Annoncé il y a un peu plus d'un an, We Happy Few a profité de l'été dernier pour s'offrir un détour réussi par Kickstarter avant de reprendre son développement dans l'ombre. Nous avons profité de la PAX East 2016 pour aller à la rencontre de leurs développeurs et surtout nous adonner pendant près d'une heure à cette expérience peu banale, qui vous place dans une Angleterre dystopique du début des années 60.
Avec un tel pitch, on pourrait déjà s'imaginer déambuler au sein d'un titre narratif à l'univers riche. Ce n'est pourtant pas l'ambition première de l'équipe de Compulsion Games, qui nous propose avec We Happy Few un soft aux zones générées de façon procédurale à la dimension survie prononcée.
I fought the law and the law won
Il n'est toutefois pas dénué de contexte puisqu'il nous emmène en 1964, dans une réalité alternative ou l'angleterre serait tombée sous le joug allemand suite à la seconde guerre mondiale. Vous y explorez une petite ville aux habitants touchés par la drogue, avec ses différents quartiers aux lois et coutumes uniques reliés par des portes. Chacune de ces dernières peut être franchie de plusieurs façons que vous devez découvrir en explorant les zones générées de façon procédurale. Ce qui rend le soft singulier, c'est principalement ce système de lois qui régissent chacune des différentes zones : si vous ne prenez pas la peine de vous y plier, les habitants deviendront agressifs à votre égard et il sera nettement plus complexe d'explorer l'ensemble. Ainsi, nous avons pu découvrir un quartier ou saluer les habitants et porter une tenue adéquate permettait de s'y dissimuler sans souci. Autre moyen de passer inaperçu, l'utilisation de drogues à l'effet limité dans le temps aura toutefois une conséquence néfaste sur vos jauges de survie et doit donc être utilisée avec parcimonie.
Be Survie be Happy
Chaque zone explorée vous offre un abri dans lequel vous pourrez stocker vivres, armes, matériaux mais également vous reposer : car dans We Happy Few, vous devrez vous nourrir, dormir, boire et vous soigner en cas de blessure, le jeu incluant une dimension survie. Il est également possible de fabriquer différents éléments tels que des bandages et des armes à partir des matériaux - y compris des fleurs pour les botanistes en herbe - récupérés dans l'environnement. L'équipe derrière le soft a insisté sur le fait que si le joueur venait à mourir et devoir recommencer sa partie, il ne fallait pas que ce soit à cause d'un mécanisme un peu trop frustrant ou d'un manque de chance. Dans cette optique, ils ont notamment inclus une petite fenêtre de sortie une fois le joueur à terre et sans vie, prenant la forme d'une bulle d'une vingtaine de secondes durant laquelle il peut se soigner et s'offrir une seconde chance. Il reste toutefois vulnérable à la présence d'ennemis et à l'absence de kit de soin dans son inventaire, qui lui serait alors fatale.
Des ambitions narratives
Point plus surprenant, We Happy Few devrait se doter quelques mois après sa mise à disposition des joueurs d'un mode scénarisé. Surprenant, car le procédural et la narration font rarement bon ménage, mais intriguant et attirant grâce à l'univers créé par Compulsion Games qui jouit d'un potentiel certain en la matière. La brève séquence à laquelle nous avons assisté nous faisait enchaîner plusieurs dialogues avec un étranger qu'il nous fallait ensuite rejoindre en passant par les zones habituelles toujours générées à la volée. La particularité du système tient ici au fait que la narration ne repose pas sur un suivi linéaire des zones explorées - qui seraient elles-mêmes fixes - mais davantage sur les personnages, qui pourront donc apparaître à différents points de la carte en nous faisant progresser à chaque nouvelle rencontre et séquence de dialogues. L'idée est ambitieuse mais l'on reste encore un peu sceptique sur sa capacité à se fondre au sein d'un système procédural qui a sur le papier tout du traquenard. Il reste encore du temps aux développeurs pour trouver le compromis idéal entre liberté d'exploration et ambition narrative.
We Happy Few propose un mélange des genres aussi surprenant que séduisant, bercé par une direction artistique hallucinée à mi-chemin entre Bioshock et Dishonored. Si l'on est déjà convaincu par le potentiel de rejouabilité du soft, on restera cependant prudent sur l'implantation attendue d'une section narrative, dont la conciliation avec des éléments procéduraux reste toujours particulièrement risquée au sein d'un jeu. Une idée toutefois pas si saugrenue pour l'univers dystopique proposé par l'équipe de Compulsion Games, qui propose un monde au potentiel narratif certain.