This War of Mine vous proposait de gérer une petite poignée de civils retranchés dans un immeuble dévasté afin d'échapper aux violences de la guerre faisant rage à l'extérieur. Mettant en scène la rudesse des conditions de vie des civils dans ces temps troublés, This War of Mine avait pour grande force de ne jamais esthétiser la violence ni de verser dans la complaisance facile. Il montrait au contraire, avec une neutralité de ton exemplaire, qu'il faut parfois sacrifier sa morale pour assurer la survie des siens.

L'hiver est déjà là

Frostpunk, en substance, garde l'ADN du premier essai des équipes polonaises. Il vous place dans la peau d'un dirigeant chargé de faire survivre une poignée d'âmes alors que le monde est en proie à une ère glaciaire meurtrière. Grâce à une immense cheminée fonctionnant à la vapeur (donnant au titre un design steampunk du plus bel effet), la population encore en vie s'est regroupée autour de cette dernière afin de profiter de sa chaleur. Mais malheureusement, la rigueur des éléments impliquera une attention de tout instant et il vous appartient de tenter tant bien que mal de préserver l'humanité de son extinction, même si cela doit passer par des décisions particulièrement difficiles à prendre.

À la tête d'une colonie de seulement 15 personnes au départ, vous investissez un cratère au centre duquel se tient l'immense fourneau pour le moment éteint. Votre première mission sera de répartir les différents individus sur des activités de récoltes. Effectivement, carcasses d'acier, minerai de charbon et bois mort jalonnent l'ensemble du cratère et il faudra récolter suffisamment de ressources pour parvenir à allumer l'immense cheminée. Une fois ceci fait, vous constaterez que la neige autour du foyer fondra rapidement et pourrez ainsi construire les premières infrastructures nécessaires à la survie de vos habitants. Toutes les constructions de Forstpunk se font en cercles concentriques et partent de l'intérieur vers l'extérieur. Effectivement, le fourneau ne dégage en premier lieu qu'une chaleur limitée, mais suffisante pour que votre société puisse s'y abriter avant de développer les technologies nécessaires à l'optimisation du rayonnement de la chaleur.

Des choix moraux et nécessaires, qui comptent et qui coûtent

De nombreux moyens sont mis à votre disposition pour pérenniser votre société, dont la longévité sera aussi rythmée par un scénario qui vient apporter une bonne dose de narration à vos obligations de gestion. Vous aurez donc accès à un arbre de recherche technologique qui débloquera au fur et à mesure des bâtiments et optimisations générales, tandis qu'un livre de loi, réparti sur différents thèmes, vous permettra de définir les grandes lignes politiques de votre civilisation. Autant dire que, jeu 11 Bit Studio oblige, les différentes lois à promulguer vous demanderont systématiquement de faire preuve d'un certain sens du sacrifice. Des quelques lois du livre que nous avons pu voir, aucune n'était pleinement satisfaisante. Autoriser le travail des enfants donnera un sévère coup au moral de vos troupes mais renforcera votre main-d'oeuvre. Diluer un peu la soupe augmentera la satiété de vos habitants, cependant cela leur minera le moral. Plus loin encore, des questions plus dramatiques finissent par se poser : que faire des cadavres ? Les brûler pour se chauffer ? Les enterrer ? Autant de choix dont nous n'avons qu'entraperçu les conséquences directes, mais qui, même sur une très courte session de jeu, ont déjà su nous faire largement réfléchir sur ce à quoi l'on serait prêt pour assurer la survie de l'espèce.

Outre ces leviers que l'on ne peut pas activer quand bon nous semble, il est nécessaire de systématiquement garder un œil sur deux jauges : celle du mécontentement et celle de l'espoir. Si la première se rempli, suite à un cumul mauvais choix de votre part, les habitants peuvent se rebeller et finir par vous renverser puis vous exécuter. Si en revanche, vous maintenez un espoir assez élevé, les individus seront plus enthousiastes au travail. Plus malin encore, il est parfois possible de prendre des décisions difficiles qui provoqueront un certain mécontentement, mais aussi une génération d'espoir. La population comprendra parfois la nécessité de sacrifier par exemple un peu de confort pour un peu de nourriture. Il faudra toujours peser le pour et le contre et si nous n'avons pas pu avancer bien loin au cours de notre session, on nous a garanti que les possibilités de gestion seront nombreuses. Effectivement, si vous pouvez tenter de gérer les choses d'une manière démocratique, libre à vous de devenir un véritable dictateur. Cependant, réprimer brutalement toute tentative d'insurrection, créera une obéissance forcée de votre peuple mais cela ne sera pas sans conséquence sur la perception qu'il aura de vous.

Frostpunk nous a semblé être le digne héritier de This War of Mine, dans le fond comme dans la forme. Les différents éléments scénaristiques croisés sur notre session nous ont permis de constater qu'une fois encore, 11 Bit Studios est parvenu à impliquer activement le joueur dans ses décisions. Il lui fait cruellement sentir l'enjeu dramatique que porte la promulgation d'une loi par exemple. Si vous gérez certes une colonie entière, l'individu est aussi au centre du jeu, permettant au joueur de ne jamais considérer les habitants comme de simples unités. Ajoutez à cela une dimension gestion qui nous a semblé particulièrement solide, des graphismes tout bonnement somptueux et une liberté d'approche dure, mais riche, et vous comprendrez que nous attendons avec la plus vive impatience la sortie du jeu le 24 avril prochain.