C'est à la Paris Games Week 2017 que les joueurs ont découvert pour la première fois Onrush, le nouveau jeu des anciens d'Evolution Studios. Un titre arcade, fun et déjanté, par les papas de plusieurs licences prestigieuses ? Forcément, après une telle annonce et une petite discussion avec Paul Rustchynsky, on était plutôt emballé et on avait hâte de l'essayer. Hélas, après un premier contact manette en mains, on a un peu perdu de notre assurance.
Nous avons joué à Onrush lors d'un événement organisé à Londres par Codemasters, pendant environ deux heures, sur Xbox One X et PlayStation 4 Pro.
Belle histoire que celle de Paul Rustchynsky et ses équipes d'Evolution Studios. Après le semi-échec de DRIVECLUB, Sony avait restructuré puis fermé les portes du studio, laissant sur la paille plusieurs dizaines de développeurs. Mais lorsque l'on a à son CV plusieurs MotorStorm et WRC, on ne reste pas longtemps au chômage et effectivement : à peine annonçait-on la fermeture du studio que les voisins de Codemasters approchaient la bande à Rustchynsky pour lui proposer d'intégrer leurs effectifs. C'est désormais chose faite et c'est donc sous la bannière de Codemasters, un autre grand studio anglais spécialiste du jeu de course, que l'équipe s'est remise au travail. Avec une idée précise en tête : proposer aux joueurs une autre vision du jeu de course arcade.
Le salon de l'autoMOBAle
Lorsque nous avions rencontré Rustchynsky à la Paris Games Week, il nous avait fait savoir qu'Onrush serait un jeu de course d'un nouveau genre, dans lequel il ne s'agirait pas forcément d'être premier pour gagner. Notre curiosité avait été piquée à vif mais le réalisateur n'avait pas souhaité nous en dire plus. Il aura finalement fallu attendre le 15 mars 2018 pour comprendre ses propos. La présentation orale qui nous a été faite du jeu, en guise de préambule, nous a rapidement mis la puce à l'oreille : au moment d'évoquer les principales influences de son bébé, Rustchynsky cite Burnout, Motorstorm ou même OutRun, avant de nommer... Street Fighter V, Rocket League et Overwatch. « Plaît-il ? » fut-on tenté de dire. Car voilà, Onrush n'est clairement pas un jeu de course comme les autres. Après y avoir joué pendant environ deux heures, on en viendrait même à se demander si Onrush est vraiment un jeu de course.
Sur les bases, le titre s'en approche pourtant rudement : le joueur un véhicule motorisé sur de vastes circuits remplis d'obstacles, de longs sauts, de gouffres à éviter.... Le rythme est soutenu et marqué par les nombreux takedowns qui permettent d'envoyer au tapis ses adversaires. Sauf que voilà, il n'est pas nécessaire d'arriver premier pour gagner une course. On ne peut donc pas vraiment parler de course, ni de "finir premier". Le principe d'Onrush, c'est tout simplement de marquer des points, en détruisant des ennemis, en accomplissant des combinaisons d'actions classieuses et surtout en suivant les différents objectifs. Ces objectifs sont déterminés par le mode de jeu choisi et c'est en équipe que l'on peut triompher. Inutile de pointer en tête de course, en somme, puisque c'est en restant au contact de vos alliés et de vos ennemis que vous serez le plus utile à votre équipe. Notez que le titre se joue intégralement en équipe, que l'on opte pour la campagne solo, ou les modes multijoueurs. En solo, vos coéquipiers seront donc gérés par l'IA, qui s'en sort plutôt bien soit dit en passant.
Bien entendu, Onrush repose sur un système de classes inspiré des MOBA les plus connus, et devrait, les développeurs l'espèrent, imposer aux joueurs d'une même équipe de collaborer pour s'assurer la victoire. Certaines autos gagnent du boost lorsqu'elles renversent des ennemis, d'autres peuvent déposer ici et là des murs qui ralentissent la progression, tandis que certaines sont capables charger la jauge de boost des copains à proximité. L'idée est assez surprenante, mais les vidéos de gameplay qui nous ont été présentés donnaient l'impression d'avoir affaire à un jeu de course nerveux et rempli d'actions, avec une composante stratégie qui méritait d'être éprouvée. Alors, sans a priori, nous avons commencé à jouer à Onrush.
Onrush Hour
Quelques minutes de conduite suffisent pour constater que les bases d'Onrush fonctionnent à merveille : sur la forme, il s'agit bel et bien d'un jeu de course arcade hyper instinctif, dans laquelle on passe son temps à écraser la touche de boost pour filer toujours plus vite. La sensation de vitesse est très agréable et l'on prend plaisir à dévaler les pistes des différents circuits que l'on a pu essayer. Très inspirés de la série Motorstorm, les différents niveaux sont tous installés dans des environnements relativement sauvages et remplis d'arbres, de canyons, de tremplins, de plates-formes... Côté level-design, c'est plutôt bien vu puisque l'on passe son temps à revoir sa trajectoire, et les différentes possibilités d'itinéraire laissent une certaine place à la prise d'initiative et à l'expérimentation. On aurait toutefois aimé que ces circuits soient plus fous encore, avec plus de jump, plus de chemins détournés, plus de raccourcis... un peu comme dans Motorstorm en fait ! Seulement voilà, comme nous le disons plus haut, Onrush n'est pas un jeu de course à proprement parler et les raccourcis et autres chemins de traverse n'auraient finalement aucun intérêt. Ici, mieux vaut que les joueurs restent groupés au maximum et dans les faits, la chevauchée mécanique est rarement éparpillée. Le but n'est pas de faire la course, mais bien de se mettre des coups de portière.
