de la sorte les champions, rien de plus simple : il faut utiliser les pièces d’or. A chaque match, gagné ou perdu, on remporte 5 pièces d’or, utiles pour acheter des champions parmi la sélection disponible à chaque manche. Cette sélection peut être “renouvelée” contre 2 pièces d’or, ce qui est utile si vous cherchez impérativement à monter un champion au rang “argent” avant un combat et que vous en avez déjà 2 exemples par exemple. Mais attention, vous disposez d’une “réserve” de champions remplaçants qui est limitée en nombre et devrez souvent faire des choix au niveau du banc de touche, préférant garder par exemple des champions de tel ou tel type, qui, si vous trouvez suffisamment de clones, deviendront plus fort et pourront être placés sur le terrain pour compléter les synergies de classes.
Une économie et des choix
Une véritable économie s’installe vite dans les auto-chess étant donné que l’on touche des intérêts à chaque tranche de 10 pièces d’or dans vos caisses en début de manche : on vous conseille donc d’économiser assez souvent, histoire d’arriver au dessus des 50 pièces d’or en stock et gagner ainsi 10 pièces d’or par manche, 5 de base, et 5 d'intérêt. Notez qu’au delà de 50 pièces en stock, les intérêts ne grimpent pas plus, ce qui vous fixe un cap, en dessous duquel il faudra éviter d’aller pour ne pas fragiliser votre économie. On est donc constamment invité à commencer un round avec des économies arrondies à la dizaine, ce qui peut être atteint en vendant des champions inutiles. Leur valeur est d’ailleurs répartie entre 1 et 5 pièce d’or, à l’achat comme à la revente, et cette valeur définit leur rareté et leur efficacité sur le terrain. Il est par ailleurs possible d’acheter de l’XP, à raison de 4 pièces d’or pour 4 XP : plus le niveau avance, et plus vous pourrez placer de champions sur le terrain, ce qui vous permettra d’avoir plus de synergies aux bonus parfois cumulés, ou bien d’avoir des synergies plus fortes, qui arriveront à différents paliers de puissance. A titre d’exemple, une composition comportant 2 démons permet à ce duo de voler presqu'une fois sur deux de la mana des adversaires, et ce gain va augmenter significativement si vous déployez 4 démons sur le terrain : un avantage non-négligeable, étant donné qu’il est crucial pour des “casteurs” de lancer le plus souvent possible des sortilèges. En somme, les auto-chess sont un ensemble de règles et d'automatisation, avec énormément de petites subtilités tactiques.
La draft : un moment de rage et de joie
TFT part donc de cette base commune à la totalité des auto-chess et customise cette expérience. A titre d’exemple, on pourra citer 2 particularités, que l’on ne retrouve pas partout ailleurs : les draft et le système d’objets. La draft, c’est cette période de chaque phase de jeu durant laquelle les joueurs tirent un champion et un objet, ces derniers tournent en rond au milieu et les joueurs vont, chacun leur tour, se diriger vers la proposition qui leur plaît le plus. Et si le principe fonctionne bien et ajoute une grosse dose de hasard, il est assez regrettable que TFT, malgré son planning de mise à jour régulier, n’ait pas inclus divers éléments permettant de faciliter la tâche aux novices. Durant la draft, aucun moyen de savoir de quelle classe sont les champions qui “tournent”, ni même de connaître les statistiques des objets qu’ils ont : il faudra y aller à l’expérience, et reconnaître le skin ou le pictogramme.
De même, juste avant cette phase de draft, il faudra se montrer observateur et bien se souvenir des champions dont nous avons besoin, ou que nous avons d’ores et déjà en double. Par ailleurs, attention où vous marchez car il n’est pas rare de prendre un personnage non-désiré en tournant autour de la ronde des champions. La lisibilité de cette phase n’est pas non plus des plus évidente, surtout si des joueurs s’amusent à se déplacer dans la ronde une fois leur choix effectué. Toutefois, cette phase, une fois maitrisée, s’avère parfois très intéressante, et quelques stratégies commencent à se dessiner, notamment si vous souhaitez contrer l’évolution d’un joueur, en ayant préalablement observé sa réserve et sa composition, une pratique très en vogue une fois que l’on sait bien jouer. Certains joueurs vont même jusqu’à tourner autour d’un champion désiré, et attendre le tout dernier moment pour le sélectionner, ce qui peut perturber le choix des autres et s'avère parfois décisif.
Des objets au coeur de la victoire
L’autre spécificité de TFT, qui lui donne toute sa profondeur, c’est la notion d’objets. Là où son grand rival, Dota Underlords, propose de placer un objet par champion de manière provisoire, TFT vous demande de placer les objets de manière définitive. Pour le récupérer, il faudra vendre le champion, gare donc à ne pas placer un objet boostant le mana d’un champion qui n’en utilise pas.
On est d’ailleurs souvent dans le doute quant à ce que va devenir un objet une fois fusionné avec un autre. en survolant un item avec un autre en main, on obtient les infos relatives à l’objet qu’ils vont former une fois fusionnés, mais il est encore aujourd’hui obligatoire d’installer un petit plug-in pour avoir de manière permanente la liste des fusions disponibles par objets, très utile lors des draft pour récupérer un item particulier, quitte à vendre le champion qui le porte. Il existe des tas d’items, et des tas de stratégies basées sur ces derniers. 3 objets maximum par champion signifie que certains peuvent se gaver d’items fusionnés, devenant alors de vrais tueurs qu’il faudra protéger derrière des lignes de tanks.
