C'est fin février que Milestone avait convié la presse à Londres pour leur présenter MXGP 3 : The Official Motocross Videogame, ainsi qu'un mystérieux nouveau jeu de course. Nommé Gravel, le soft promet de nous faire revivre les plaisirs infinis du jeu de course arcade, tel qu'on l'a connu à la fin des années 90. Sur le papier, on serait tout à fait preneurs. Manette en mains, les choses sont un peu différentes...
Nous avons pu jouer plus d'une heure à Gravel, sur une version PC. La démo était limitée à un seul mode de jeu, sur lequel on ne pouvait accéder qu'à un seul circuit. Il était possible de choisir le moment de la journée (jour/nuit), et son véhicule, parmi un choix d'une dizaine de modèles différents.
Les jeux de course arcade sont morts, paix à leur âme. Et on entend par là : les vrais jeux de courses arcade. Pas ces titres aux fessiers coincés entre deux chaises, tiraillés entre l'envie de plaire au plus grand nombre, tout en proposant quelques éléments plus réalistes. Aujourd'hui, à part Need for Speed et Forza Horizon, ils sont peu nombreux à prendre le risque de proposer un gameplay léger mais amusant, misant tout sur le plaisir de la vitesse. Voilà pourquoi l'annonce de Milestone avait de quoi nous réjouir : avec Gravel, c'est précisément ce genre de sensations que les Italiens cherchent à invoquer. Notez l'utilisation du verbe « chercher ».
La course arcade, sans sourciller
Gravel annonce la couleur dès les premières secondes : il s'agit d'un jeu de course arcade pur jus. Les courses se déroulent toutes en off-road, que ce soit sur de vastes plages de sable blanc, ou sur les sentiers de forêts tropicales. Le soft vise clairement la diversité de routes et de paysages, et fait voyager le joueur des îles du Pacifique Sud aux glaces de l'Alaska. Avec ces environnements plutôt nombreux et aux ambiances toutes très marquées, Gravel rappelle facilement les jeux de course de la fin des années 90, mais évoque aussi des titres plus récents. Si Milestone préfère citer l'un des premiers jeux du studio, c'est-à-dire Screamer, Gravel s'inspire clairement de titres tels que MotorStorm ou Forza Horizon 3. On retrouve cette volonté de faire voyager, de proposer des paysages de cartes postales, et surtout de proposer un jeu de course accessible, mais reposant sur une physique cohérente.
Le jeu propose différents types de courses, une variété appréciable à notre époque. Si The Witcher 3 : Wild Hunt est le nouveau jalon pour les RPG, Forza Horizon 3 est celui des jeux de course arcade, et après pareille réussite, difficile de se cantonner aux bêtes courses sur circuit. On trouve ainsi des courses dans des environnements semi-ouverts, dont la progression est balisée ; des cross de cross-country ; des courses en stadium ; et les modes Speed Cross et Wild Rush. Vous l'aurez compris, dans tous les cas il s'agit d'aller très vite et à chaque fois en tout-terrain. Le jeu propose à ce titre tout un tas de bagnoles : Ford Raptor F150, Hummer H3, BMW X3 CC, Ford Fiesta ST, Renault 5 Turbo Maxi, Lancia Stratos... Le garage tape dans des époques différentes mais on retrouve, pour l'essentiel, des SUV ou des voitures connues pour leurs exploits en WRC, ainsi que quelques bonnes surprises.
Sur le papier donc, Gravel a tout pour séduire. D'autant que Milestone ne cache pas sa volonté de toucher un public plus large qu'avec ses jeux de course habituels. Alors, comment tout ceci pourrait mal se passer ? Eh bien, vous allez voir, c'est facile.
La route de l'ennui
Petite question : qu'est-ce qui fait qu'un jeu de course est amusant ? Eh bien, c'est très simple. Le joueur doit gérer sa vitesse et anticiper les changements de direction ; des modulations (vitesses, virages...) qui ont un impact direct sur le comportement de la voiture, qu'il faudra dompter. Un jeu de course, finalement, c'est courir sur une poutre : chaque nouveau pas est une progression vers la victoire, mais également un potentiel futur accident. Le risk & reward (« risque et récompense ») à l'état pur, donc. Et c'est précisément ce sentiment de danger constant, allié à une bonne impression de vitesse, qui fait qu'un jeu de course est amusant.
Et pourtant, c'est précisément sur ce point que Gravel échoue. Si nous n'avons pu tester qu'un seul circuit, celui-ci était constitué d'une route finalement peu sinueuse et extrêmement large. Les zones à risque étaient donc pratiquement inexistantes et nous avons triomphé de l'IA sans grande difficulté. À vrai dire, lors de notre premier essai, nous comptions même plus d'une minute d'avance sur le second... On espérait que ce souci de design provenait du circuit proposé dans la démo, mais le réalisateur du jeu nous a confirmé que les tracés étaient tous taillés de la sorte. En fonction des destinations, l'étroitesse de la route pourrait varier mais manifestement, les développeurs préfèrent mettre l'emphase sur la conduite off-road, avec ses jumps et ses drifts. Manifestement, il faudra se contenter de rouler pied au plancher, et de jouer du frein à main de temps à autre.
C'est dommage parce qu'en soit la conduite n'est pas désagréable. La conduite est très arcade et rappelle les antiques V-Rally, avec une sacrée impression de vitesse. Mais avec des tracés aussi gentillets, difficile de s'amuser réellement. On a même le temps de regarder le paysage ! Et autant vous dire que ce n'est pas franchement une réussite. Les jeux Milestone n'ont jamais été connus pour leurs graphismes, Gravel ne devrait pas changer la donne. Le jeu de couleurs est plutôt agréable, mais les textures manquent de précision, et tout manque de détails. C'est particulièrement criant sur les différents bolides du jeu, qui dans l'état actuel des choses, font très « plastique ». Après une petite demi-heure de jeu, nos ardeurs étaient déjà bien refroidies...
Les images utilisées dans cet article ont été fournies par Milestone
La première bande-annonce de Gravel
On n'a pas vu grand-chose de Gravel mais le peu qu'on n'en a vu ne nous inspire pas confiance. Mais alors, pas du tout. Si l'on ne peut que saluer le parti pris pleinement assumé de proposer un jeu de course arcade décomplexé, les développeurs ont manifestement confondu gameplay arcade et simplicité absolue. Avec ses tracés trop larges et trop droits, Gravel ne chahute pas vraiment le joueur, et alors qu'on pensait découvrir un titre arcade plein d'énergie, on tombe sur un jeu de course soporifique à bien des égards. Peut-être que le jeu, à sa sortie, nous fera mentir, mais on en doute un peu.