Fondé en 2005, le studio polonais The Farm 51 n'est pas vraiment connu de par chez nous. Son CV est plutôt léger, leur titre le plus connu étant sans doute NecroVisioN, sorti en 2009 sur Xbox 360 et PC. Ce qui ne les a pas empêché de nous surprendre agréablement à la gamescom, avec un nouveau projet intitulé Get Even. Ambiance sombre et pesante, asile psychiatrique abandonné, et protagoniste principal amnésique : on n'a pas tout compris, mais ce que l'on a vu nous a plu.
Pour cet aperçu, nous avons pu jouer à Get Even pendant environ 30 minutes, dans sa version PC.
"Bonjour, nous vous invitons à venir découvrir un tout nouveau jeu, mystère, on ne vous dit rien à son sujet à part qu'il s'agit d'un FPS polonais. Bonne journée !" À l'approche d'un salon, il n'est pas rare que les médias spécialisés, comme Jeuxvideo.com, soient contactés par différents éditeurs, ou plus directement par de petits développeurs, à venir voir un jeu inconnu, à l'abri des regards indiscrets. Pour cette gamescom 2016, le cas s'est présenté à plusieurs reprises. C'est ainsi que Panthaa, notre grand fan de Metal Gear Solid, découvrait Metal Gear Survive, suite à une invitation de Konami ; votre serviteur s'est lui dirigé vers le stand business de Bandai Namco pour jouer à Get Even. Une sacrée bonne surprise, faut-il préciser, d'autant que le projet semblait porté disparu depuis maintenant bien des lunes.
Beaucoup de mystère
Il faut dire que Bandai Namco avait plutôt bien préparé son coup. À peine arrivé sur place, les quelques journalistes qui avaient fait le déplacement étaient invités à s'installer et à jouer, sans aucune présentation au préalable. Pris au dépourvu, nous nous sommes exécutés et manettes en main, nous avons fait nos premiers pas dans l'inquiétant monde de Get Even. D'abord enfermé dans une petite pièce aux allures de squat sordide, le joueur est incité à ouvrir une première porte où il découvre un jardin envahi par les herbes folles. Dans sa progression, le jeu lui permet de dégainer un pistolet à silencieux qui lui permettra d'abattre sans état d'âme un premier garde armé. Le joueur aguerri applique les schémas qu'il connaît par coeur, et continue sa progression, se demandant tout de même qui était cet homme, et si sa mort était bien nécessaire : nous ne lui avons pas laissé le temps de manifester la moindre vélléité d'agression. En déambulant à travers une nouvelle construction, nous avons vite compris que l'homme que nous incarnions était à la recherche d'une personne, probablement enlevée pour des raisons inconnus, par des personnages aux intentions peu claires. Le joueur est alors autant acteur que spectateur, puisque s'il contrôle le personnage jouable, il n'a aucune idée de ses intentions, où de ce qui se joue autour de lui : le level design et quelques indices guident sa progression. C'est son instinct qui le pousse à avancer.
Juste avant de croiser deux nouveaux gardes, le jeu accorde subitement à notre héros un gadget nommé corner gun, qui, combiné au pistolet et au smartphone qu'il manipule depuis le début de l'aventure, lui permet de tirer sur ses ennemis, en restant caché. Pratique. Notre progression, ralentie par l'obscurité et une montée en tension de tous les instants, permise par un incroyable travail de sound-design, nous conduit finalement à ce qui semblait alors être l'étape finale : une pièce où deux hommes discutent près d'une jeune femme, ligotée à une chaise. Après les avoir rapidement éliminés, nous nous précipitons vers la jeune femme pour découvrir, horrifié, qu'une bombe est scellée à ses vêtements. Le compte a rebours, déjà enclenché, nous laisse peu de temps : après avoir saisi un premier code, la bombe explose. Fin de la partie.
