À l’origine de franchises telles qu’Unreal ou Gears of War, Cliff Bleszinski est aujourd’hui considéré comme l’un des grands noms de l’industrie du jeu vidéo. Pourtant en 2012, l’homme annonçait son départ d’Epic Games après plus de 20 ans au sein de la compagnie. Une retraite d’un an et demi en Asie plus tard pendant laquelle il nous confie s’être ressourcé à travers la lecture d’œuvres de science-fiction et le visionnage de nombreux films, Cliff annonce son retour au sein du secteur en juin 2014 avec l’ouverture de son nouveau studio Boss Key en plein coeur de la capitale de la Caroline du Nord, Raleigh. Ses acolytes et lui-même planchent sur un projet d’arena shooter dédié au PC LawBreakers d’abord présenté sous la forme d’un free-to-play avant de subir - il y a peu - un revirement sur son modèle économique pour adoper la forme d'un jeu payant. Entre Overwatch, Battleborn et Paladins, Lawbreakers s'avance avec un gameplay nerveux et aérien n'hésitant pas à se jouer de la gravité pour en mettre plein la vue. Parvient-il à imposer son style au milieu de toute cette concurrence ?
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J’ai demandé à la lune
Replaçons les choses dans leur contexte afin d’expliquer au mieux la mécanique centrale du gameplay de Lawbreakers. Dans un futur imaginaire, l’humanité motivée par de cupides ambitions commerciales a provoqué la destruction de la Lune (rien que ça !). Privé de son astre gardien, les lois de la physique Terrestre se retrouvent quelque peu chamboulées par de graves perturbations de la gravité. L’action du jeu se déroule environ un an après cette catastrophe baptisée “The Shattering” (de l’anglais fracassement, démolition) dont l’ampleur de la violence a complètement bouleversé le paysage des continents. C’est plus précisément vers l’Amérique que les différentes cartes du jeu se tournent afin d’explorer les possibilités artistiques offertes par ce monde futuriste certes en partie démoli, mais toujours habité par le puissant désir d’en apprendre plus sur l’utilisation scientifique des anomalies physiques.
La face géopolitique du monde a changé et les gouvernements ont, pour la plupart, sombré dans le chaos le plus total. C’est le cas des États-Unis qui, en mal de financements, n’ont pas hésité à vendre le territoire du Grand Canyon (rien que ça !) à la Shura Corporation, une organisation scientifique dont les plans sont de transformer la zone en vaste laboratoire de recherches sur les anomalies gravitationnelles. Privé d’ordre mondial, la Terre s’en remet aujourd’hui aux rares et derniers défenseurs de la justice, les gardiens de la loi (les fameux Law, de Lawbreakers) confrontés dans leur mission à des bandits sanguinaires profitant du désordre ambiant pour vendre leurs services aux plus offrants, les Breakers. De cette dualité ordre vs chaos découle la base de cet arena shooter où deux équipes de cinq joueurs s’affrontent dans des gunfights sanglants et aériens pour le contrôle d’objectifs.
Batterie en charge
La carte pratiquée durant ce premier aperçu souris et clavier en main portait le nom de Grandview, une vision stylisée du Grand Canyon mâtinée à la sauce architecture japonaise futuriste du fait de la présence des laboratoires de Shura Corporation. Cliff Bleszinski et son équipe entendent bien nous offrir une relecture à la fois moderne et originale des lieux les plus iconiques des États-Unis comme le Mont Rushmore ou bien Santa Monica. Durant ces 2h30 de prise en main, nous avons exclusivement approché Overcharge, le premier mode de jeu disponible pour Lawbreakers. Son principe le rapproche beaucoup d'un classique capture de drapeau avec toutefois quelques petites subtilités. À chaque début de partie, une batterie apparaît au milieu de la carte, les deux équipes doivent alors lutter pour la récupérer puis la rapporter dans leur base. Cette dernière se charge alors progressivement en énergie pour arriver jusqu'à 100%. Une fois remplie, il faut alors la défendre à tout prix durant 20 secondes pour marquer un point. La première équipe marquant deux points remporte la partie. Toutefois, la protection de la batterie n'est pas de tout repos car l'équipe adversaire n'aura de cesse de vous attaquer pour la dérober et la conduire dans sa propre base.
