Il en aura fait du chemin, ce We Happy Few depuis son arrivée en early access en 2016. Davantage perçu comme un jeu de survie assorti d'un univers alléchant, mais à la dimension narrative un peu trop en retrait. À quelques semaines de sa sortie, nous avons pu nous essayer à du contenu inédit afin de prendre la mesure du virage opéré par les équipes de Compulsion Games après deux ans de travail.
Trailer de We Happy Few
Hymne à la Joie
Pour reposer les bases de l'univers très déjanté de We Happy Few, rappelons que vous évoluez dans un monde où les individus, grâce à la consommation régulière d'une drogue baptisée « Joy », voient le monde d'une manière fantasmée et colorée. Votre personnage central, Arthur, refuse un jour de se soustraire à la prise de sa pilule de joie, le conduisant rapidement à voir le monde tel qu'il est : un univers dévasté, dictatorial, prompt à la censure et dans lequel les « downers » comme Arthur sont chassés dans les bas-fonds de la ville. Rapidement détecté comme déviant, le pauvre diable se fait rapidement bannir de son emploi de censeur et part en quête d'un frère perdu, suite à une guerre qui a laissé de lourdes séquelles sur la mémoire de celles et ceux l'ayant vécu.
Initialement, votre exode était synonyme d'une plongée immédiate dans un monde ouvert divisé en plusieurs îles et dont les bâtiments et différents éléments récoltables étaient générés de manière procédurale. Il vous appartenait alors de comprendre les mécaniques du jeu, de gérer votre sommeil, votre faim et votre satiété tout en tentant de poursuivre votre quête de retrouvailles familiales. Avec des mécaniques de jeu peu claires, pas nécessairement nouvelles ni palpitantes, We Happy Few donnait l'impression d'avoir seulement ébauché un univers terriblement inspiré et une idée très originale sans jamais chercher à en exploiter le potentiel. Ce que nous avons vu au cours de notre session de jeu, qui nous a conduits à incarner chacun des trois personnages jouables dont les destins sont liés, nous confirme que Compulsion Games a inversé ses ambitions initiales.
Une narration aux petits oignons
Désormais, il semblerait que We Happy Few ne soit pas un jeu de survie saupoudré de narration, mais plutôt l'inverse. Pour preuve, au lieu de vous parachuter dans l'open world après votre évasion, le titre vous propulse dans une petite île façonnée à la main (le reste du jeu se reposant sur du procédural), permettant d'appréhender autant les mécaniques du jeu que son histoire et ses personnages. Nous avons donc été conduits à infiltrer un camp de bandits afin de rendre service à un homme esseulé, ce qui a eu pour conséquence de nous faire vivre un combat clandestin contre un ancien collègue de bureau, une séquence d'infiltration plutôt réussie, et une séquence de fuite haletante. En plus du grand soin apporté à l'écriture et au voice acting en général, un énorme effort a été fait dans la narration visuelle et scripturale. Effectivement, les décors regorgent de détails et l'exploration permet autant de booster les compétences de notre personnage que de récolter des lettres permettant de narrer le passé des lieux traversés.
Avec son sens de l'humour noir maîtrisé, qui tranche avec certaines séquences plus sombres et/ou touchantes, We Happy Few semble vraiment souhaiter s'appuyer sur les forces de son univers plutôt que de s'enterrer dans des mécaniques de survie. A priori une bonne idée, puisque si elles ont certes fait leurs preuves, elles s'avèrent un rien lassantes à force d'avoir été vues et revues partout ailleurs. Notez que, si nous ne pouvons pas vous révéler grand-chose concernant les divers personnages à interpréter durant l'aventure, sachez que la manière dont ils sont introduits est aussi brillante qu'efficace. Outre un brossage rapide et affûté de leur personnalité en quelques subtiles actions à réaliser ou détails d’environnements, c'est aussi le gameplay qui variera d'un personnage à l'autre. L'un pourra étouffer discrètement ses adversaires tandis qu'un autre devra user de seringues anesthésiantes de manière à se faufiler dans des endroits retranchés.
Car clairement, We Happy Few misera grandement sur l'infiltration et non pas sur les combats. Outre le fait qu'une fois en position accroupie, vous pourrez observer les traces de pas de vos ennemis proches, vous pourrez également vous contenter de fuir si d'aventure des gardes venaient à vous détecter. Pour cela, vous disposerez de gadgets divers, tels que des chausses-trappes ou encore des concoctions rendant fous les personnages hostiles. Et ce n'est là qu'une fraction des originalités manifestes déployées dans cette session de We Happy Few, nouvelle version.
Alors certes, au cours de notre session de jeu, limitée dans le temps, les développeurs nous ont invités à nous concentrer sur la quête principale sans nous laisser voir les mécaniques liées à l'exploration et la narration qui habite les zones ouvertes du titre. Cependant nous espérons que les quêtes annexes seront aussi soignées que ce que nous avons vu dans la principale et que le joueur sera naturellement invité à explorer le monde du jeu dans ses moindres recoins.
Il semblerait que We Happy Few ait pris un virage narratif appuyé, qui donne encore plus de corps à l'univers assez fou qu'il développe. Opération payante au regard de notre session de jeu qui, si elle ne nous a pas permis de voir les mécaniques développées dans les zones ouvertes du titre, nous a au moins confirmé que l'écriture, le cynisme et l'intelligence du propos seront au rendez-vous. Il ne reste qu'à espérer que, dans sa globalité, We Happy Few proposera une expérience équilibrée, et que la survie sera mise au service de la narration, et non l'inverse. Réponse le 10 août prochain sur PC, PS4 et Xbox One