Un démon comme Aatrox aura un fort avantage sur le terrain si on l’équipe d’une Etreinte du Seraphin, d’un Echo de Luden et d’un Ange Gardien.
Aatrox est un démon, maitre des lames, dont “l’ulti” (pour reprendre les termes de LoL) est une attaque chargée dévastatrice. Seraphin lui donne un bonus de mana (idéal pour déclencher son sort rapidement) ainsi qu’un gain de mana à chaque utilisation de sort. En gros, Aatrox utilisera son attaque dévastatrice beaucoup plus souvent. Luden en revanche, est ici un item crucial pour Aatrox, puisque l’objet lui confère des statistiques améliorées, mais surtout un effet de “splash” qui va faire rebondir les dégâts d’attaques magique (l’ulti en question) autour de la zone de dégât. Les deux combinés, et placés sur un personnage de mêlée comme Aatrox, fait que le démon inflige de très sérieux dégats dans les rangs ennemis, auxquels il va très vite se frotter en début de partie, avec une attaque ultime déjà bien préparée, alimentée par le buff des démons.
Enfin, l’Ange Gardien lui permettra de revenir à la vie après quelques secondes, s’il est mis à terre. Cet objet lui est très utile car cela lui permettra bien souvent de perdre “l’agro”, le fait d’être ciblé par les ennemis environnants, et donc d’être de nouveau frais et prêt à l’attaque face à des ennemis déjà sérieusement décimés ou mal en point. Et ce n’est, évidemment, qu’un exemple de stratégie.
Quelques axes d’amélioration
Après 3 mois de service, TFT s’est déjà bien amélioré. Largement en retard par rapport à son concurrent direct le plus notable à ses débuts, le titre a su ajouter quelques features essentielles au fil des patchs très réguliers. Ainsi, on a pu voir débarquer le compteur de dégâts, qui permet de savoir quels sont les champions les plus faiblards de votre équipe, et qu’il faudra potentiellement changer de place ou carrément échanger.
On notera au passage certains soucis de pathfinding qui sont progressivement retravaillés, mais il arrive encore de voir des sorts lancés n’importe comment, ou des champions restés bloqués durant leurs positionnement. D’autres petits soucis, plus anecdotiques, entachent parfois l’expérience : achats de champions et placements d’items au tout dernier moment qui sont mal pris en compte, ou encore le fait que l’on puisse mettre parfois nos objets dans la réserve du camp adverse, ce qui n’est pas risqué car il ne pourra pas l’utiliser, mais risque fort d’apporter un peu de confusion.
Toutefois, le rythme de patch, hebdomadaire pour l’instant, permet d’alterner ajout de contenu et ajustements, d’une semaine à l’autre. Ainsi, la “meta” est constamment remodelée, et même s’il existe des composition plus optimisées que d’autres, le fait qu’elles deviennent célèbres fait que plus de joueurs vont la jouer, et se partageront donc les champions (en nombre limités) disponibles dans la boutique. De cette manière, il n’existe pas vraiment de composition ultime et imparable, étant donné que tout le monde a accès à la même boutique et se partage donc les quelques copies des champions jugés “meta”, les rendant bien plus rare qu’à la normale.
TFT fait son petit bonhomme de chemin et s’améliore constamment : ajouts de persos, ajouts de classe, équilibrage, parfois pointé du doigt, certes, mais toujours effectué en écoutant la communauté. Riot tient assurément le bon filon, jouable en normal ou en classé, et instaure un nouvel entrant incontournable dans l’environnement de League of Legends, qui avait besoin d’un gros coup de pouce depuis l’arrivée de Fortnite. De plus, jouer à TFT incite clairement à retourner de temps en temps sur League of Legends, ne serait-ce pour retrouver nos champions qui ont brillé en auto-chess, et les jouer dans leur "version LoL". C’est donc un titre réussi, et on a hâte de suivre son évolution.
Points forts
- Des mécaniques automatisées qui traduisent une myriade de choix stratégiques.
- Un système d’objet très efficace et ultra complet.
- Des features pour rééquilibrer les forces entre joueurs (bonus de losestreak, draft à priorité pour les perdants).
- Un système de synergies de classes efficace et intéressant.
- Un support pour le moment exemplaire.
- Un jeu passionnant qui sait aussi se consommer en faisant autre chose en même temps.
- Free to play sans achats ingame avantageux.
Points faibles
- Pas ou très peu de tutoriels : peu accessible à qui ne comprend pas les règles.
- Soucis de pathfinding et quelques bugs.
- Quelques soucis d’équilibrage d’une semaine à l’autre.
- Des sessions de 30 à 45 minutes un peu longuettes sur les premières phases.
- Uniquement jouable sur PC : on aurait aimé une version PC/mobile à expérience commune.
Teamfight Tactics est un auto-chess que l’on savoure sans modération. Grâce à sa réactivité et à son lore inépuisable, Riot installe son TFT au sommet du podium, en matière de popularité, de finition, et de support, augmentant semaine après semaine le potentiel de la formule, qui donne d’ailleurs sacrément envie de retourner sur LoL entre deux parties de TFT.