On se retrouve ainsi avec des captures successives d'un noyau qui conserve l'énergie accumulée entre chaque changement de camps. Il est donc tout à fait possible d'aller chaparder une batterie chargée à 99% chez l'ennemi pour la ramener dans sa base et marquer le point une vingtaine de secondes après. Une action tout autant jouissive à réaliser que frustrante à vivre si elle vous tombe dessus après avoir mâché tout le boulot aux adversaires. On aime ce principe de tension constante induit par ce mode et on attend maintenant l'E3 2016, évènement lors duquel Boss Key dévoilera d'autres cartes, modes de jeu et personnages.
Je n'enfreins pas la loi, je la pulvérise !
Arena shooter oblige, Lawbreaker s'appuie sur un casting de personnages réparti à l'heure actuelle en quatre classes distinctes. Pour bien marquer sa différence avec un Overwatch, le titre s'éloigne volontairement du schéma à la Blizzard basé sur des personnalités individuelles aux capacités toutes différentes pour se concentrer sur des archétypes bien définis. S'il existe actuellement huit personnages dans Lawbreakers, on compte au final quatre types de gameplay différents puisque les deux camps (Law et Breakers) partagent leurs capacités en mode miroir. On retrouve en premier choix la classe de Titan, un tank armé d'un puissant lance-roquettes avec deux représentants : Bomchelle pour le côté Law et Chronos chez les Breakers. Avec Axel et Kintaro, le rôle d'Enforcer marque sans doute le gameplay le plus classique du titre ; il est, en effet, basé sur un combo fusil d'assaut et grenades incapacitantes. Aussi mobiles que mortels, les Assassins Hellion et Kitsune sèment la terreur sur le champ de bataille grâce à leur grappin, dash et doubles lames acérées. Enfin, les Vanguards Maverick et Toska-9 plombent de balles le corps de leurs victimes à l'aide de leur Gatling portative combinée à leur jetpack. En cours de préparation, une cinquième classe de type espion nous a même été dévoilée grâce à différents travaux préparatoires.
Chaque classe est dotée d’une arme principale et secondaire comme un pistolet ou un canon électrique pour le Titan, une impulsion d’énergie en mode Iron Man pour le Vanguard ou bien encore un fusil à pompe pour les Assassins. Arena shooter oblige, un kit de quatre capacités équipe les classes pour leur offrir à la fois des techniques d’attaque et de contrôle des adversaires. Nos amis les Titans peuvent, par exemple, bondir vers l’avant avec rage pour infliger des dégâts à l’adversaire ; les Vanguards disposent d’un barrage de grenades tandis les Enforcers peuvent manipuler l’espace-temps pour augmenter temporairement la vitesse de déplacement, de tir et de rechargement des alliés alentour. Dans son optique de classe mobile, l’assassin peut dasher vers l’avant ou accrocher son grappin à toutes les surfaces du jeu pour profiter de toute la verticalité du terrain afin de surprendre ses adversaires par les airs. La classe dispose aussi d’une grenade à anomalie gravitationnelle capable de repousser à la fois les ennemis et les projectiles adversaires. Toutes ces techniques fonctionnent bien entendu sur temps de rechargement et disposent de plusieurs synergies très intéressantes obligeant à jouer en groupe coordonné pour espérer remporter la victoire.
Du gameplay pour Lawbreakers
Car s’il est tout à fait envisageable d’aborder Lawbreakers en loup solitaire (surtout dans des rôles comme celui d’Assassin), le jeu en équipe se montre vite crucial autant en attaque qu’en défense. Tous les personnages disposent enfin d’un ulti apte à faire la différence lorsqu’utilisé au bon moment. Le Titan entre en mode Berserk et se change en boule de nerfs électrique, le Vanguard s’envole dans les cieux avant de retomber brutalement sur sa cible, etc. Le tout offre un gameplay très nerveux qui rappelle à tous les instants l’héritage Unreal porté à bout de bras par Bleszinski ! D’autant que Lawbrekers nous réserve encore une spécificité apte à changer la façon d’aborder son gameplay : l’absence de gravité !
