Difficile de ne pas associer Bioware à son prestigieux passé. KOTOR, Mass Effect, Dragon Age : Origins ou encore Baldur's Gate sont autant de RPG solo ayant marqué leur génération. Cette année, le studio se lance dans le vivier très concurrentiel du shooter multijoueur en coopération et tente à sa manière de marier la « griffe BioWare » à une formule tout en ligne, dont le principe n'est pas sans rappeler un certain Destiny. Pari réussi ?
Les versions consoles d'Anthem désormais disponibles, nous nous sommes penchés sur les performances des différentes machines lors d'une série de missions en mode libre et scénarisé. Voici nos retours sur l'état du jeu sur PS4, PS4 Pro, Xbox One et Xbox One X.
De manière générale, le patch Day One fait beaucoup de bien à l'expérience de jeu et corrige la plupart des gros problèmes de framerate rencontrés lors de la démo. Notez qu'aucune des versions consoles ne propose un affichage à 60 images par seconde, BioWare ayant préféré privilégier le rendu visuel de son jeu en tablant sur un minimum de 30 fps sur toutes les plateformes. Un bug lié au patch ne permet pas, à l'heure actuelle, d'activer l'option HDR sur PS4 et Xbox One.
PS4 : Le titre tourne ici en 30 images par seconde sans grands ralentissements lors des séquences en exploration libre. On note toutefois quelques chute de framerate lors de nos visites dans les zones les plus détaillées de Fort Tarsis ou durant certains affrontements particulièrement chargés en ennemis et en effet. Le tout se montre très agréable à l'œil malgré un décalage dans l'affichage en pleine résolution de certaines textures. Les temps de chargement, nombreux et véritable bête noire des joueurs, ont largement été réduits depuis l'arrivée du patch day one, ils sont rapides lors des accès à la forge ou du HUB principal et toujours un peu longs lors des accès en missions dans les différentes zones du monde de Bastion.
PS4 Pro : La version PS4 Pro d'Anthem ne permet pas d'afficher de la 4k native, la console utilise les technique classiques d'upscale et de checkboard rendering afin de simuler cette résolution. Le résultat à l'écran, en 1080p ou en 4K non native reste toutefois très convaincant avec une image mieux détaillée que celle affichée sur le modèle classique de PS4. Le jeu est plus beau et son framerate se montre plus stable que sur PS4 classique avec de très rares chutes sous la barre des 30 fps lors des combats les plus intenses. Parcourir Fort Tarsis laisse toutefois encore apparaître le même constat d'affichage tardif de certaines textures dans leur pleine résolution. Cette version PS4 Pro version dépasse aussi dès qu'elle le peut la barre des 35 fps afin d'accorder un meilleur confort au joueur. Les temps de chargement font état des mêmes améliorations que sur PS4 classique, ils sont toujours nombreux, mais largement raccourcis grâce au patch day one.
Xbox One : Basée elle aussi sur un affichage à 30 images par seconde, la version Xbox One fait le choix de diminuer sa résolution à du 900p afin de maintenir sa promesse de framerate. Le résultat est payant avec un affichage quasi constant à 30fps qui connait toutefois lui aussi, comme son homologue sur PS4 classique, quelques légers ralentissements lors des séquences de jeu les plus surchargées. Les temps de chargement font état du même constat que sur PS4, nombreux, mais désormais bien mieux optimisés que lors de la démo. Le titre affiche un rendu convaincant, parfaitement jouable et plutôt bien optimisé.
Xbox One X : La version One X est la seule à proposer un affichage natif en 4K sur les écrans compatibles. Dans cette résolution, elle affiche le niveau de détail le plus avancé de toutes les consoles du marché. En 4K ou en 1080p, la Xbox One X table elle aussi sur du 30 fps minimum et n'en décroche que très peu à l'usage. En 4K, elle dispose d'un peu moins de marge de manœuvre que la PS4 Pro pour booster son framerate au dessus des 35 fps. La version, tout comme son homologue PS4 Pro, ne permet pas de choisir son mode d'affichage dans les menus et d'opter pour un mode performance réduisant la qualité graphique au profit de la fluidité. Quoi qu'il en soit, elle reste très agréable à l'usage et affiche un rendu très convaincant.
