Drôle d'histoire que celle d'Eden Games, vieille gloire du jeu vidéo français. Les Lyonnais ont donné naissance à des licences prestigieuses, comme V-Rally ou encore Test Drive Unlimited, avant de connaître des moments difficiles. Après avoir frôlé la cessation d'activité, le studio est parvenu à se relancer en 2013, et aujourd'hui, il a plutôt la forme. On en veut pour preuve la sortie prochaine de Gear•Club sur Switch, ou les nombreuses et savoureuses anecdotes du patron, David Nadal ; l'homme est capable de discuter, avec une nonchalance étonnante, de ses relations avec Playground Games, les créateurs de la série Forza Horizon(qui doit beaucoup à Test Drive Unlimited), comme de ses dernières rencontres avec Horacio Pagani ou Christian von Koenigsegg. Un vétéran qui connaît les arcanes du monde du jeu de course, un passionné d'automobile avec qui nous avons pu découvrir Gear•Club Unlimited, un jeu de course arcade sacrément complet.

Petite console, gros contenu

La Switch occupe une place un peu à part dans notre industrie, accueillant à la fois les dernières grosses productions Nintendo, ainsi qu'un flot quasi-incessant de petites productions, souvent indépendantes. Ces dernières proposent souvent une expérience de jeu plus courte mais parfaitement adaptée aux particularités de la console. Dans le cas de Gear.Club Unlimited, on est un peu dans ce cas de figure : le jeu a fait ses preuves sur mobile, et son adaptation sur une console telle que la Switch est en fait assez logique. En revanche, on pourra difficilement dire qu'il est rapide de faire le tour de Gear•Club Unlimited. Reprenant globalement la structure de la version iOS/Android, le jeu vous invite toujours à participer à des courses toujours plus longues, à travers un monde qui offre une belle variété d'environnements, et qui viendront épicer le challenge. À travers les routes d'un désert façon Route 66, sous les neiges d'une imposante montagne ou dans les vallées verdoyantes d'une Écosse fantasmée, le jeu d'Eden Games surprend par la diversité de ses environnements comme la longueur de son mode Carrière, qui propose des dizaines et des dizaines de course.

Le jeu propose toujours une grosse trentaine de véhicules, qu'il sera possible de customiser et/ou d'améliorer, en fonction des impératifs fixés par les marques. Le joueur a la possibilité de dépenser son argent en achetant de nouveaux bolides, mais aussi en personnalisant son atelier personnel. Au départ simple cabane au fond du jardin, on peut l'agrandir et l'enrichir, en achetant de nouveaux modules. L'un permettra de repeindre ses voitures, l'autre de tester leur aérodynamisme, un autre de changer les pneus et les freins... Ainsi de suite. Vous l'aurez compris, il y a de quoi faire et c'est justement cette richesse de contenus qui surprend, car on ne l'attend pas forcément d'un jeu de course né sur mobile. C'est là que l'on devine le glorieux passé d'Eden, qui malgré des moyens sans doute plus limités aujourd'hui, trouve le moyen de proposer une expérience aussi riche que possible. Simplement parce que le studio connaît les jeux de course, et sait ce qu'aiment les amateurs du genre.

Des graphismes po(r)tables

S'il y a en revanche un point sur lequel le studio n'a pas pu faire de miracles, c'est bien du côté des graphismes. Sublime sur smartphones et tablettes, le jeu a ici été porté tant bien que mal sur la console de Nintendo, et cela se ressent. Autant dans la simplicité de la modélisation des véhicules que dans les décors qui datent. Beaucoup. C'est sans doute sur ce point que de nombreux joueurs vont juger Gear•Club et c'est bien dommage. Car ne nous leurrons pas, malgré toutes ses qualités, le titre revêt une apparence indigne d'un jeu de 2017, même sur Switch. La petite console de Nintendo en a dans le ventre et peut faire bien mieux que ce que propose le jeu du studio lyonnais. Sans être horrible à regarder, puisqu'il reste heureusement parfaitement fluide, Gear•Club aurait sans doute mérité mieux. Interrogé sur la question d'un éventuel portage sur PlayStation 4 et Xbox One, David Nadal n'a pas souhaité donner de réponse, mais a ajouté que ces machines pourraient permettre de faire beaucoup mieux. Mais dans l'immédiat, c'est la version Switch que les joueurs vont découvrir et il est possible qu'ils fassent un peu la grimace.

La course pour tous

Et ce serait bien dommage de limiter Gears.Club Unlimited a sa simple apparence, puisque le jeu d'Eden Games est, sans surprise, un bon petit jeu de course arcade comme il n'en existe aucun sur la dernière-née de Nintendo. Offrant une chouette sensation de vitesse, qui évolue sensiblement lorsque l'on passe dans les catégories de voitures plus puissantes, le titre repose sur un gameplay simple et efficace, qui caricature intelligemment le comportement de chaque bolide qu'il met en scène. La Veyron est un missile qui peine un peu lorsque les enchaînements de virages se font plus prononcés, tandis que la Nissan GT-R a le drift facile, et un freinage très puissant. D'autres sur-virent, ou sous-virent, et il faut, à chaque fois, se réadapter au comportement de la voiture que l'on pilote. C'est d'autant plus vrai que le jeu s'amuse à bousculer nos certitudes, avec des tracés souvent bien pensés et surtout une belle diversité d'épreuves. Il existe notamment plusieurs course typées « rallye », qui se déroulent en fait sur des chemins de terre, des routes rocailleuses, sur lesquelles seules quelques voitures sont acceptés ; il faut alors savoir gérer intelligemment ses freinages et ses accélérations, notamment dans les grosses épingles, en gardant en tête que les gâchettes du contrôleur Pro de la Switch ne sont pas analogiques. Eden a dû ruser pour contourner ce problème, et le résultat est plutôt convaincant : manette en mains, les sensations sont franchement agréables. Il y a dans ce Gear.Club Unlimited une certaine profondeur de jeu qui pourrait séduire les amateurs du genre.