Un gameplay sans gravité !
Profondément impacté par la destruction de la Lune, le gameplay de Lawbreakers défie les lois de la gravité pour nous proposer des combats aériens et sanglants. Si certaines zones protégées par des barrières énergétiques ne subissent pas les effets de son absence, une bonne partie de la carte appelle au ballet aérien et à la démonstration de skill en mode vertical. Dans ces situations, la menace peut survenir de tous les côtés et il n’est pas rare de voir débouler un Assassin au-dessus de votre tête alors que vous êtes vous-même en train de planer en haut des bâtiments. Les développeurs ont effectué un gros travail sur la physique du jeu pour garantir de nombreuses variations de déplacement en fonction de vos mouvements ou de l’utilisation de certaines techniques.
Car l’une des forces de Lawbreakers est d’être parvenu à combiner les effets des skills de ses classes à sa mécanique anti-gravitationnelle. Une fois pris en main, l’Assassin bénéficie particulièrement de ce système et peut se déplacer dans les airs avec une grande agilité en combinant son dash et son grappin. Notez d’ailleurs que le titre offre une particularité originale et bien pensée, puisque tous les personnages peuvent tirer dans leur dos en mode aveugle afin de couvrir leurs arrières. Néanmoins, la technique sert surtout à bénéficier d’une impulsion de vitesse non négligeable lors des phases de déplacement dans les anomalies. À première vue lourd et peu mobile, le Titan se révèle être diablement rapide lorsqu’il déclenche ses roquettes derrière son dos !
Lawbreakers offre ainsi une prise en main en trois dimensions dotée d’une verticalité qui fait la différence au sein de l’offre actuelle des arena shooters. Nous vous invitons à visionner le trailer disponible dans ce premier aperçu pour constater par vous-même les possibilités offertes par cette mécanique de gameplay. On y retrouve ce côté fast FPS à la Unreal ou Quake qui, combiné à son orientation de jeu basé sur des capacités, offre un cocktail détonant et résolument plus mature dans son approche qu’une bonne partie de la concurrence. Ce n’est donc pas à proprement parler un rival direct à Overwatch et autres Battleborn, mais une vision moderne et décomplexée de l’essence même d’un shooter où même le plus doué des tireurs devra aussi apprendre à se mouvoir avec talent sur la carte pour espérer briller.
Un point sur la technique enfin pour signaler une utilisation du moteur Unreal que l’on sent tout à fait maîtrisé par le studio. Logique me direz-vous lorsqu’on connaît le passif de M. Bleszinski ! On ressent la patte du bonhomme sur le design des héros et plus particulièrement de leurs armes et animations de rechargement. Reste maintenant au titre de peaufiner l’esprit général des deux camps pour peut-être mieux différencier les personnages sur le terrain avec des spécificités propres à la Loi et aux Breakers. Effets de lumière, résolution des textures et fluidité du framerate (60 fps et +) n’ont de leur côté rien à se reprocher pour le moment. Gros coup de cœur aussi au niveau du sound design qui parvient à retranscrire le côté arcade viscéral du titre sans tomber dans le surplus d’effets sonores ou la parodie de voix d’animateur de supermarché (n’est-ce pas Doom !)
On ressort très emballés de cette première prise en main de Lawbreakers tant le titre de la team Bleszinski sait mettre à profit des mécaniques de gameplay qui font mouche ! Au beau milieu de la déferlante actuelle des arena shooter, le jeu s'avance avec des arguments solides sous le bras : gameplay nerveux, bon feeling des armes et combats en trois dimensions dynamisés par la mécanique centrale de l'absence de gravité sur les cartes. Le tout offre une expérience à la fois mature et viscérale portée par un casting de personnages dotés de capacités en synergie avec les anomalies physiques du futur dépeint ici. Et pour ne rien gâcher, le jeu se montre techniquement réussi, fluide et doté d'un sound design prometteur. Si vous suiviez ce projet de loin, il est grand temps de commencer à le regarder de plus près, car Cliff est de retour et semble ne rien avoir perdu de son mordant !