C’est durant un événement parisien que nous avons pu nous essayer aux trois premières “War Stories” de Battlefield V, nouvel épisode bisannuel de la saga emblématique de DICE. Pour ce nouvel opus, les équipes misent à nouveau sur ce format anthologique qui fit en partie le succès du Battlefield 1 de 2016. Nous parcourrons donc encore le globe, incarnant divers profils, afin d’exploiter de petites histoires, généralement méconnues mais qui, mises bout à bout, ont contribué à modifier la face du monde à l'issue ce conflit global.
3 minutes pour comprendre les qualités et défauts des passages joués
Une version encore très instable
Pour ce premier essai du solo de Battlefield V, nous avons pu juger de la pertinence de la narration, de la mise en scène, des IA, et de l’avancement global du développement à tout juste un mois de la sortie du titre. Force est de constater qu’à ce niveau là, il reste encore beaucoup de travail aux équipes de DICE afin d’endiguer les divers bugs qui ont constellé notre session. Soucis de physique, IA clairement déficiente, sévère clipping et popping d’éléments, ralentissements, textures parfois très pauvres, bugs d’affichage très gênants : le titre, sur la version essayée, est à un stade que l’on voit communément à six mois de la sortie, rarement à une quinzaine de jours du passage en version Gold. Notons toutefois que l'équipe est au courant de certains de ces soucis et dévraient les régler pour la version finale.
En dehors de ça, le jeu dispose d’avantages certains côté technique, puisqu’il arbore fièrement un Frostbite 3 toujours très propre et parfaitement adapté aux grandes arènes criblées d’obus, jalonnée d’éléments en mouvement et de joueurs en pleine action. Toutefois, à plus petite échelle, comme durant les War Stories, où nous sommes seuls face à des IA, le "grandiose", caractéristique des séquences en multijoueur, est ici presque absent. Ce que les développeurs appellent les “battlefield moments” furent, sur la séquence jouée, illustrés par quelques cinématiques et cut-scenes tout au plus mais se ressentaient rarement lorsque l'on était aux commandes. En revanche, on notera un véritable effort réalisé sur le cadre, la narration et la construction de ces War Stories…
Prologue : Épisode dans lequel on alterne entre différents points de vue afin de s’habituer aux types de gameplay que couvrira le jeu. La mise en scène est léchée et le ton, solennel, permet d’introduire le propos des War Stories.
Nordlys : Épisode au coeur de la résistance norvégienne. On y incarne une jeune saboteuse qui recherche sa mère, interrogée par les nazis.
Under No Flag : Episode en Afrique du Nord qui vous propose d’incarner un ex-taulard anglais ayant intégré l’armée de Sa Majesté au sein d'un petit contingent de casse-cous débrouillards, envoyée derrière les lignes ennemies.
Tirailleur : Episode en France, dans lequel on suit Debe, tirailleur des colonies françaises en Afrique, fier de venir défendre son pays. Malheureusement, il fait face avec ses amis d’infortune au mépris des européens et à la difficile situation de ceux envoyés en première ligne.
The Last Tiger : Épisode où l’on incarne un nazi, chef d’un petit groupe aux commandes d’un Tiger 1, tank surpuissant de l’armée allemande, envoyé seul sur le champs de bataille en support d'unités d'infanterie.
Histoires méconnues, propos héroique
Attaquons nous donc au coeur du sujet, à ces histoires méconnues qui cimentent la composante solo de BFV et offriront à vue d'oeil 5 à 6 heures de jeu au total. Celle que nous avons fait intégralement, Nordlys, reprend un thème déjà illustré dans des séries, films et jeux, dont Battlefield 1942. Ce thème, c'est une mission de sabotage qui prend place en Norvège et concerne la production d’eau lourde, nom commun attribué à l’oxyde de deutérium, un précieux liquide raffiné dans ces terres froides qui sert, en théorie, à développer des armes atomiques. Plusieurs missions durant la Seconde Guerre Mondiale ont visé à détruire les principales usines productrices, aux mains des nazis durant l’occupation du territoire, et c’est l’une d’elles que nous jouons dans Nordlys. Notre héroïne, Solveig, est une jeune résistante de 18 ans dont la mère a été arrêtée par les nazis. Cette dernière connaît l'importance de l'usine d'eau lourde et tentait de saboter l’acheminement des précieux barils vers l'Allemagne. C’est donc une double quête qui vous est proposée là : sauver la mère de Solveig et arrêter les chargements d’eau lourde par n’importe quel moyen.