Et cela, Onrush le fait plutôt bien. On ressent nettement l'inspiration de Burnout, mentionnée par Rustchynsky. Si vous avez déjà joué à l'un des derniers Burnout (et pourquoi pas l'épisode Paradise, qui a récemment eu droit à un remaster), les courses type Road Rage font un bon élément de comparaison : les carcasses volent dans tous les sens et l'on est constamment harcelé par l'équipe adverse qui est parfois prête à tout pour vous sortir de la route. En fait, on aurait presque l'impression d'assister à une suite du film Mad Max Fury Road. Les voitures explosent et se retournent dans tous les sens, ce qui est souvent l'occasion de constater que le moteur physique du jeu fonctionne à merveille. Joli boulot effectué sur la mise en scène, en somme. Toutefois, on n'a pas tout à fait compris comment fonctionnait le système de takedown et comment le jeu déterminait qui étaient le frappeur et le frappé : certains contacts qui semblaient être en notre faveur se sont avérés être bien désagréables à avaler... À noter que les courses comportent en permanence 24 pilotes, la moitié étant gérés par l'IA et n'appartenant à aucune équipe. Ces faire-valoir permettent simplement d'effectuer plus facilement des takedowns et donc des combos, ou de gagner du boost. L'idée peut paraître curieuse mais elle se justifie pleinement en course, car cela apporte du rythme et permet d'enchaîner les belles actions, et donc de faire des combos.
Le doute subsiste
Si les sensations sont agréables, le plaisir de jeu lui est malheureusement plus limité. Lors des premières courses, on a effectivement apprécié la vitesse et le caractère soutenu de ces faces à faces motorisés mais après quelques parties... Force est de constater que l'on ne comprend pas toujours ce qui se passe à l'écran. On gagne, on perd, sans toujours savoir pourquoi et forcément, cela agace. La première raison à cela, c'est que l'aspect MOBA du jeu est peut-être mal mis en avant : Onrush manque de marqueurs visuels et en dehors de quelques pouvoirs qui ont effectivement un impact à l'écran, le reste est passif et ne se manifeste jamais clairement. Prenez League of Legends, par exemple : lorsqu'un champion utilise l'un de ses skills, n'importe quel joueur peut le savoir, que ce soit à cause d'une animation particulière, ou d'un effet visuel quelconque. Dans Onrush, c'est trop rarement le cas. Bien entendu il s'agit fondamentalement d'un jeu de course et si l'écran était envahi de rayons laser, de fumées multicolores et d'explosions d'énergie, la visibilité en prendrait un coup, un risque que l'on ne peut pas se permettre dans un jeu qui va aussi vite qu'Onrush. Les limites de la formule ? Peut-être.
Mais le résultat c'est que la dimension teamplay est finalement assez limitée et lors de notre session de jeu, nous avons gagné la majeure partie de nos courses sans adresser un seul mot à nos petits camarades. Nous n'en avons pas ressenti le besoin. Peut-être qu'avec plus de pratique et face à des adversaires plus expérimentés, cela aurait été nécessaire : il faudra jouer encore un moment à Onrush pour mesurer la profondeur de son gameplay.
En revanche ce qui est certain c'est qu'outre le caractère trop sage des circuits, qui a déjà été évoqué, le nouveau jeu des ex-Evolution Studios est marqué par un défaut particulièrement handicapant : l'absence d'une véritable direction artistique. Sur la build qui nous a été présentée, les environnements manquent de variété, de couleurs, d'imaginations. On pourrait confondre Onrush avec n'importe quel jeu de course arcade bas de gamme qui, la plupart du temps, végètent au fond du catalogue Steam. Il ne faut pas prendre cet écueil à la légère puisqu'une bonne DA participe très largement au plaisir de jeu, et dans le cas présent, c'est plutôt l'inverse : Onrush est très fade. C'est d'autant plus étonnant que la salle qui a accueilli l'événement tenu par Codemaster était bardée de couleurs et de dessins, inspirés de la culture skate/punk. On ne le retrouve pas vraiment in-game, mais peut-être faut-il mettre cela sur le compte de la version qui nous a été proposée, et qui n'est pas représentative de ce que sera OnRush lorsqu'il débarquera dans le commerce, début juin.
Onrush repose sur un concept original et peut se targuer de proposer quelque chose de vraiment nouveau, et donc forcément intéressant. Cela étant, ceux qui attendaient un vrai jeu de course arcade, dans la veine d'un Motorstorm, seront déçus. Et on les comprend un peu, d'autant que cet essai nous a laissés dubitatifs et l'on ne sait pas si la formule pensée par Codemasters fonctionnera. Il faudra y jouer encore un long moment pour se faire un avis mais pour l'instant, notre enthousiasme a nettement diminué.