Mystérieux, mi-glauque, et re mystérieux derrière
Fin de la partie ? Pas vraiment. Après une courte cinématique cryptique au possible , notre héros se réveille dans un parc, à la végétation abondante. Celle-ci masque à peine des statuts d'anges au regard placide. Sommes-nous proches d'une église, ou dans un cimetière ? Impossible à dire. Le téléphone vibre : un SMS nous invite à avancer dans un batiment à proximité. La musique, grave, lancinante, presque difficile à supporter, s'étouffe de temps à autre pour nous laisser percevoir des cris de femme. Mais sont-ils vraiment réels ?
Difficile de comprendre ce qui se trame autour de nous. Manifestement, Black, le personnage principal, était à la recherche d'une certaine Grace, qu'il n'a pu sauver. L'homme est hanté par de terribles visions, et la jeune fille lui apparaît plusieurs fois, lors de son exploration. Celui-ci va trouver de nombreux documents sur son chemin, jusqu'à nous permettre de comprendre qu'il est enfermé dans un vieil asile psychiatrique, avec d'autres personnes particulièrement louches. Et dangereuses. Sans prévenir, l'une d'elle nous a foncé dessus, au détour d'un virage. Il a fallu l'abattre. Là encore, un réflexe. Animal. Une question de survie. Dès les premiers instants, Get Even a réussi à nous faire comprendre qu'en ces lieux, nous ne pouvions faire confiance à personne et que derrière chaque porte, à chaque nouveau couloir, pouvait surgir une menace.
Grâce à sa formidable bande-son, d'abord, mais également en multipliant les petits coups de pression. Comme ce singe automate à cymbales, installé sur une chaise, croisé au hasard de notre promenade. Une vision particulièrement peu rassurante, dans le contexte de Get Even. Glauque, sale et finalement très perturbant, l'asile que l'on explore est en apparence déserté depuis des années mais une menace rôde. Pour preuve : à notre second passage, le singe susmentionné était tombé de sa chaise. Comme si on l'avait poussé. Il ne s'agissait que d'un vieux jouet, mais rarement nous ne nous étions sentis aussi fragile. La voix d'un homme, qui ordonne à Black de continuer d'avancer, nous laisse penser que celui-ci est désormais prisonnier d'un dangeureux psychopathe. Un médecin, peut-être ? Une chose est certaine : celui-ci s'intéresse particulièrement à la mémoire de notre héros. Une mémoire au centre de l'intrigue dont on peine à percevoir les contours.
Un minimalisme effrayant
Ce qui surprend le plus dans Get Even, c'est la facilité avec laquelle il nous plonge dans l'angoisse. Le jeu se veut particulièrement minimaliste et facile à prendre en main. Dès les premières minutes, on comprend que l'on peut courir, ouvrir des portes, et surtout se servir de son smartphone pour accomplir diverses actions. Scanner un élément du décors pour obtenir des informations supplémentaires, trouver des sources de chaleur, ou, plus simplement, s'éclairer. De quoi résoudre quelques puzzles et surtout de jouer avec notre peur du noir. Sur ces 30 minutes de jeu, le pistolet ne nous aura finalement que très peu servi, mais sa présence avait quelque chose de rassurant.
Le jeu se repose avant tout sur son ambiance et une réalisation technique de premier plan : l'ensemble est très, très propre et jouit d'un jeu de lumières de qualité. Un élément essentiel pour maintenir le joueur dans un état de malaise constant. Dérangeant, mais curieusement attirant. Un tour de force.
À quoi avons-nous joué ? Au moment de rédiger ces lignes, nous avons encore du mal à le savoir. Get Even se présente sous la forme d'un thriller glauque à souhait, qui mêle allégrement fantastique et horreur pour plonger le joueur dans un monde presque irréel, vaporeux, dans lequel les réalités s'entrechoquent tantôt, fusionnent parfois. Difficile de démêler le vrai du faux, dans ce méli-mélo de souvenirs terrifiants. Mais une chose est certaine : on espère retrouver rapidement Get Even, pour en apprendre plus à son sujet. Avec, pourquoi pas, de la réalité virtuelle, puisque The Farm 51 en est particulièrement friand.