Les différentes versions consoles en image
Une histoire peu captivante
Anthem vous plonge au cœur de Bastion, une région façonnée par des Démiurges grâce à la manipulation de l'Hymne de la Création, sorte de relique permettant à celui qui l'utilise de créer le monde à son image. Alors que l'humanité vit presque paisiblement dans les terres verdoyantes du jeu, le Dominion, faction belliqueuse, cherche à s'emparer de la relique pour asseoir sa domination sur le monde. Malheureusement la manipulation de l'artefact n'est pas une chose aisée et a déclenché un Maelstrom, cataclysme invoquant des créatures dantesques et bouleversant les règles physiques et météorologiques de l'environnement. Pour contrer cette attaque, une équipe de freelancers, dont vous faites partie, prend les armes, mais échoue à repousser totalement l'adversaire. La fuite face à la menace érode le statut de héros de ces défenseurs auprès des humains survivants, désormais retranchés dans Fort Tarsis, dernier véritable havre de civilisation dans un monde laissé en ruines. Deux ans plus tard, une menace similaire pèse sur l'univers et vous demandera de reprendre du service, afin de partir au combat aux commandes de votre javelin, exosquelette boosté et polyvalent.
Si, à la lecture de ces quelques lignes, vous estimez que le scénario est un rien convenu, ne soyez pas surpris, il l'est. En vous propulsant immédiatement dans une période de crise, ce qui ne permet pas au joueur de prendre conscience des enjeux qui pèsent sur ses épaules, Anthem précipite sa narration et contraint le joueur à se réfugier dans le codex pour comprendre le contexte dans lequel il est placé. Si l'on sent bien qu'un vrai travail a été effectué par les équipes en charge de l'écriture pour donner de l'épaisseur à l'univers (magnifique) du jeu, difficile de se sentir vraiment concerné par les tourments de la population locale. La plupart des protagonistes, s'ils profitent d'excellents doublages (VF comme VO), et d'expressions faciales parfois criantes de vérité, ne sont pas pour autant particulièrement attachants ou intéressants à écouter. Certes, la relation entre votre freelancer et une poignée de personnages principaux parvient à fonctionner passé quelques heures de jeu, mais dans l'ensemble, la plupart des interactions avec la population de Fort Tarsis, dans lequel vous passerez beaucoup de temps, est anecdotique et la quête principale cousue de fil blanc.
Fort Tarsis, caution narrative et hub d'Anthem
Fort Tarsis, pourtant, regorge de lignes de dialogue. La plupart des personnages qui y vivent ont des choses à raconter et vous en apprennent davantage sur la situation dans laquelle ils se trouvent. Mais, à quelques exceptions près, la personnalité des intervenants est brossée avec une généreuse dose de clichés ou de tourments un rien factices qui semblent n'être là que pour donner de la matière à un univers qui sonne finalement creux. Il y aura bien ici ou là quelques choix de dialogue qui donneront simplement lieu à des répliques différentes de votre personnage, mais n'espérez en aucun cas une narration poignante et impliquante. Pire encore, il ne sera pas rare d'être à l'avance rebuté à l'idée d'aller converser avec les occupants de Fort Tarsis, dans le simple espoir de déclencher une nouvelle quête, qui assurera votre progression dans l’univers d'Anthem, ce qui crée une rupture de rythme plutôt préjudiciable.