A travers trois chapitres, nous poursuivons donc notre mission, alternant infiltration, sniping, affrontement de vagues d’ennemis et petites descentes à ski. Car oui, dans Nordlys, DICE en profite pour innover un peu, proposant à Solveig d’enfiler ses skis en quelques secondes pour se rendre rapidement d’un point à l’autre des immensités glacées. Bien pensé, bien qu’encore un peu buggée, cette feature est la seule nuance de gameplay que nous avons testé durant notre première approche des War Stories. La map est parfois immense et vous aurez d'ailleurs plusieurs approches, tantôt infiltration, tantôt bourrin, pour venir à bout de vos objectifs. Le propos est intéressant, les dialogues et cut-scenes sont efficaces, et l’on prend plaisir à parcourir Nordlys, une aventure qui fait voyager et dépose les bases d’une excellente histoire, aux origines bien réelles, exploitée ici dans un récit vidéoludique rythmé. Comptez à peu près une heure pour en venir à bout, ce que nous avons fait avant d’attaquer les premiers chapitres de deux autres War Stories, à commencer par Under No Flag.
Under No Flag : Quand les IA sapent le moral des troupes
Under No Flag nous raconte l’histoire d’un taulard, Billy, qui se retrouve embrigadé au coeur d’une unité de choc de l’armée anglaise. Fraîchement débarqué en Afrique du Nord, aux prises avec l’Afrika Korps de Rommel, notre héros d’infortune va devoir très vite s'acclimater et faire face à la Guerre, la vraie. Stuka à dézinguer à coup de batterie anti-aérienne ou encore infiltration de camps en faisant bien attention à ne pas éveiller les soupçons : ce premier volet de l’épisode ne nous a pas laissé sur notre faim côté action. En revanche, on ne pourra que regretter les errances des IA qui, ici plus qu’ailleurs, sont régulièrement dépassées par l’action du joueur. Mention spéciale au deux Stuka que l'on doit dézinguer : l'un s’est crashé de lui-même dans une montagne, tandis que l'autre a explosé mollement, une dizaine de secondes après s'être planté dans le sol. Dommage pour l’immersion. Nous n’en saurons pas plus des aventures de Billy, puisque le reste de son histoire attendra la sortie du jeu pour être exploitable.
Tirailleur : Un bon concept, vite dépassé par le gameplay
Enfin, Tirailleur fut l’occasion pour nous d’essayer le contenu dédié à la France, dans cette anthologie d’histoires oubliées. L’épisode nous place aux commandes de Debe, jeune français des colonies africaines. Une fois arrivé en France, c’est un accueil chaleureux qui l’attend de la part de ses camarades d’infortune. En revanche, ses compatriotes blancs, métropolitains, le traitent comme un citoyen de seconde zone, l'envoyant à la bataille, en première ligne, avec un fusil de la Première Guerre. Son premier chapitre est donc une ruée progressive vers des objectifs, dans une Provence qui ressemble plus à Bordeciel en automne qu’aux environs de Marseille. Les feuilles mortes se soulèvent à chaque explosion, les tirs fusent et la progression se fait sans trop de difficulté sur la carte, au son des cris de guerre des compagnons de Debe.
Malheureusement, on ne ressent pas vraiment, durant ce premier tronçon de l’épisode, les difficultés exprimées par Debe et ses amis. Le matériel rudimentaire, caractéristique de cette War Story où les soldats africains sont armés de fusils d'une autre époque, est vite remplacée par des armes tout à fait fiables, trouvées en quelques secondes sur le champs de bataille. On est donc très vite à armes égales face aux nazis et cette War Story perd alors en cohérence. Vous n'aurez aucun mal à dézinguer les ennemis par grappes, sauf ceux équipés de lance-flammes, qui s'avèrent excessivement difficiles à neutraliser. Là encore, le propos est appréciable mais le gameplay peine à suivre. Reste donc à savoir si tout ceci sera corrigé et amélioré d'ici un mois, pour la sortie du titre.
Les War Stories de ce Battlefield V démarrent très bien avec une mission Nordlys, en Norvège, qui signe un quasi sans-faute. Vaste, rythmée, elle met en avant infiltrations et affrontements armés dans un cadre glacial du plus bel effet. On ne peut malheureusement pas en dire autant du début des deux autres aventures essayées, qui soit forcent moins l'empathie (Under No Flag) tout en peinant à convaincre côté IA, soit disposent d’un concept de base qui est balayé dès les premiers instants (Tirailleurs) tout en manquant au passage de subtilité dans le gameplay. Quant à l’état actuel du titre, techniquement parlant, il semble souffrir d’un inquiétant retard, notamment sur l'optimisation d’une IA souvent dépassée et sur de très nombreux bugs, dont certains sont déjà identifiés par les développeurs qui assurent travailler dessus, à quelques semaines de son passage Gold.