Deux ans après la sortie de la Super Nintendo en Europe et une pile de jeux cultes plus tard dont Super Mario World et Super Castlevania IV, un nouveau titre débarquait dans nos rayons. Était-il lui aussi Super ? Méfiez-vous de ses graphismes colorés, il pourrait bien vous pousser à vous arracher les cheveux et demandera beaucoup de volonté. Si vous n'avez jamais vu un OVNI, c'est parce que vous n'avez jamais joué à Young Merlin.
Notre protagoniste est un jeune homme fringant, plus proche de Brice de Nice ou de l'itération de Merlin dans Kaamelott que de la représentation habituelle du vieil homme sage. Pantalon rouge serré et maillot bleu d'été, Merlin sort de chez lui et aperçoit ce qui semble être sa petite amie faire une chute dans une rivière au courant puissant. En ni une ni deux, il se précipite à sa poursuite mais la perd de vue et se réveille au bord d'un lac. C'est à cet instant que vous prenez le contrôle du personnage, face à une fontaine que vous allez voir de très (trop) nombreuses fois. Votre mission sera en un premier temps de partir à la recherche de la jeune femme disparue, puis de venir en aide à différents personnages tels qu'un vieux magicien ou des fées. Sur votre route se dressera un bestiaire dangereux, allant d'hommes-cochons minuscules, qui fusionnent pour devenir un gros bonhomme-sanglier, à des plantes carnivores.
UNE APPARENTE SIMPLICITÉ CACHANT UN DÉFI BARIOLÉ
Comme la plupart des jeux de sa génération, l'histoire de Young Merlin ne sera pas passionnante à suivre. Chaque retournement de situation n'est qu'une excuse pour nous envoyer chercher tel objet dans une mine, récupérer une pince à dévisser (Merlin l'enchanteur était donc Merlin le bricoleur dans sa jeunesse) ou récolter des fleurs planquées dans le décor. Les objets se stockent dans un inventaire et s'utilisent avec les touches Y ou B, vous avez la possibilité de modifier les assignations avec L ou directement depuis l'inventaire. L'ergonomie est bien pense, et constitue sans hésitation la chose la plus claire du jeu. On regrettera néanmoins cette obligation de retourner sans cesse face à la fontaine du début du jeu pour y jeter tous les diamants (un par couleur) que l'on trouvera. La première fois on trouve ça original, au bout de la cinquième fois on regrette qu'il existe autant de couleurs différentes car elles y passeront toutes.
ENTRE FRUSTRATION ET ENVIE D'ALLER PLUS LOIN
Cela peut être vu comme une force mais c'est aussi sa faiblesse : Young Merlin est un jeu qui ne vous expliquera jamais rien explicitement, des points clés permettent de progresser jusqu'aux dialogues qui ne sont que des marmonements à effet comique. Tous les problèmes devront se résoudre par le sens de déduction du joueur et les quelques aides offertent se résument à des rébus abscons flottant dans une bulle. Même le système de sauvegarde est une mini-énigme en soi, car il fonctionne à travers un mot de passe que l'on obtient après avoir atteint un point important et qu'il faut entrer depuis un menu dédié.
L'ordre d'obtention des items se fait dans le désordre, ce qui rend la résolution des énigmes encore plus complexe. En effet, il est possible de trouver une fleur dès le début de l'aventure qui sera utile bien plus tardivement. A contrario, on croise des passages bloqués qui requièrent des objets trouvables ultérieurement dans une zone éloignée. Ces situations alambiquées peuvent créer une grande frustration, car les déplacements sont lents et les ennemis reviennent après chaque changement d'écran. Young Merlin peut se terminer en 2 heures en connaissant le jeu sur le bout des doigts, mais prendra potentiellement 5 à 10 heures pour quiconque aura le courage de s'y atteler sans solution sous les yeux.
BEAU, BIZARRE ET UN PEU BARBANT
Les graphismes se situent dans le haut du panier : les couleurs sont belles et chatoyantes, collant parfaitement à cet univers féerique inspiré des mythes de Brocéliande. Les animations ne sont pas en reste, mention spéciale au charisme de notre personnage sur son chariot-skate ; ce qui fait du titre des créateurs de Command & Conquer son originalité, c'est son mélange des genres et un parti pris déconcertant. Les ingrédients de ce tour de magie sont nombreux : un peu d'action et des monstres disséminés avec parcimonie, de l'aventure et des paysages variés (milieu aquatique, mine de diamants, donjon démoniaque), des mystères tordus à résoudre et souvent frustrants mais accompagnées de musiques enchanteresses.
Bien que la jouabilité ne l'illustre pas directement, l'influence des point & click se fait ressentir dans la mise en scène et l'utilisation des objets secondaires. Étrange sous tous ses aspects, la difficulté elle-même est difficile à définir : les combats ne demandent pas un doigté extraordinaire mais peuvent être ardus. Les énigmes sont très simples et en même temps un casse-tête à cause de l'emplacement bancal des objets à trouver. Enfin, même l'humour s'avère déroutant, avec une fin qui laisse perplexe mais prête à sourire.
Points forts
- C'est beau, coloré et les graphismes sont soignés
- Les musiques et le sound design
- Le nombre d'objets à notre disposition
- Original encore aujourd'hui et prenant…
Points faibles
- … à condition d'être patient et observateur
- Certains objets très peu exploités
- Les énigmes, souvent contre-intuitives, peuvent bloquer le joueur durant des heures
- Les allées et venues incessantes, cumulées à la lenteur des déplacements
L'absence de véritables dialogues et le manque d'explications in-game sont autant de raisons qui diviseront les avis sur cet extra-terrestre de la Super Nintendo. Parfois comparé à tort ou à raison au troisième volet de la franchise Zelda, que ce soit pour son système de vie basé sur des coeurs et la possibilité de récupérer des réceptacles supplémentaires, ou bien pour son assignation d'armes secondaires, Young Merlin ne vous laissera pas indifférent et vous plongera dans un périple qui fera appel à vos méninges et demandera une grande dose de persévérance.