Un gameplay grisant pour une progression redondante
À défaut de happer le joueur par son histoire, Anthem parvient à l'impliquer grâce à un gameplay incisif. C'est bien simple, quel que soit le javelin incarné, jouer à Anthem est un véritable plaisir. Fluide, précis et nerveux, le gameplay vous permet d'enchaîner les prouesses avec une économie de manipulation assez impressionnante. Vol stationnaire (limité dans le temps), corps à corps, combat à mi-distance, les techniques et approches s'enchaînent avec frénésie pour un rendu spectaculaire à l'écran. Chaque javelin dispose de capacités ultimes, de deux armes et de deux pouvoirs, et lorsque chaque membre de l'équipe les déclenche simultanément, la sensation de puissance des personnages est omniprésente. Empruntant et améliorant le système de combat déjà agréable de Mass Effect Andromeda, Anthem a boosté les dégâts infligés par la complémentarité des sorts. Ainsi, un adversaire préalablement gelé pourra subir des dommages supplémentaires si un sort d'électricité le percute. Il en résulte un gameplay explosif traduit à l'image par une généreuse quantité d'effets visuels qui, s'ils créent une certaine confusion, procurent toutefois beaucoup de satisfaction. Cependant, et c'est assez regrettable, il est possible de s'équiper de sorts à même d'amorcer et de déclencher des combos, rendant le teamplay un rien secondaire. Notez d'ailleurs que les interactions sociales sont plutôt limitées, et la présence d'une baie de lancement connectée, qui réunit les mêmes propositions que Fort Tarsis mais cette fois en présence d'autres joueurs, n'a qu'un intérêt limité.
S'il est bien possible de jouer à Anthem seul, en optant pour une parte privée, il est toutefois recommandé de se laisser tenter par les parties publiques, qui vous grouperont dans des escouades pouvant accueillir 4 joueurs. Chaque expédition vous rapportera une certaine quantité d'expérience jusqu'à ce que vous atteigniez le niveau maximal capé à 30, mais la répartition des récompenses dépend de vos prouesses au combat, et non pas du nombre d'ennemis tués sur le terrain. En difficulté normale comme en difficile, Anthem est globalement un parcours de santé qui ne requiert presqu'aucune collaboration, chacun pouvant jouer dans son coin sans craindre véritablement l'échec. C'est d'autant plus regrettable, car un peu de coopération forcée aurait permis de pallier à la grande répétitivité des missions du jeu. La plupart de vos expéditions se résumeront à aller à un point A, interagir avec un objet, repousser une vague d'ennemis et répéter deux ou trois fois l'opération. Pendant la grosse vingtaine d'heures que vous demandera le jeu pour voir le générique de fin, vous aurez le sentiment d'enchaîner en boucle les mêmes objectifs dont on a le sentiment qu'ils sont tous interchangeables. Le schéma est systématiquement le même : se contraindre à longuement parler à différents PnJ dans Fort Tarsis, récupérer une expédition, se rendre à son javelin, être propulsé dans le monde ouvert avec trois joueurs et recommencer à nouveau. Les ennemis de leur côté, manquent de diversité et semblent en permanence attendre votre venue, patientant bien groupés pour vous tirer dessus une fois sur place ou apparaissant par vague par l'intermédiaire de failles.
Exemple d'évènement en partie libre
La grande redondance du jeu est en outre associée à une multiplication assez impressionnante de temps de chargements et des mécaniques dont on peine à comprendre la présence. En effet, si toutefois, vous êtes un peu en retrait de votre groupe, un message s’affichera vous indiquant que vous avez 30 secondes pour rejoindre vos partenaires. Passé ce délai, et même lorsque vous avez votre groupe en visuel, un chargement forcé intervient pour vous rapprocher de vos compagnons. Ce principe est assez frustrant et finit par donner l'envie au joueur de se précipiter vers les objectifs pour ne pas être à la traîne et s'infliger ce nouveau temps de chargement.
Un contenu trop maigre et répétitif
Une fois une mission terminée, l'ensemble du loot apparaît dans un écran dédié qui est l'occasion de constater la très grande uniformité des armes. Les plus férus de customisation en feront les frais, de nombreux modèles sont identiques exception faite d'une couleur sensiblement différente. Outre le manque d'attrait purement cosmétique, c'est aussi pour la sélection de l'équipement que cette homogénéité pose problème, empêchant de voir d'un simple coup d'oeil quelle arme pourrait rejoindre notre arsenal. Si l'on sent bien les efforts consentis par Bioware pour permettre de personnaliser l'équipement de notre javelin, par l'intermédiaire d'armes, d'items de soutien ou de multiples bonus passifs, la sensation de jouer un personnage assez identique du début à la fin du jeu est omniprésente, ne serait-ce que visuellement. Un arbre de compétence par javelin n'aurait, par exemple, pas été de trop.
Progression uniforme, loot assez peu attractif... autant d'écueils qui ne s'érodent pas avec le end game. Une fois parvenu au niveau maximal, trois modes de difficulté se débloquent ainsi que 2 forteresses, dont une est en réalité la mission de fin de la quête principale. Vous aurez donc la possibilité, pour améliorer votre équipement, d'accomplir des expéditions répétables, de faire des événements mondiaux en partie libre dans le monde ouvert, ou de vous frotter aux trois paliers de la difficulté « grand maître ». Nous aurions espéré que cette difficulté impose un vrai jeu d'équipe et amène de nouveaux ennemis ou stratégie, mais ce n'est malheureusement pas le cas. Si la difficulté est réelle, elle n'existe qu'en raison des lourds dégâts infligés par le moindre ennemi et de sa quantité astronomique de points de vie. Notez que cela masque l'intelligence artificielle inexistante des adversaires, qui sont davantage à voir comme des poteaux assortis d'armes puissantes.
Il n'est agréable pour personne d'avoir à vider trois ou quatre chargeurs pour mettre un trash au sol et c'est pourtant ce que Anthem propose pour corser le challenge. Certes, il faudra, pour triompher des adversaires, concentrer les tirs du groupe sur la même cible, centraliser les attaques sur les quelques points faibles des monstres et favoriser les combos. Mais la coopération s'arrêtera là et finalement, la répartition du loot étant assez obscure, nous avons obtenu plus d 'équipement en mode normal qu'en difficulté maximale, tout en prenant plus de plaisir à jouer. Cependant, les items légendaires ne tomberont qu'à la difficulté maximale qui booste jusqu'à 3100% de la vie et les dégâts des opposants. La sensation de puissance du javelin n'a donc plus cours dans les hauts modes de difficulté, et l'impression de ne pas faire de dégâts aux adversaires est frustrante. Dommage que Anthem ait opté pour cette approche du haut niveau et espérons que l'avenir rectifiera le tir.
Le contenu de fin de jeu est donc assez maigre pour l'instant et ce ne sont pas les quelques défis, qui permettent de déverrouiller des patrons d'armes ou d'équipement, qui relèvent la saveur du jeu. Même l'open-world, pourtant splendide, a davantage des allures de coquille vide que l'on n'a pas spécialement envie d'explorer. Espérons donc, que l'avenir permettra à Bioware d'étoffer son contenu et de donner un peu plus de diversité à son jeu qui dispose d'un vrai potentiel de fun.
Points forts
- Open world superbe
- Un gameplay nerveux, immédiat et intuitif
- Les javelins et leurs spécificités
- Les combos et le sentiment de puissance qui s'en dégage
- Quelques personnages attachants
- Doublage VF et VO de qualité
- Des bases solides pour une évolution prometteuse
Points faibles
- Bien trop répétitif dans l'ensemble
- Univers sous exploité par un scénario convenu
- IA ennemie à revoir
- Bestiaire peu varié et trop peu de boss uniques
- Loot peu attractif et trop uniforme
- Fort Tarsis, un hub pénible à parcourir
- Temps de chargement trop nombreux et trop longs
- La téléportaion automatique en mission si vous ne suivez pas votre escouade
- Une difficulté axée uniquement sur les points de vie et les dégâts des monstres
- Trop maigre en contenu end game pour le moment
- Teamplay assez secondaire
En dépit de son gameplay ultra nerveux et agréable à prendre en main et de son open world absolument splendide, Anthem souffre de défauts liés à sa structure et son contenu. Très répétitif, maigre en contenu end game, et assez pauvre scénaristiquement, Anthem pèche aussi par un challenge uniquement conditionné par une hausse maladroite des points de vie et des dégâts des monstres. Reléguant la coopération au rang secondaire, les expéditions comme les donjons ne requièrent qu'une stratégie limitée aux combos et à l'esquive et ne récompensent les efforts que par un loot trop uniforme. Il s'agit désormais pour BioWare de continuer à étoffer son jeu pour lui donner plus de diversité et d'intérêt, car le potentiel lui, est assurément là. Un beau terreau pour un futur bon jeu, mais qui doit encore mûrir pour remporter l'adhésion des joueurs.